8 AVRIL 2005 C.02.0419.N/1
Cour de cassation de Belgique
Arrêt
C.02.0419.N
ETAT BELGE, ministre des Finances,
Me Ignace Claeys Bouuaert, avocat à la Cour de cassation,
contre
SANOMA MAGAZINES BELGIUM, société anonyme,
Me Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation.
I. La décision attaquée
Le pourvoi est dirigé contre l’arrêt rendu le 15 mars 1999 par la cour
d’appel d’Anvers.
8 AVRIL 2005 C.02.0419.N/2
II. La procédure devant la Cour
Le conseiller Ghislain Londers a fait rapport.
L’avocat général Dirk Thijs a conclu.
III. Les faits
Les faits sont décrits de la manière suivante dans la requête :
En 1990 et 1991, la défenderesse a payé diverses factures relatives à
l’organisation de festivités auxquelles des clients (acheteurs ou futurs acheteurs
de ses publications) étaient invités. Il est précisé dans l’arrêt qu’étaient inclus la
fourniture de nourriture et de boissons ainsi que le divertissement et le
délassement des invités.
La question est savoir si ces dépenses doivent être qualifiées de « frais de
réception » au sens de l’article 45, § 3, 4°, du Code de la TVA, auquel cas la
TVA ayant grevé ces frais ne peut être déduite, par l’assujetti concerné, de la
TVA dont il est redevable au Trésor.
La défenderesse soutenait que les dépenses en question devaient être
qualifiées intégralement de frais de publicité et que la TVA y afférente ne
pouvait être considérée comme « des frais de réception », mais était soumise à la
règle générale de la déductibilité.
A la demande de l’administration, la défenderesse a payé sous réserve la
TVA qu’elle avait déduite dans sa déclaration pour en réclamer ensuite le
remboursement.
Le premier juge a accueilli cette demande et la cour d’appel a confirmé
cette décision par l’arrêt attaqué.
IV. Le moyen de cassation
Le demandeur présente un moyen dans sa requête.
8 AVRIL 2005 C.02.0419.N/3
Dispositions légales violées
- article 45, § 1er, 1°, et § 3, 4°, de la loi du 3 juillet 1969 créant le Code
de la taxe sur la valeur ajoutée, dans sa version applicable pour les années 1990
et 1991, soit avant l’entrée en vigueur des modifications apportées par la loi du
28 décembre 1992 ;
- et, pour autant que de besoin, article 16, point 6, de la Sixième
Directive du Conseil des Ministres des Communautés européennes du 17 mai
1977, en matière d’harmonisation des législations des Etats membres relatives
aux taxes sur le chiffre d’affaires Système commun de taxe sur la valeur
ajoutée : assiette uniforme (ci-après : Sixième Directive).
Décisions et motifs critiqués
La cour d’appel d’Anvers, statuant sur l’appel du demandeur, déclare cet
appel non fondé et confirme la décision du premier juge pour les motifs
suivants :
« Le litige entre les parties porte sur la portée exacte de la notion de
‘frais de réception’.
Le fisc définit la notion de ‘frais de réception’ comme étant les frais
exposés par une entreprise en matière de relations publiques pour l’accueil, la
réception et le divertissement ou le délassement de visiteurs étrangers à
l’entreprise, notamment les fournisseurs et les clients. La société anonyme
Mediaxis défend la thèse que les dépenses faites à des fins publicitaires ont un
caractère professionnel et doivent être exclues de la notion de ‘frais de
réception’.
L’article 45, § 1er, du Code de la TVA porte le principe que tout assujetti
peut déduire de la taxe dont il est redevable, les taxes ayant grevé les biens et les
services qui lui ont été fournis. L’article 45, § 3, 4°, qui interdit la déduction de
la TVA en matière de frais de réception constitue une exception à ce principe et
il y a donc lieu de l’interpréter de manière restrictive.
8 AVRIL 2005 C.02.0419.N/4
A défaut de définition légale de cette notion, cette disposition qui limite le
droit de déduction doit être interprétée conformément à la Sixième Directive
européenne. L’article 17.6 de cette directive dispose notamment que les
dépenses n’ayant pas un caractère strictement professionnel telles que les
dépenses de luxe, de divertissement ou de représentation, sont exclues du droit à
déduction.
Eu égard à la distinction faite dans cette directive entre les dépenses à
caractère professionnel et les dépenses de divertissement et de représentation, le
champ d’application de la notion de ‘frais de réception’ doit être limité aux frais
exposés au profit de clients ou d’invités, sans que soit poursuivi d’autre
avantage que la création d’une atmosphère globalement favorable à
l’entreprise.
Si les frais visent au contraire la vente directe ou sont exposés dans le but
de faire de la publicité pour certains produits, il s’agit de publicité. Il s’agit
alors de dépenses ayant un caractère strictement professionnel et non de
dépenses de délassement ou de représentation. Le fait que cette publicité soit
faite dans des circonstances offrant du délassement et de l’agrément au
bénéficiaire de la dépense et que cette dépense se situe dans le cadre de l’usage
final, n’exclut pas le caractère strictement professionnel de la dépense.
La cour constate que cette interprétation est aussi celle du fisc, ce qui
ressort :
1.des décisions administratives des 7 et 10 juillet 1989 n° E.T. 63.540,
qui ne considèrent pas comme des frais de réception mais comme des frais de
publicité, les dépenses exposées par les entreprises relativement à l’utilisation de
business-seats et de loges pour autant que les entreprises visées fassent, au
moyen de ces business-seats et de ces loges, de la publicité sous une forme ou
l’autre (Revue de la TVA, n° 88/11/89, 426) ;
2.de la réponse du ministre des Finances à la question parlementaire
n° 269 posée par Monsieur Destexhe le 20 juin 1997, dont il ressort que le
ministre pose comme condition, pour qu’une dépense soit considérée comme une
prestation de publicité et pas comme frais de réception, que la prestation
implique la transmission d’un message vantant explicitement les qualités d’un
8 AVRIL 2005 C.02.0419.N/5
produit ou d’un service (Questions et Réponses Sénat, 9 septembre 1977, (n°1-
53), p. 2700-2701).
Un examen précis et concret des pièces produites démontre que les
évènements dont l’organisation a été confiée par la société anonyme Mediaxis à
la société anonyme Any Time et qui font l’objet du présent litige, ont
effectivement ce caractère publicitaire concret.
Le lancement de la revue Feeling : le 31 janvier 1991, la société
anonyme Mediaxis a organisé une fête en vue de la promotion de son nouveau
magazine Feeling, dont le premier numéro a paru le 1er février 1991. Il ressort
de la facture de la société anonyme Any Time qu’il s’agissait d’un événement au
cours duquel des artistes de genres différents se sont produits, la nourriture et
les boissons étaient fournies (voir le poste catering) et des parapluies ‘Feeling’
ont été distribués. La vente des numéros d’un nouveau magazine dépend
évidemment de la notoriété de ce magazine auprès des autres médias. Une fête,
organisée pour faire connaître un nouveau magazine, constitue un simple acte
de publicité dans le chef d’un éditeur. Les frais occasionnés par un tel
événement sont des frais de publicité purement professionnels et non des frais de
réception.
Le ‘gouden prosper’ et l’homme et la femme de l’année : il ressort des
pièces produites que l’hebdomadaire Panorama/De Post décerne chaque année
un prix à une personne qui (selon le jury constitué par la rédaction) s’est
distinguée dans le milieu de la musique pop belge (le ‘gouden prosper’), alors
que les lecteurs sont invités à élire chaque année l’homme ou la femme de
l’année. L’élection du gagnant du ‘gouden prosper’ et la consécration des
hommes et des femmes de l’année se déroulent au cours de l’événement organisé
par la société anonyme Mediaxis. Des concerts de musique pop sont organisés
lors de la remise du ‘gouden prosper’.
Il ressort du dossier déposé par la société anonyme Mediaxis que ces
deux élections retiennent particulièrement l’attention, tant dans l’hebdomadaire
lui-même dans lequel des articles sont consacrés à cet événement des semaines
auparavant que dans la presse nationale, qui donne des informations à propos
1 / 10 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !