Syndrome métabolique, diabète et maladies cardiovasculaires : un

Impact global 21
Impact global
20
Dans la pratique clinique, les deux critères les plus utilisés à
l’heure actuelle pour diagnostiquer le syndrome métabolique ont
été proposés par l’American Heart Association/ National Heart,
Lung, Blood Institute (AHA/NHLBI) et la Fédération Internationale
du Diabète (FID) (voir tableau page 22). Ces définitions impliquent
la présence de trois des cinq facteurs de risque cardiométabolique
suivants : obésité abdominale, hypertension, glycémie à jeun
élevée, taux élevé de triglycérides et/ou faible cholestérol HDL. La
valeur prédictive de ces définitions peut dépendre de la prévalence
de ces composants clés au sein d’une population donnée.
La définition de la FID prévoit des
différences ethniques pour les
seuils d’obésité abdominale.
Pour diagnostiquer le syndrome, la définition de la FID impose
l’obésité abdominale plus deux facteurs supplémentaires. Elle
prévoit en outre des différences ethniques et nationales pour les
seuils d’obésité abdominale. Des analyses récentes menées aux
Etats-Unis (entre 1999 et 2002) ont montré que cette définition
menait à des estimations de prévalence du syndrome métabolique
plus élevées (39 %) que la définition basée sur les critères de
l’AHA/NHLBI (34,5 %).1
Une étude menée récemment en Norvège a utilisé à la fois la
définition de la FID et celle de l’AHA/NHLBI. Elle a révélé que
la prévalence du syndrome métabolique augmentait considéra-
Le syndrome métabolique est en train de deve-
nir un probme de santé publique au niveau
mondial. Les personnes touchées sont exposées
à un risque plus élevé de souffrir dune crise
cardiaque ou dun accident cérébrovasculaire
et den mourir que les personnes non attein
-
tes du syndrome. Lensemble de facteurs qui le
caractérise est étroitement lié à la progression
du diabète de type 2, des maladies cardio-
vasculaires et dautres maladies chroniques à
léchelle mondiale. Les dés précoces et les
invalidités associés menacent de paralyser
les budgets de la san des pays développés
et en développement. Les critères appliqués
pour diagnostiquer le syndrome métabolique
combinent différents facteurs de risque car-
diométaboliques. Les auteurs de cet article
se penchent sur les deux définitions les plus
utilisées et sur lutili de celles-ci en termes de
santé publique pour limiter la charge croissante
des maladies chroniques au niveau mondial.
Syndrome métabolique,
diabète et maladies
cardiovasculaires :
un lien avéré
Hermes Florez, Ana Palacio, Leonardo Tamariz
Mai 2008 | Volume 53 | Numéro spécial
blement avec l’âge.
2
En Italie, chez les populations caucasiennes
non atteintes de diabète, les critères de la FID entraînaient une
augmentation des estimations de prévalence du syndrome, en
particulier chez les personnes plus âgées, par rapport aux critères
de l’AHA/NHLBI. La définition de l’AHA/NHLBI semble toutefois
plus efficace que celle de la FID pour identifier les personnes
atteintes de tolérance abaissée au glucose.3
Dans une étude transversale réalisée sur des adultes grecs, la
prévalence des maladies cardiovasculaires chez les personnes
atteintes du syndrome métabolique était plus élevée, indépendam-
ment de la définition utilisée. Cette augmentation était toutefois
plus nette en utilisant les critères de l’AHA/NHLBI.
4
Chez les
Coréens, la prévalence du syndrome métabolique était plus éle-
vée avec la définition de la FID qu’avec celle de l’AHA/NHLBI ;
cette dernière était toutefois plus étroitement associée aux troubles
cardiovasculaires.
5
Une étude menée en Chine a révélé que
les critères de la FID semblaient mieux adaptés que les critères
de l’AHA/NHLBI pour le dépistage et l’estimation du risque de
syndrome métabolique chez les Chinois.6
Troubles cardiovasculaires
L’importance du syndrome métabolique en termes cliniques et
de santé publique reste incertaine. Un rapport sur sa valeur
prédictive a conclu que le syndrome métabolique pourrait être
à l’origine d’environ 7 % des décès et de 17 % des maladies
cardiovasculaires.7 Dans le même ordre d’idée, un rapport de
la Framingham Heart Offspring Study révélait que le syndrome
métabolique contribuait au risque de maladie cardiovasculaire
et de maladie coronarienne à raison de 34 % et de 29 % res-
pectivement chez les hommes et de 16 % et 8 % respectivement
chez les femmes.8
Les recherches ont montré une hausse de
78 % du risque d’accident cardiovasculaire
et de décès chez les personnes
atteintes du syndrome métabolique.
Dans cette analyse, les composants du syndrome les plus déter-
minants en termes de maladies cardiovasculaires étaient l’hyper-
tension (33 %) et les faibles taux de cholestérol HDL (25 %). Une
méta-analyse récente de 37 études longitudinales a révélé une
augmentation de 78 % du risque d’accident cardiovasculaire et
de décès chez les personnes atteintes du syndrome métabolique.9
Sa capacité prédictive pour les maladies cardiovasculaires peut
varier en fonction de l’appartenance ethnique, du sexe et de la
présence ou non d’hyperglycémie.
Diabète
Le syndrome métabolique non seulement accompagne mais précède
et prédit le diabète de type 2. Les chercheurs de la San Antonio
Heart Study ont comparé les résultats du test oral de tolérance au
Tableau : Critères pour le diagnostic clinique du syndrome métabolique
Mesure clinique aAHA/NHLBI bFID c
Obésité abdominale
Tour de taille 102 cm (asiatiques 90 cm) (hommes)
Tour de taille 88 cm (asiatiques 80 cm) (femmes) Tour de taille 94 cm (asiatiques 90 cm) (hommes)
Tour de taille 80 cm (asiatiques 80 cm) (femmes)
Hypertension
130 mmHg systolique
85 mmHg diastolique
ou traitement pharmacologique spécifique
chez les personnes atteintes d’hypertension
130 mmHg systolique
85 mmHg diastolique
ou traitement pharmacologique spécifique chez
les personnes atteintes d’hypertension
Glycémie à jeun élevée
5,6 mmol/l (100 mg/dl), diabète
ou traitement pharmacologique spécifique
5,6 mmol/l (100 mg/dl) ou diabète
(TAG aussi acceptée)
Taux élevé de triglycérides
1,7 mmol/l (150 mg/dl)
ou traitement pharmacologique spécifique
1,7 mmol/l (150 mg/dl)
ou traitement pharmacologique spécifique
Faible cholestérol HDL
<1,03 mmol/l (40 mg/dl) (hommes)
<1,29 mmol/l (50 mg/dl) (femmes)
ou traitement pharmacologique spécifique
<1,03 mmol/l (40 mg/dl) (hommes)
<1,29 mmol/l (50 mg/dl) (femmes)
ou traitement pharmacologique spécifique
a La présence de trois composants sur cinq entraînent le diagnostic du syndrome métabolique.
b Ces critères ont remplacé les critères définis en 2001 par l’étude National Cholesterol Education Program /Adult Treatment Panel III (NCEP/ATP III).
c Pour les populations d’Amérique du Sud et d’Amérique centrale, la FID a recommandé les mêmes valeurs seuils que pour les populations asiatiques tandis que
pour les populations d’Afrique sub-saharienne, de Méditerranée orientale et du Moyen Orient (arabes), elle recommande d’utiliser les mêmes valeurs seuils que
pour les Européens.
Impact global 23
Impact global
22
Mai 2008 | Volume 53 | Numéro spécial
Impact global 23
Impact global
22
glucose et du syndrome métabolique pour prédire le diabète.
10
C’est
la présence de tolérance abaissée au glucose dans le test oral de
tolérance au glucose qui affichait la valeur prédictive la plus forte
(43 %) mais le syndrome métabolique accentuait également de
façon indépendante (31 %) le risque de diabète. Même chez les
personnes atteintes de tolérance abaissée au glucose, la présence
du syndrome métabolique augmentait le risque de progression
vers le diabète de type 2, bien que des études complémentaires
soient nécessaires pour confirmer cette observation.
Une revue récente d’études prospec-
tives a révélé que le syndrome méta-
bolique contribuait à plus de 52 %
au risque de développer un diabète
de type 2.
7
Dans l’étude de cohor-
te de Framingham, la présence du
syndrome métabolique au début de
l’étude s’imposait également comme
un prédicateur puissant du diabète de
type 2, avec une contribution de 62 %
chez les hommes et de 47 % chez les
femmes.
8
Sans surprise, une hyper-
glycémie égale ou supérieure à 5,6
mmol/l (100 mg/dl) était associée à
une plus forte contribution (62 %) dans
le cas du diabète de type 2, tandis que
la combinaison de l’hyperglycémie,
de l’obésité abdominale et de faibles
taux de cholestérol HDL multipliait par
douze le risque de diabète.
Le syndrome métabolique
pourrait générer des
problèmes de santé
publique majeurs, en plus
du diabète et des maladies
cardiovasculaires.
Cependant, les combinaisons de facteurs de risque qui n’incluaient
pas l’hyperglycémie multipliaient également par cinq le risque de
diabète de type 2. Ces données confirment l’hypothèse selon laquelle
la combinaison de facteurs de risque du syndrome métabolique re-
flète le développement sous-jacent d’une insensibilité à l’insuline.
Autres maladies chroniques
En raison des différents mécanismes liés à l’âge, les personnes âgées
sont plus susceptibles de développer le syndrome métabolique.
Les personnes âgées sont plus
susceptibles developper
le syndrome métabolique, ce
qui peut augmenter le risque
de velopper plusieurs
maladies chroniques.
Mai 2008 | Volume 53 | Numéro spécial
Ce dernier peut augmenter le risque de développer plusieurs
maladies chroniques. Le syndrome métabolique augmente consi-
dérablement le risque de néphropathie chronique, en partie en
raison de la présence d’hyperglycémie et d’hypertension. Plusieurs
études ont mis en évidence le fait que le syndrome métabolique
et ses composants étaient associés au développement du cancer
colorectal, tandis que d’autres suggéraient un lien possible avec les
cancers du sein et de la prostate. Les personnes atteintes de poly-
arthrite rhumatoïde affichent une plus forte prévalence du syndrome
métabolique. Chez ces personnes, l’inflammation peut également
provoquer une augmentation du risque d’athérosclérose.
Enfin, le syndrome métabolique est associé à un risque accru de
troubles cognitifs, de dépression, de troubles neuromoteurs et
d’incontinence. Deux composants physiologiques du syndrome
métabolique l’insensibilité à l’insuline et l’inflammation sont
associés à une faiblesse musculaire, une mauvaise tolérance à
l’exercice physique et une baisse de la mobilité. Le syndrome mé-
tabolique peut donc contribuer considérablement à l’accélération
du vieillissement et du déclin fonctionnel, susceptible d’entraîner
des problèmes de santé publique majeurs dans un avenir proche,
parallèlement au diabète et aux maladies cardiovasculaires.
Le syndrome métabolique
permet d’attirer l’attention et les
ressources sur les personnes.
Gestion
Le principal objectif chez les personnes atteintes du syndrome
métabolique est de réduire le risque de développer le diabète,
une maladie cardiovasculaire ou d’autres maladies chroniques.
Dans un premier temps, l’accent doit être mis sur la modification
des facteurs de risque sous-jacents (insensibilité à l’insuline,
obésité, inflammation) à travers une adaptation du mode de vie
(intensification de l’activité physique, alimentation cardioprotec-
trice et perte de poids).
Un traitement pharmacologique spécifique peut s’avérer adéquat
pour traiter les composants cliniquement significatifs du syndrome
hypertension, dyslipidémie ou hyperglycémie, par exemple.
Cependant, l’intérêt d’adapter un traitement à une combinaison
spécifique de critères n’a pas été étudié. Le syndrome métabolique
a le mérite d’attirer l’attention et les ressources sur les personnes
exposées à un risque élevé de développer un diabète de type 2,
des troubles cardiovasculaires et d’autres maladies chroniques.
Hermes Florez, Ana Palacio, Leonardo Tamariz
Hermes Florez est professeur au sein du Humana Health Service
Research Center de l’Université de Miami, endocrinologue et
gériatre auprès du Miami Veterans Affairs Healthcare System, Miami,
Etats-Unis, et professeur invité à l’Université de Zulia, Maracaibo,
Venezuela.
Ana Palacio est professeur au sein du Humana Health Service
Research Center de l’Université de Miami et interniste auprès du
Miami Veterans Affairs Healthcare System, Miami, Etats-Unis.
Leonardo Tamariz est professeur au sein du Humana Health Service
Research Center de l’Université de Miami et interniste auprès du
Miami Veterans Affairs Healthcare System, Miami, Etats-Unis.
Références
1 Ford ES. Prevalence of the metabolic syndrome defined by the
International Diabetes Federation among adults in the US.
Diabetes Care 2005; 28: 2745-9.
2 Hildrum B, Mykletun A, Hole T, et al. Age-specific prevalence of the
metabolic syndrome defined by the International Diabetes Federation
and the National Cholesterol Education Program: the Norwegian HUNT 2
study. BMC Public Health 2007; 7: 220.
3 Mannucci E, Monami M, Bardini G, et al. National Cholesterol
Educational Program and International Diabetes Federation
diagnostic criteria for metabolic syndrome in an Italian cohort: results
from the FIBAR Study. J Endocrinol Invest 2007; 30: 925-30.
4 Athyros VG, Ganotakis ES, Elisaf MS, et al; GREECE-METS Collaborative
Group. Prevalence of vascular disease in metabolic syndrome using
three proposed definitions. Int J Cardiol 2007; 117: 204-10.
5 Choi KM, Kim SM, Kim YE, et al. Prevalence and cardiovascular
disease risk of the metabolic syndrome using National Cholesterol
Education Program and International Diabetes Federation definitions
in the Korean population. Metabolism 2007; 56: 552-8.
6 He Y, Jiang B, Wang J, et al. Prevalence of the metabolic
syndrome and its relation to cardiovascular disease in an elderly
Chinese population. J Am Coll Cardiol 2006; 47: 1588-94.
7 Ford ES. Risks for all-cause mortality, cardiovascular disease, and
diabetes associated with the metabolic syndrome: a summary
of the evidence. Diabetes Care 2005; 28: 1769-78.
8 Wilson PW, D’Agostino RB, Parise H, et al. Metabolic syndrome as a
precursor of cardiovascular disease and type 2 diabetes mellitus.
Circulation 2005; 112: 3066-72.
9 Gami AS, Witt BJ, Howard DE, et al. Metabolic syndrome and risk of
incident cardiovascular events and death: a systematic review and meta-
analysis of longitudinal studies. J Am Coll Cardiol 2007; 9: 403-14.
10 Lorenzo C, Okoloise M, Williams K, et al. The metabolic syndrome as
predictor of type 2 diabetes: the San Antonio Heart Study.
Diabetes Care 2003; 26: 3153-9.
Impact global
24
Mai 2008 | Volume 53 | Numéro spécial
1 / 4 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !