2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ Efficacité des politiques économiques et croissance : le cas de l’Algérie Boutaleb Kouider1 Introduction : L’efficacité des politiques économique suscite d’amples débats, particulièrement dans les pays du sud ( pays du Tiers Monde ) soumis à des ajustements structurels sous l’égide des institutions internationales.En effet, devant la situation préoccupante qui caractérise un grand nombre de pays en voie de développement dont l’Algérie (chômage de masse, extension de la pauvreté…), on s’interroge toujours sur l’efficacité de telles politiques économiques qui n’ont guère permis comme postulé pourtant, à engager ces économies sur des sentiers de croissance génératrice d’emploi et de valeur ajoutée. C’est à travers le cas de l’Algérie qu’on va tenter d’éclairer cette problématique . Nous allons, dans un premier temps, reprendre, pour l’essentiel, une analyse antérieure (1) ou nous avons tente d’apprécier l’efficacité des politiques économiques poursuivies en Algérie a travers la grille mise au point par l’économiste Hongrois N.Kaldor et connue sous le nom de « carre magique » Nous tenterons par la suite d’apprécier le contenu de la croissance réalisée en Algérie et voir quel a été son impact sur la dynamique de création d’emploi et de valeur ajoutée. 1 Docteur en sciences économiques Faculté des sciences économiques et de gestion Université Abou Bakr Belkaid - Tlemcen (Algérie ) 104 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ 1/ Les objectifs de la politique économique : Définie simplement, la politique économique désigne « l’ensemble des décisions prises par les pouvoirs publics afin d’atteindre grâce à l’utilisation de différents moyens à leur disposition, certains objectifs concernant la situation économique générale »(2). C’est ce qu’exprime TIMBERGEN en affirmant que « la politique économique consiste dans la manipulation délibérée d’un certain nombre de moyens mis en oeuvre pour atteindre certaines fins » (3). C’est ainsi qu’on distingue habituellement objectifs et finalités de la politique économique. - Les finalités sont des motivations fondamentales et généralement qualitatives de la politique économique. Elles deviennent des objectifs lorsqu’elles sont représentées par « des grandeurs susceptibles d’une quantification absolue (c’est à dire cardinale) ou au moins d’une mesure ordinale » (4). On obtient alors généralement trois catégories de variables objectives : 1-Les objectifs économiques purs, tels que le plein emploi et la stabilité des prix pour le court terme, la croissance et la redistribution des revenus pour le moyen long terme. 2-Les objectifs sociaux : éducations, santé,… 3-Les quasi-objectifs : L’équilibre de la balance des paiements, la hausse des taux d’intérêt, … Ces divers objectifs sont combinés de telle sorte que toute la politique économique d’un pays se conçoit désormais à partir du « carré magique » de N. KALDOR (5). Le « carré magique » imaginé par N.KALDOR est une représentation des principaux objectifs de la politique économique et qui sont : 1-La croissance économique (évaluée par le taux de croissance du PIB). L’état cherche à promouvoir une croissance forte et durable considérée comme garante d’une amélioration du bien être. 2-La situation de l’emploi (mesurée par le taux de chômage en pourcentage de la population active). Le rôle de l’état est de favoriser la création d’emploi directement ou indirectement. 3-La stabilité des prix (mesurée par le taux d’inflation en pourcentage). L’état cherche à garantir le pouvoir d’achat des agents économiques en luttant contre l’érosion monétaire liée à l’inflation. 4-L’équilibre des comptes extérieurs (mesuré par le solde de la balance des paiements en % du PIB). L’état cherche à équilibrer au mieux les entrées et les sorties de biens, de revenu et de capitaux avec le reste du monde. La représentation graphique du « carré magique » résume donc la situation économique d’un pays à travers 4 indicateurs traduisant l’état de réalisation des 4 objectifs surindiqués (taux de croissance, taux de chômage, taux d’inflation, solde de la balance des comptes extérieurs). 2/ L’efficacité de la politique économique : 2-1- Les principes du carré magique de N.KALDOR : Une politique économique est jugée efficace si elle parvient à atteindre les 4 objectifs ci-dessus définis tel que synthétisés par N. KALDOR en 1960 à l’aide d’un graphique à 4 dimensions dénommé « carré magique » (6). 105 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ La croissance doit être la plus élevée possible mais elle doit se faire en respectant 3 contraintes d’équilibre : une inflation faible, un chômage réduit au niveau du chômage frictionnel et une balance des paiements courants équilibrée. Cette situation est difficilement réalisable compte tenu des oppositions entre les 4 objectifs. Mais elle est représentative de la meilleure situation économique et sociale possible et doit être prise comme un objectif (idéal ?) à atteindre. Rappelons que N. KALDOR, de tendance keynésienne a énoncé la loi KALDORVERDOORN (en 1966) qui établit une relation entre le taux de croissance de l’économie d’une nation et 3 paramètres fondamentaux de celle-ci. Il en a proposé une représentation graphique (le carré magique) construite sur la base de données quantitative qu’il établit de la manière suivante : - Croissance du PIB : 5% l’an. Taux annuel d’inflation : nul (0%). Taux annuel de chômage : nul (0%). - Solde de la balance des transactions courantes (en % du PIB) : nul ou positif. En fonction du carré, on peut mesurer l’impact des politiques économiques en fonction de l’aire reliant les différents axes entre eux : si la croissance économique est forte et s’accompagne d’une stabilité des prix, d’un taux de chômage faible et d’une solde de la balance des paiements extérieurs positif, alors la surface du carré est importante ce qui exprime une bonne efficacité de la politique économique poursuivie. Taux de croissance 5 4 3 2 1 Solde de la BP Taux d’inflation 0 5 10 15 -2 20 15 10 5 0 Taux de chômage 106 -1 0 1 2 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ A l’extrémité des différentes diagonales du carré magique se trouvent les situations idéales : - Taux de croissance à 6%. Exportation-Importation / PIB à 2%. Taux de chômage à 0%. Taux d’inflations à 0%. La jonction des 4 sommets forme ainsi le carré magique. Plus on s’éloigne des sommets pour se diriger à l’intérieur du carré en suivant le long des axes, moins sont bons les résultats. On obtient ainsi pour les différentes années, des quadrilatères ou des prismes différents situés à l’intérieur du carré et dont la surface plus ou moins grande permet d’observer une situation économique plus ou moins bonne. 2-2-Les prescriptions des institutions financières internationales : Les prescriptions des politiques économiques libérales sont quasi universelles même si elles sont adaptées et modifiées en fonction des circonstances précises prévalant dans chaque pays. Elles se fondent sur l’approche néo-classique du processus de croissance qui postule la condition d’équilibre (interne et externe), l’allocation des ressources par les mécanismes du marché et l’entreprise privée dans des conditions de concurrence et de substitutions des facteurs. La détermination des revenus fondée sur le principe de la productivité marginale qui implique l’élasticité des salaires…(7). Une telle interprétation du processus de croissance définit l’orientation de la politique économique sous-jacente. La politique économique qui devrait être appliquée est donc très claire : Il est indispensable de recourir l’équilibre interne à travers une réduction radicale de la demande globale, l’élimination des barrières rencontrées par les mécanismes économiques (libération des marchés incluant particulièrement les activités liées au commerce extérieur, l’élimination de la rigidité à la baisse des salaires, application de taux de change « réalistes »,…). Dans cette approche, ces mesures sont incontournables, particulièrement pour les pays endettés, ce qui est le cas de la plupart des PVD. Ainsi donc la hiérarchie des objectifs assignés à la politique économique prescrite dans le cadre de cette approche véhiculée par les institutions internationales (B.M, FMI) et mise en oeuvre dans la plupart des P.V.D, donne la priorité à l’équilibre de la balance des paiements ainsi que la stabilité des prix (réduction de l’inflation) contrairement aux orientations hiérarchiques schématisées par le « carré magique » : croissance – emploi – inflation – balance commerciale.(8) Cette hiérarchie des objectifs est source de dilemmes dans les PVD. Car dans ces pays marqués par le sous emploi et le chômage c’est d’abord l’emploi et donc la croissance économique qui devraient constituer avec la stabilité des prix les objectifs prioritaires. En effet le problème fondamental dans les P.V.D c’est l’intégration de leurs ressources dans un processus de développement économique. Il s’agit à cet égard comme le précise Xavier Greffe « de générer l’accumulation, d’éliminer les goulots d’étranglement, d’éradiquer le chômage structurel, et cela alors même que le marché est faiblement efficace, les revenus distribués de manière inégale, les bénéfices et les coûts sociaux différents des bénéfices et coûts privés »(9). 107 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ 3/ L’efficacité des politiques économiques poursuivies en Algérie : Les politiques économiques poursuivies en Algérie depuis l’engagement des réformes libérales et plus particulièrement depuis l’adoption du programme d’ajustement structurel en 1994, se fixaient comme objectif conformément aux prescriptions des institutions financières internationales, le rétablissement des équilibres macroéconomiques et macro financiers d’une part et la création des conditions propices à la relance de l’économie (croissance économique) d’autre part. Dans cette perspective toute une série de mesures furent appliquées principalement en matière de déflation monétaire, de dévaluation du taux de change, de la fixation de taux d’intérêt et plus globalement de libéralisation des activités économiques. Les résultats de l’application de cette politique économique tout au long de cette période ont été les suivants : Indicateurs économiques (Algérie 1994/2003) PIB % Chômage % Inflation % Solde B.C % Du PIB 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 -0,90 3,9 4,1 1,10 5,10 3,2 2,50 2,10 4,10 7,2 24,4 26,99 27,99 29,20 27,30 29 29,77 27,30 27 23,70 29 29,8 18,7 5,70 5 2,60 0,30 4,20 1,40 2,50 0,3 + 0,2 + 4,1 5,7 1,5 2,1 11,8 12,9 7,7 12 Source : construit par nous même sur le base des données de ONS, DREE, CNES 108 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ Taux de croissance -6 -5 -4 -3 -2 solde de la BP -1 -0 Taux d’inflation 0 5 10 15 20 25 30 -2 -30 -25 -20 -15 -10 -5 __ carré magique __ année 1994 (début du PAS) __ année 1998 (fin du PAS) -0 Taux de chômage Taux de croissance 109 -1 0 +1 +2 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ -6 -5 -4 -3 -2 -1 -0 Taux d’inflation 0 5 15 10 15 20 25 30 -10 -15 0 5 10 -30 -25 -20 __ carré magique __ année 2000 __ année 2001 __ année 2002 -15 -10 -5 -0 Taux de chômage 3-1- La croissance économique : Négatif ou très faible depuis le début des années 1990, le taux de croissance de l’économie est devenu positif depuis 1995. De l’ordre de – 2,2% et – 0,90 en 1993 et 1994 respectivement, le taux de croissance est passé à 3,8% en 1995 et 4,1% en 1996 selon les données de l’ONS reprises par le CNES (10). En 1997, il chute cependant à 1,1% à cause d’une 110 Solde de la B.C 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ baisse sensible de la production agricole notamment. Depuis il s’est stabilisé à 3% environ en moyenne (3,2% en 1999, 2,4% en 2000, 2,1% en 2001 et 4,1% en 2002) En 2003 il enregistre 7,2% suite au plan de relance économique (PNRE). , les prévisions pour 2004 sont de l’ordre de 5 à 6%. Ces taux de croissance enregistrés ces dernières années sont certes assez élevés mais il faudrait s’interroger sur le contenu de cette croissance pour pouvoir apprécier la dynamique qui l’a engendre et les impacts qu’elle a eu. Nous y reviendrons plus loin. 3-2- Le chômage : Le chômage est demeure extrêmement élevé avec un taux quasiment constant de plus de 27% avec une légère baisse enregistrée en 2003. En 2004 cependant ce taux a connu un fléchissement inattendu : 17°/°.Cette importante chute du taux de chômage fortement controversée est due sans aucun doute a des changements opères dans le mode d’évaluation antérieur(11)…Quoiqu’il en soit et au-delà des controverses relatives à sa mesure, le chômage est une réalité tangible en Algérie, ce qui pousse à s’interroger sur les performances des politiques économiques dans ce domaine sensible de la création d’emploi productifs. 3-3- L’inflation : L’inflation a été jugulée. On peut observer nettement à travers les chiffres du tableau que les effets des mesures du plan d’ajustement structurel sont nettement perceptibles : de près de 30% en 1995, le taux d’inflation à été ramené au plus bas à 0,30 en 2000. Depuis, il s’est quelque peu relevé sous l’effet des mesures contenues dans le plan de soutien à la relance économique (PSRE) initié en 2001. Le taux d’inflation a été en effet évalue a 3,6 % en 2004 contre 2,6 % en 2003 à « cause de l'accroissement des investissements publics et l'augmentation de certains types de salaires », comme l’a souligné le premier ministre M. OUYAHIA.(12) 3-4- La Balance commerciale : Le solde de la balance commerciale s’est nettement améliore suite aux mesures de compression de la demande domestique mais surtout à cause de la fermeté positive des cours des hydrocarbures sur le marché international. Pour la cinquième année consécutive, la balance des paiements a enregistré un solde positif .Ce solde a été estime à 9,6 milliards de dollars en 2004 3-5- Interprétation : On peut donc affirmer que les politiques économiques poursuivies jusqu’alors privilégiant la rigueur monétaire et budgétaire ont conduit à comprimer l’inflation, à réduire notablement le déséquilibre de la balance des paiements sous l’effet d’une augmentation sensible de l’excédent de la balance commerciale (due surtout aux recettes d’exportations des hydrocarbures). Mais parallèlement à ces résultats le chômage est demeuré à un niveau très élevé (le plus élevé incontestablement des pays de la méditerranée) quant à la croissance, elle n’a pu être obtenue (voir plus loin) que grâce à des facteurs exogènes qui tiennent au niveau élevé du prix des hydrocarbures sur le marché international, à une relative bonne pluviométrie durant ces dernières années qui a permis des augmentations importantes de la production agricole et sans doute surtout les effets du PSRE. Or ces facteurs sont non seulement instables mais échappent par définition à un contrôle interne (13).C’est ce qu’on peut constater à travers les données disponibles notamment celles émanant de l’ONS . 4 - Le contenu de la croissance : La croissance économique a été générée essentiellement par les hydrocarbures et les services marchands tout au long de la période 1985-2002. La part revenant aux hydrocarbures, fortement dépendante du cours du baril de pétrole, a atteint 28,6%, en 1985, et 40,1% en 2002 .C’est dire le 111 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ poids que représente le secteur de des hydrocarbures dans l’économie nationale.En effet les hydrocarbures et l’agriculture constituent plus de 50% du PIB (43% pour les ressources non renouvelables et 9,4% pour les ressources agricoles), alors que l’industrie manufacturière ne dépasse pas 7% et que les services atteignent 37%. Cette tendance s’est accentuée depuis plusieurs années. En 1994, le secteur primaire ne constituait que 32% du PIB (dont 18,2% pour les hydrocarbures), contre 11,5% pour l’industrie manufacturière et 56,5% pour les services. C’est là un schéma complètement inverse de tous les pays émergents. A titre d’exemple, en 2002, la structure du PIB de la Corée du sud se répartit comme suit : 55,1% pour les services, 40,9% pour l’industrie et 4% pour l’agriculture.(14) Cette spécialisation est aggravée par le fait que les hydrocarbures constituent 97% des recettes d’exportations. La structure de la valeur ajoutée hors hydrocarbures, des secteurs public et privé montre une tendance à la baisse de la part de la valeur ajoutée des secteurs de l’industrie et du BTPH en raison, notamment, de l’affaiblissement continu du secteur public et une tendance à la hausse des services marchands dont la part a connu une forte augmentation entre 1985 et 2002 passant respectivement de 37,6% à 47,30%. 4 – 1 -Par secteur juridique : Evolution de la structure (en %) de la valeur ajoutée par secteur juridique dans le système productif hors hydrocarbures : Entreprises publiques Entreprises privées de 10 salariés et plus Entreprises privées de – de 10 salariés 1985 52,7 3,3 1992 37,0 2,0 1997 27,0 2,0 2001 22,8 1,8 44,0 61,0 71,0 75,4 El Watan du 04/07/04( cite par le CNES) . La structure de la valeur ajoutée totale (y compris hydrocarbures), illustrent les niveaux de participation des entreprises publiques et privées à la création de la richesse nationale On observe selon les données de l’ONS la chute de la contribution des entreprises publiques qui de 67,10% en 1985 est passée à 53% en 2001. Si on excepte les hydrocarbures, la chute de cette part est encore plus marquée.En effet pour les mêmes dates cette part est passée de 52,7% à 22,8%. Par contre pour le secteur privé, la contribution à la valeur ajoutée (y compris hydrocarbures) s’est accrue de plus de 14 points, de 32,90% à 47% sur la même période. Hors hydrocarbures, l’évolution de cette contribution est encore plus nette puisqu’elle est passée de 47,3% en 1985 à 77,2% en 2001.Mais ce qu’on remarque c’est surtout la contribution des petites entreprises de moins de 10 salaries… 4 – 2 - Par secteur d’activité. . Evolution de la structure ( % ) de la valeur ajoutée par secteur d’activité hors hydrocarbures Agriculture Industrie BTPH Services marchands Total hors hydrocarbures 14,7 22,5 25,2 37,6 100 20,7 19,4 21,9 38,0 100 112 21,8 21,6 19,1 37,5 100 18,5 18,2 20,0 43,2 100 19,1 16,3 18,5 46,0 100 20,2 15,4 17,6 46,9 100 19,0 15,0 18,7 47,3 100 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ Source : de 1985 à 2001 :Office National des Statistiques, pour 2002 : services du Délégué à la Planification La faiblesse de la part du secteur industriel hors hydrocarbures dans la formation du PIB reflète le processus de déstructuration accrue des entreprises en particulier publiques. La dépréciation de la monnaie (le dinar) a fortement enchéri les prix des inputs aggravant ainsi les déséquilibres de trésoreries des entreprises(15). 5 - La croissance et la productivité des facteurs La mesure de la productivité globale des facteurs (PGF) est la méthode économétrique la plus simple et la plus utilisée pour évaluer la performance passé et future de croissance d’une économie, les capacités de rattrapage vis à vis d’autres économies et les différences de niveau de revenu et de croissance. En Algérie la PGF est négative depuis au moins deux décennies comme le relève un rapport du FEMISE (16), ce que confirme une étude réalisée par le FMI (17) selon lequel le problème ne se situe ni dans l’insuffisance de l’investissement matériel ni dans celui du capital humain qui ont connu des taux assez élevés. Ainsi, si le capital humain et le capital physique ont augmenté plus vite que la production, il ne peut y avoir qu’une seule interprétation possible à savoir la croissance de la productivité des facteurs (PTF) (selon la terminologie du FMI) a été négative. Pour quantifier la PTF ; les experts du FMI ont utilisé une fonction de production du type COBB-DOUGLAS avec capital humain et matériel et de travail en tant que facteurs de production. Plutôt que de produire une seule évaluation de la PTF, une série de données a été basée sur deux scénarios afin de conforter la validité des résultats obtenus : - Le premier scénarios (hypothèse basse) est fondé sur un rapport d’un tiers pour le capital matériel et de deux tiers pour le travail et le capital humain combinés. Ce scénario fournit une PTF particulièrement faible (- 2,1% annuellement en moyenne). - Le second scénario (hypothèse forte) est fondé sur des estimations plus conservatrices de la croissance du capital humain (4,5% en moyenne, identique au capital matériel) et prend en compte une augmentation de la part du capital à une moitié.Même dans un tel scénario optimiste la croissance de la PTF reste négative (- 0,5% annuellement) Algérie – Comptabilisation explicative de la croissance 1965/2000 PTF (hyp-basse) 1965/70 3,9 1970/75 -1,3 1975/80 -4,6 1980/85 -2,3 1985/90 -4,2 1990/95 -4,3 1995/2000 -1,8 1965/2000 -2,1 PTF (hyp-haute) 5,2 -0,2 -3,2 -0,9 -2,6 -2,1 03 -0,5 PIB 6,4 5,2 6,2 5,2 0,1 0,3 3,1 3,8 Capital matériel 22 7,1 10,3 5,3 3,0 1,0 1,3 4,5 Travail Capital humain hyp-basse 0,3 5,0 3,3 9,1 6,8 14,8 9,5 9,0 1,4 8,5 3,5 9,0 4,7 8,7 3,4 9,5 Capital humain hyp-haute 0,0 4,1 9,8 6,3 3,5 3,7 3,7 4,5 Source : FMI « Algérie country Repport »Mars 2003 Comme on peut le constater, la PTF de l’Algérie est devenue négative dans les années 1970 et l’est demeurée jusqu’au milieu des 1990. La croissance ralentie de l’économie Algérienne peut donc être attribuée à l’utilisation inefficace des facteurs de production plutôt qu’à une éventuelle insuffisance de capital humain ou matériel. Une légère amélioration de la croissance de la PTF est enregistrée en 1995 même si elle reste négative. Ce qui correspond à la 113 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ période au cours de laquelle les autorités ont annoncé un programme de reforme (PAS) et ce qui est plus significatif les investissements dans le secteur des hydrocarbures ont augmenté. A l’heure actuelle la croissance reste trop faible pour créer suffisamment d’opportunités d’emploi pour une population active en croissance rapide. Cette situation révèle un grave problème dans l’allocation des ressources et dans leur efficacité, ce qui signifie que les ressources dont dispose le pays et qui sont loin d’être négligeables (si ont tient compte des revenus des hydrocarbures qui ont généré grâce à la fermeté des cours durant ces dernières années des réserves évaluées présentement à plus de 32 Milliard de Dollars) sont mal gérées. Ainsi l’économie algérienne a besoin incontestablement d’ une plus grande efficience dans l’utilisation et l’allocation de facteurs de production de façon à parvenir à une croissance soutenable dans le long terme. 6 - la croissance et l’emploi la création d’emplois requise pour diminuer le taux de chômage sinon le stabiliser nécessite une croissance maintenue à moyen terme à un taux supérieur à 5%. Les taux de croissance enregistrés en 2002, 2003 et 2004 peuvent laisser croire que la croissance reprend à des taux proches du niveau nécessaire pour réduire sérieusement le chômage. Cependant, cette croissance présente plusieurs caractéristiques qui n’augurent pas de meilleurs résultats en terme de création d’emploi à l’horizon 2010 : 1D’une part, ces taux de croissance appréciables n’expriment nullement une dynamique économique réelle,comme on a pu le oir.Ces performances s’expliquent en effet par des conditions exogènes ( prix des hydrocarbures qui se fixent sur le marche international, bonne pluviométrie ) sur lesquelles les pouvoirs publics ne peuvent exercer aucun contrôle. Quant à l’industrie, sa production se dégrade en raison de sa déstructuration, sa mauvaise organisation et la concurrence des produits importés. 2- Par ailleurs, on estime qu’une croissance réelle, (celle impulsée par un effort d’investissement productif) se situerait autour de 3%. Là encore, le problème qui se pose est qu’un tel niveau n’est rendu possible que par les niveaux élevés des dépenses publiques (18). Le rapport des dépenses publiques au PIB hors hydrocarbures est passé de 47% en 2001 à 52% en 2004. 3- Si on considère que le chômage a effectivement recule ces dernières années nonobstant les controverses inhérentes a son mode d’évaluation, ce recul serait cependant du principalement aux différents dispositifs de lutte contre le chômage mis en place par les pouvoirs publics. Pour la seule année 2004, où le taux de chômage est abaissé à 17% selon l’ONS, 306 000 nouveaux emplois temporaires ont été créés à travers les dispositifs ESIL, IAIG, TUPHIMO et CPE et 2400 emplois dans la micro entreprise (annexe3). Ainsi en dépit d’une croissance économique positive qui se confirme d’année en année, L’emploi précaire se généralise et l’emploi informel se développe en Algérie.En effet il a été enregistré en 2004 un recul de la part du salariat de 65% en 2003 à 60%, une augmentation des indépendants où prédomine l’informel (23% en 2003 et 32% en 2004) et une augmentation plus rapide des emplois temporaires (+18% par rapport à 2003, contre +3% pour les emplois permanents). De ce fait, toute politique de long terme de création d’emplois ne peut qu’être inscrite dans des politiques multidimensionnelles de recouvrement de la croissance.Une croissance réelle fondée sur une meilleure allocation des ressources et par conséquent génératrices d’emplois productifs 114 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ Conclusion Pour conclure cet exposé sur l’efficacité des politiques économiques dans les pays en voie de développement illustré à travers le cas de l’Algérie, cas assez singulier au demeurant, nous pouvons affirmer que si les résultats macro-financiers ont évolués positivement conformément à la rigueur budgétaire prescrite dans le cadre de ces politiques économiques libérales, il en est tout autrement du marché du travail et de son corollaire le pouvoir d’achat. Le traitement du chômage ne peut se réduire aux seules mesures palliatives nonobstant leur nécessité, mais doit s’inscrire dans une stratégie de relance économique impliquant « une vision unitaire et globale de mise en mouvement de politique à long terme ». L’incontournable stabilité macro financière ne saurait devenir un substitut à une politique de relance par l’offre au lieu et place de la politique actuelle de relance par la dépense (si on fait référence au Plan de Soutien à la Relance Economique (PSRE) volontairement initié devant la sclérose qui caractérisait le système économique d’après PAS). La croissance réalisée durant ces dernières années n’est pas une croissance, comme on a pu le voir très succinctement, due à une augmentation des capacités de production ou a une meilleure utilisation des facteurs de production (effet de productivité). Cette croissance est due à des facteurs exogènes et ne saurait par conséquent justifier la poursuite de ces politiques économiques « L’économie Algérienne à besoin d’une politique économique qui débouche sur une augmentation de l’offre de biens et services ayant une valeur internationale de préférence et non d’une relance de l’activité qui ne débouche que sur une relance… des importations et une excroissance des services qui lui sont liés »(19). Pour sortir de cette situation, le pays doit engager au plus vite la diversification de la production nationale, (notamment dans les industries et les services à forte valeur ajoutée), et celle des exportations. D’ici 20 ans, il faut que le PIB quadruple, autrement dit qu’il augmente en moyenne de 7 à 8% par an, et que la structure des échanges extérieurs se modifie radicalement en faveur des produits manufacturés et de haute technologie. C’est possible comme le souligne S.Goumezianne (20) : la Corée et la Chine l’ont fait. Défi d’autant plus difficile à tenir qu’il ne pourra pas être tiré par le secteur des hydrocarbures dont les réserves s’épuiseront a terme . Les ventes de gaz pourraient contrecarrer en partie cette évolution (le gaz représente d’ores et déjà 40% des recettes d’exportations), mais il ne faut guère se faire d’illusions, l’Algérie doit désormais réfléchir au plus vite aux autres moteurs qui pourront garantir durablement les taux de croissance nécessaires, et regarder du côté du BTP, des infrastructures, des industries manufacturières et des services de haute technologie. 115 2005 ﻧﻮﻓﻤﺒﺮ15 و14 اﻟﻤﻠﺘﻘﻰ اﻟﻌﻠﻤﻲ اﻟﺪوﻟﻲ اﻟﺜﺎﻧﻲ Bibliographie : (1) Boutaleb kouider « La problématique de l’efficacité des politiques économiques dans les PVD : le cas de l’Algérie » Communication au colloque international sur « l’évaluation des politiques économiques : réalités et perspectives » Tlemcen nov. 2004 (2) R.DI ROBERTO: « L’état et l’économie » Université Victor Segalen Bordeaux P. 17 (3) J. TINBERGEN: « Techniques modernes de la politique économique » Dunod - Paris 1966. P61 (4) C. DE BOISSIEU : « Principes de politique économique » économica – Paris 1980. P35 (5) C. DE BOISSIEU : Op.cité P40 (6) G. GENEREUX : « Introduction à l’économie » Ed. seuil 1992. (7) K. BOUTALEB : « La nature et l’efficience de la politique d’ajustement du FMI » Revue Algérienne n°3 - 1994 (8) J.M. FONTAINE : « Diagnostic et remèdes proposés par le FMI » Revue Tiers Monde n°117 – 1989. (9) X. GREFFE: «Politique économique » Economica – Paris 1991. P178 (10) CNES: «Rapport sur le développement humain 2001 » Alger 2002 (11) A.BOUZIDI : « Des statistiques fiables : un besoin urgent »Le Quotidien d’Oran jeudi 11 novembre 2004 (12) A.OUYAHIA : conférence de presse sur « Algérie : situation et perspectives » .Samedi 12/03 2005 (13) CNES: «Rapport sur les effets économiques et sociaux du PAS » Alger 1999 (14) S.GOUMEZIANE : « Algérie : un système archaïque » CEDTIM 6 Mai 2004 (15) CNES /op. cite (16) FEMISE : « Rapport 2002 sur le partenariat Euro-Méditerranée » (17) FMI : « Algeria country Report » Mars 2003 (18) Plan de Relance Economique 2001/ 2004 et 2005 / 2009 (19) D. BELKACEM : « L’illusion de la croissance en Algérie » (20) S.GOUMEZIANE : op. Cite 116