50 © Magnard, 2012 – Latin 3e – Livre du professeur
3 Auguste, « le premier » des Romains
pp. 28-35
Après la mort de Jules César, une impitoyable lutte de succession s’est engagée : Octave, neveu et
ls adoptif de César, en sort vainqueur et devient le seul maître de Rome avec le titre d’Auguste.
OBJECTIFS DU CHAPITRE
Comprendre comment un homme change profondément l’histoire de Rome en forgeant un nouveau type de
régime politique.
Connaître et comprendre les mots-clés défi nissant les enjeux fondamentaux de ce nouveau pouvoir : auctoritas,
augustus, imperium, princeps.
Poursuivre la révision et l’apprentissage de la conjugaison : les temps formés sur le radical du parfait à l’actif
(parfait, plus-que-parfait, futur antérieur).
Découvrir le « siècle d’Auguste » à travers ses principaux aspects : historiques et politiques, sociaux et culturels.
Les ressources numériques
AUDIO
Découvrir le texte : « Plus grand que Romulus ! », Ovide, Fastes, livre II, vers 127-133, 136-138
et 141-144
lecture alternée, en latin et en français (p. 28)
Phrases d’observation : « Ego, divus Augustus… », d’après Auguste
lecture par groupes de mots, en latin et en français (p. 31)
VIDÉO
Auguste, la propagande impériale (p.29)
+ Fiche d’activité pour exploiter la vidéo
TEXTE À COPIER
/
COLLER
Phrases d’observation : « Ego, divus Augustus… », d’après Auguste (p. 31)
• Lire, comprendre et traduire : d’après Macrobe, Saturnales, II, 4 (p. 33)
EXERCICE À COMPLÉTER
Exercice 1 (p. 31)
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Découvrir le texte p. 28
Le texte étudié permet de découvrir comment les Romains
honorent leur nouveau « grand homme » : auréolé d’une
gloire quasi divine, le « prince » (princeps) désormais nommé
« Auguste » dépasse même en prestige le glorieux ancêtre
fondateur, Romulus.
Texte : « Plus grand que Romulus ! »
Ovide, Fastes, livre II, vers 127-133, 136-138 et 141-144.
Ressource
numérique
AUDIO
La possibilité d’écouter le texte lu par des comédiens,
soit en latin, soit en français, permet de mettre le texte
en valeur.
www.3e.latin.magnard.fr
Les Res gestae (table XXXV, 1, voir ci-après) attestent qu’aux
Nones (5 février) de l’an 2 avant J.-C., Auguste reçut le titre
de « Père de la Patrie », octroyé par le Sénat, l’ordre équestre
et le peuple romain tout entier. C’est un titre prestigieux, que
reçurent avant lui Cicéron et César.
Lévénement, qui est à l’origine de l’éloge d’Ovide, met en
évidence l’importance du « pater », pilier et pivot de toute la
société romaine : il est fondamental de rappeler aux élèves
que le pater familias, qui est aussi le patronus pour ses clientes,
est la fi gure du protecteur par excellence ; on lui doit pietas
et des. Auguste, premier des patres – car les sénateurs sont
aussi des « pères » – se voit ainsi glorifi é comme « le Père »,
gure sacrée (sanctus) à l’égal de Jupiter, et plus que Romulus,
l’ancêtre fondateur. C’est l’occasion de préparer les élèves
à l’étude des caractéristiques d’un régime profondément
« paternaliste ».
51
© Magnard, 2012 – Latin 3e – Livre du professeur
Activité numérique complémentaire
COMPLÉMENTS AU LIVRE DU PROFESSEUR
Vous pouvez retrouver l’extrait de Suétone (en latin et
en français) racontant comment le titre de « père de la
patrie » fut attribué à Auguste sur le site Magnard du
manuel : www.3e.latin.magnard.fr
• Le document
La statue d’Auguste dit « de la Prima Porta » est ici restituée
en polychromie. C’est un plâtre réalisé en 2003 à partir de
l’original en marbre de Paros, à la suite d’une collaboration
scientifi que entre les musées de Munich (Glyptothèque), de
Copenhague (Ny Carlsberg) et du Vatican, où il se trouve
aujourd’hui exposé. On suivra l’historique de cette réalisation
dans les extraits vidéo mis à disposition dans le manuel
numérique (voir ci-après). C’est l’occasion d’expliquer un point
fondamental de l’art antique, sur lequel nous reviendrons :
toutes les œuvres d’art (sculptures, temples) étaient peintes,
en Grèce comme à Rome, dans des couleurs que nous
qualifi erions aujourd’hui de « ashy », ce qui change le regard
porté sur un art trop souvent jugé « austère » et « compassé ».
• Lire le texte
Lobjectif est de poursuivre la phase de reprise progressive
en proposant aux élèves de traduire six vers : un « cadrage »
simple les guide dans le repérage des éléments principaux
(sujet / verbe / compléments). Il permet de constater que
l’ordre des mots en poésie est beaucoup plus « libre » que
celui de la prose (groupes nominaux souvent disjoints,
par exemple) : ici, il met particulièrement en valeur l’éloge
hyperbolique du « prince » (voir la répétition de nomen et
tibi).
1. Traduction des vers en gras : « Vénérable père de la
patrie, c’est à toi que la plèbe, c’est à toi que la curie ont
donné ce nom, ce nom nous te l’avons donné nous aussi,
les chevaliers. [ ] Toi ce nom tu l’as à travers toute la terre,
(le nom) que Jupiter détiens tout en haut du ciel : toi (tu
es) le père des hommes, lui (il est père) des dieux. […] Pour
toi, la force brutale a été agréable ; sous César, les lois sont
orissantes ; toi, tu détiens le nom de maître, lui, celui de
prince. »
2. Ovide s’adresse successivement à Auguste et à
Romulus : on fait relever les vocatifs sancte pater patriae (vers
1) et Romule (vers 7). Le poète établit ainsi une comparaison
explicite entre le « père » qui a fondé Rome et celui qui l’a
en quelque sorte « refondée » par son action politique
pacifi catrice.
3. Les mots répétés sont les éléments du groupe verbal : le
verbe (dedit, au singulier en raison de l’accord de proximité,
et dedimus, dans lequel s’inclut Ovide) + le COD (hoc nomen)
+ le COS (tibi). On revient ici sur un point d’histoire et de
culture fondamental : les trois classes qui fondent le pacte
social romain sont nommément citées, la masse du peuple
(la plèbe), le Sénat (la curie) et l’ordre équestre (deuxième
ordre en importance, après l’ordre sénatorial). On note
qu’Ovide profi te de l’occasion pour rappeler son origine (sa
famille appartenait à l’ordre équestre).
4. Auguste est rapproché de Jupiter, le « roi des dieux »,
ce qui donne à l’éloge son caractère éminemment hyper–
bolique. On rappelle que l’épopée nationale, l’Énéide de
Virgile, a déjà popularisé l’image de Jupiter confi ant aux
Romains « un empire sans fi n » (imperium sine fi ne dedi, livre
I, vers 279).
5. Le parallèle entre Auguste et Romulus, tout à l’avantage
du premier, est un choix poétique qui s’explique aussi par
une circonstance historique : en 27 avant J.-C., des sénateurs
avaient voulu donner à Octave le surnom (cognomen) de
Romulus, mais c’est fi nalement celui d’Augustus qui fut retenu
(voir Suétone, ci-après). Pour les besoins de la comparaison,
Ovide trace de Romulus un portrait peu fl atteur : l’œuvre
de conquête et de pacifi cation d’Auguste est opposée au
caractère belliqueux de Romulus (voir l’allusion au fratricide
avec la formule te Remus incusat, vers 13). Le sort malheureux
de Rémus fait en eff et ressortir la culpabilité et la violence de
Romulus, ce qui contraste avec la clémence d’Auguste, l’une
de ses « vertus » fondamentales (voir manuel p. 29). De même,
les lois (leges) d’Auguste pour favoriser les mariages et pour
réprimer l’adultère (voir ci-après) sont opposées au rapt des
femmes (l’enlèvement des Sabines), pratiqué par Romulus.
Le latin oppose les termes dominus (« maître »), terme
qui s’applique en politique à un « tyran » (au sens du grec
tyrannos) exerçant un pouvoir absolu, et celui de princeps
prince » ou « premier des citoyens »). C’est eff ectivement
le terme princeps qui fut donné à tous les empereurs à
partir dAuguste (manuel p. 30) : lui-même refusa toujours le
titre de dominus (voir la citation de Suétone, manuel p. 33,
exercice 1). Avec un bel eff et de chiasme (caelestem / patrem
ouvre / ferme le vers), Ovide met en parallèle les deux
apothéoses : c’est le dieu Mars, père de Romulus, qui
a élevé son fi ls au rang de divinité céleste (caelestem),
tandis qu’Auguste (ille) a réalisé cette divinisation pour son
père (adoptif), César. On fait retrouver l’information sur
l’apothéose de César (manuel, p. 25) : bâti sur le Forum, un
temple « au Divin Jules » fut dédié par Auguste en 29 avant
J.-C., après la victoire d’Actium. Les élèves constatent que
la divinisation du père par le fi ls est plus « valorisante » que
celle du fi ls par le père parce quelle met en évidence, une
fois de plus, une « vertu » cardinale : la pietas qui impose au
ls d’honorer ses parents (voir le modèle représenté par
Énée et son père Anchise).
Activité numérique complémentaire
TEXTE À VIDÉOPROJETER
Le manuel numérique enrichi en vidéoprojection, avec
ou sans TBI, permettra de mettre en évidence certains
aspects du texte. On pourra, par exemple, utiliser les
outils suivants :
-l’outil Formes prédéfi nies pour encadrer les vocatifs
(sancte pater patriae et Romule) afi n de mettre en
évidence la comparaison entre Auguste et Romulus
-l’outil Surligner pour relever les mots répétés dans les
deux premiers vers (verbe, COD, COS)
-l’outil Zoom pour mettre en valeur les chiasmes
(caelestem / patrem)
52 © Magnard, 2012 – Latin 3e – Livre du professeur
Compétences
situer un événement dans le temps, l’espace, les
civilisations (Socle, C5)
repérer les informations dans un texte à partir des
éléments explicites et des éléments implicites nécessaires
(Socle, C1)
identifi er des éléments du texte en latin et retrouver leur
traduction
mettre en relation des éléments linguistiques et
historiques
ébaucher un commentaire littéraire
être sensible aux enjeux esthétiques et humains d’un
texte littéraire
Découvrir l’image p.29
Cette page permet d’observer, de manière « ciblée », sur le thème
de la propagande impériale, une partie de l’une des plus célèbres
représentations sculptées dAuguste.
Propagande impériale
Statue d’Auguste (détail) trouvée dans la villa de Livie (au
nord de Rome), marbre de Paros (H. 2,04 m), env. 50 après
J.-C., Musées du Vatican, Rome.
• 
Ressource
numérique
IMAGE À VIDÉOPROJETER
On peut vidéoprojeter la cuirasse sculptée pour la faire
décrire aux élèves. On pourra utiliser l’outil Spot/cache
pour mettre en évidence ou masquer les différents
éléments à observer et ainsi guider les réponses des
élèves.
VIDÉO ET FICHE DACTIVITÉ
Cette sculpture est présentée avec la réalisation de sa
copie en polychromie dans une vidéo disponible dans
le manuel numérique.
www.3e.latin.magnard.fr
Gros plan sur...
Les élèves observent l’aigle de la légion et retrouvent
l’importance de cet emblème dans l’armée romaine (voir
dans notre manuel de 4e p. 33). Ils se reportent à la carte
présentée en intérieur de couverture (pp. 1-2) pour repérer le
site de la bataille de Carrhes (en Mésopotamie) où mourut
Crassus ainsi que les provinces créées par Auguste.
• La citation : Suétone, Vie d’Auguste, XXI, 3-7
Cette citation permet de replacer l’épisode de la restitution
des aigles dans le cadre plus général de la politique
pacifi catrice d’Auguste, objet d’une propagande continue
chez tous les auteurs qui glorifi ent les « vertus » du prince.
Sans participer lui-même aux opérations de guerre,
l’empereur sut en eff et aussi bien organiser les off ensives
que les alliances diplomatiques permettant de conquérir de
nouveaux territoires.
Pendant près de trois siècles Romains et Parthes ont été en
confl it pour l’Arménie, la Syrie et la Mésopotamie. Auguste,
qui a bien compris qu’il avait aff aire à un adversaire de taille,
préfère renoncer à l’aff rontement et choisit la diplomatie.
En 20 avant J.-C., il signe avec Phraatès IV un pacte d’amitié
qui fi xe l’Euphrate comme frontière entre les deux empires.
Comme gage de bonne volonté Phraatès restitue les aigles
prises à Crassus en 53 et permet le retour des prisonniers
romains. Voici comment Auguste rapporte lui-même cet
épisode : « Après la défaite des ennemis, j’ai récupéré en
Espagne, en Gaule et en Dalmatie les nombreuses enseignes
militaires perdues par d’autres généraux. J’ai contraint les
Parthes à me restituer les dépouilles et les enseignes de trois
armées romaines et à demander à genoux une alliance avec
le peuple romain » (Res gestae divi Augusti, XXIX, 2).
Activité numérique complémentaire
COMPLÉMENTS AU LIVRE DU PROFESSEUR
Vous pouvez retrouver un autre extrait des Res gestae
(en latin et en français) mettant en avant la « clémence »
d’Auguste, à confronter avec le témoignage de
l’historien grec Dion Cassius, sur le site Magnard du
manuel : www.3e.latin.magnard.fr
La statue d’Auguste dite «de Prima Porta» tire son nom de la
localité où elle a été trouvée en 1865 dans la villa de Livie, au
nord de Rome. La statue en marbre devait avoir pour modèle
une statue en bronze, exécutée vers 20 avant J.-C. et copiée
après la mort d’Auguste. Lempereur est représenté dans une
attitude très romaine, celle du général faisant une adlocutio à
ses troupes, mais le modèle esthétique est grec : la position
du corps est inspirée de celle du Doryphore de Polyclète (voir
notre manuel de 4e pp. 120-121) et les pieds nus rappellent le
modèle des dieux grecs « classiques ». Aux pieds d’Auguste,
un Cupidon chevauchant un dauphin rappelle l’ascendance
divine qu’il revendique dans toute sa propagande, à la suite
de Jules César (Vénus, ancêtre de la gens Julia), mais aussi la
victoire navale d’Actium, qui lui a assuré la suprématie
(manuel p. 34).
La défaite de Carrhes était ressentie comme un profond
traumatisme pour l’orgueil romain : le triumvir Crassus y
avait perdu la vie, mais pire que tout, les enseignes romaines
avaient été capturées par l’ennemi. Cette restitution
qu’Auguste venait d’obtenir par la voie diplomatique lavait
trente ans d’une terrible humiliation face aux peuples d’Asie :
les enseignes restituées furent placées dans le temple de Mars
Ultor (Mars Vengeur) dans le forum d’Auguste, à Rome, et le
Sénat éleva un autel « à la Fortune revenue » (reduci Fortunae).
Lensemble des succès d’Auguste, militaires et diplomatiques,
donnait aux Romains l’impression que l’empire atteignait
ainsi une dimension universelle : c’est cette pacifi cation
cosmique que la cuirasse met en scène. En fait, toutes ces
démonstrations offi cielles avaient aussi pout but de cacher
un arrêt de la conquête romaine en Orient ainsi que le désir
d’Auguste de ne pas pousser plus avant de ce côté du monde.
• Lire l’image
1. On voit quil s’agit de la cuirasse, sur laquelle les experts
ont retrouvé des traces de polychromie (voir la vidéo dans les
ressources numériques).
2. En suivant les explications fournies à côté de l’image, les
élèves repèrent trois registres, mêlant histoire et mythologie,
dans une vision grandiose et symbolique, à la dimension
proprement « cosmique ». Au centre, Tibère, un chien (la
louve romaine ?) à ses pieds : casqué et cuirassé, il tient dans
53
© Magnard, 2012 – Latin 3e – Livre du professeur
sa main gauche une épée ou un bâton de commandement,
il tend la main droite pour recevoir l’aigle que lui remet le roi
parthe à l’habit oriental exotique (on observe les pantalons).
De part et d’autre de cette scène, deux figures féminines
assises figurent les nations soumises et pacifiées : la Gaule ou
la Dacie à droite, la Dalmatie ou l’Espagne à gauche. Toutes
les autres figures sont des allégories cosmiques : on note, tout
en haut, le Ciel (Caelum) étendant son voile sur le monde, le
Soleil conduisant son char, l’Aurore tenant sa cruche de rosée,
devant la Lune éclairant la nuit de son flambeau ; tout en
bas, la Terre (Tellus), avec ses symboles habituels de fertilité
(couronne d’épis de blé, corne d’abondance, enfants). Apollon
se reconnaît à sa lyre, Artémis à son carquois. On observe
enfin que les attaches de la cuirasse sont décorées de sphinx,
renforçant le thème « oriental » de la scène représentée, mais
faisant aussi allusion à la conquête de l’Égypte (Cléopâtre et
Marc Antoine vaincus à Actium).
3. Lévénement de la restitution des aigles s’inscrit dans le
mythe général du retour de l’Âge d’or, dont tous les motifs
se retrouvent dans le Chant séculaire d’Horace (voir ci-après) ;
peu importe qu’il ne mette pas en scène une victoire militaire :
bien au contraire, célébré avec faste, il contribue fortement à
idéaliser les « vertus » dAuguste (magnanimité, clémence),
garant de la paix universelle, tel que le présentent aussi Ovide
et Suétone ainsi que de nombreuses monnaies.
Compétences
identifier des éléments du récit en comparant texte et
image
établir des liens entre les œuvres littéraires et artistiques
pour mieux les comprendre (Socle, C5)
retrouver des informations culturelles déjà connues
Découvrir les mots-clés p. 30
Les mots-clés ont été choisis en liaison directe avec le thème
mis en place par le texte et l’image des pages précédentes : ils
permettent d’aborder les nouveaux enjeux de la vie politique
à Rome avec la prise de pouvoir d’Auguste. Celui-ci restaure les
formes de la République sénatoriale, après avoir pacifié le pays
en mettant fin aux guerres civiles qui l’ensanglantaient depuis
un siècle.
Auctoritas, augustus, imperium, princeps
Les élèves retrouvent les enjeux politiques fondamentaux
posés par le terme imperium : ils font le lien entre les notions
et le contexte définis au chapitre précédent, comme entre
les personnages de Jules César et d’Octave Auguste ; ils
comprennent ainsi comment une nouvelle forme de régime
caractérisée par la concentration des pouvoirs (le principat
que nous nommons Empire) se met en place avec celui qui
s’affiche comme l’héritier de César.
Toute l’habileté d’Octave est de ne se faire nommer ni roi,
ni dictateur, mais « prince » et « Auguste » (avec son plein
sens honorifique et religieux, qui donne à son détenteur
un caractère sacré), comme le constate Tacite (Annales, I,
9) : dans cette période troublée, « il ne restait de remède
aux divisions de la patrie que le gouvernement d’un seul.
Toutefois le pacificateur de l’état, content du nom de prince,
ne s’était fait ni roi ni dictateur » (non regno tamen neque
dictatura, sed principis nomine constitutam rem publicam).
Avec un sens certain de la mise en scène, le nouveau maître
de Rome a su en effet déjouer le piège de la dictature dans
lequel était tombé César : « Pour refuser solennellement
la dictature que le peuple lui offrait avec beaucoup
d’insistance, il mit un genou à terre, rejeta sa toge de ses
épaules et offrit sa poitrine nue », rapporte Suétone (Vie
d’Auguste, 52). Un geste que Dion Cassius commente avec
perspicacité : « Il n’accepta pas la dictature, au contraire : il
alla jusqu’à déchirer sa toge en public un jour où il ne trouvait
plus d’autre moyen, persuasion ou menace, de détourner le
peuple de cette idée. Il est vrai que disposant de pouvoirs
et d’honneurs supérieurs à ceux des dictateurs, il se gardait
avec raison de la jalousie et de la haine que suscitait ce titre »
(Histoire romaine, LIV, 1).
Quant au titre d’Auguste, il est accordé par le Sénat à Octave
sur proposition de Lucius Munatius Plancus (le fondateur de
la colonie de Lugdunum), alors que, trois jours auparavant,
Octave lui-même a habilement démissionné de toutes ses
fonctions et que le Sénat, désemparé, l’a supplié de revenir.
Il est intéressant de noter que le nom d’Auguste a été
préféré à celui de Romulus : « Quelques-uns pensaient qu’il
fallait l’appeler Romulus, parce qu’il était en quelque sorte
le fondateur de Rome. Mais le surnom d’Auguste prévalut
comme nouveau et plus noble. Il caractérisait les lieux saints,
ceux où les augures consacraient quelque chose, soit que
cette dénomination vînt d’auctus, « le garant ou plénitude
de chance » soit qu’elle fût tirée des mots avium gestu
ou gustu, « par le mouvement » ou « par la nourriture des
oiseaux », ainsi que l’indique ce vers d’Ennius : «Après que
l’illustre Rome eut été fondée sous d’augustes augures.» »
(Suétone, Vie d’Auguste, 7)
À titre de bilan, on note les titres et pouvoirs d’Octave-Auguste
qui montrent comment celui qui aimait se présenter comme
« Primus inter pares » (« premier au milieu d’égaux ») a réussi à
cumuler à vie les plus hautes fonctions de la République :
consul, treize fois (43, 33, 31, 30, 29, 28, 27, 26, 25, 24, 23, 5,
2 avant J.-C.).
imperator, le titre lui est décerné vingt-et-une fois. Le
13 janvier 27 avant J.-C., Octave a officiellement rendu la
charge de la res publica au peuple de Rome. En échange,
le Sénat lui accorde l’imperium pour dix ans. Les provinces
sont partagées en sénatoriales et impériales : Octave prend
pour lui les provinces où se trouvaient des forces militaires et
laisse au Sénat toutes celles qui n’avaient besoin que d’une
administration purement civile.
augustus à partir du 16 janvier 27 avant J.-C.
– doté de la tribunicia potestas (puissance tribunicienne) à
partir de 23 avant J.-C. (renouvelée chaque année en juin).
pontifex maximus à partir de 12 avant J.-C.
pater patriae à partir du 5 février 2 avant J.-C.
À la fin de sa vie, Auguste fait lui-même le bilan des honneurs
qui lui furent successivement décernés en janvier 27 avant J.-
C. : le titre d’Augustus, les lauriers plantés devant sa maison au
Palatin, la couronne civique et le clipeus virtutis (manuel, p. 36).
Il ajoute aussitôt en conclusion de ce quadruple hommage la
phrase célèbre : post id tempus auctoritate omnibus praestiti
après cet instant, je l’ai emporté sur tous en autorité », Res
gestae, VI, 34). C’est bien grâce à cette auctoritas, à la fois
religieuse et politique, que le « prince » l’emportait désormais
sur tous les magistrats.
54 © Magnard, 2012 – Latin 3e – Livre du professeur
• Limage : l’aureus d’Octave
Les élèves exploitent leurs compétences récemment
acquises avec le dossier numismatique (manuel pp. 16-
17). On leur demande de déchiff rer la légende de l’aureus :
IMP•CAESAR / DIVI•F•COS•VI. Les initiales IMP, F et COS signi ent
imperator, fi lius et consul, la mention VI indique qu’au moment de
l’émission de la pièce, le « prince » est consul pour la sixième fois.
• Étymologie
1. On relève auctor, auctoritas, augurium, augustus. En
français : augmenter, auteur (avec ses divers sens), autorité,
auguste, augure, inaugurer, etc.
2. Empire et empereur viennent de imperium et imperator. On
insiste sur le fait que le régime instauré par Auguste se nomme
« le principat » et que celui qui l’exerce est « le prince », au sens
où l’entendra Machiavel avec son célèbre ouvrage (Le Prince).
3. Le « mois d’Auguste » est le mois d’août (on note la
présence de l’accent circonfl exe comme trace du s latin) ;
dans d’autres langues : august (anglais/allemand), agosto
(italien/ espagnol).
4. Le point commun est le nom princeps. Les élèves
retrouveront les divers sens des mots français dans des
dictionnaires de référence.
Jouez avec les mots
5. Octave « a restauré les lois et les droits pour le peuple
romain ». Les élèves retrouvent facilement l’étymologie de
juridique (jus, manuel, p. 20), de législatif (lex, legis) et de
restitution (verbe restituere).
Compétences
– identifi er une racine, une famille de mots
– comprendre un vocabulaire spécifi que
avoir des connaissances et des repères relevant de la
culture civique (Socle, C5)
comprendre les principes d’un État de droit, le
fonctionnement des institutions (Socle, C6)
relier texte et image à l’aide des phrases simples
entraînant à une lecture/traduction autonome
Observer p.31
Ressource
numérique
AUDIO
Les phrases sont enregistrées dans une version alternée,
mêlant le latin et sa traduction en français. La lecture
alternée du latin et du français, guidée par le professeur,
est à pratiquer dans l’identifi cation initiale des groupes
de mots puis, une fois la traduction complétée, à titre
de relecture et de consolidation des acquis.
www.3e.latin.magnard.fr
Activité numérique complémentaire
COMPLÉMENTS AU LIVRE DU PROFESSEUR
Vous pouvez retrouver le texte original, en latin, de
ce passage des Res gestae ainsi que le point de vue
résumé par Tacite sur Auguste, sur le site Magnard du
manuel : www.3e.latin.magnard.fr
Ressource
numérique
TEXTE À COPIER/COLLER
Ces phrases, comme toutes celles des pages
« Observer », peuvent être copiées-collés à partir d’un
chier au format.doc. Le fi chier peut être donné aux
élèves tel quel, comme une fi che « prête à l’emploi »,
lors d’un contrôle ou d’un exercice en classe, ou bien
peut être modifi é selon les attentes du professeur et le
niveau de la classe.
www.3e.latin.magnard.fr
Il est important de souligner que le texte à observer est tiré
des Res gestae divi Augusti, dont on présentera le caractère
historique original aux élèves.
En latin, l’expression res gestae désigne les actions accomplies
(participe parfait passif du verbe gerere), c’est-à-dire les
« hauts faits » (voir l’étymologie de « chanson de geste »),
ou « Histoire ». Entre 11 et 13 après J.-C., Auguste rédige lui
même un récit de sa vie en forme de « rapport d’activités »
qui devra servir de modèle à ses successeurs : il dépose ce
testament politique entre les mains des Vestales, parmi
d’autres documents ; il souhaite que le texte en soit gravé sur
des tablettes de bronze qui seraient placées à l’entrée de son
mausolée. Suétone le présente ainsi : Res gestae divi Augusti,
quibus orbem terrarum imperio populi Romani subjecit, et
impensae, quas in rem publicam populumque Romanum fecit
les actions accomplies par le divin Auguste par lesquelles
il a soumis toute la terre à l’empire du peuple romain et les
dépenses qu’il a faites pour l’État et pour le peuple romain »).
Dès l’Antiquité, cette inscription a été recopiée et largement
diff usée. Les plaques de bronze ont disparu, mais on a
retrouvé des fragments de copies gravées sur la pierre. Dans
les provinces, ces copies étaient affi chées dans les temples
dédiés à Rome et à Auguste divinisé. Trois d’entre elles ont
été retrouvées en Asie Mineure et une en Syrie. Une seule,
celle du Monumentum Ancyranum, le « Temple de Rome et
d’Auguste » à Ancyra (aujourd’hui Ankara), off re un texte à
peu près complet, accompagné d’une traduction grecque (la
langue la plus répandue en Méditerranée orientale) ; les
autres ne sont que des fragments. Les deux tables d’Ancyra
mesurent 2,70 mètres de haut sur 4 mètres de long : elles
comportent six « pages » de 46 ou 54 lignes de 60 caractères
chacune environ. Le texte latin, parfois très mutilé, a pu être
reconstitué grâce à la traduction grecque et aux fragments
retrouvés dans les autres sites.
Prolongement
On trouvera le texte complet des Res gestae sur plusieurs
sites : nous recommandons la traduction qu’en a donnée
Michel Dubuisson (Université de Liège) : http://www.class.
ulg.ac.be/ressources/resgestae.html
• Reconnaître
Les élèves sont invités à identifi er les cas respectifs de noms
dont certains ont des terminaisons identiques. Dans les deux
chapitres précédents, l’activité portait essentiellement sur
l’identifi cation de la classe grammaticale. Les corrections
proposées ouvrent cependant la possibilité de demander à
l’élève l’identifi cation de la déclinaison du nom et du cas, de la
1 / 12 100%
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