Actualité S anté 7 Les candidoses buccales Des mycoses superficielles à surveiller Présent dans la cavité buccale de toutes les personnes saines, le Candida albicans devient quelque fois pathogène. C ’est sou vent le cas chez des patients soumis à des médications telles qu ’une antibiothérapie prolongée ou une chimiothérapie. C omme c’est souvent le cas, à la suite d’une sinusite aiguë rebelle, par exemple, un traitement réunissant des antibiotiques et des corticoïdes est prescrit. Un mauvais goût au niveau de la bouche, une difficulté à mâcher convenablement les aliments par manque de salive, mais aussi une sensation de picotement, voire de brûlure en mangeant certains mets assaisonnés peuvent signaler une candidose buccale. Epidémiologie, physiopathologie Présent communément dans la cavité buccale, le Candida albicans a cependant une incidence qui augmente avec l’âge. De 5 % chez le nouveau-né, il atteint près de 90 % chez la personne âgée. Lorsque les conditions sont propices, le Candida peut passer de sa forme unicellulaire (levure) à une forme multicellulaire de type mycélium. En devenant une moisissure, il devient alors capable de traverser les parois intestinales grâce aux longs filaments qu'il développe et pénètre ainsi dans le système sanguin et lymphatique. Une des causes princeps réside dans l’abaissement du pH buccal provoqué par le déséquilibre de la flore commensale accompagnée d’une baisse de la salivation (ou hyposialie). Physiologique aux âges extrêmes de la vie, celle-ci est pathologique dans certaines maladies comme celle de Parkinson, une HTA ou un diabète non équilibré. Pathologique, elle peut l’être également lorsqu‘elle est liée à certains traitements comme les antihypertenseurs, les diurétiques, les anti-histaminiques, les antitussifs, les antibiotiques. Une corticothérapie locale, une hygiène buccodentaire insuffisante, un excès de consommation de sucres rapides, de même que l’alcoolisme ou le tabagisme peuvent être également responsables. En l’absence de causes locales, la candidose peut faire partie d’un tableau général comme celui réalisé au cours d’un syndrome d’immunodéficience, d’une anémie, d’une dénutrition, d’une avitaminose, voire de pathologies endocriniennes. Parmi les facteurs prédisposants, on peut donc retrouver la prise d'antibiotiques à répétition et/ou les corticoïdes, la chimiothérapie et/ou la radiothérapie, mais également la prise de la pilule contraceptive, une grossesse simple ou multiple, le diabète, voire un choc psycho-affectif intense ou encore l'intoxication par les métaux lourds (vaccins, amalgames dentaires...). Traitement Le traitement doit être préventif : pour prévenir une candidose buccale chez un patient à risque, il faut lui demander d’éliminer l’alcool, le tabac, d‘assurer une parfaite hygiène buccodentaire, de proscrire les sucreries, surtout entre les repas qui, tous, doivent être suivis d’un soigneux brossage dentaire et de bain de bouche. Pour lutter contre l’hyposialie, il est conseillé de boire abondamment, de mâcher du chewing gum. En ce cas, la prescription de teinture de jaborandi fait preuve d’une réelle efficacité. Dans les formes aiguës, on conseille un traitement local débutant par un bain de bouche bicarbonaté suivi du médicament gargarisé puis avalé, et cela pendant trois semaines. En cas d’échec du traitement local, ou d’atteinte généralisée, un traitement par voie générale est préconisé en première intention chez un patient immunodéprimé. L’ensemble des traitements dure environ trois semaines, le patient étant revu à la deuxième semaine pour un bilan. Jacques Bidart Diagnostic Pour faire le diagnostic, il suffit de demander au patient d’ouvrir la bouche : on note un aspect inflammatoire de l’ensemble de la cavité buccale avec une muqueuse érythémateuse. La langue est rouge et lisse, la paroi postérieure du pharynx, les amygdales sont recouvertes d’un enduit blanchâtre se détachant facilement à l’abaisse-langue. Devant un tel tableau clinique, les examens complémentaires, mycologiques en particulier, sont inutiles. Ils ne se justifient qu‘en cas de doute diagnostique ou devant des formes récidivantes ou particulièrement rebelles. En ce cas, un prélèvement permet de tester l’efficacité des antimycotiques, et l’examen histopathologique d’éliminer un autre diagnostic. Les candidoses sont classées dans les mycoses cutanéomuqueuses superficielles. Le Candida colonise seulement les assises superficielles de l’épithélium. Les pathologies peuvent siéger aussi bien au niveau de la peau, qu’au niveau des muqueuses oro-pharyngées ou génitales. Mais il existe des mycoses qui infectent les tissus en profondeur (blastomycose, sporotrichose, actinomycose...), des mycoses systémiques d’emblée à symptomatologie, entre autres, bucco-faciale telle l’histoplasmose, des mycoses sinusiennes comme l’aspergillose. Infos ... Des infections opportunistes Les candidoses des muqueuses buccales sont des infections opportunistes fréquentes car le Candida ne sera pas pathogène chez l’humain en bon équilibre physiologique, en bonne santé et aux systèmes de défenses intacts. Il faut donc des perturbations de l’écosystème buccal et/ou de l’état général, des modifications physiologiques et/ou pathologiques de l’hôte, pour permettre au saprophyte de devenir pathogène. Professions S anté Infirmier Infirmière N ° 63 • mai 2005