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COMMUNIQUÉ
LES ENJEUX DE RTE POUR LE RÉSEAU
D’AUJOURD’HUI ET DE DEMAIN
Sur un même territoire, la
production d’électricité ne
coïncide pas avec les besoins
locaux de consommation. Le réseau
assure la solidarité électrique entre
les territoires. Ce concept de solida-
rité s’entend à l’échelle du quartier, de
la ville, de la région, du pays, de l’Eu-
rope. Incombe alors à l’opérateur du
réseau haute et très haute tension un
rôle de gestionnaire de flux, capable
d’anticiper creux et pointes, et d’uti-
liser la complémentarité des sources
d’énergie. C’est particulièrement vrai
avec le développement des énergies
renouvelables. La production d’élec-
tricité coïncide d’autant moins avec
les besoins locaux de consommation
qu’elle peut être tributaire des condi-
tions météorologiques : le vent pour
les parcs éoliens, comme le soleil
pour les panneaux photovoltaïques.
Les territoires européens ne sont
pas tous logés à la même enseigne :
l’ensoleillement est meilleur au Sud,
le vent plus fort à l’Ouest. Les énergies
renouvelables comme la géothermie
ou la biomasse offrent moins de
variabilité, la géothermie étant tou-
tefois circonscrite à certains bassins.
Les énergies marines, comme l’éo-
lien offshore, affichent elles aussi
davantage de constance, mais sont
exploitées dans des zones éloignées
des centres de consommation.
Le concept de foisonnement
Le réseau européen d’électricité per-
met de lisser la variabilité des sources
de production et les relatives inégali-
tés dans la répartition des gisements
d’énergie renouvelable. À travers lui,
le concept dit « de foisonnement»
peut pleinement s’exprimer: la météo
étant rarement la même à 500 km
d’écart, il y aura toujours un parc de
production d’énergie renouvelable
capable de pallier la production
qu’un autre parc distant n’aura pas
été capable de livrer.
Des différences culturelles
De son côté, la consommation d’élec-
tricité dépend non seulement des
conditions climatiques, mais aussi
des modes de vie et des habitudes
culturelles, de la densité du tissu
industriel ou encore de la dynamique
démographique d’une région. En
France, la pointe de consommation
du soir survient à 19h, mais en Alle-
magne, elle apparaît plus tôt compte
tenu des habitudes domestiques.
Là aussi, le réseau permet de tirer
bénéfice de ces différences culturelles
en couvrant les besoins par exemple
grâce à la production française. De
même, l’éolien et le photovoltaïque
allemands font bénéficier le reste de
l’Europe d’une électricité bon marché
lorsqu’elle est disponible.
Une électricité sûre et fiable
La variabilité de la demande est une
donnée à prendre d’autant plus en
compte qu’avec l’essor annoncé des
véhicules électriques, elle promet
d’être de plus en plus forte. En effet,
si des millions de voitures électriques
se mettent à circuler sur les routes
d’Europe, elles auront besoin d’être
rechargées régulièrement, et cela à
des moments et dans des lieux diffi-
cilement identifiables à l’avance. Là
aussi, le réseau et la gestion des flux
devront s’adapter. Loin d’être figé
dans le temps ou dans l’espace, le
déséquilibre entre zones productrices
et zones consommatrices d’électricité
peut donc s’inverser au cours d’une
journée, au fil des saisons ou bien
dans l’année. Or, comme elle est
difficile à stocker, l’électricité doit
être produite au moment où elle est
consommée.
La mutualisation des moyens de
production et la complémentarité des
sources d’énergie permettent alors
de gérer intelligemment la courbe
de consommation et d’assurer, à tout
moment, la livraison d’une énergie
sûre et fiable.
Acteur tant du système électri-
que que du marché de l’élec-
tricité, RTE développe des
outils qui assurent la compatibilité
entre les échanges commerciaux et
la sécurité d’alimentation électrique.
Par l’intermédiaire des bourses
européennes d’échanges d’électrici-
té, le couplage des marchés permet
d’utiliser au maximum les capacités
d’interconnexions pour optimiser
les sources de production d’électri-
cité disponibles. C’est le concept de
couplage des marchés. Mis au point
avec la participation active de RTE, le
couplage des marchés du Portugal à
la Scandinavie permet ainsi d’utiliser
les moyens de production selon leur
avantage économique, tout en optimi-
sant l’utilisation des infrastructures,
au bénéfice du consommateur et de
la collectivité.
Le mécanisme de capacité
Autre instrument de marché que RTE
a développé dans l’exercice de ses
missions : le mécanisme de capacité.
Certains moyens de production ne
sont utilisés que quelques heures
dans l’année, en cas d’extrême pointe
de consommation. Leur exploitation
n’est donc pas rentable. Néanmoins,
ils sont indispensables à la sécurité
d’approvisionnement. Fort de ce
constat, RTE a conçu un mécanisme
pour que le prix de l’électricité intègre
non seulement le prix de l’énergie
produite, mais aussi le service rendu à
la sécurité d’alimentation au moment
des pointes de consommation.
Un système innovant et souple
Ce service, rendu possible par le
mécanisme de capacité, a ceci
d’innovant qu’il peut s’effectuer en
mobilisant des moyens de production
ou d’effacement de consommation.
En effet, pour répondre à un déséqui-
libre entre offre et demande, on peut
démarrer de nouveaux moyens de
production ou demander à certains
clients d’interrompre momentané-
ment leur consommation.
RTE est moteur dans la valorisa-
tion de la flexibilité de la consom-
mation d’électricité et conçoit de
nombreux mécanismes permettant
sa modulation. Jusque-là cantonnés
au mécanisme d’ajustement, c’est-à-
dire aux équilibrages de très court
terme (d’une heure sur l’autre), les
effacements sont appelés à devenir
de vraies offres de marché. Pour
cela, il fallait des règles du jeu qui
permettent de considérer un efface-
ment de consommation sur le même
plan qu’une production d’électricité:
ce sont les NEBEF (Notifications
d’échange de blocs d’effacement). La
maîtrise de la puissance consommée
anime aussi l’esprit d’Ecowatt, un
dispositif consistant à sensibiliser
et à solliciter les consommateurs
résidant dans des zones fragiles
électriquement (Bretagne, Paca) lors
de situations tendues. Sur le principe
du volontariat, ceux-ci sont invités à
limiter leur consommation électrique
à réception d’un message d’alerte.
Cinq questions à Jean-Paul Roubin, directeur
du Centre National d’Exploitation du Système
électrique (RTE).
Comment pilote-t-on un réseau électri-
que de plus de 100 000 km ?
Jean-Paul Roubin : D’abord, en cherchant à
anticiper les situations. La prévision est au cœur
de l’expertise de RTE et couvre des échelles de
temps différentes : du long terme, lorsque nous
publions le Bilan Prévisionnel qui nous est
demandé par les pouvoirs publics. Il permet de
les éclairer sur les mesures à prendre pour sécu-
riser l’approvisionnement électrique. Du court
terme, quand nous discutons avec l’ensemble des
acteurs du système électrique des possibilités de
production et des évolutions vraisemblables de
la consommation pour établir des prévisions que
nous affinons au cours du temps.
Cet exercice prévisionnel, comment se
déroule-t-il ?
J.-P. R. : L’exercice démarre plusieurs mois à
l’avance, en élaborant des hypothèses de produc-
tion et de consommation, jusqu’à la veille pour
le lendemain. À tout moment, nous vérifions
que les moyens de production sont suffisants
et le seront pour l’heure qui suit et ajustons nos
prévisions en conséquence. Côté consommation,
nous nous basons sur des courbes historiques,
les données météo. Vient ensuite le temps réel:
nous observons l’électricité qui circule sur le
réseau, en collectant 60 000 informations qui
sont actualisées toutes les dix secondes. Nous
pouvons ainsi réagir au moindre déséquilibre.
Justement, comment réagissez-vous si
vous constatez un déséquilibre ?
J.-P. R. : Une indisponibilité fortuite (panne d’un
moyen de production, coup de foudre sur une
ligne) ne doit pas entraîner de surcharge sur
d’autres lignes, préjudiciable à l’alimentation en
électricité ou à sa qualité. La correction des écarts
est une composante importante du pilotage du
réseau. S’il faut mobiliser de nouveaux moyens de
production ou effacer des consommations, nous
déterminons les besoins nécessaires pour équili-
brer l’offre et la demande. Le marché sélectionne
alors la solution la plus performante sur le plan
économique pour permettre de régler les écarts.
Comment ce travail s’articule-t-il avec
celui des réseaux européens voisins ?
J-P. R. : L’interconnexion des réseaux permet
d’assurer la solidarité électrique entre les pays, de
mutualiser les moyens de production et les profils
de consommation. Elle nécessite coopération et
rigueur. En effet, si un déséquilibre survenait
quelque part en Europe, cela se ressentirait à
l’autre bout. Il est donc nécessaire de piloter
cette « plaque européenne» en commun. C’est la
mission de Coreso, un centre de coordination du
réseau ouest-européen mis en place à Bruxelles
par les opérateurs de réseau de transport français,
italien, britannique, belge et allemand. Cette
vision du système électrique au niveau suprana-
tional accompagne le couplage des marchés de
l’électricité. Si les signaux économiques envoyés
par le marché montrent qu’il est judicieux, parce
que c’est moins cher ce jour-là, de solliciter des
moyens de production français pour couvrir
la demande allemande, il est indispensable de
disposer d’une gestion coordonnée des réseaux.
Comment gérez-vous la variabilité de la
production d’origine renouvelable ?
J-P. R. : En faisant des prévisions, grâce à notre
logiciel IPES. Ensuite, en exploitation, nous nous
appuyons sur la complémentarité des sources
d’énergie à l’échelon européen. Prenons un
exemple : la France dispose d’un parc nucléaire
couvrant la consommation de base, l’Espagne
d’un parc de production éolienne et photovol-
taïque, une production qu’il faut utiliser même
si la demande espagnole n’est pas suffisante. De
plus, les pointes de consommation sont décalées:
vers 21 h en Espagne et 19 h en France... quand
il y a moins de soleil. Les besoins ne sont donc
pas forcément simultanés. Le réseau permet d’y
apporter une réponse : de l’électricité française
couvrira les pics espagnols, et vice-versa. La
nouvelle liaison souterraine en courant continu
à travers les Pyrénées qui sera inaugurée en 2015
permettra de renforcer ces échanges.
AVIS D’EXPERT
« ANTICIPER, PILOTER,
CORRIGER »
Pour orir à ses clients une électricité économique, sûre et propre, RTE exerce son expertise
non seulement pour gérer les flux électriques et organiser le marché de l’électricité, mais aussi
pour développer et entretenir les infrastructures.
ASSURER L’ÉQUILIBRE
OFFRE-DEMANDE
ORGANISER ET
STRUCTURER LE MARCHÉ
RTE
GÉRER 3
JEAN-LIONEL DIAS
OLIVIER ULRICH
Mission la plus connue de
RTE, l’accès à une alimen-
tation électrique de qualité,
partout et à tout moment, passe par
un entretien minutieux des 100 000
kilomètres et plus de lignes à haute
et très haute tension. Cette mainte-
nance, qui vise à faire vivre dans la
durée le patrimoine industriel en
le fiabilisant, se fait notamment à
travers des méthodes innovantes,
par exemple à l’aide de robots et de
drones pour les interventions sur les
lignes aériennes.
Assurer l’accès à une alimentation
électrique de qualité passe aussi
par l’adaptation du réseau. Pour
répondre aux préoccupations de
nos concitoyens et limiter notre
empreinte environnementale, il est
primordial de tirer le meilleur parti
des infrastructures existantes. Au-
trement dit, il s’agit d’innover pour
étendre leur durée de vie et accroître
leur contribution à la sécurité de
l’approvisionnement électrique. Les
transitions énergétiques engagées
en France et en Europe amènent à
accélérer le développement de nou-
velles infrastructures, tout en inté-
grant le mieux possible les ouvrages
dans l’environnement.
Un réseau interconnecté
Plus le réseau sera finement maillé
et interconnecté, plus il sera facile
de faire coïncider pointes et creux
de consommation avec pointes et
creux de production. Sans réseau,
une pointe de consommation locale
devrait être couverte par un renfort
de production locale, ce qui serait
extrêmement coûteux, et la plupart
du temps techniquement impossi-
ble. Mieux vaut alors solliciter des
moyens de production distants et
bon marché, y compris à l’étranger!
En décorrélant ainsi la géographie
de la consommation et celle de la
production d’électricité, le réseau
de transport d’électricité permet
d’atteindre un optimum économique
et limite le besoin en investissements.
Le réseau au service de la
sécurité d’approvisionnement
En Provence-Alpes-Côte-d’Azur, par
exemple, le réseau en vient même à
jouer le rôle de « filet de sécurité » :
située en marge des grands bassins
de production d’électricité que sont
la vallée du Rhône et les Alpes, cette
région subit en hiver de fortes con-
sommations. Au lieu de construire
des centrales de production dont
l’utilité se limiterait sur une petite
période de l’année, la région s’appuie
sur le réseau: à charge pour celui-ci
d’acheminer toute l’électricité dont
elle a besoin, produite ailleurs, en
France et en Europe.
À l’écoute de la population
RTE a pris l’engagement de ne pas
augmenter le nombre de kilomètres
de lignes aériennes en France. Ainsi,
l’aménagement de la nouvelle ligne
Cotentin-Maine, longue de 163 km,
s’est accompagné de la suppression
et la mise en souterrain de 163 autres
kilomètres de lignes aériennes
ailleurs. À l’heure où les territoires
revendiquent une plus grande maî-
trise de leur environnement, la né-
cessité d’adapter le réseau s’ac-
compagne d’un dialogue et d’une
transparence renforcés. Publications
de données et d’analyses, développe-
ment constant sur la concertation
autour des projets, association des
acteurs concernés à la conception
de nouveaux services et outils, RTE,
monopole par nature, fait de la trans-
parence le moteur de sa performance.
ENTRETENIR ET ADAPTER
LE RÉSEAU
AGENCE HDA