Structures alg´
ebriques indispensables et arithm´
etique
Emmanuel Amiot
octobre 2016
1 Groupes
1.1 Rappels
On rappelle la d´
efinition g´
en´
erale d’un groupe :
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
D´
EFINITION 1. Gest un groupe si et seulement si
Gest muni d’une loi de composition interne , i.e. telle que
x, y G, x yG
cette loi est associative :x, y, z G, (xy)z=x(yz)
Il y a un ´
el´
ement neutre e, tel que xG, x e=ex=x.
Tout ´
el´
ement de Gposs`
ede un inverse, i.e.
xG, yG, x y=yx=e
Quand on a pour tout couple (x, y)G2, x y=yxon dit que la loi est commutative
et Gest un groupe ab´
elien (ou commutatif).
Remarques :
1. la loi peut ˆ
etre not´
ee de toutes sortes de fac¸ons : +,,×,..... Ou mˆ
eme ne pas ˆ
etre
not´
ee du tout. Souvent on commet l’abus de parler de l’ensemble sans pr´
eciser la loi
(ex : le groupe Z...). Ce n’est pas bien. La seule convention est qu’une loi not´
ee
+ est forc´
ement commutative. Pour une loi + on parle d’oppos´
e au lieu d’inverse.
2. On v´
erifie (faites-le !) que l’´
el´
ement neutre est unique. S’il y a ´
el´
ement neutre `
a
gauche et ´
el´
ement neutre `
a droite, alors ils sont identiques.
3. De mˆ
eme il ne peut pas y avoir deux inverses distincts. L’inverse `
a gauche = l’inverse
`
a droite.
4. Dans un groupe on a le droit de simplifier :a.x =a.y x=y.
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
EXERCICE 1. Donner des exemples de lois internes non associatives.
Donner des exemples de groupes non ab´
eliens.
* Trouver un cas o `
u il existe un inverse `
a droite mais pas `
a gauche.
(N,+) est-il un groupe ? pourquoi ?
* recherche : se documenter sur la notion de mono¨
ıde, en pr´
esenter un ou des
exemples int´
eressants.
Exemples : Z,Q,R,C, tout espace vectoriel E, sont des groupes pour la loi usuelle +.
R,R
+,Csont des groupes pour ×ainsi que le cercle unit´
eUou les racines nes de l’unit´
e
Un. Le groupe des matrices inversibles G`n(K)est non commutatif.
Les ´
el´
ements inversibles d’un anneau forment un groupe multiplicatif.
Les bijections (dites aussi permutations) SXd’un ensemble Xquelconque forment un
groupe pour la loi de composition des applications . Ceci comprend le cas tr`
es g´
en´
eral
des transformations qui conservent quelque chose (par exemple, les isom´
etries de l’es-
pace qui pr´
eservent un cube, les changements de variables qui pr´
eservent une ´
equation
diff´
erentielle, etc. . .).
NB : la loi est toujours associative.
o
o
EXERCICE 2. Si Xan´
el´
ements, quel est le cardinal de SX? Ce groupe peut-il ˆ
etre com-
mutatif ?
Un proc´
ed´
e pour construire des groupes plus grands :
o
o
o
o
o
o
D´
EFINITION 2. Le produit de deux groupes (G, .)et (G0,×)est l’ensemble G×G0muni de
la loi produit :
(g, g0)(h, h0)=(g.g0, h ×h0)
Ceci se g´
en´
eralise bien s ˆ
ur `
a un produit de ngroupes. Exemple : l’ensemble des points du
plan `
a coordonn´
ees enti`
eres peut ˆ
etre consid´
er´
e comme groupe produit Z×Z.
Le groupe multiplicatif produit R
+×Utraduit la d´
ecomposition polaire d’un nombre
complexe (non nul), avec la loi
(r, e)×(r0, e 0)=(rr0, ei(θ+θ0))
re×r0e0=rr0ei(θ+θ0)
1.2 Sous-groupes
Rien n’empˆ
eche une partie d’un groupe de profiter elle-aussi d’une structure de groupe.
En particulier, l’associativit´
e est une propri´
et´
e h´
er´
editaire (si elle est vraie partout, elle est
vraie aussi plus localement).
o
o
o
o
o
o
o
o
o
D´
EFINITION 3. Une partie HGest un sous-groupe ssi Havec la restriction de la loi de
Gest aussi un groupe. Pour cela il faut et il suffit que Hsoit non vide ( ! ! !) et
x, y H, x.y1H
D´
emonstration. V´
erifiez que Hcontient le neutre, est stable par .et par passage `
a l’inverse.
Exemple : pourquoi les irrationnels de Rne forment-ils pas un sous-groupe ?
Exemple de sous-groupe : l’ensemble des multiples (entiers) de 3 est un sous-groupe de
(Z,+).
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
o
EXERCICE 3. On consid`
ere le groupe Fdes isom´
etries de R3qui conservent un ballon de
football, que les g´
eom`
etres appellent icosidod´
ecah`
edre – le ballon, pas le sport (i.e.
les isom´
etries envoient une face pentagonale sur une face pentagonale, un hexagone
sur un hexagone, un sommet sur un sommet, et le ballon dans la lucarne). Montrer
sans aucun calcul que le sous-ensemble des rotations RFest un sous-groupe.
** Montrer qu’il a 120 ´
el´
ements (avec des calculs).
2
PROPOSITION.Toute intersection de sous-groupes de Gest un sous-groupe de G.
En revanche une r´
eunion de sous-groupes n’a aucune raison d’en ˆ
etre un (la r´
eunion de
deux droites n’est pas un plan, mmmm ?)
TH´
EOR `
EME 1. Les sous-groupes de (Z,+) sont les (nZ,+) (pour tous les nN).
Ce th´
eor`
eme est essentiel.
D´
emonstration. Soit Gun tel sous-groupe. Mettant `
a part la solution G={0}il existe dans
Gau moins un ´
el´
ement non nul, et donc un ´
el´
ement x>0. La partie G[1, +[est non
vide, minor´
ee et constitu´
ee d’entiers : elle poss`
ede un plus petit ´
el´
ement (cela peut se
prouver par un algorithme : tant que n /G, n =n+1. . .) qu’on appelle n.
Nous allons prouver que G=nZ. Pour cela, si xGon forme la division euclidienne de x
par n:
x=n×q+ro`
u06r<n
´
Etant donn´
e que n×q=n+n+. . . n G(OK, si qest n´
egatif on consid`
ere l’oppos´
e, q×n)
et que xG, il vient que r=xn q Gpar stabilit´
e du sous-groupe G.
Or par construction, il n’y a pas d’´
el´
ement de Gqui soit > 0 et strictement inf´
erieur `
an.
La seule possibilit´
e est donc r=0, i.e. xest multiple de nou encore xnZ.
On a montr´
e que GnZ, mais si nGalors on a aussi n+n=2n, 2n +n=3n . . . ainsi
que leurs oppos´
es et donc nZG, d’o `
u l’´
egalit´
e.
Enfin et r´
eciproquement, tout nZest bien un sous-groupe de (Z,+) (stabilit´
e des multiples
de npar soustraction).
La stabilit´
e par intersection de cette notion permet de donner la d´
efinition suivante, sur
laquelle nous reviendrons surtout dans le cas d’un singleton :
o
o
o
D´
EFINITION 4. Le sous-groupe de Gengendr´
e par une partie AGest le plus petit
sous-groupe contenant A, i.e. l’intersection des sous-groupes qui contiennent A.
(`
A votre avis, cela a-t-il encore un sens si A=? Les opinions diff`
erent. . .)
On dira qu’une partie Aest g´
en´
eratrice si elle engendre le groupe tout-entier.
Exemples :
G= (R,+). Le sous-groupe engendr´
e par le singleton 1est (Z,+).
Gest l’ensemble des isom´
etries affines de R2. L’ensemble Ades rotations affines
planes (i.e. avec des centres n’importe o `
u dans le plan) n’est pas un groupe, mais il
le devient si on y rajoute le(sous-groupe de)s translations : gr(A) = A∪ T .
G=S1, le cercle unit´
e (groupe multiplicatif). Le groupe engendr´
e par A={e2iπ/n}est
le groupe Undes racines ni`
emes de l’unit´
e. notez qu’il a d’autres g´
en´
erateurs : par
exemple, e7iπ/6 engendre aussi bien U12 que eiπ/6.
G= (R,+). Le groupe engendr´
e par les inverses d’entiers A={1
n|nN}est Q.
o
o
o
EXERCICE 4. Montrer par r´
ecurrence sur nque Snest engendr´
e par les transpositions,
i.e. les permutations τi,j qui ´
echangent seulement deux ´
el´
ements ij.
1.3 Morphismes
Cette notion est tr`
es importante dans tous les domaines des math´
ematiques : il s’agit
d’applications qui pr´
eservent la structure ambiante.
3
o
o
o
o
o
o
o
o
o
D´
EFINITION 5. Un morphisme de groupes est une application u:GG0o`
uG, G0sont des
groupes (munis des lois * et . disons) telle que
x, y G u(xy) = u(x).u(y)
o
o
o
EXERCICE 5. V´
erifier que l’image de l’´
el´
ement neutre ede Gest forc´
ement l’´
el´
ement neutre
e0de G0et que l’image d’un inverse est l’inverse de l’image : u(x1) = u(x)1.
Exemple : x742x est un morphisme de Zdans lui-mˆ
eme.
z7|z|est un morphisme de (C,×)dans (R
+,×).
exp est un morphisme de (R,+) dans (R
+,×). Et aussi de (C,+) dans (C,×). Mais pas de
Mn(R)dans G`n(R).
Det est un morphisme du groupe des matrices inversibles G`n(K)dans (K,×).
La signature est un morphisme du groupe des permutations (Sn,)dans ({1, 1},×).
o
o
o
D´
EFINITION 6. Le noyau d’un morphisme u:G7G0est Ker u={xG|u(x) = e0}.
Son image est Im u={yG0|xG, u(x) = y}.
PROPOSITION.Image et noyau sont des sous-groupes (de G0, G respectivement).
Exemple : vous souvenez-vous du groupe sp´
ecial orthogonal SO(E)(ses ´
el´
ements sont les
rotations de l’espace euclidien E) ? Sachant que O(E)est un groupe (les isom´
etries sont les
applications qui conservent la distance, donc elles forment un groupe), et que Det est un
morphisme de O(E)dans R(en fait dans {1, 1}), SO(E)qui est le noyau de ce morphisme
est automatiquement un sous-groupe de O(E).
Il est ´
el´
egant de montrer qu’un ensemble a telle ou telle structure en arguant de ce qu’il
est l’image (ou le noyau) d’un autre espace de structure connue.
EXERCICE 6. Noyau du morphisme susmentionn´
ez7|z|?
PROPOSITION.Un morphisme uest injectif ssi Ker u={e}.
Ceci est imm´
ediat `
a d´
emontrer mais tr`
es important en pratique car l’injectivit´
e se r´
esume
`
a r´
esoudre l’´
equation u(x) = e0(et non u(x) = u(x0)). Attention, cela doit se faire quand, et
seulement quand,uest connu pour ˆ
etre un morphisme ! (on ne cherche pas le “noyau”
de l’application x7x+3!)
o
o
o
o
o
EXERCICE 7. * Les noyaux ont une propri´
et´
e additionnelle, prouvez-l `
a : si H=Ker uG
alors pour tout ´
el´
ement gGle sous-groupe conjugu´
e1H0=gHg1={ghg1|hH}
co¨
ıncide avec H.
o
o
o
D´
EFINITION 7. Un isomorphisme est un morphisme qui est `
a la fois injectif et bijectif.
Un automorphisme est un isomophisme d’un groupe Gdans lui-mˆ
eme.
Cela signifie que tout ´
el´
ement de G0poss`
ede un et un seul ant´
ec´
edent xG|u(x) = x0.
Cela signifie surtout que la loi de Gest le parfait miroir de celle de G0: toute relation x.y =z
dans Gcorrespond `
a une unique relation x0×y0=z0dans G0. Connaˆ
ıtre un groupe, c’est
connaˆ
ıtre tous ses groupes isomorphes.
o
o
o
PROPOSITION.L’application r´
eciproque d’un isomorphisme de Gdans G0est un isomor-
phisme de G0dans G.
Exemple : le logarithme et exp sont des isomorphismes r´
eciproques. Ce qui permet de
4
choisir le sens de la flˆ
eche qui nous va le mieux ! Plus g´
en´
eralement on a
o
o
o
EXERCICE 8. La relation ˆ
etre isomorphe `
aest une relation d’´
equivalence dans l’en-
semble de tous les groupes.
EXERCICE 9. Les groupes nZ(pour nN) sont tous isomorphes.
o
o
o
EXERCICE 10. On note el’´
el´
ement g´
en´
erique de U. Fabriquer un isomorphisme de (U,×)
dans (SO2(R),)(complexe unitaire 7rotation).
o
o
o
EXERCICE 11. Montrer que le groupe produit G×G0admet un sous-groupe isomorphe `
a
G(resp. `
aG0).
o
o
o
EXERCICE 12. Montrer que le groupe produit R
+×Uest isomorphe `
aC(je ne pr´
ecise pas
les lois, expr`
es).
o
o
o
EXERCICE 13. * (th`
eme d’´
etude) Les groupes additifs Z,Q,(plus dur. . .) Rne sont pas
isomorphes.
1.4 Le groupe Z/nZ
On reviendra sur cet ensemble en tant qu’anneau ult´
erieurement (pour les gouverner tous
et dans les t´
en`
ebres les lier).
1.4.1 L’ensemble Z/nZ
o
o
o
o
o
o
o
o
o
D´
EFINITION 8. ab(mod n)aest congru `
abmodulo nabnZ(c’est `
a
dire que ndivise |ab|) ;
La relation (mod n)est une relation d’´
equivalence, ses classes constituent l’en-
semble Z/nZ.
Remarquons qu’une telle classe est une progression arithm´
etique de raison n: si par
exemple n=12, a =3, ˙a={. . . , 21, 9, 3, 15, 27, . . .}. Un tel ensemble est invariant par trans-
lations de n(ou multiples !) Un exemple courant est celui des heures sur une montre. On
a aussi les notes de la gamme (Si b´
emol d´
esigne une classe d’´
equivalence modulo une
octave, i.e. douze demi-tons).
Nous allons d´
efinir une loi de composition interne sur ces classes d’´
equivalence. Cela
paraˆ
ıt terriblement abstrait mais en fait cela revient `
a faire des calculs comme si n
valait 0 , ou encore en calculant de mani`
ere circulaire.
1.4.2 Structure de groupe de Z/nZ
o
o
o
o
o
o
o
TH´
EOR `
EME 2. L’ensemble Z/nZa exactement n´
el´
ements. C’est un groupe additif avec la
loi d´
efinie par
˙a+˙
b=˙
z}|{
a+b
On notera aussi bien ˙a+˙
b=˙cque a+bc(mod n).
Ce qu’il n’est pas facile de comprendre est que cette d´
efinition a un sens ! Encore moins
facile est de comprendre que la question se pose.
Concr`
etement : essayez d’ajouter 3(mod 10)`
a5(mod 12), c’est `
a dire la s´
equence infinie
··· 17, 7, 3, 13, 23 . . . 2013 . . . `
a l’autre s´
equence . . . 19, 7, 5, 17, 29 . . . 1205 . . . . C¸ a ne fait
rien de lisible ! Mais si le modulo est le mˆ
eme alors tout va bien (faites-le avec n=10). Plus
g´
en´
eralement :
5
1 / 19 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !