. A2 LA PRESSE MONTRÉAL DIMANCHE 16 AVRIL 2006 lllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllll L’ÉGLISE REVISITÉE VÉRITÉS OU BALIVERNES? REGAIN D’INTÉRÊT POUR MATHIEU PERREAULT Grâce au célèbre livre Da Vinci Code, les études théologiques sur Marie-Madeleine connaissent une nouvelle popularité depuis quelques années. La disciple de Jésus joue un rôle central dans le roman, dont la version cinématographique sortira en mai. Selon l’auteur Dan Brown, l’Église a tenté de cacher qu’elle a été l’épouse du Christ et qu’ils ont eu un enfant ensemble. Les thèses les plus radicales considèrent que Marie-Madeleine a été la source d’une guerre des sexes au sein de l’Église du début du IIe siècle. Ce conflit aurait été gagné par les partisans de la prééminence des hommes, ce qui expliquerait que les femmes ne peuvent toujours pas devenir prêtres catholiques, évêques ou pape. Cette thèse a été proposée en 2004 par une professeure de religion de Harvard, Karen King. Dans son livre The Gospel of Mary of Magdala, Mme King affirme que deux documents fondamentaux de cette guerre des sexes ont été publiés vers 125. L’évangile selon Marie-Madeleine proposait l’égalité des sexes, alors que la lettre de Paul à Timothée suggérait que les femmes gardent le silence dans l’Église. L’évangile selon Marie-Madeleine a été retrouvé à la fin du XIXe siècle en Égypte. Écrit en copte au IIe ou au IIIe siècle, il serait une traduction d’un docu- ment grec plus ancien, selon M me King. Un peu comme l’évangile selon Judas, dévoilé la semaine dernière. Rome, le centre de l’Église Ce document n’a pas été écrit par Marie-Madeleine, selon une trentaine de récits de la vie de Jésus qui n’ont pas été approuvés par le concile de Nicée, en 325. Seuls les quatre évangiles canoniques, écrits entre 65 et 100, ont été retenus par le concile. Les évangiles apocryphes ont été écrits plus tard. « L’évangile selon Marie-Madeleine montre que, dans l’Église primitive, les femmes avaient un rôle plus grand qu’aujourd’hui. On peut penser que l’exclusion des femmes a commencé avec la hiérarchisation de l’Église, aux II e et IIIe siècles. » Pierre Létourneau, professeur de théologie à l’Université de Montréal. « On adopte son point de vue », explique-t-il. M. Létourneau est spécialiste des « évangiles apocryphes », La thèse de Mme King étire la datation possible de l’évangile selon Marie-Madeleine, selon M. Létourneau. « Je crois qu’il a été écrit 100 ans après la lettre de Paul à Timothée. Mais l’évangile selon Marie-Madeleine montre que, dans l’Église primitive, les femmes avaient un rôle plus grand qu’aujourd’hui. On peut penser que l’exclusion des femmes a commencé avec la hiérarchisation de l’Église, aux IIe et IIIe siècles. Cette hiérarchisation a fait de Rome le centre de l’Église. Le modèle politique de l’Empire romain, dans lequel seuls les hommes jouaient un rôle, a été adopté. » Il est aussi possible, selon M. Létourneau, que l’égalité entre hommes et femmes au début du christianisme ait été une manière de se distinguer du judaïsme, où les rites étaient célébrés par des hommes. « Dans les religions gréco-romaines, les femmes jouaient un rôle important », note-t-il. lllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllll L’Église américaine dénonce les «erreurs» du Code Da Vinci MATHIEU PERREAULT Le mois dernier, la Conférence des évêques catholiques américains a lancé une grande offensive contre le Code Da Vinci de Dan Brown, dont la version cinématographique sortira en mai. Le site jesusdecoded.com énumère les erreurs de M. Brown, selon une perspective catholique. Voici quelques-uns des points retenus : > Le livre n’est pas blasphématoire. Il s’agit simplement d’opinions partagées par beaucoup de non-chrétiens qui ne croient pas que Jésus est le fils de Dieu. > Rien ne permet de penser que, mis à part certaines sectes minoritaires, le christianisme primitif vouait un culte à une divinité féminine. > Jésus n’était probablement pas marié et n’a probablement pas eu d’enfants, parce que cela aurait été mentionné dans le Nouveau Testament. Sa femme serait probablement allée le voir sur la croix. > L’Opus Dei n’est pas une organisation criminelle et ne compte pas de moines dans ses rangs ; ses rituels de mortification ne causent pas de blessures sanglantes. > Le Prieuré de Sion est un organisme antisémite créé dans les années 50 en France, qui a fabriqué de faux documents. La fraude a été dévoilée dans les années 70. > L’Église catholique estime que la sexualité est beaucoup plus importante et sacrée que le rite de fertilité décrit dans le roman. > Il n’y a pas de femme dans le tableau La Dernière Cène de Léonard de Vinci. Les artistes de la Renaissance donnaient souvent aux hommes des traits efféminés, sans qu’il s’agisse de professions de foi homosexuelles cachées. > Le Concile de Nicée, en 325, n’avait pas pour objectif de déterminer si Jésus était Dieu ; cela était accepté depuis le début du christianisme. Il s’agissait plutôt de comprendre comment Jésus pouvait être Dieu alors qu’il n’y avait qu’un seul Dieu. PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE © L’adaptation cinématographique du film tiré du livre de Dan Brown, Da Vinci Code, a été tournée à Paris, notamment aux Invalides. L’Opus Dei interpelle les producteurs du film ASSOCIATED PRESS ROME — L’Opus Dei, organisation catholique conservatrice proche du Vatican, a fait savoir hier à la compagnie Sony que la diffusion d’un message de démenti au générique du film Da Vinci Code serait un signe de respect envers Jésus et l’Église catholique. « Des médias ont écrit que Sony examinait la possibilité de diffuser avant le film un message expliquant qu’il s’agit d’une fiction et que toute similitude avec des faits réels ne serait que pure coïncidence », a déclaré l’Opus Dei sur son site Internet. L’organisation catholique a aussi précisé qu’elle avait adressé un courrier en ce sens au siège de Sony Pictures Entertainment au Japon. L’adaptation cinématographique du best-seller de Dan Brown, avec Tom Hanks et Audrey Tautou, est attendue le 19 mai dans les salles. Réalisé par l’Américain Ron Howard, le film fera l’ouverture du 59e Festival de Cannes le 17 mai prochain. Le Da Vinci Code soutient l’hypothèse que Jésus aurait épousé Marie-Madeleine et qu’ils auraient eu une descendance. L’Opus Dei y est dépeinte comme une secte assoiffée de pouvoir qui n’hésite pas à recourir au meur- tre, notamment pour dissimuler la descendance du Christ. Sony Pictures Entertainment avait assuré en février que le film n’avait rien de religieux et n’entendait critiquer aucun groupe, qu’il soit religieux ou pas. L’Opus Dei avait alors déclaré qu’elle n’avait pas l’intention d’appeler au boycottage du film, mais avait espéré que les « références qui blesseraient les catholiques » seraient coupées au montage. Vendredi, à l’occasion du Vendredi saint, le père Raniero Cantalamessa a dénoncé dans son homélie depuis la basilique Saint-Pierre de Rome ceux qui font leur profit en reniant l’enseignement de l’Église.