PAGE 21. Indices | | Janvier 2016 | Produits financiers Emprunts à haut rendement Rémunération élevée du risque Ces emprunts n’ont enregistré une performance négative qu’à quatre reprises durant les 29 dernières années. Est-ce bon signe pour 2016? S Peter Jeggli Senior Portfolio Manager Fisch Asset Mangement Les taux de défaillance aux Etats-Unis sont de 4% dans le secteur de l’énergie et de 10% dans les matières premières. aviez-vous qu’en termes absolus, les emprunts high yield ont réalisé un rendement positif durant 25 des 29 dernières années? En outre, les quelques années négatives (1990, 2000, 2002, 2008) ont toujours été suivies d’une nette reprise. Cette année, les emprunts high yield ont à nouveau connu une évolution globalement très hétérogène: alors que les emprunts européens progressaient de 0,8% en 2015, les titres des Etats-Unis enregistraient un résultat négatif de 5,1%. Au total, la performance du marché des emprunts high yield a été de moins 2,5%. Par comparaison avec le début de l’année, l’évaluation est devenue aujourd’hui sensiblement plus attrayante, car de très nombreuses nouvelles négatives ont déjà été prises en compte. Ainsi, les emprunts high yield peuvent non seulement diversifier les portefeuilles obligataires, mais aussi remplacer utilement les actions. En effet, outre leur rendement similaire à celui des actions, cette catégorie de placements a présenté ces 30 dernières années une volatilité inférieure et des drawdowns moins importants. Après la forte reprise du marché des emprunts high yield en octobre, dans le droit fil de la baisse des primes de risque, ces dernières ont à nouveau progressé en novembre et ont été les principaux moteurs des légers reculs sur le plan de la performance. En 2015, les primes de risque dans le monde se sont creusées entre 150 et 250 points de base au vu de la légère augmentation des taux de défaillance, pour atteindre leur niveau le plus élevé depuis automne 2011. Les rendements à l’échéance de l’indice BofA Global High Yield Index dépassent désormais les 8%. Les investisseurs axés sur le marché américain des emprunts high yield sont invités à tenir compte du fait que les taux de défaillance sont de 4% dans l’énergie et de 10% dans le segment des matières premières. Ces chiffres ne sont pas négligeables, puisque les émetteurs du domaine de l’énergie représentent désormais près d’un huitième de l’univers high yield américain. Il ne sert pas à grand-chose pour un investisseur de choisir la meilleure région pour investir (en 2015, il s’agissait de l’Europe) s’il mise ensuite, lors de la sélection des titres, sur des entreprises menacées d’insolvabilité (par exemple Abengoa ou Phones 4u). C’est pourquoi tout investissement réussi nécessite un processus systématique assorti d’une vision allant clairement de haut en bas et d’une approche de bas en haut rigoureuse. Ce n’est qu’ainsi qu’il est possible de réduire autant que possible les défaillances dans le portefeuille. Pour la sélection des titres, de nombreux investisseurs s’appuient sur les notations d’agences de renom, telles que Standard & Poor’s, Fitch ou Moody’s. Mais des possibilités de placement intéressantes échappent aux investisseurs du fait que dans ces agences, les placements individuels ne peuvent jamais avoir une notation supérieure à celle du pays considéré. Une recherche autonome sur le crédit peut contribuer à corriger le tir. Ainsi, nous tablons sur les évaluations de l’entreprise d’analyse du crédit Independent Credit View (I-CV), qui a mis au point un modèle performant de risque de crédit. Globalement, le marché high yield présente un comportement très hétérogène, mais qui n’exclut pas que des opportunités de rendement se présentent dans des régions et des secteurs spécifiques, sur la base de sous-évaluations potentielles. En outre, l’expérience a montré que dans le domaine high yield, une gestion active du portefeuille porte ses fruits. Les managers qui ont du succès se caractérisent non seulement par une bonne sélection des régions et des secteurs, mais aussi par le fait qu’ils évitent les défaillances et les réductions de notation importantes. Dans ce contexte, l’adjonction progressive en particulier d’emprunts high yield diversifiés à l’échelle mondiale peut offrir des opportunités intéressantes par rapport à des portefeuilles traditionnels d’actions ou d’obligations. Les obligations high yield se situent à un niveau d’acquisition attrayant Elles ont eu une performance négative durant quatre mois consécutifs. Ceci n’était arrivé qu’une fois dans l’histoire. L Christina Böck CIO Switzerland, Head Solution Strategists Central Europe AXA Investment Management es derniers mois ont été très difficiles pour le marché américain des obligations high yield, et c’est seulement depuis début octobre que la situation s’est stabilisée. Auparavant, et en particulier entre juin et septembre, les obligations à haut rendement, c’est-à-dire les obligations avec un rating inférieur à investment grade, ont connu une performance négative durant quatre mois consécutifs – ce qui n’était arrivé qu’une fois dans l’histoire, pendant le krach obligataire de 1994. Le troisième trimestre 2015 a également été seulement le quatrième trimestre au cours de l’histoire à connaître une performance négative. Cette vive correction a commencé avec l’affaiblissement des marchés des matières premières. Ces derniers ont été à nouveau durement touchés cet été, suivant la baisse déjà très importante des prix du quatrième trimestre 2014. Par exemple, le prix du pétrole brut a chuté de nouveau de 25% entre juin et août 2015. Et comme 13% des obligations high yield américaines sont émi- les spreads de crédit high yield ont tendance à se resserrer pendant les premiers trimestres de hausse de taux ses par des entreprises du secteur énergétique, c’est tout le segment qui a souffert en voyant ses spreads s’élargir par un effet de sympathie. Cet effet négatif a été renforcé par des craintes plus générales sur la continuation de la croissance aux Etats-Unis car plusieurs indicateurs économiques se sont inscrits en baisse durant quelques mois. Compte tenu de cette forte correction du marché obligataire de crédit, notre société a entrepris une étude quantitative pour juger la valorisation du marché obligataire après la correction dans un contexte historique. Ainsi, les spreads de crédit des obligations ont été mis en relation avec le taux de défaut qui a été réalisé durant les 12 mois suivants. Première observation: depuis le début des années 2000, les spreads ont, aux États-Unis, toujours surcompensé le taux de défaut. Entre 2005 et 2015, les pertes pour défaut ont représenté un tiers du spread de crédit – le reste du spread constituant une compensation d’autres risques, comme par exemple le manque de liquidité, une volatilité élevée, etc. En Europe, le marché des obligations à haut rendement n’est pas encore arrivé à la même maturité qu’aux ÉtatsUnis, ce qui entraîne parfois de réels problèmes d’efficience: en 2008, les défaillances ont été nombreuses et couteuses et le marché ne l’avait pas entièrement prévu, les spreads n’ayant pas été suffisamment élevés pour compenser ces pertes. En plus, la part des défaillances dans le spread varie plus fortement en Europe, ce qui souligne sa faible efficience. Ces anomalies sont dues à un nombre d’intervenants bien moins important se reflétant dans une moindre profondeur et liquidité du marché. Aujourd’hui, après quatre mois de pertes impor- tantes et un rétablissement hésitant, les spreads de crédit sont toujours assez élevés. En d’autres termes, les défauts futurs anticipés par les spreads de crédit actuels sont importants en comparaison historique, malgré le fait que les spreads ont presque doublé depuis le début de l’année. Le marché prévoit donc une croissance forte des défauts ce qui ne correspond nullement à la prévision de notre établissement, même dans le secteur énergétique. Nous estimons que la situation fondamentale est toujours très favorable aux entreprises. La faible sensibilité relative des obligations à haut rendement contre les hausses des taux d’intérêt constitue un autre point positif pour ce marché en ce moment. En effet, les spreads de crédit d’entreprise représentent une sécurité vis-à-vis de la perte de valeur dans le cas d’une augmentation des taux d’intérêt. Pour nous rendre compte de l’effet d’une hausse de taux sur la performance des obligations high yield, observons les quatre dernières années calendaires pendant lesquelles les taux d’intérêt à deux ans ont augmenté aux États-Unis: pour ces quatre observations, la performance absolue était positive. La raison réside dans le fait que les spreads de crédit high yield ont tendance à se resserrer pendant les premiers trimestres de hausse de taux car c’est une période très favorable aux conditions économiques des entreprises durant laquelle leurs fondamentaux s’améliorent normalement. Ainsi, les obligations d’entreprise à haut rendement représentent aujourd’hui une bonne occasion d’achat puisque la hausse des spreads de crédit, c’est-à-dire de leur prime de risque, s’avère à l’heure actuelle exagérée et ouvre des opportunités, et ce encore plus aux États-Unis qu’en Europe.