pelvi~ périnéologie - sifud-pp

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PELVI~
PÉRINÉOLOGIE
S O M M A I R E
VOLUME
ISSN 1778-3712
ÉDITORIAL
Délégation de compétence
et pelvi-périnéologie ............................ 108
G. Amarenco
ARTICLES SCIENTIFIQUES
ARTICLES ORIGINAUX
Modifications à court terme de la phase
mictionnelle, induites par la bandelette
sous-urétrale : TVT® vs TVT-O® ............ 110
A. Pigné, F.-A. Valentini, P.-P. Nelson
La chirurgie des fistules anales n’a pas
d’influence sur la latence distale anale
motrice du nerf pudendal .................... 117
C. Thomas, F. Daniel, I. Etienney,
P. Atienza
Étude rétrospective portant sur 93 cas
de prolapsus traités par plaque de
Pelvicol® ............................................. 121
J. Mercky, A. Chami, V. Zerr, D. Collin
CAS CLINIQUE
Troubles sensitifs périnéaux par
compression sacrée secondaire à
un fécalome géant............................... 125
E. Guettard, P. Raibaut, C. Jacq,
A. Terrier, G. Amarenco
MISES AU POINT
2
•
NUMÉRO
Indications de l’opération de
Malone ou dérivées chez
le patient neurologique........................ 144
J.-H. Lefèvre, Y. Parc, R. Parc
FORMATION MÉDICALE
DOSSIER THÉMATIQUE
Hormones et continences
Incontinence urinaire et ménopause :
données épidémiologiques................... 149
B. Fatton
Estrogènes et fonction ano-rectale ....... 156
L. Siproudhis, A.-S. Thirouard,
M. Eléouet
Estrogènes et fonction vésicale ............ 159
X. Gamé, J.-F. Arnal, P. Rischmann,
B. Malavaud
Estrogènes et fonction urétrale ............ 164
F. Demaria, B. Boquet, J.-L. Benifla
Vrais et faux bénéfices et risques
des traitements hormonaux de
la ménopause...................................... 168
C.-G. Jamin
FOCUS
La proctalgie fugace : restons zen... ..... 175
V. de Parades, I. Etienney, P. Bauer,
P. Atienza
2
•
JUIN
2007
PRATIQUE MÉDICALE
Le bloc pudendal : technique
d’analgésie postopératoire en
chirurgie proctologique........................ 180
B. Vinson-Bonnet
Traitement médical de l’hypoactivité
vésicale .............................................. 184
M. de Sèze, P. Grise , M.P. de Sèze,
J.-B. Roche, E. Shao , P.-A. Joseph
RECOMMANDATIONS
Recommandations pour le suivi
des vessies neurologiques dans
la sclérose en plaques ......................... 193
M. de Sèze, A. Ruffion, P. Denys ,
B. Perrouin-Verbe , les membres du
Genulf
PERSPECTIVES
Les ballonnets ajustables (ACT®)
périurétraux pour le traitement de
l’incontinence de la femme ................. 198
L. Le Normand
CONGRÈS
L’essentiel du 100e Congrès de
l’Association française d’urologie
29 novembre-2 décembre 2006 (Paris).. 203
J.-F. Hermieu
Les dyssynergies urétrales ................... 128
J.-M. Soler
Maladie de La Peyronie :
connaissances validées et hypothèses
en physiopathologie, épidémiologie,
diagnostic et thérapeutique ................. 135
N. Morel Journel, A. Ruffion,
J.-L. Campos-Fernandes, F. Grima,
A. Leriche
Les instructions aux auteurs de la revue PELVI~PÉRINÉOLOGIE sont désormais disponibles sur le site Springer à
l’adresse suivante : www.springer.com/11608. De plus, à compter de ce numéro, les auteurs ne recevront plus de
tirés-à-part gratuits de leur article, en revanche, un exemplaire de la revue leur sera adressé gracieusement.
Pelv Perineol (2007) 2: 108–109
© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0127-z
ÉDITORIAL / EDITORIAL
Délégation de compétence et pelvi-périnéologie
G. Amarenco
Service de rééducation neurologique et d’explorations périnéales, hôpital Rothschild, APHP, Paris, France
Crise des vocations médicales (contexte économique oblige...), effet pervers (et attendu...) du numerus clausus,
diminution du temps de travail, augmentation des files actives de patients, désaffection pour certaines spécialités
peu lucratives, trop contraignantes ou trop risquées sur le plan juridico-financier, tout conduit à une diminution
du temps médical et ainsi à une diminution de l’offre de soins.
Qui plus est, les lourdeurs réglementaires de la profession médicale, l’importance grandissante de la gestion
médico-administrative, la prise en compte d’éléments non médicaux (environnementaux) souvent nécessaires à
la prise en charge, l’appréciation de la dimension sociale, sont autant de facteurs supplémentaires à la dispersion
temporelle de nos activités spécifiquement médicales, et ce quels que soient nos modes d’exercice, privé ou
public.
La pelvi-périnéologie est tout particulièrement confrontée à ce problème en raison de l’absence de formation
spécifique et d’un nombre de spécialistes limité, qu’ils soient médecins ou chirurgiens.
La « délégation de compétence » est-elle dès lors une solution ?
Sans équivoque, oui. Et cela fait bien longtemps que nous l’avons compris et expérimenté. Le travail
collaboratif avec d’autres professionnels de santé, au premier rang desquels figurent kinésithérapeutes,
infirmières, sages-femmes et psychologues, permet une meilleure répartition des tâches et in fine une
meilleure prise en charge. Mais notre « science médicale » n’est pas déléguée à ces professionnels. Elle est
simplement partagée, puisque dans leur cursus d’études, des éléments de diagnostic, d’évaluation et de
traitement sont appris et sanctionnés par des examens spécifiques (diplôme d’État), gages de crédibilité, de
sécurité et d’efficacité. Tout le monde connaı̂t en pelvi-périnéologie le rôle thérapeutique des kinésithérapeutes,
l’apport diagnostique des sages-femmes, le rôle clé des infirmières dans l’évaluation globale du patient. Les
nouvelles réformes augmentent encore le rôle de ces professionnels de santé (prescription des sondes par les
infirmières, détermination des modalités de rééducation par les kinésithérapeutes...).
Pourtant cela ne suffit pas, car d’une part nous fonctionnons déjà comme cela depuis des années et ce
mode de fonctionnement n’a pas pour autant permis d’augmenter notre temps médical ; et d’autre part, car
de réels et spécifiques domaines de nos activités médicales peuvent en effet être transférés sur ces
professionnels de santé.
Diagnostic des maladies, évaluation des conditions pathologiques, suivi de l’évolution clinique des affections
chroniques, actions thérapeutiques et ajustement des traitements, dépistage des complications y compris
iatrogènes, éducation du patient, toutes ces composantes de la prise en charge médicale peuvent être ainsi, en
partie ou en totalité, déléguées.
En matière de pelvi-périnéologie, de nombreux services hospitaliers ont déjà passé ce cap en confiant de
véritables consultations d’incontinence à certaines infirmières triées sur le volet :
– évaluation de l’incontinence et de son retentissement ;
– mise en place de traitements (autosondages, stimulation périphérique) et contrôle de ceux-ci ;
– éducation du patient ;
– réalisation de bilans diagnostiques (urodynamique, neurophysiologique, radiologique) ;
– formation de personnel.
Bien évidemment, ce type d’activité se doit d’être extrêmement encadré tant sur le plan réglementaire
qu’organisationnel, avec un contrôle médical permanent permis par un feedback constant de ces personnels,
par une sélection de ces derniers et un travail fondé sur des guidelines très précis. Dans ces conditions, et
seulement si celles-ci sont respectées, du temps médical pourra être récupéré et utilisé au mieux pour
d’autres activités, notamment diagnostiques.
109
Mais il faut valoriser ce personnel : des valorisations financières et statutaires sont bien évidemment
indispensables, mais une reconnaissance universitaire éventuelle pourrait être aussi une manière de mettre en
exergue ces activités et de constituer un mode de validation aisée à mettre en place.
Il faut nous engager dans ce processus et ce à toutes les étapes : expérimentation sur le terrain, formation
de formateurs, validation des tâches proposées. La pelvi-périnéologie se prête idéalement à de telles
expériences. Profitons-en. Ne laissons pas passer une chance d’optimiser nos activités de soins et
d’améliorer ainsi la qualité de la prise en charge offerte aux patients.
Pelv Perineol (2007) 2: 110–116
Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-128-y
©
ARTICLE ORIGINAL / ORIGINAL ARTICLE
Modifications à court terme de la phase mictionnelle, induites
par la bandelette sous-urétrale : TVT® vs TVT-O®
A. Pigné 1 , F.-A. Valentini 2,3 , P.-P. Nelson 3
1
2
3
CEEG, Paris, France
UMR S 731 Inserm-université Pierre-et-Marie-Curie, Paris-V, France
Groupe hospitalier Charles-Foix-Jean-Rostand, 39-41, rue Jean-Le-Galleu, 94200 Ivry-sur-Seine, France
Résumé : Objectif : Comparer les modifications de la phase
mictionnelle induites par la pose d’une bandelette sousurétrale, TVT® ou TVT-O®, pour traitement d’une incontinence urinaire d’effort (IUE).
Patientes et mé thodes : Parmi 44 patientes présentant
une IUE, 22 ont bénéficié d’un TVT® et 22 d’un TVT-O®. Un
examen clinique et un bilan urodynamique étaient réalisés
en préopératoire et à un mois postopératoire. L’analyse
modélisée des débitmétries libres était effectuée à l’aide du
modèle de miction VBN® pour rechercher une obstruction
constrictive ou une béance urétrale, caractérisée par le
paramètre g, ou une compression locale, caractérisée par le
paramètre g.
Ré sultats : En postopératoire, le débit maximum décroı̂t
de manière significative : groupe TVT® : 29 14 vs 35 10 mL/s, groupe TVT-O® : 23 12 vs 33 13 mL/s et des
modifications notables de la forme de la courbe de débit
sont observées, plus fréquentes après TVT-O®. En préopératoire, la mécanique urétrale était affectée par le
paramètre g (constriction ou béance) ; en postopératoire,
ce paramètre g reste inchangé, mais une compression était
mise en évidence dans 18 dossiers TVT® (g = 11,0 6,7 cmH2O) et 12 dossiers TVT-O® (g = 15,2 10,1 cmH2O).
Conclusion : Les bandelettes TVT® et TVT-O® produisent des effets comparables sur la mécanique de la phase
mictionnelle. La modélisation permet, par simulation
d’hypothèses physiopathologiques, d’identifier et de quantifier une compression urétrale induite par la bandelette.
Ce phénomène est plus fréquent après TVT®, mais
d’amplitude plus grande après TVT-O®. Cette différence
pourrait être due à la différence des trajets ; une étude sur
l’effet à plus long terme du TVT-O® est en cours.
Mots clés : Débitmétrie – Bandelette sous-urétrale – Incontinence urinaire d’effort – Modèle mathématique
Comparison of short-term changes induced by suburethral
tapes (TVT® and TVT-O®) in the voiding phase
Abstract: Objective: Our purpose was to compare changes
in the voiding phase following the cure of stress urinary
incontinence (SUI) with one of the two devices, TVT®
and TVT-O®.
Methods: Among 44 women presenting with SUI, 22
(mean age 56.4 y) underwent a TVT® and 22 (mean age
54.8 y) a TVT-O® procedure. They add physical examination and urodynamic tests before and at 1-month after
surgery. A modelled analysis of free uroflow was performed
using the VBN® micturition model. A constrictive obstruction or gaping urethra was characterized by parameter
g and local compression by parameter g.
Results: Maximum flow rate decreased significantly
after surgery: TVT® group: 29 14 vs 35 10 mL/s, and
TVT-O® group: 23 12 vs 33 13 mL/s. The shape of
the flow curve was significantly changed; prolonged flow
rate and polyphasic curves were more frequent after the
TVT-O® procedure. Preoperatively, the urethra was
affected by constrictive obstruction or gaping. Postoperatively, g remained unchanged; additional compression appeared in 18 TVT® files (g = 11.0 6.7 cmH2O)
and 12 TVT-O® files (g = 15.2 10.1 cmH2O).
Conclusion: TVT® and TVT-O® tapes appear to have
similar effects on the mechanics of the voiding phase.
By simulating pathophysiological hypotheses, modelling
makes it possible to identify and quantify the occurrence
of urethral compression induced by the tape. This
phenomenon was more frequent in the TVT® group,
while its magnitude was higher in the TVT-O® group.
The reason for the difference could be the position and
direction of the tape. Extended follow-up of TVT-O®
patients is in process.
Keywords: Free uroflow – Suburethral tape – Stress urinary
incontinence – Mathematical model
Introduction
Les bandelettes sous-urétrales sont très largement utilisées
pour le traitement chirurgical de l’incontinence urinaire
d’effort. Les premières bandelettes, TVT® (tension-free
vaginal tape), ont été mises en place par Ulmsten [1]. Pour
Correspondance : E-mail : [email protected] ; Tél. : +33 1 49 59 71 33 ; Fax : +33 1 49 59 71 42
111
pallier les risques présentés par cette technique, Delorme
a proposé une modification technique [2] ou TOT
(transobturator tape) consistant à introduire la bandelette
à travers les trous obturateurs (de dehors en dedans). Cette
technique pouvant elle aussi occasionner des lésions
vésicales et urétrales [3], de Leval [4] a développé une
procédure, TVT-O® (de dedans en dehors), permettant
d’éviter l’espace pelvien. Chacune de ces techniques conduit
à un taux élevé de succès pour le traitement de l’incontinence urinaire d’effort (IUE) et a pour objectif de restaurer
un point fixe à la jonction tiers moyen - tiers distal de
l’urètre. Il est admis que la continence résulte alors des
mouvements de rotation de l’urètre autour de ce point fixe
[5] ; ces mouvements peuvent aussi avoir pour conséquence
des modifications de la phase mictionnelle. Dans une étude
récente [6], il a été montré que le TVT® induit une obstruction
dynamique caractérisée par une compression de l’urètre sur la
bandelette. Le but de cette étude est de comparer les
modifications de la phase mictionnelle induites par les
bandelettes TVT® et TVT-O® après traitement de l’IUE.
Population et méthodes
Population
Quarante-quatre patientes ont bénéficié d’une cure d’IUE
par pose d’une bandelette sous-urétrale (GynecareTM).
Pour 22 patientes (âge moyen 56,4 10,9 ans), il
s’agissait d’un TVT® ; pour les 22 autres (âge moyen
54,8 11,4 ans), il s’agissait d’un TVT-O®. Le geste
opératoire était réalisé par le même chirurgien (AP).
Étaient exclues de l’étude les patientes présentant un
prolapsus de grade supérieur à II. Toutes les patientes ont
eu une évaluation incluant examen clinique et bilan
urodynamique (chaı̂ne Sedia®) en préopératoire et à un
mois postopératoire (certaines, au moment de l’étude,
avaient un suivi de trois à dix mois). La parité était
comparable dans les deux groupes (2,0 1,2 vs 2,0 1,0).
Cinq patientes du groupe TVT® et trois du groupe TVT-O®
avaient un antécédent de chirurgie pelvienne.
Mé thodes
L’analyse modélisée des débitmétries libres (DL) a été
réalisée à l’aide du logiciel VBN®. Ce logiciel permet
l’utilisation avec un court temps de calcul du modèle
mathématique VBN® de la miction [7] ; ce modèle est
une description mathématique des phénomènes physiologiques ayant lieu pendant la miction. Le modèle permet
de calculer des courbes mictionnelles théoriques : débit
et pression détrusorienne en fonction du temps. Deux
paramètres décrivent l’état de l’urètre chez la femme :
le premier, g, caractérise la surface de section efficace
de l’urètre : g = 1,0 chez un sujet normal, g < 1,0 s’il existe
une obstruction constrictive (réduction de la surface de
section) et g > 1,0 s’il existe une béance urétrale ;
le second g (exprimé en cmH2O), permet de décrire
une compression locale s’exerçant sur l’urètre.
La force exercée par le detrusor est caractérisée par
un paramètre de force k : un detrusor normal aura 1,0
pour valeur de ce paramètre.
Chaque miction dépend des paramètres urétraux, du
paramètre détrusorien et de paramètres circonstanciels
(décroissance ou arrêt de l’excitation du detrusor, retard
d’ouverture ou relaxation incomplète du sphincter...).
L’analyse consiste à obtenir une superposition des
courbes enregistrées (débit et pression du detrusor) et
des courbes calculées avec une erreur quadratique
inférieure à 2 %.
Dans cette étude, seules les débitmétries libres étaient
enregistrées, l’analyse a donc été réalisée en supposant
un detrusor normal (k = 1,0).
La Figure 1 décrit l’effet d’une obstruction urétrale
(constriction ou compression) et d’une décroissance de
l’excitation du detrusor sur la débitmétrie. La Figure 2
montre l’effet d’une obstruction urétrale sur la mécanique urétrale.
Afin d’augmenter la précision des analyses, les deux
versions du logiciel, version de base et version automatique, ont été utilisées. La version de base requiert une
analyse pas à pas : l’investigateur teste successivement
diverses hypothèses. La procédure d’analyse est décrite
en Annexe ; un exemple est donné en Figure 3. La
version automatique test, sans intervention de l’investigateur après initialisation des calculs, les diverses
hypothèses concernant l’obstruction urétrale et donne
les valeurs des paramètres urétraux conduisant à la
meilleure concordance des courbes.
Les critères d’exclusion des courbes pour l’analyse
sont un volume mictionnel inférieur à 100 mL ou/et une
interruption du débit. La présence d’artefacts peut
également conduire à éliminer un certain nombre
d’enregistrements.
Analyse statistique
Pour l’analyse statistique, le test t et le test paramétrique
de Wilcoxon ont été utilisés. Une valeur de p inférieure
ou égale à 0,05 était considérée comme significative.
Résultats
Le débit maximum Qmax décroı̂t de manière significative
après chirurgie dans les deux groupes : 35 10 vs
29 14 mL/s dans le groupe TVT® (p = 0,05) et 33 13 vs
23 12 mL/s dans le groupe TVT-O® (p = 0,001) alors que
les volumes urinés étaient semblables. Le volume résiduel Vr
augmente en postopératoire mais seulement de manière
significative dans le groupe TVT-O® (p = 0,029). Ni la
pression de clôture pclot, ni la longueur fonctionnelle
urétrale LFU ne sont modifiées par la chirurgie dans les deux
groupes. Ces résultats sont regroupés dans le Tableau I.
112
OBSTRUCTION CONSTRICTIVE
NORMAL
Q mL/s Pcm H2O
Q mL/s Pcm H2O
40
40
30
30
20
20
10
10
0
0
5
10
15
20
25
30
35
0
s
OBSTRUCTION COMPRESSIVE
10
15
20
25
30
35
s
40
γ = 10 cm H2O
cassure à tc = 5 s
30
30
20
20
10
10
5
5
Q mL/s Pcm H2O
40
0
0
CASSURE D'EXCITATION DU DETRUSOR
Q mL/s Pcm H2O
0
g = 0.5
10
15
20
25
30
35
0
s
0
5
10
15
20
25
30
35
s
Fig. 1. Calculs théoriques des courbes de débit (trait continu) et de la pression détrusorienne (tirets) pour un volume vésical initial de 300 mL (sujet
féminin). En haut à gauche : cas normal ; en haut à droite : obstruction constrictive (réduction de la surface de section efficace de l’urètre) avec
g = 0,5 ; en bas à gauche : obstruction compressive avec g = 10 cmH2O ; en bas à droite : cassure de l’excitation du détrusor après cinq secondes
surface de section de l'urètre
surface de section de l'urètre
COMPRESSION
CONSTRICTION
pression d'ouverture
g = 1.0
γ=0
g = 0.5
γ = 20 cm H2O
0
0
40 cm H2O
40
pression du detrusor
80
pression du detrusor
Fig. 2. Effet d’une obstruction sur la mécanique urétrale. Une obstruction compressive (paramètre g) diminue la surface de section de l’urètre mais
conserve la pression d’ouverture. Une obstruction compressive (paramètre g) ne modifie pas la surface de section mais augmente la pression d’ouverture
Tableau I. Données urodynamiques avant et après mise en place d’une bandelette sous-urétrale, TVT® ou TVT-O®, pour traitement
d’une incontinence urinaire. Une valeur de p inférieure ou égale à 0,05 est considérée comme significative
Qmax mL/s
Vu mL
Vr mL
pclot cmH2O
LFU mm
Avant TVT®
Aprè s TVT®
p
Avant TVT-O®
Aprè s TVT-O®
p
35 10
446 197
44 107
51 26
35 12
29 14
397 210
64 91
46 17
34 9
0,05
0,33
0,46
0,17
0,91
33 13
373 223
49 59
48 24
38 11
23 12
363 192
132 195
41 9
40 9
0,001
0,96
0,029
0,14
0,82
La forme de la courbe de débit est notablement modifiée
(augmentation de la durée du débit ou courbe quasipolyphasique) en postopératoire (Fig. 4), à l’exception de
quatre dossiers du groupe TVT®.
Un dossier du groupe TVT® et six dossiers du groupe
TVT-O® n’ont pas permis d’obtenir une analyse fiable, soit
en raison de courbes de débit polyphasiques, soit en raison
d’une discordance entre l’analyse pas à pas et l’analyse
113
mL/s
a
E
40
d
débitmétrie libre
30
4
20
excitation du sphincter
3
10
0
2
0
5
10
15
20
25
30
35
excitation du detrusor
s
mL/s
1
b
débitmétrie calculée
40
0
30
g = 1.27
0
5
10
15
20
25
30
35
s
mL/s Pcm H2O
20
10
40
0
0
5
15
10
20
25
30
35
pdet calculée
s
30
mL/s
c
débitmétrie calculée
40
pabd.eff calculée
20
30
g = 1.27
10
20
10
0
0
0
5
10
15
20
25
30
35
0
5
10
15
20
25
30
35
s
s
Fig. 3. Analyse pas à pas d’une courbe de débitmétrie libre à un mois d’un TVT® ; l’analyse de la débitmétrie préopératoire a permis d’évaluer le
paramètre urétral : g = 1,27. (a) courbe enregistrée ; (b) calcul théorique (trait gras) avec l’hypothèse d’une valeur du paramètre g identique à la
valeur trouvée en préopératoire : superposition des courbes de débitmétrie (enregistrée et calculée) non obtenue ; (c) calcul théorique après
addition d’une compression avec g = 10 cmH2O : restitution correcte de la partie initiale de la courbe ; (d) interprétation finale : cassure de
l’excitation du détrusor au temps t = 7 secondes et addition d’une faible poussée abdominale efficace (i.e. n’agissant que sur la vessie) en fin de
miction (pointillés). La courbe en tirets dans le registre bas représente la pression du détrusor. Le registre haut représente les excitations du
sphincter (traits continus) et du détrusor (tirets) ; les excitations standard sont en traits fins
Q mL/s
Q mL/s
TVT®
TVT-O®
40
40
AVANT Vu(mes) = 466 mL
APRÈS Vu(mes) = 576 mL
AVANT Vu(mes) = 218 mL
30
30
20
20
10
10
APRÈS Vu(mes) = 734 mL
0
0
0
5
10
15
20
25
30
35
0
s
®
5
10
15
20
25
30
35
s
®
Fig. 4. Débitmétries libres avant et après TVT à droite, avant et après TVT-O à gauche. On remarque les importantes modifications de la forme des
courbes induites par la chirurgie
automatique. Pour tous les autres dossiers, le critère requis
pour la superposition des courbes enregistrées et calculées
a été obtenu (erreur quadratique < 2 %).
Lorsque plus d’une valeur du paramètre urétral était
trouvée à partir de la débitmétrie préopératoire (cinq
courbes du groupe TVT® et dix dossiers du groupe
TVT-O®), le choix de la valeur la plus probable était
réalisé à partir de la débitmétrie postopératoire (seule une
obstruction peut apparaı̂tre).
Avant chirurgie, l’urètre est trouvé normal chez cinq
patientes, béant chez sept et présentant une obstruction
constrictive (g < 1,0) chez neuf dans le groupe TVT® ;
dans le groupe TVT-O®, l’urètre est normal chez deux
patientes, béant chez sept, présentant une obstruction
constrictive chez six et une obstruction compressive
(g > 0) chez une. Cette analyse montre qu’il n’existe pas
de différence significative du statut urétral préopératoire
entre les deux groupes.
114
TVT®
1 MOIS PRÉOPÉRATOIRE
1 MOIS POSTOPÉRATOIRE
Q mL/s
Q mL/s
40
40
30
30
20
20
10
10
0
0
5
10
15
20
25
30
Vu(mes) = 202 Vu(cal) = 202 Vr(cal) = 0 g = 0.80
35
s
0
0
5
10
15
20
25
30
35
s
Fig. 5. Analyse modélisée des courbes de débitmétrie avant et après TVT® : courbes enregistrées en trait fin, courbes calculées en trait épais. Le
paramètre g reste inchangé (g = 0,8) à un mois postopératoire, mais une compression de g = 23 cmH2O est induite par la bandelette
TVT-O®
2 MOIS PRÉOPÉRATOIRES
1 MOIS PRÉOPÉRATOIRE
Q mL/s
Q mL/s
40
40
30
30
20
20
10
10
0
0
5
10
15
20
25
30
35
S
0
0
5
10
15
20
25
30
35
S
Vu(mes) = 322 Vu(cal) = 340 Vr(cal) = 0 g = 0.65
Fig. 6. Analyse modélisée des courbes de débitmétrie avant et après TVT-O® : courbes enregistrées en trait fin, courbes calculées en trait épais. Le
paramètre g reste inchangé (g = 0,65) à un mois postopératoire, mais une compression de y = 22 cmH2O est induite par la bandelette
Après chirurgie, le paramètre urétral g garde la même
valeur (ou décroı̂t de manière non significative), mais la
restitution des courbes implique l’intervention d’une
compression chez 18 patientes après TVT® (81,2 %)
(Fig. 5) et chez 12 patientes après TVT-O® (75,0 %)
(Fig. 6). Les valeurs de cette compression sont g = 11,0 6,7 cmH2O dans le groupe TVT® et g = 15,2 10,1 cmH2O
dans le groupe TVT-O®. Chez l’unique patiente pour
laquelle était trouvée une compression préopératoire, la
pose de la bandelette TVT-O® entraı̂ne une diminution de g
de 16,3 à 10,0 cmH2O.
Discussion
En postopératoire précoce (un mois), la modification de la
forme de la courbe de débit, traduisant une obstruction, est
plus importante après TVT-O® qu’après TVT®. Une
modification dans le même sens a été décrite chez des
patientes ayant bénéficié de la pose d’un TVT® pour
traitement d’incontinence [8]. En revanche, une étude
récente [9] décrit l’absence de modification significative de
la débitmétrie dans une population de 120 femmes ayant
bénéficié d’un TOT, bien que 11 rétentions transitoires
soient signalées... Les modifications rapportées dans notre
étude pourraient être rattachées à un phénomène irritatif
secondaire à la mise en place de la bandelette.
Une diminution significative du Qmax a été décrite
dans plusieurs études relatives au TVT® [8-10] et au TOT
[11]. Une augmentation du résidu post-mictionnel a
également été décrite après TVT® [8] et TOT [11] ; dans
notre étude, seul le TVT-O® entraı̂ne une augmentation
significative du résidu.
115
Les bandelettes sous-urétrales TVT® et TVT-O®
semblent avoir des effets comparables sur la mécanique
urétrale pendant la phase mictionnelle, puisqu’elles
n’induisent pas une obstruction constrictive (diminution
de la surface de section efficace de l’urètre) mais une
compression locale. Il a été suggéré que le TVT® permet
la continence par un effet compressif secondaire à la
mobilité de l’urètre proximal. Cette étude met en
évidence un plus grand pourcentage de patientes dont
la phase mictionnelle est affectée par une compression
dans le groupe TVT® alors que l’amplitude de la contrepression est plus importante dans le groupe TVT-O®. Les
raisons de ces différences pourraient être la position et la
direction de la bandelette. Les résultats d’une étude
récente [12] permettent de proposer une explication.
Dans cette étude, la position de la bandelette, TVT® ou
TOT, a été étudiée par échographie introı̈tale. Au repos,
l’aspect de chacune des bandelettes est un V ; l’angle
d’ouverture de ce V augmente lors d’efforts de poussée.
Comme le site de perforation du fascia est le même quelle
que soit la bandelette, l’effort de poussée peut entraı̂ner
un déplacement latéral expliquant l’ouverture du V et la
compression de l’urètre. En raison de la direction de
chacune des bandelettes après traversée du fascia, la
résultante des forces est plus importante pour un TOT
que pour un TVT ® ; ce résultat explique la plus
importante amplitude de la compression secondaire à
la mise en place du TVT-O®.
Conclusion
La modélisation permet par simulation d’hypothèses
physiopathologiques d’identifier et de quantifier les
conséquences sur la phase mictionnelle de la mise en
place d’une bandelette sous-urétrale, TVT® ou TVT-O®,
pour traitement de l’incontinence urinaire. Chacune des
bandelettes implique la mise en jeu d’une compression
externe sur l’urètre pour restaurer la continence.
Pendant la miction, le TVT-O® provoque un effet
compressif plus important, s’il se produit un effort de
poussée, en raison de son trajet. Cette étude préliminaire
doit être poursuivie afin de mieux préciser le mécanisme
d’action et les conséquences à long terme du TVT-O®.
Annexe : Procédure d’analyse des courbes
de débitmétrie libre à l’aide du logiciel VBN®
Nous envisageons ici le cas de figure présenté dans cet article,
c’est-à-dire l’analyse de la seule débitmétrie libre. Dans ce
cas, l’hypothèse posée a priori est que le detrusor est normal.
E´tape 1 : entré e des donné es (Fig. 3-a)
On entre la courbe de débitmétrie (format ICS, format
csv, ou courbe scannée), le volume initial vésical (volume
uriné + volume résiduel) et le sexe du patient.
La mé connaissance du volume ré siduel entraıˆnera
donc, pour des volumes ré siduels supé rieurs à 20 % du
volume initial une incertitude notable sur les ré sultats.
E´tape 2 : calcul pré liminaire (Fig. 3-b)
Un premier calcul est effectué avec l’hypothèse que le
sujet est normal.
E´tape 3 : ajustement de la pente initiale
de la courbe de dé bit (Fig. 3-c)
Chez une femme, on a, en première intention, recherché
une modification de l’urètre, obstruction (constrictive ou
compressive) ou béance pouvant expliquer la différence
entre courbe enregistrée et courbe calculée.
Le paramètre g, sans dimension, caractérise une
obstruction de type constrictif (réduction de la surface
de section de l’urètre) g < 1,0 ou une béance g > 1,0 ; la
valeur normale de ce paramètre est g = 1,0.
Le paramètre g, en cmH2O, caractérise une obstruction
de type compressif (s’exerçant à l’extérieur de l’urètre). Ce
type d’obstruction est comparable à celle secondaire à
l’hypertrophie bénigne de prostate chez l’homme.
E´tape 4 : recherche d’une cassure d’excitation
du detrusor (Fig. 3-d)
Lorsque la courbe calculée à l’étape 3 retrouve bien la
pente initiale de la courbe de débit mais reste ensuite
supérieure à la courbe enregistrée, on peut évoquer une
cassure (fading) de l’excitation du detrusor. Ce phénomène circonstanciel n’est pas constant et peut avoir une
amplitude variable pour des mictions successives.
E´tape 5 : recherche d’une poussé e abdominale
efficace (Fig. 3-d)
La poussée abdominale fait partie des phénomènes
circonstanciels. Pour avoir une action sur le débit, elle ne
doit s’exercer que sur la vessie. Nous appelons pression
abdominale efficace une telle poussée.
Pour une plus grande fiabilité de l’analyse, l’introduction d’une pression abdominale ne doit être réalisée
que dans l’étape finale de l’analyse.
E´tape 6 : comparaison de plusieurs dé bitmé tries (Fig. 7)
La fiabilité d’une interprétation est accrue par la comparaison de deux débitmétries successives (réalisées lors de
la même session urodynamique). Alors, les paramètres
mécaniques d’urètre doivent être invariants.
La comparaison de débitmétries successives permet
d’identifier un autre type de phénomène circonstanciel se
manifestant par un défaut de cette invariance ; il s’agit
de l’ouverture retardée ou de la relaxation incomplète
116
mL/s
mL/s
a
mL/s
b
40
40
40
30
30
30
20
20
20
10
10
10
0
0
0
5
10
15
20
c
0
0
5
10
15
20
0
5
10
15
20
Première itération: Vini = 202 mL, g = 0,8
Fig. 7. Modification de la courbe de débit induite par (b) un retard d’ouverture du sphincter de 5 secondes, (c) une relaxation incomplète du
sphincter pendant la phase mictionnelle. En (a) première itération de calcul pour un volume vésical initial de 202 mL et un paramètre urétral g = 0,8.
En trait fin débitmétrie enregistrée, en trait gras débitmétrie calculée
per-mictionnelle du sphincter. L’ouverture retardée
conduit à une pente initiale de la courbe de débitmétrie
très supérieure à ce que prévoit le calcul, la relaxation
incomplète per-mictionnelle conduit à une apparente
obstruction de type compressif.
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© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0129-x
ARTICLE ORIGINAL / ORIGINAL ARTICLE
La chirurgie des fistules anales n’a pas d’influence
sur la latence distale anale motrice du nerf pudendal
C. Thomas, F. Daniel, I. Etienney, P. Atienza
Service de proctologie médico-interventionnelle, groupe hospitalier Diaconesses-Croix-Saint-Simon,
18, rue du Sergent-Bauchat, F-75012 Paris, France
Résumé : La chirurgie des fistules anales est reconnue
comme un facteur de risque majeur d’incontinence anale.
Le mécanisme de cette incontinence réside principalement
dans les lésions sphinctériennes chirurgicales, cependant
un mécanisme neurogène par atteinte du nerf pudendal
n’est pas exclu. L’objectif de notre étude était d’évaluer
l’influence de la chirurgie anale sur les latences distales
anales motrices du nerf pudendal (LDANP).
Maté riel et mé thode : Les LDANP ont été mesurées en
pré- et postopératoire chez respectivement 33 patients (28
hommes et cinq femmes) opérés de suppuration anale et
34 patients (21 hommes et 13 femmes) opérés d’hémorroı̈dectomie pédiculaire selon la technique de Milligan et
Morgan.
Ré sultats : L’âge moyen était de 49,6 ans dans le
groupe hémorroı̈des et 45 ans pour le groupe fistule
(p = 0,19). Le sex-ratio n’était pas différent entre les deux
groupes (p = 0,06). Dans le groupe fistule anale, la
moyenne de la LDANP en préopératoire est de 2,42 ms
(± 0,46) du côté infecté et de 2,40 ms (± 0,42) du côté
sain, avec une différence significative avec les latences
préopératoires ipsi-latérales du groupe témoin : 2,73 ms
(± 0,60) [p = 0,02, p = 0,01]. Les variations de la LDANP
en postopératoire du groupe fistule, aussi bien du côté
sain (LDANP = 0,06 ± 0,42 ms) que du côté pathologique
(LDANP = 0,03 ± 0,40 ms), sont comparables à celle du
groupe hémorroı̈des (LDANP = 0,01 ± 0,48 ms, p = 0,63,
p = 0,84).
Conclusion : La conduction nerveuse des nerfs
pudendaux ne semble pas être altérée par la présence
d’un processus infectieux de la fosse ischiorectale, non
plus que par le geste chirurgical. Cependant, une étude
électrophysiologique plus fine paraı̂t nécessaire pour
évaluer le retentissement sur l’innervation périnéale.
Mots clés : Latence distale anale motrice nerf pudendal –
Fistule anale
Pudendal nerve terminal motor latency is not altered
following anal fistula surgery
Abstract: Anal fistula surgery presents a risk factor for
anal incontinence. Surgical sphincter lesions are the
main cause of this type of incontinence, although related
damage to the pudendal nerve is possible. The aim of our
study was to evaluate the influence of anal surgery on
pudendal nerve terminal motor latency (PNTML).
Material and method: PNTML values were measured
pre- and postoperatively in 33 patients (28 men,
five women) treated for anal suppurations and 34
patients (21 men, 13 women) undergoing haemorrhoidectomy using the Milligan-Morgan technique.
Results: The average age was 49.6 in the haemorrhoid
group and 45 in the fistula group (P = 0.19). There was no
difference in the sex ratio between the two groups
(P = 0.06). In the anal fistula group, the preoperative
mean PNTML was 2.42 ms (± 0.46) on the infected side
and 2.40 ms (± 0.42) on the healthy side, significantly
differing from the control group’s preoperative ipsilateral latencies: 2.73 ms (± 0.60) [P = 0.02, P = 0.01]. The
variations in postoperative PNTML in the fistula group,
both on the healthy side (PNTML = 0.06 ± 0.42 ms)
and infected side (PNTML = 0.03 ± 0.40 ms), are
comparable to those in the haemorrhoid group
(PNTML = 0.01 ± 0.48 ms; P = 0.63, P = 0.84).
Conclusion: Nerve conduction in the pudendal nerves
does not seem to be altered by the presence of an infectious
process in the ischiorectal fossa or by the surgical
procedure. However, a more refined electrophysiological
study would be necessary to assess the repercussions for
perineal innervation.
Keywords: Pudendal nerve terminal motor latency – Anal
fistula
Introduction
Le traitement chirurgical des fistules anales est délétère
sur la fonction sphinctérienne anale. Selon les études,
l’incontinence anale postopératoire survient chez 3 à
45 % des patients [1,2]. Le mécanisme de cette incontinence n’est pas parfaitement élucidé. Les fistules complexes, la hauteur du trajet fistuleux trans-sphinctérien,
l’atteinte du sphincter interne apparaissent comme des
facteurs prédictifs d’incontinence anale postopératoire [3].
118
Cependant, les études fonctionnelles, manométrie anorectale et échographie endo-anale, ne permettent pas d’en
déterminer le mécanisme précis. L’importance de l’innervation périnéale avait déjà été soulevée dans de précédentes études. En outre, dans une étude anatomique
récente portant sur 28 cadavres, Schraffordt et al. révèlent
l’existence d’un plexus nerveux périanal chez 17,9 % des
cadavres étudiés [4]. Ce plexus est constitué à partir des
branches du nerf pudendal.
La mesure de la latence distale anale motrice du nerf
pudendal (LDANP) est une technique validée et reproductible pour explorer la conduction nerveuse du nerf
pudendal [5]. Le but de notre étude est d’évaluer les
conséquences du processus infectieux de la fosse
ischiorectale sur la conduction du nerf pudendal, et par
ailleurs, l’influence de la chirurgie des fistules anales sur
cette conduction.
Matériel et méthode
Trente-trois patients opérés pour fistule anale ont été
inclus dans l’étude. Ont été exclus les patients porteurs
d’une affection générale pouvant léser le système nerveux
périphérique, les femmes enceintes, les patients contaminés par le VIH, et les patients opérés sous anesthésie
générale.
Tous les patients ont été opérés sous rachianesthésie,
en position de la taille. L’intervention comportait un
temps exploratoire, utilisant un écarteur anal bivalve et
l’injection de bleu de méthylène par l’orifice secondaire,
permettant de préciser le type de fistule anale : transsphinctérienne inférieure, supérieure, complexe en fer à
cheval ou inter-sphinctérienne. Vingt-deux patients
présentaient une fistule de la fosse ischiorectale droite
ou gauche et 0nze patients étaient porteurs d’une fistule
médiane postérieure ou intramurale, sans communication avec une fosse ischiorectale. Le traitement comportait la mise à plat du trajet, soit en un seul temps, soit en
deux ou trois temps avec mise en place de sétons. Vingtcinq patients étaient ainsi opérés en deux temps pour
une fistule trans-sphinctérienne supérieure. Le premier
temps consistait à la mise à plat de l’abcès et le drainage
de la fistule par un drain ; le second temps, un drain
élastique pour tractions ultérieures était inséré dans le
trajet. L’évaluation de la LDANP était réalisée lors du
premier temps opératoire. Trente-quatre patients opérés
d’hémorroı̈des, sans fistule associée, représentaient le
groupe témoin. L’hémorroı̈dectomie comportait une
résection pédiculaire ouverte réalisée selon la technique
de Milligan et al. [6]. Cette technique ne nécessite pas le
drainage des fosses ischiorectales ni la mise en place
d’écarteur bivalve. Tous les patients étaient opérés sous
rachianesthésie.
La mesure de la LDANP était réalisée, selon la méthode
précédemment décrite, immédiatement en pré- et
postopératoire, patient anesthésié [7]. La mesure de la
LDANP était réalisée avec l’électrode St Marks (DantecMedtronic, Keypoint software, Skovlunde, Danemark)
disposée sur l’index d’une main gantée intra-rectale,
permettant la stimulation des nerfs pudendaux droit et
gauche au niveau de l’épine ischiatique. Le recueil de la
réponse globale motrice se faisait par électrode de surface
au niveau du sphincter externe anal. Les nerfs pudendaux
étaient successivement stimulés à droite puis à gauche.
Quatre à cinq réponses étaient étudiées de chaque côté. La
LDNAP était mesurée depuis l’artefact de stimulation
jusqu’au début de la réponse motrice. L’anesthésie réalisée
chez tous les patients était une rachianesthésie, sans
influence sur la conduction nerveuse et la réponse motrice.
Les valeurs normales de LDA de notre laboratoire ont été
précédemment rapportées [8].
Étude statistique
L’analyse et le traitement des données ont été effectués
en utilisant un logiciel Statview 5.0, version 1982-1987
(SAS Institute Inc., Cary, NC). Les comparaisons
statistiques des caractéristiques des différents groupes,
ainsi que les variations des LDANP en postopératoire
(LDANP) ont été faites par le test t pour les séries
appariées ou indépendantes selon les cas. Une différence
significative était retenue pour une valeur de p inférieure
à 0,05.
Résultats
Le groupe des fistules renfermait 28 hommes et cinq
femmes. L’âge moyen était de 45 ans. Le groupe témoin
était lui constitué de 21 hommes et de 13 femmes, opérés
pour pathologie hémorroı̈daire (Fig. 1). L’âge moyen était de
49,6 ans. Il n’existait pas de différence significative entre les
deux groupes en matière de sex-ratio (p = 0,06), et d’âge
(p = 0,19). La distribution des différents trajets fistuleux était
comme suit : 25 fistules trans-sphinctériennes hautes, six
fistules trans-sphinctériennes basses, 11 diverticules intra-
Fig. 1 Distribution hommes/femmes
119
Fig. 2 Distribution des trajets fistuleux (un patient peut en avoir plusieurs)
Fig. 4 Moyenne des LDANP préopératoires côté infecté dans le sousgroupe fistules trans-sphinctériennes ischiorectales, dans le sousgroupe fistules intra-murales et médianes postérieures, et le groupe
hémorroı̈des
Fig. 3 Moyenne des LDANP préopératoires côtés sain et infecté dans le
groupe fistules anales et côté correspondant dans le groupe hémorroı̈des
muraux, sept trajets antéro-droits, dix trajets postéro-droits,
cinq trajets antéro-gauches, sept trajets postéro-gauches, et
11 trajets médians postérieurs (Fig. 2). Dans le groupe fistule
anale, la moyenne de la LDANP en préopératoire est de
2,42 ms (± 0,46) du côté infecté et de 2,40 ms (± 0,42) du
côté sain, avec une différence significative avec les latences
préopératoires ipsi-latérales du groupe témoin : 2,73 ms
(± 0,60) [p = 0,02, p = 0,01] (Fig. 3). La moyenne de la
LDANP préopératoire du côté pathologique du sous-groupe
fistules de la fosse ischiorectale était de 2,44 ms (± 0,43), sans
différence significative avec celle du sous-groupe fistules
intramurales et médianes postérieures (2,40 ± 0,52 ms,
p = 0,81), ni celle du groupe témoin (p = 0,06, p = 0,11)
(Fig. 4). Les variations de la LDANP en postopératoire
du groupe fistule, aussi bien du côté sain (LDANP =
0,06 ± 0,42 ms) que du côté pathologique (LDANP =
0,03 ± 0,40 ms) étaient comparables à celle du groupe
hémorroı̈des (LDANP = 0,01 ± 0,48 ms, p = 0,63 et p = 0,84
respectivement) (Fig. 5).
Discussion
Le traitement chirurgical des fistules anales est reconnu
délétère sur la fonction sphinctérienne anale. Deux études
Fig. 5 Moyenne des LDANP préopératoires et postopératoires côtés sain
et infecté dans le groupe fistules anales et côté correspondant dans le
groupe hémorroı̈des
ont montré une corrélation entre une diminution des
pressions de repos en manométrie ano-rectale et incontinence anale postopératoire : ainsi, l’atteinte du sphincter
interne anal paraı̂t être un facteur pronostique important
[9,10]. Une troisième étude montre une diminution des
pressions de repos et de la contraction volontaire [3].
L’incontinence anale postopératoire des fistules anales
opérées paraı̂t donc être liée à une atteinte des sphincters
interne et externe anaux. Cependant, cette atteinte n’est pas
toujours due à une rupture sphinctérienne. Van Tets et
Kuijpers avaient soulevé l’hypothèse de la responsabilité de
l’innervation [10].
Notre étude ne montre pas de différence significative des
LDNAP pré- et postopératoires. À notre connaissance, notre
étude est la deuxième s’intéressant à l’influence
de la chirurgie des fistules anales sur l’innervation
périnéale : Lunniss et al. avaient déjà observé ce résultat [9].
Dans notre étude, les mesures ont été réalisées dans
de très bonnes conditions d’examen : examens indolores
120
chez des patients dont les muscles périnéaux étaient
relaxés. La technique de mesure est reconnue, validée et
reproductible.
Notre étude ne montre pas de différence entre les
latences pré- et postopératoires dans le groupe des fistules.
Ainsi, le geste chirurgical ne semble pas altérer la
conduction nerveuse. De même, l’absence d’augmentation des latences entre côté sain et côté infecté dans le
groupe fistule montre que le processus infectieux d’une
fosse ischiorectale ne modifie pas la conduction nerveuse
des nerfs pudendaux. Ces résultats paraissent surprenants si l’on considère la présence proche d’un plexus
nerveux ; il est vrai que ce dernier ne semble exister que
chez une minorité de patients.
Par ailleurs, les latences préopératoires du groupe
hémorroı̈des sont supérieures à celles du groupe fistules : ce
résultat rappelle une précédente étude [11] ; nous n’avons
pas d’explication précise à cela, peut-être est-ce lié à la
dyschésie souvent présente en cas de pathologie hémorroı̈daire et donc à un étirement des nerfs pudendaux.
Mais peut-on dire pour autant que la chirurgie est
sans influence sur l’innervation périnéale ? La mesure de
la LDANP évalue la conduction motrice du nerf pudendal
par sa latence et non par l’amplitude des potentiels
d’action recueillis : quelques fibres motrices non altérées
suffisent pour maintenir une latence motrice normale.
Par ailleurs, la conduction sensitive, souvent la première
altérée, n’est pas explorée. Ainsi, récemment, la question
de la valeur prédictive de cette mesure a été soulevée [12].
D’autres techniques électrophysiologiques, en particulier l’EMG quantifié, sont reconnues validées [13]. Pour
évaluer la responsabilité de l’innervation périnéale dans
l’incontinence postopératoire des fistules anales, il est
nécessaire d’utiliser d’autres techniques électrophysiologiques complémentaires de la mesure de la LDNAP.
Conclusion
La conduction nerveuse des nerfs pudendaux ne semble
pas être altérée par la présence d’un processus infectieux
de la fosse ischiorectale, non plus que par le geste
chirurgical. Cependant, une étude électrophysiologique
prenant en compte non seulement le composant moteur,
mais aussi les composants sensitif et autonome de
l’innervation, paraı̂t nécessaire pour évaluer le retentissement sur l’innervation périnéale.
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© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0130-4
ARTICLE ORIGINAL / ORIGINAL ARTICLE
Étude rétrospective portant sur 93 cas de prolapsus
traités par plaque de Pelvicol®
J. Mercky, A. Chami, V. Zerr, D. Collin
Fédération de gynécologie et d’obstétrique, centre hospitalier de Haguenau, 64, avenue Professeur-Leriche,
F-67504 Haguenau cedex, France
Résumé : L’objectif était d’évaluer l’efficacité et la
tolérance à court et à long terme de la plaque de Pelvicol®
dans le traitement du prolapsus uro-génital de la femme.
L’étude rétrospective portait sur 93 cas de prolapsus urogénital traités par une pose de plaque de Pelvicol® de 2003
à 2005 dans notre département de chirurgie gynécologique. Nous rapportons les complications et les résultats
fonctionnels avec un recul de 24 mois. L’âge moyen des
patientes était de 60,6 ans. La parité moyenne était de 2,97.
Les patientes présentaient une cystocèle dans 89,2 % des
cas, une rectocèle dans 46,2 % des cas, une hystéroptose
dans 44 % des cas et une élytrocèle dans 5,3 % des cas. La
plaque de Pelvicol® a été posée en position antérieure
dans 64,5 % des cas, en position postérieure dans 26,9 %
des cas, en position antérieure et postérieure associées
dans 5,3 % des cas. Nous n’avons pas observé de
complication peropératoire. Avec un recul allant de
six à vingt-quatre mois, nous avons relevé quatre
récidives de cystocèle (4,3 %) et une récidive d’élytrocèle
(1 %). Nous signalons quatre cas d’hématomes périnéaux
(4,3 %) et quatre cas d’infections de plaie opératoire
(4,3 %) avec un cas d’exposition de prothèse n’ayant pas
nécessité son retrait. Aucun cas de rejet de prothèse n’a
été observé. La plaque de Pelvicol® dans le traitement du
prolapsus uro-génital de la femme est un matériel fiable et
bien toléré. On observe un taux d’efficacité de 94,6 %. Le
suivi clinique de ces patientes va continuer.
Mots clés : Prolapsus – Cystocèle – Rectocèle –
Xénogreffe – Biomatériaux
Retrospective study of 93 cases of genital prolapse
treated with the Pelvicol® implant
Abstract: Our goal was to assess the effectiveness as well as
short- and long-term tolerance of the Pelvicol® collagen
matrix in the treatment of genital prolapse. We carried out a
retrospective study of 93 women who received the Pelvicol®
implant in our gynaecological surgery department from
2003 to 2005 for the treatment of genital prolapse. Here, we
report the adverse effects and functional outcome after
Correspondance : E-mail : [email protected]
24 months. The average age of the patients was 60.6, and the
average number of children per patient was 2.97. The
patients presented with cystocele in 89.2%, rectocele in
46.2%, hysteroptosis in 44%, and elytrocele in 5.3% of the
cases. The Pelvicol® implant was used to repair the anterior
wall in 64.5%, posterior wall in 26.9%, and both walls in 5.3%
of the cases. No peroperative complications were observed.
Six to 24 months after the procedures, we noted four
recurrences of cystocele (4.3%) and one of elytrocele (1%).
We also noted four cases of perineal haematoma (4.3%) and
four of surgical site infection (4.3%), including one case of
implant exposure that did not require its removal. No
implant rejection was observed. The Pelvicol® collagen
matrix is a reliable and well-tolerated implant for the
treatment of genital prolapse in women. Its effectiveness rate
was 94.6%. The clinical follow-up of these patients will
continue.
Keywords: Prolapse – Cystocele – Rectocele – Xenograft –
Biomaterial
Introduction
Une femme sur trois, voire une sur deux, va développer
des troubles de la statique pelvienne après 60 ans. Selon
Handa, en 2004, 31,8 % des femmes en post-ménopause
présentaient un prolapsus uro-génital [1].
Hendrix, en 2002, trouvait chez 16 616 femmes nonhystérectomisées incluses dans l’étude de la Woman
Health Initiative 14,2 % d’hystéroptose, 34,3 % de cystocèle et 18,6 % de rectocèle [2].
De nombreuses techniques chirurgicales ont été
décrites depuis 50 ans pour la cure de prolapsus urogénitaux. Certains auteurs décrivaient l’utilisation
d’autogreffe de tissu conjonctif comme matériel de
soutènement [3]. Plus tard sont apparus les matériaux
prothétiques (Gore-Tex® [4], polypropylène [5]), puis la
xénogreffe permettant l’utilisation de matériaux biologiques d’origine animale. La cure de prolapsus par matériel
prothétique d’origine porcine Pelvicol® (Bard) est un
122
domaine où la littérature reste pauvre. En effet, ce
matériau a initialement été conçu, entre autres, pour la
chirurgie réparatrice maxillo-faciale et urologique.
Objectif
Nous avons évalué l’efficacité et la tolérance du Pelvicol®
dans le traitement du prolapsus uro-génital.
Matériel et méthode
Maté riel
Le Pelvicol® est composé de derme porcin acellulaire. Il
est fabriqué à partir de peau de porc dont la couche
épidermique a été retirée. Il est ensuite stabilisé par crosslinking au héxaméthylène–diisocyanate (HMDI) qui
protège le matériau contre la résorption par les collagénases de l’organisme receveur, lui permettant de conserver sa structure intègre dans le temps. Il devient une
matrice bio-compatible de collagène et d’élastine. Le
matériau est ensuite stérilisé par irradiation gamma à
faible dose, puis hydraté par solution saline.
Après sa pose dans l’organisme receveur, la matrice
de Pelvicol® est colonisée par les fibroblastes, créant une
coque fibreuse augmentant la résistance du tissu environnant.
Il se présente sous la forme d’un rectangle souple
de 0,75 à 2 mm d’épaisseur. Notre département utilise
principalement le Pelvicol® de 2 12 cm de surface.
Mé thode
Nous avons effectué une étude rétrospective portant sur
93 cas de patientes ayant présenté un prolapsus urogénital traité dans notre service de 2003 à 2005.
On observait une cystocèle dans 89,2 % des cas, une
rectocèle dans 46,2 % des cas, une hystéroptose dans
44 % des cas et une élytrocèle dans 5,3 % des cas.
L’âge moyen des patientes était de 60,6 ans. La parité
moyenne était de 2,97.
La plaque de Pelvicol® a été posée en position
antérieure dans 64,5 % des cas, en position postérieure
dans 26,9 % des cas, en position antérieure et postérieure
associées dans 5,3 % des cas. Les interventions ont été
conduites par deux opérateurs principaux expérimentés
dans le domaine de la chirurgie pelvienne.
Notre protocole prévoyait une cure de métronidazole
(Flagyl®) pendant trois jours avant l’intervention. Une
irrigation vaginale à la Bétadine® était effectuée au bloc
opératoire.
Pour les cas de cystocèle, la procédure commence
après sondage vésical à demeure par une colpotomie
antérieure verticale sous-urétrale de 3 à 4 cm. On dissèque
ensuite la vessie prolabée en la séparant de la paroi
vaginale, après incision du fascia d’Halban, en progressant
de chaque côté vers la fosse para-vésicale homo-latérale.
La plaque de Pelvicol® était ensuite posée dans le sens
transversal après l’avoir réduite à 10 cm, sachant que la
distance entre les deux arcs tendineux du fascia pelvien est
de 10 cm. Enfin, la plaque était fixée à l’aide d’un fil
d’Ethicrin® 2/0 par trois points, le long de chaque arc
tendineux. La colpotomie antérieure était suturée à l’aide
de points séparés de fil résorbable.
Pour les cas de rectocèle, on pratique une colpotomie
postérieure triangulaire puis on disséquait le rectum de
la paroi vaginale en progressant jusqu’à la fosse
pararectale de chaque côté. On réalise une plicature du
fascia prérectal avec pose d’une plaque de Pelvicol® de
2 12 cm rectangulaire étendue longitudinalement. Cette
plaque était ensuite fixée par son bord supérieur aux
ligaments utéro-sacrés et latéralement au fascia prérectal
par un point d’Ethicrin® 2/0. On termine par une
périnéorraphie.
On posait systématiquement en fin de procédure une
mèche vaginale vaselinée qui était retirée au bout de
vingt-quatre heures. La sonde urinaire était retirée au
deuxième jour.
Résultats
Nous n’avons pas observé de complications peropératoires.
Toutes les patientes ont été examinées avant le retour à
domicile.
Avec un recul allant de six à vingt-quatre mois, nous
avons un taux de suivi postopératoire de 82 %. Nous avons
17 cas suivis en ville par le gynécologue traitant, attaché au
département de chirurgie, qui n’a pas rapporté de
complications.
Nous avons relevé quatre récidives de cystocèle
(4,3 %) et une élytrocèle (1 %). Nous signalons quatre
cas d’hématomes périnéaux (4,3 %) et quatre cas d’infections de plaie opératoire (4,3 %) dont l’évolution a été
favorable sous antibiothérapie dans chaque cas.
Deux cas de rétention urinaire aiguë sont à signaler. Ils
sont en rapport avec la pose d’une bandelette sous-urétrale
de type TOT®, dans le cas d’une incontinence urinaire
d’effort associée. Nous notons un cas d’exposition de
prothèse ayant nécessité une antibiothérapie de principe et
une surveillance en ambulatoire plus fréquente. Il n’a pas été
nécessaire de retirer la prothèse. Aucun cas de rejet de
prothèse n’a été observé à vingt-quatre mois de suivi.
Le taux d’efficacité globale de la procédure s’élève à
94,6 % (Tableau 1).
Tableau 1. Selon les autres auteurs [6,7]
Auteurs
Complications Complications Taux de
tardives
succè s (%)
pré coces
Doumerc N,
0
11,3 %
n = 132
David-Montefiore E, 1 plaie
8 cas
n = 47
de vessie
de récidive
1 plaie rectale
1 hématome
94
93,6
123
Discussion
Nous observons dans la littérature des chiffres similaires
en termes de succès et de complications. En effet,
Doumerc, sur une série de 132 cas, ne décrit aucune
complication précoce. Il révèle 11,3 % de complications
tardives, comprenant notamment une exposition de
prothèse d’évolution favorable, ce qui lui confère un
taux de succès de 94 % [6].
De plus, David-Montefiore dans une série de
47 cas rapporte une plaie de vessie, une plaie rectale, un
hématome et huit cas de récidive. Il observe un taux de
succès de 93,6 % [7].
De nombreuses prothèses en polypropylène ont été
mises sur le marché ces dernières années.
Les premières prothèses disponibles étaient responsables de forts taux de complications locales. De Tayrac
retrouvait, dans une étude menée de 1999 à 2002 et
portant sur 63 cas de cystocèle, 5,5 % de rétraction
prothétique et 9,1 % d’érosion vaginale [8].
On note dans la littérature des taux de succès très
variés concernant le traitement du prolapsus uro-génital.
Eglin, en 2006, rapporte une étude portant sur 221 cas de
prolapsus génital traité par voie vaginale par prothèse en
monofilament de polypropylène de type Ugytex® [9]. Il ne
relève aucune infection de prothèse et obtient un taux de
guérison anatomique de 93,2 %. Il conclut en un taux
de récidive de cystocèle de 6 % et de rectocèle de 2,6 %.
L’auteur décrit 16 cas d’érosion vaginale avec exposition
de prothèse (7,2 %).
Une autre complication inhérante à ce type de matériau
est l’inflammation locale. Baessler évoque un phénomène
d’inflammation aiguë avec infiltration de lymphocytes
qui peut compromettre la cicatrisation vaginale après la
pose d’une prothèse en polypropylène monofilament
[10]. D’après Deprest, les prothèses en polypropylène
multifilament génèrent une réaction inflammatoire aiguë
moins intense que les prothèses en monofilament [11].
La phase inflammatoire chronique est cependant plus
marquée dans ce cas. Il montre ensuite expérimentalement, chez le rat, que la réponse inflammatoire globale
Tableau 2. Comparaison avec la prothèse Ugytex®
en polypropylène
AuteursComplications
Polypropylène :
Ugytex®
Age moyen 62.9 ans
[Eglin G. 2006] (9)
Complications Infection : 0
précoces
Exposition de
prothèse : 7.2 %
Complications Récidive de
tardives
cystocèles : 6 %
Récidive de
rectocèles : 2.6 %
Taux de succès 93.2%
Pelvicol®
Age moyen 60.6 ans
[Mercky, Chami 2006]
Infection : 4.3 %
Hématome : 4.3 %
Cystocèles : 4.3 %
Rectocèle : 0 %
94.6%
semble être moins importante dans le cas du Pelvicol®
comparé au Prolène® (Johnson et Johnson) qui est une
prothèse en polypropylène monofilament macroporeux.
Microscopiquement, moins de granulocytes et macrophages sont observés au niveau de la prothèse. Dans son
étude, Deprest poursuit en évaluant la résistance de la
prothèse trois mois après sa pose chez le lapin. En
comparaison avec le Prolène®, le Pelvicol® perd de sa
force tensiométrique alors que la prothèse synthétique la
conserve. De plus, au bout d’un an, 50 % des prothèses de
Pelvicol® posées chez le lapin montraient des signes de
décomposition (Tableau 2).
Le traitement du prolapsus par pose d’un implant
de Pelvicol® nous paraı̂t être une technique efficace et
reproductible, comme le montre la littérature. Le fait que
le taux de satisfaction auprès des patientes en consultation
soit élevé nous conforte dans notre sentiment. Nous
n’avons pas relevé de dyspareunie à distance de l’intervention. L’impact sur la sexualité des patientes s’est révélé
minime quoique difficile à évaluer.
Nous estimons que le résultat fonctionnel de la cure
de prolapsus par Pelvicol® sera pleinement évaluable
après un recul de suivi de patientes de cinq ans.
Conclusion
Notre série de 93 cas de prolapsus uro-génital traités par
plaque de Pelvicol® montre que ce matériel est fiable et
bien toléré. On observe un taux d’efficacité de 94,6 %. Le
suivi clinique de ces patientes va continuer.
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© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0131-3
CAS CLINIQUE / CASE REPORT
Troubles sensitifs périnéaux par compression sacrée
secondaire à un fécalome géant
E. Guettard, P. Raibaut, C. Jacq, A. Terrier, G. Amarenco
Service de rééducation neurologique et d’explorations périnéales, hôpital Rothschild, APHP, Paris, France
Résumé : Nous rapportons ici l’observation d’un patient de
36 ans ayant une hypoesthésie périnéale par compression
sacrée secondaire à un volumineux fécalome. L’apport de
l’IRM est discuté ainsi que les possibles étiologies.
Mots clés : Fécalome – Compression sacrée
Perineal anaesthesia secondary to sacral root
compression caused by severe fecal impaction
Abstract: We report a case of a 36-year-old patient
presenting with perineal anaesthesia secondary to
compression of the sacral roots by severe fecal impaction.
The appropriateness of MRI and possible aetiologies are
discussed.
Keywords: Fecal impaction – Sacral root compression
Observation
Un homme de 36 ans sans antécédent notable consulte
pour des troubles sensitifs périnéaux récurrents. Il s’agit
d’épisodes d’hypoesthésie périnéale (touchant le pénis,
les bourses, le périnée, la région anale, les fesses) survenue
la première fois en mai 2005, et ce pendant trois semaines.
Parallèlement, s’il ne semblait pas exister de trouble
vésicosphinctérien avec une bonne perception du besoin
d’uriner, du passage uréthral des urines et une absence de
dysurie, il signalait la présence d’une constipation
avec fécalome et une abolition des érections. Cette
symptomatologie avait totalement régressé en trois
semaines, l’IRM lombo-sacrée prescrite par son médecin
généraliste s’étant avérée normale. La sérologie herpétique était positive mais la ponction lombaire n’avait mis
en évidence aucun argument en faveur d’une méningoradiculite, il n’y avait pas eu de contage ou d’éruption
suspecte. La symptomatologie récidivait trois mois
plus tard pendant une semaine avec le même type de
trouble. Deux mois plus tard, toujours à l’occasion d’une
constipation majeure, apparition d’une nouvelle hypoesthésie périnéale persistante pendant un mois, associée
cette fois-ci à une abolition de la perception du passage
des selles dans le canal anal, à une dysurie et à une
dysérection. À l’interrogatoire, on ne retrouvait aucun
antécédent multifocal régressif dans l’hypothèse d’une
éventuelle démyélinisation, aucun trouble associé des
membres inférieurs (paresthésie, déficit moteur...) pendant les épisodes d’hypoesthésie périnéale dans l’hypothèse d’une lésion vasculaire du cône. L’examen
neurologique était normal, notamment sans atteinte des
nerfs crâniens, pyramidale ou cérébelleuse, sans ophtalmoplégie ; l’examen neuropérinéal retrouvait une hypoesthésie
diffuse localisée dans les métamères S2, S3, S4, S5 sans
modification des réflexes du cône (réflexe bulbo-anal,
réflexe bulbocaverneux) ou de la tonicité du sphincter anal
et de la commande analytique.
Les sérologies herpétiques, de Lyme et VIH étaient
négatives. L’examen de détection des muscles périnéaux
s’avérait strictement normal, sans processus neurogène
périphérique. Les latences du réflexe bulbocaverneux
étaient normales, tant du côté gauche que du côté droit,
ainsi que la vitesse de conduction sensitive du nerf dorsal
de la verge et l’amplitude du potentiel sensitif distal. En
revanche, si les potentiels évoqués somesthésiques
cérébraux par stimulation des deux membres inférieurs
(SPI gauche et droit à la cheville) étaient normaux, il
existait un retard du complexe P40 lors de l’étude des
potentiels évoqués cérébraux par stimulation du nerf
pudendal. Lors du bilan urodynamique, l’étude débimétrique était normale tant sur le plan qualitatif que
quantitatif. Il n’existait pas de résidu post-mictionnel
significatif. En profilométrie, les pressions de clôture
étaient normales. La cystomanométrie révélait une mégavessie avec une contenance de plus d’un litre associée à un
retard à la perception consciente du besoin, témoin d’une
hypoactivité vésicale. À l’interrogatoire, on retrouvait
clairement depuis toujours un syndrome des mictions
rares (ce patient pouvant uriner deux fois par jour
seulement). La manométrie ano-rectale mettait en évidence une hypertonie du sphincter anal associé à une
diminution de la sensibilité rectale avec un volume à la
première sensation élevé. Les IRM lombo-sacrée et
cérébrale étaient normales mais l’IRM pelvienne retrouvait
un rectum très dilaté avec un fécalome important comblant
l’espace présacré et comprimant les structures nerveuses
(Figs 1-3).
126
Fig. 1. Aspects IRM d’un volumineux fécalome occupant l’espace
présacré chez un patient de 36 ans avec troubles sensitifs périnéaux,
dysurie, dysérection et mégarectum dans le cadre d’une possible
dysautonomie
Fig. 3. Aspects IRM d’un volumineux fécalome occupant l’espace
présacré chez un patient de 36 ans avec troubles sensitifs périnéaux,
dysurie, dysérection et mégarectum dans le cadre d’une possible
dysautonomie
Fig. 2. Aspects IRM d’un volumineux fécalome occupant l’espace
présacré chez un patient de 36 ans avec troubles sensitifs périnéaux,
dysurie, dysérection et mégarectum dans le cadre d’une possible
dysautonomie
Devant cette association de troubles ano-rectaux
(mégarectum, trouble de la sensibilité rectale, trouble de
la sensibilité vésicale, mégavessie), une dysrégulation du
système nerveux autonome, dans le cadre d’une « dysautonomie primaire » avec une expression vésicosphinctérienne et ano-rectale isolée, était recherchée par des tests
cardio-vasculaires de la fonction autonome, d’autant
qu’il existait des manifestations de colopathie spasmodique, de mauvaise digestion, d’excès de transpiration
post-prandiale, de possibles manifestations d’hypotension orthostatique, et un éblouissement visuel facile.
Seule l’étude de la variabilité de l’espace RR au cours de la
respiration ample dirigée s’avérait pathologique (test de la
fonction parasympathique), les autres tests cardio-vasculaires (recherche d’hypotension orthostatique, étude de
la variabilité RR au cours du Valsalva, du Cold Pressor
Test, ratio 30-15) étant négatifs, de même que le test
Schirmer et la débimétrie salivaire. En revanche, les
potentiels cutanés sympathiques périnéaux étaient abolis,
contrastant avec la présence des réponses électrodermiques aux membres supérieurs et inférieurs. Quant au test
au sucre, il était partiellement positif puisque le sucre
n’est pas totalement délité. Dans l’hypothèse d’une
visceral myopathy, une manométrie œsophagienne était
pratiquée, d’autant qu’il existait une dysphagie basse,
manométrie retrouvant une hypotonie de repos du
sphincter inférieur de l’œsophage et une motricité
œsophagienne insuffisante.
Si en définitive, selon les critères d’Ewing, on ne
pouvait formellement affirmer une dysautonomie, une
dysrégulation végétative globale pouvait néanmoins être
évoquée chez ce patient continuant à se plaindre de
troubles vésicosphinctériens (mégavessie, mictions rares,
dysurie, pression abdominale, gouttes terminales, altération de la perception du passage uréthral des urines) ; de
127
troubles génito-sexuels (dysérection et dyséjaculation) ; de troubles ano-rectaux (dyschésie) ; coliques
(ballonnements abdominaux...), gastriques (plénitude
gastrique post-prandiale, difficultés à la digestion) et
œsophagiens. Cette dysrégulation végétative étant de plus
objectivée sur les examens paracliniques (perturbations
de la cystomanométrie, des manométries ano-rectale et
œsophagienne, du test au sucre, des potentiels cutanés
sympathiques, de la variabilité RR au cours de la
respiration profonde).
Il notait enfin que l’impression d’hypoesthésie
pénienne diminuait franchement lorsqu’il arrivait à
évacuer en grande partie son rectum.
Discussion
L’absence d’antécédents familiaux, l’âge de début tardif
(symptômes non apparus dans l’enfance ou l’adolescence), l’absence de dégradation de l’état général et de
syndrome occlusif, l’absence de dilatation du grêle sont
autant d’arguments contre une myopathie viscérale [1,2],
bien que des formes sporadiques aient été décrites [3]. Il
existe peu d’arguments pour une cytopathie mitochondriale (absence de lésion de la substance blanche en IRM)
[4], pour un POLIP syndrome (polyneuropathy, ophthalmoplegia, leukoencephalopathy, and intestinal pseudoobstruction) [absence de pseudo-obstruction] [5], une
atteinte lupique ou une maladie cœliaque. L’hypothèse
d’une dysrégulation localisée du système nerveux autonome est la plus plausible [6].
Les complications des fécalomes géants sont rares
[7-13]. Si des incontinences urinaires, des tamponnades
cardiaques, des compressions urétérales et des hydronéphroses ont été décrites, une compression nerveuse n’a,
à notre connaissance, jamais été signalée. L’IRM, en
mettant en évidence les rapports du fécalome avec les
structures nerveuses, permet d’étayer le diagnostic et
d’éliminer les autres étiologies tumorales, bénignes ou
malignes, pouvant envahir et comprimer l’espace sacré
[14,15]. Les explorations neurophysiologiques périnéales
peuvent apporter quelques arguments, comme dans notre
observation où les potentiels somesthésiques du nerf
pudendal étaient altérés.
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© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0132-2
MISE AU POINT / UPDATE
Les dyssynergies urétrales
J.-M. Soler
Service de rééducation neurologique, centre Bouffard-Vercelli-Cerbère, cap Peyrefite, France
Résumé : La dyssynergie vésicosphinctérienne (DVS) est
un problème fréquent au cours des lésions médullaires
pouvant déterminer des complications du haut appareil
et même altérer l’espérance de vie des patients. Deux
types de DVS peuvent être décrits : la DVS striée et la
DVS lisse. Nous présentons une revue de ces DVS avec,
notamment, les stratégies diagnostiques et les résultats
des bilans urodynamiques.
Mots clés : Dyssynergie vésicosphinctérienne – Vessie
neurologique
Incoordination of the urethral sphincter
Abstract: Detrusor sphincter dyssynergia (DSD) is a
debilitating condition in patients with spinal cord injuries.
DSD carries a high risk of complications, affecting even
life expectancy. Two types of DSD have been described:
detrusor-external sphincter dyssynergia and detrusorinternal sphincter dyssynergia. We present a review of
these forms of DSD, including diagnostic strategies and
urodynamic investigations.
Keywords: Detrusor sphincter dyssynergia – Neurogenic
bladder
Introduction
La fonction vésicosphinctérienne est soumise à une
régulation comportementale, l’alternance des phases de
continence et de réflexe mictionnel dépend de l’intégrité
des circuits neurologiques impliqués.
Les dyssynergies vésicosphinctériennes expriment
l’altération de la synchronisation du réflexe mictionnel
et les conflits vessie-sphincter strié et vessie-sphincter
col lisse.
Leurs définitions sont nombreuses, multipliant leur
mode d’évaluation et les difficultés de leur recensement.
Les dysfonctionnements vésicosphinctériens traduisent un dysfonctionnement du circuit neurologique
Correspondance : E-mail : [email protected]
médullaire impliqué dans le réflexe mictionnel ; la prise
en charge consiste essentiellement à prévenir les risques
de complications urologiques.
Miction normale
Le fonctionnement vésicosphinctérien est constitué d’une
alternance de phases de continence et de réflexe
mictionnel. Le remplissage progressif de la vessie active
les afférences de la vessie et de l’urètre à l’origine des
différents besoins d’uriner.
La réalisation des mictions et la régulation comportementale sont dépendantes de multiples structures encéphaliques. La coordination du fonctionnement de la vessie et de
l’urètre est assumée par des structures neurologiques
pontiques. Le réflexe mictionnel est entièrement dépendant
de centres médullaires sympathiques thoraciques (D10-L2),
parasympathiques et somatiques sacrés (S2-S4). La miction
normale, volontaire, aisée et complète, nécessite l’intégrité
des différents centres et circuits impliqués dans le cycle
continence-miction. Sa réalisation est synergique, la contraction du détrusor est précédée d’une ouverture du sphincter
strié urétral et d’une relaxation du col vésical, ce qui permet
une expulsion complète du contenu vésical à faible pression.
L’altération de la synchronisation ouverture sphincter
strié et contraction de vessie ou relaxation du col vésical et
contraction du détrusor constitue les dyssynergies vésicostriée et vésico-lisse. Elles sont essentiellement décrites dans
les lésions médullaires supra-sacrées et attribuées à la perte
du contrôle des structures pontiques sur les centres dorsolombaires et sacrés impliqués dans le réflexe mictionnel. Il
existe donc deux types de dyssynergie : une dyssynergie
vésico-striée et une dyssynergie vésico-lisse (vésicocol).
Dyssynergies vé sico-strié es
La connaissance et la description de la dyssynergie vésicostriée datent du début du siècle [1]. Au cours du temps,
l’incoordination entre l’activité vésicale et le fonctionnement du sphincter strié a été appréciée différemment selon
les auteurs.
129
Définitions
La définition la plus communément acceptée est celle de
Blaivas : « présence de contractions involontaires du
sphincter strié urétral enregistrées par EMG pendant la
contraction du détrusor » [2].
Yalla définit la dyssynergie vésico-striée comme une
perturbation du réflexe mictionnel, résultant d’une
contraction involontaire ou d’une absence de relaxation
des pressions du sphincter strié précédant ou accompagnant une contraction du détrusor [3,4].
Pour De Leval et Penders, la dyssynergie est définie
comme une absence de relaxation urétrale et/ou une
contraction sphinctérienne avant et/ou pendant la
contraction du détrusor [5].
Ces trois définitions de la dyssynergie sont les
références les plus utilisées pour l’évaluation de la
dyssynergie, même s’il en existe de multiples nuances.
Pour ces différents auteurs, la présence de la
contraction du détrusor et une activité involontaire du
sphincter strié sont essentielles pour affirmer une
dyssynergie.
Classifications
Plusieurs classifications ont été proposées (Fig. 1) :
Fig. 1. Schémas des classifications
Classification de Yalla [3,4]. L’auteur décrit quatre
fonctionnements différents vésicosphinctériens à partir
d’une étude de 200 patients présentant une atteinte
médullaire complète ou incomplète. Il réalise 300 urétrocystomanométries associées à un EMG du sphincter strié
urétral, une débitmétrie, un contrôle radiologique et un
test à l’eau glacée.
Le grade 0 : les patients ont une miction synergique
avec relaxation des pressions urétrales précédant la
contraction du détrusor, tous ces patients ont un test à
l’eau glacée négatif.
Le grade I est défini comme un retard de la miction par
absence de relaxation prémictionnelle urétrale avec
persistance de l’activité électromyographique du sphincter strié au début de la contraction du détrusor.
Le grade II est marqué par une activité intermittente
du sphincter strié pendant la contraction du détrusor
responsable de mictions en plusieurs jets.
Le grade III est caractérisé par une augmentation de
l’activité du sphincter strié urétral pendant la contraction
du détrusor, rendant parfois la miction impossible.
Pour ces trois derniers stades, le test à l’eau glacée est
toujours positif.
41,5 % des patients ayant une lésion médullaire ont
une dyssynergie de stade I, II et III. La dyssynergie
vésicosphinctérienne est exclusivement liée à une lésion
médullaire supra-sacrée.
Classification de Blaivas [2]. Elle découle de l’exploration de troubles vésicosphinctériens de 550 patients
dont 119 ont une lésion médullaire. Le bilan urodynamique comprend un enregistrement des pressions vésicales, rectales, une débitmétrie et un EMG du sphincter
strié urétral.
Le type I se manifeste par une augmentation de
l’activité électromyographique du sphincter strié au début
de la contraction du détrusor avec survenue tardive de la
relaxation urétrale et miction différée.
Le type II est caractérisé par une augmentation
intermittente de l’activité électromyographique du
sphincter strié, alternée avec des phases de relaxation
urétrale pendant la contraction du détrusor occasionnant
une miction en plusieurs jets.
Le type III se manifeste par une activité permanente du
sphincter strié, pendant la contraction du détrusor
pouvant interdire la miction.
54 patients sur 119 ont une dyssynergie vésico-striée.
Pour Blaivas, il s’agit d’une pathologie exclusivement liée
aux lésions médullaires supra-sacrées.
Si ces deux classifications sont les plus utilisées encore
actuellement, de nombreux auteurs proposent des définitions et des classifications différentes.
Classification d’Andersen et Bradley [6]. Ils réalisent
une étude urodynamique et électrophysiologique de
patients dyssynergiques. Ils considèrent l’augmentation
de l’activité électromyographique du sphincter strié,
induite par la distension de la vessie sans contraction du
130
détrusor, comme une forme de dyssynergie pour les
patients neurologiques ne pouvant contrôler volontairement le sphincter strié. Ils introduisent le concept d’une
dyssynergie vésico-striée sans contraction du détrusor.
Ils évoquent le fait d’une inhibition de la contraction du
détrusor par l’hyperactivité du sphincter strié.
Classification de Siroky [7]. Pour cet auteur, la perte
d’une guarding-réfexe pendant la phase de remplissage est
considérée comme une forme de dyssynergie. Il définit
également la pseudo-dyssynergie qui se caractérise par une
contraction involontaire du sphincter strié, précédant et
accompagnant la contraction du détrusor.
Classification de Bary [8]. Elle distingue 3 formes de
dyssynergie à partir d’une évaluation urodynamique
complète de 42 blessés médullaires complets et incomplets :
– 1re forme : persistance d’une activité du sphincter
strié urétral pendant la miction associée à une hypo- ou
une aréflexie du détrusor ;
– 2e forme : elle est caractérisée par l’apparition d’une
hyperactivité urétrale marquée par une augmentation de
l’EMG du sphincter strié pendant la contraction du
détrusor, c’est le prédétrusor kick. La présence de ce
prédétrusor kick est considérée comme une forme de
« dyssynergie non soutenue » ;
– 3e forme : l’activité du sphincter strié urétral se
prolonge pendant la contraction du détrusor : « c’est une
dyssynergie soutenue ».
Pour Bary, tous les blessés médullaires complets ou
incomplets ont une dyssynergie vésico-striée, quelle que
soit l’activité du détrusor.
Classification de De Leval Chantraine et Penders [5]. Ils
proposent une classification étiologique des dyssynergies
vésico-striées. Ils définissent la dyssynergie neurologique
comme l’absence de relaxation des pressions urétrales
prémictionnelles et/ou la persistance d’activité urétrale
pendant la contraction du détrusor (dyssynergie tonique).
La dyssynergie clonique se manifeste par des contractions
du sphincter strié urétral pendant la contraction du
détrusor, associée ou non à une relaxation prémictionnelle
des pressions urétrales. Ces auteurs retrouvent dans les
atteintes médullaires 97,5 % de dyssynergies toniques.
Ils décrivent également la dyssynergie non neurologique qui se caractérise par une relaxation des pressions
du sphincter strié précédant la contraction du détrusor,
mais accompagnée d’activité clonique.
Caractéristiques
Pour la majorité des auteurs, la dyssynergie vésico-striée
épargne les lésions supraspinales (Blaivas, Siroky, Penders, De Leval, Yalla...).
Endersen, Bradley, Tsuchida et Perrigot signalent la
présence d’une incoordination vésicosphinctérienne dans
les atteintes encéphaliques. Endersen et Bradley soulignent l’importance des circuits pyramidaux à l’origine de
la dyssynergie vésico-striée et considèrent que toute
désorganisation des circuits du contrôle de la miction
peut entraı̂ner un trouble de la synergie vésicosphinctérienne.
La fréquence des dyssynergies dans les atteintes
médullaires est appréciée différemment selon les auteurs :
45 % pour Blaivas, 41,5 % pour Yalla, 97,5 % pour Penders
et Delaval, 70 % pour Koyanagui, 100 % pour Bary. Une
étude clinique, urodynamique et radiologique, intéressant
327 blessés vertébro-médullaires complets moteurs et
sensitifs (ASIA A), confirme chez ces patients l’absence de
relaxation des pressions urétrales associée à la persistance
de l’activité électromyographique du sphincter strié
pendant la phase prémictionnelle. À cette dyssynergie
tonique était associée une activité clonique pendant la
contraction du détrusor dans près d’un cas sur deux [9].
La même étude chez 80 patients présentant une
atteinte complète motrice et incomplète sensitive
(ASIA B) révélait dans 25 % des cas une véritable miction
synergique.
Plusieurs auteurs considèrent qu’il n’existe pas de
relation entre l’existence de dyssynergie et le niveau de la
lésion médullaire (Yalla, Blaivas), mais leurs résultats ne
le prouvent pas. De même que Yalla et Siroky signalent
que le degré de synergie est dépendant de l’importance de
la lésion médullaire : les patients incomplets ayant
toujours les dyssynergies les moins importantes.
Malgré les résultats discordants de la littérature, on
peut affirmer que la dyssynergie vésico-striée est essentiellement retrouvée dans les atteintes médullaires. Il
existe cependant, dans 20 % des cas, une mauvaise
synergie vésico-striée dans les atteintes encéphaliques.
La prévalence des dyssynergies vésico-striées dans les
atteintes médullaires est très dépendante des classifications utilisées. Cette dyssynergie ne semble pas corrélée au
niveau lésionnel. Son évolution est peu connue. Ce
dysfonctionnement est à l’origine de complications
urologiques importantes.
Moyens d’évaluation
L’observation clinique, l’exploration échographique, la
débitmétrie, même associées, ne permettent pas le
diagnostic de dyssynergie. La définition et l’évaluation
sont exclusivement urodynamiques. L’exploration urodynamique associant une prise de pressions vésicales et
un EMG du sphincter strié paraı̂t suffisante pour affirmer
la dyssynergie vésicosphinctérienne. La prise de pressions
rectales permet d’éliminer la possibilité de pseudocontractions vésicales. L’enregistrement des pressions
vésicales et urétrales associant un EMG du sphincter strié
permet de mieux apprécier une éventuelle relaxation des
pressions urétrales précédant la contraction du détrusor
et accompagnant cette contraction [3,4,10-12].
L’enregistrement étagé des pressions de la vessie, du
col, de l’urètre postérieur et du sphincter strié par
multicapteurs offre la possibilité d’analyses du compor-
131
tement de tout l’appareil vésicosphinctérien pendant la
miction et le remplissage. Il permet aussi la mise en
évidence de l’association de la dyssynergie vésico-striée à
la dyssynergie vésico-lisse.
La lésion des circuits suprapontiques qui organisent la
miction et contrôlent les structures neurologiques sousjacentes est susceptible de perturber l’action des centres
pontiques responsables de la synergie vésico-urétrale.
Discussion
Conclusion
Sous contrôle encéphalique, le centre pontique décrit par
Barrington chez le chat coordonne l’activité des centres
médullaires de la miction [13,14]. Les PET scanners ont
permis de localiser chez l’animal et l’homme, dans la
région pontique médiane et latérale, des structures qui ont
un rôle similaire sur l’activité vésicale et urétrale. Des
projections de ces zones sur les centres médullaires
sympathiques dorsolombaires, parasympathiques sacrés
et noyaux d’onuf ont également été mises en évidence
[1,5,15-19,20-23].
La lésion médullaire supra-sacrée et sous-pontique
interrompt les afférences et les efférences destinées à
l’appareil vésicosphinctérien et le circuit ponto-médullaire
contrôlant la synergie vésico-striée. Le cycle continencemictions n’est plus soumis à une régulation comportementale, il est réduit à un réflexe médullaire. La sensation
de besoin et le contrôle volontaire de la miction disparaissent.
Le remplissage progressif de la vessie n’entraı̂ne plus
la mise en action des mécano-récepteurs de la musculeuse
lisse. Les afférences vésicales sont véhiculées par des
fibres C amyéliniques vraisemblablement responsables de
l’hyperréflexie vésicale. Pour De Groat, le test à l’eau
glacée stimule les récepteurs au froid de la vessie et de
l’urètre, et confirme le rôle des fibres afférentes C dans
l’hyperréflexie vésicale. La contraction involontaire du
détrusor n’est plus associée à la relaxation du sphincter
strié urétral et du sphincter lisse [19].
L’obstruction urétrale entraı̂ne souvent une augmentation de l’amplitude et de la durée de la contraction du
détrusor. Cette opposition à haute pression des forces
d’expulsion vésicale et des forces de résistance urétrale
peut générer des complications urinaires : déformation
vésicale, reflux vésico-urétéro-rénaux [21,24-28].
La majorité des auteurs considèrent que la dyssynergie
vésicosphinctérienne est pathognomonique des lésions
médullaires [2-5,7,8,29]. Cependant, des dyssynergies
vésico-striées sont décrites dans certaines pathologies
encéphaliques : Parkinson, MSA, hémiplégie, démence,
traumatisme crânien, toujours associées à une hyperactivité du détrusor [6,17,30-32]. Cette hyperactivité
détrusorienne est certainement résultante des modifications des afférences vésicales similaires à celles décrites
dans les lésions médullaires comme en témoigne le test
à l’eau glacée positif chez ces patients. Le test à l’eau glacée
active les fibres C vésicales et urétrales. Il n’entraı̂ne
qu’une sensation de besoin d’uriner chez le sujet témoin
et une contraction involontaire du détrusor chez le blessé
médullaire [16].
L’absence de synchronisme des activités vésicales et
sphinctériennes définit la dyssynergie. La présence
d’activités involontaires vésicale et sphinctérienne au
cours d’une miction paraı̂t nécessaire pour définir une
dyssynergie vésico-striée. Il appartient au praticien d’en
faire la preuve en enregistrant les pressions vésicale et
urétrale pendant le remplissage et la miction, ainsi que
l’électromyogramme à l’aiguille du sphincter strié urétral.
Les dyssynergies vésico-striées sont fréquentes dans
les pathologies médullaires, leur présence dans les
atteintes encéphaliques ne paraı̂t cependant pas incohérente.
L’évaluation actuelle des dyssynergies ne permet pas
leur quantification précise. Leur dépistage est indispensable car elles constituent un facteur de complications
urinaires.
Dyssynergies vésico-lisses
La miction normale initiée par le besoin d’uriner est
habituellement organisée en succession de phases bien
établies chez l’animal et chez l’homme. La relaxation de
l’urètre (arrêt de l’activité électromyographique du
sphincter strié et ouverture du col vésical) précède et
accompagne la contraction du détrusor et la miction.
Dé finition
La première définition est donnée vraisemblablement par
Guyon, en 1889, qui décrit « le prostatisme sans prostate ».
Marion, en 1933, définit « la maladie du col vésical »
comme une modification du fonctionnement du col
vésical sans lésion apparente. Elle est responsable d’une
dysurie. Le diagnostic est radiologique.
À la notion d’obstacle du col vésical succède le concept
d’une obstruction fonctionnelle, et, dans les années 1960 à
1980, de nombreux auteurs signalent pour des patients
neurologiques et non neurologiques la présence d’une
dysectasie constatée au cours de clichés radiographiques
mictionnels [33].
En 1967, Ascoli [34] propose une classification en cinq
grades permettant d’apprécier l’ouverture du col vésical
des blessés médullaires au cours de la miction. De
nombreuses classifications diagnostiques radiologiques
du même type sont proposées.
La pathologie du col vésical est associée progressivement à une hypertonie ou une hyperactivité alphaadrénergique [33,35-39].
132
L’utilisation d’alphabloquants en test conforte l’hypothèse d’une participation du système nerveux végétatif alphaadrénergique dans la pathologie du col vésical [22,40-47].
Les alphabloquants par voie intraveineuse entraı̂nent
une chute des pressions urétrales, une amélioration de
l’ouverture du col vésical et une amélioration clinique de
la miction.
Le diagnostic est alors essentiellement radiologique et
pharmacologique, basé sur l’appréciation du fonctionnement du col vésical pendant le remplissage vésical et la
miction, et sur la sensibilité aux alphabloquants.
Dans les années 1980, l’enregistrement étagé des
pressions urétrales au cours d’une cystomanométrie
permet la mise en évidence d’une activité du col et de
l’urètre postérieur concomitant de la contraction du
détrusor pendant la miction [48].
En 1986, Rossier réalise chez le blessé médullaire, à
l’aide d’une sonde à multicapteurs, un enregistrement
étagé des pressions urétrales du col et du sphincter strié
au cours d’une exploration urodynamique associée à un
électromyogramme du sphincter strié, un contrôle radiologique et des tests pharmacologiques [49].
Il met en évidence une augmentation des pressions
urétrales accompagnant la contraction du détrusor et la
miction, notamment au niveau du col vésical. Il observe
une dyssynergie vésicocol chez le blessé médullaire,
indépendante de la dyssynergie striée. Schurch et Rossier
[50], en 1994, avec la même méthodologie sur une série de
34 blessées vertébro-médullaires montrent l’importance
des la dyssynergie lisse dans le fonctionnement vésicosphinctérien des blessés médullaires retrouvés dans
73,5 % des cas. La dyssynergie du détrusor-col est ainsi
définie comme une contraction du col vésical accompagnant la contraction du détrusor pendant la miction. Cette
dyssynergie peut accompagner la contraction du détrusor
sur toute sa durée. La dyssynergie lisse est indépendante
de la dyssynergie vésico-striée. Le diagnostic est urodynamique, radiologique et pharmacologique.
E´valuation
La cystomanométrie et la profilométrie traditionnelles ne
permettent pas le diagnostic de dyssynergie vésicocol.
Chez le blessé vertébro-médullaire, l’examen clinique
végétatif basé sur l’étude de la sudation, du réflexe
pilomoteur, de l’horripilation, permet de déterminer un
fonctionnement végétatif réflexe persistant dans le territoire
sous-lésionnel [51]. La persistance de réaction cutanée
sympathique au niveau des membres inférieurs et du périnée
est corrélée à une activité du col vésical. La destruction des
myélomères sympathiques dorso-lombaires D10-L2 entraı̂ne
une béance du col vésical associée à une perte des réflexes
cutanés sympathiques des membres inférieurs.
L’enregistrement des potentiels cutanés sympathiques
réalisé pendant une cystomanométrie en zone sus et souslésionnelle confirme les données de l’examen clinique [52-54].
L’exploration végétative isolée ne permet pas cependant d’affirmer l’existence d’une dyssynergie vésicocol,
mais seulement de suspecter une pathologie du col vésical.
L’exploration radiologique a longtemps été le seul
moyen d’appréciation du fonctionnement du col vésical.
La cystographie avec cliché mictionnel permet de
visualiser la fermeture complète du col vésical pendant
le remplissage vésical ainsi que son ouverture harmonieuse et symétrique en entonnoir au cours de la miction.
La cystographie avec clichés mictionnels peut révéler
pendant la miction une ouverture incomplète et intermittente du col vésical et de l’urètre postérieur. Ces
éléments, associés à l’analyse des paramètres cliniques
urodynamiques, sont des arguments diagnostiques d’une
pathologie du col vésical pouvant être assimilée à une
dyssynergie vésicocol.
Nous avons réalisé une étude sur 100 blessés vertébromédullaires supra-sacrés complets moteur et sensitif
(ASIA A) [étude non publiée]. Le bilan comprenait une
exploration radiologique avec enregistrement de la
miction au magnétoscope, un examen clinique végétatif,
un enregistrement de l’activité cutanée sympathique
recueillie en zone sous-lésionnelle pendant le bilan
urodynamique. Nos résultats corroborent ceux de
Schurch : 75 % des blessés médullaires ont un dysfonctionnement du col vésical.
L’association d’une évaluation urodynamique, radiologique et d’un enregistrement des potentiels cutanés
sympathiques permet de mettre en évidence un dysfonctionnement du col vésical susceptible d’être une dyssynergie vésicocol.
L’utilisation de sonde munie de quatre ou cinq
capteurs permet l’analyse au cours de la cystomanométrie
des modifications des pressions de la vessie, du col
vésical, de l’urètre postérieur et de plusieurs points du
sphincter strié urétral. Au cours d’une miction, l’enregistrement d’une augmentation de l’activité de la zone du col
vésical et de l’urètre postérieur précédant ou accompagnant la contraction du détrusor permet le diagnostic
d’une dyssynergie vésicocol. Le gradient de pression
détrusor-col permet d’évaluer l’importance de cette
dyssynergie. Le diagnostic de la dyssynergie vésicocol
nécessite des moyens techniques aujourd’hui encore
onéreux, mais la fréquence de cette pathologie et sa
répercussion sur le fonctionnement vésicosphinctérien
du blessé médullaire imposent son analyse quasi systématique (Fig. 2).
Commentaires
La dyssynergie vésicocol est vraisemblablement très fréquente et son rôle est essentiel dans le dysfonctionnement
vésicosphinctérien. La pathologie du col vésical est
actuellement mieux connue. L’interprétation des dysfonctionnements du col vésical est cependant différente
selon les auteurs. Pour Rossier [48,49], il existe deux types
133
La dyssynergie vésicocol ne représente vraisemblablement qu’un aspect des dysfonctionnements du col vésical.
La diversité des méthodologies utilisées dans la littérature
explique les appréciations différentes du rôle de la
dyssynergie vésicocol dans le dysfonctionnement vésicosphinctérien des patients. L’enregistrement des pressions
étagées au niveau de l’urètre postérieur et du col vésical
associé à l’enregistrement des pressions vésicales et du
sphincter strié et couplé à des clichés radiologiques permet
d’affirmer une réelle dyssynergie du col vésical.
Conclusion
Les dyssynergies vésico-lisses et vésico-striées sont fréquentes
dans les pathologies médullaires. Leur évaluation est
actuellement aisée. Les obstructions sous-vésicales sont à
l’origine de nombreuses complications urinaires. Leur prise
en charge thérapeutique médicale et chirurgicale est indispensable au rétablissement d’un équilibre vésicosphinctérien.
Références
Fig. 2. Dyssynergie vésicocol
de dyssynergie lisse, une dyssynergie intéressant les
atteintes médullaires supérieures à D5, sensibles aux
alphabloquants, et une dyssynergie intéressant les
patients ayant une atteinte médullaire inférieure à D5,
insensible aux alphabloquants. Pour Schurch [50], la
dyssynergie lisse est toujours présente, associée à la
dyssynergie vésico-striée chez les blessés médullaires
cervicaux et dorsaux hauts présentant des hyperréflexies
autonomes. Elle est toujours absente dans les atteintes
médullaires détruisant les centres sympathiques. Elle est
souvent retrouvée dans les atteintes lombo-sacrées
épargnant les centres sympathiques dorso-lombaires.
Les patients présentant des atteintes médullaires incomplètes sensitives et motrices n’ont pas de dyssynergie
vésicocol.
On peut retrouver la dyssynergie lisse vésicocol chez
tous les patients ayant une atteinte médullaire épargnant
les centres sympathiques dorso-lombaires D10-L2. La
pathologie du col vésical n’est cependant pas l’exclusivité
des blessés médullaires. Elle est mentionnée par plusieurs auteurs dans d’autres pathologies neurologiques
centrales ou périphériques. Elle est même signalée par
certains chez des patients ne présentant aucune pathologie neurologique ou urologique [55].
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DOI 10.1007/s11608-007-0124-2
MISE AU POINT / UPDATE
Maladie de La Peyronie : connaissances validées et hypothèses
en physiopathologie, épidémiologie, diagnostic et thérapeutique
N. Morel Journel, A. Ruffion, J.-L. Campos-Fernandes, F. Grima, A. Leriche
Centre hospitalier Lyon-Sud, F-69495 Pierre-Bénite Cedex, France
Résumé : Objet : La maladie de La Peyronie est décrite
depuis plus de deux cents ans, mais elle demeure encore
mal comprise. Cela explique le foisonnement d’hypothèses étiopathogéniques, même si aujourd’hui un
certain consensus émerge.
Mé thodes : Les grandes études reconnues et les
conférences sur le sujet ont servi de base pour décrire
la maladie de La Peyronie. Une revue systématique et
presque exhaustive de la littérature depuis 2004 a été
réalisée et a permis, avec l’expérience du service, de
dégager les tendances actuelles.
Ré sultats : Sur le plan étiopathogénique, l’hypothèse
des microtraumatismes reste d’actualité mais n’est pas
suffisante et les hypothèses auto-immune, génétique et
vasculaire semblent actuellement valables. Il n’y a pas
d’examens complémentaires nécessaires en pratique
courante. Les traitements médicaux sont très nombreux
et ont surtout fait la preuve de leur efficacité sur la
douleur. On retiendra la vitamine E, la colchicine ainsi
que les injections intraplaques de corticoı̈des ou de
vérapamil. Des traitements prometteurs par inhibiteurs
de la phosphodiestérase de type 5 ou par injection
d’interféron B doivent être validés. Les traitements
chirurgicaux de correction de la courbure et des troubles
de l’érection ne seront proposés que si la courbure est
stabilisée depuis six mois. La qualité des érections, la
taille de la verge, l’importance de la courbure et les
souhaits du patient seront les éléments permettant de
prendre la bonne décision thérapeutique. La correction
de la courbure par la technique de Nesbit reste la
technique de référence. En cas de plaque très importante
et de troubles de l’érection, la section de la plaque avec
greffe veineuse et prothèse gonflable est actuellement
la meilleure technique. On citera la technique de Leriche,
la mise en place d’implants souples et la lithotritie
extra-corporelle comme possibles techniques d’avenir.
Peyronie’s disease: evidence-based knowledge and
hypotheses in its pathophysiology, epidemiology,
diagnosis and treatment
Mots clés : La Peyronie – Chirurgie – Courbure – Verge –
Douleur
Keywords: La Peyronie’s Disease – Surgery – Curvature –
Penis – Pain
Correspondance : E-mail : [email protected]
Abstract: Subject: Although still poorly understood, La
Peyronie’s disease has been described for two hundred
years. This lack of solid knowledge explains the existence
of so many etiopathogenic hypotheses, despite the
current emerging consensus.
Method: We performed an exhaustive review of the
major studies and conference reports on La Peyronie’s
disease since 2004 to determine present thinking on this
condition.
Results: The microtrauma hypothesis remains valid
today but is not comprehensive enough to fully explain
aetiology; explanations touching on autoimmunity,
genetics and the vascular system are necessary to better
understand the disease. Clinical examination suffices for
establishing diagnosis. Medical treatment has mostly
succeeded in managing pain. Vitamin E, colchicine,
steroid and intraplaque verapamil injections are now
accepted treatments. Further studies are needed to
determine the efficacy of treatment with phosphodiesterase type 5 or beta interferon intraplaque injection.
Surgical treatments are appropriate only if the disease
has stabilized after six months. Erection quality, penis
size, degree of curvature and the patient’s wishes are the
main factors to consider before choosing a surgical
treatment. The reference for curvature correction is the
Nesbit procedure. If the plaque is large and accompanied
by impotence, plaque incision with vein graft and the
insertion of an inflatable prosthesis is the usual
treatment course. Leriche’s technique, soft prostheses,
and extracorporeal shockwaves offer promising alternatives but require further investigations to prove their
effectiveness.
136
Introduction
La maladie de La Peyronie est une induration plastique des
corps caverneux par un phénomène fibrotique se développant au niveau de la partie interne de l’albuginée. Elle se
traduit cliniquement par des douleurs, une courbure de
la verge pouvant gêner la pénétration, la perception de
nodules péniens indurés et parfois des troubles de
l’érection. On retrouve des écrits depuis Vésale et Fallopio,
mais le premier à l’avoir décrite est le chirurgien du roi
Louis XV, François Gigot de La Peyronie. Si la découverte
de cette maladie est ancienne, elle reste encore très mal
connue, notamment en termes de physiopathologie et de
traitements. Il existe actuellement un très grand nombre
d’hypothèses étiopathogéniques et il existe un très grand
nombre de traitements tant médicaux que chirurgicaux.
Cette « mise au point » va essayer de rendre compte de ce
foisonnement tout en essayant de dégager quelques
consensus utiles sur un plan pratique.
Épidémiologie
La prévalence dans la population générale varie de 0,4 % [1]
à 3,2 % [2,3]. On retrouve même sur des séries autopsiques
une prévalence de 23 % [4].
On retrouve une plus grande prévalence lorsque l’on
s’intéresse à des sous-populations :
– chez les diabétiques : 8 % [5] ;
– chez les patients avec dysfonction érectile : 8 % [5].
L’incidence et la prévalence sont difficiles à établir
car la maladie n’est pas toujours symptomatique ou pas
toujours suffisamment symptomatique pour que les
patients dépassent leurs inhibitions à parler de troubles
de la sexualité. En fait, l’histoire même de la maladie qui
peut régresser spontanément ne facilite pas le décompte.
Enfin, peut-on comptabiliser ensemble les patients
présentant une maladie symptomatique avec les patients
chez qui un dépistage systématique a retrouvé cette
maladie qui était non symptomatique ?
Quoi qu’il en soit, tous les spécialistes s’accordent à
dire que la prévalence est sous-évaluée [6].
vers l’albuginée et vers l’intérieur des corps caverneux. Les
tissus fibrosés peuvent aussi se calcifier, s’ossifier.
On retient quatre grandes hypothèses pouvant
expliquer cette inflammation fibrosante de l’albuginée :
– hypothèse traumatique qui explique l’apparition de
cette inflammation par un micro- ou macro-traumatisme
responsable d’un dépôt de fibrine qui va enclencher une
réaction en chaı̂ne des fibroblastes [9-11]. Mais, une étude
récente iranienne, qui a suivi sur sept ans 300 patients ayant eu
une fracture de verge ou des micro-traumatismes, ne retrouve
qu’un seul cas ayant développé une maladie de La Peyronie.
Dans le même ordre d’idée, on peut s’étonner qu’il soit si
rare que les injections intracaverneuses, le vacuum, voire la
chirurgie des corps caverneux se compliquent d’une maladie
de La Peyronie. Cela prouve qu’il existe certainement d’autres
facteurs que le traumatisme pour expliquer cette maladie ;
– hypothèse auto-immune soutenue par plusieurs
équipes ayant retrouvé la présence d’anticorps antiélastine, antiproélastine ou des anticorps antinucléaires
ou une augmentation des antigènes HLA B8 [12] ;
– hypothèse du terrain « vasculaire » : la fréquence de la
maladie suit l’âge des patients comme les maladies cardiovasculaires [13] et l’association à des troubles lipidiques, à la
consommation de tabac et à l’HTA est très fréquente ;
– hypothèse génétique relancée par une étude comparée entre la maladie de La Peyronie et celle de Dupuytren,
qui montre beaucoup de similitudes dans l’expression
génique par mRNA [14]. Une autre étude sur le rat montre
qu’il est possible de faire régresser une plaque de La
Peyronie par transfert génique [15].
Ces différentes hypothèses ne s’excluant pas, il s’agit
probablement d’un phénomène multifactoriel.
Clinique
L’interrogatoire et l’examen clinique sont les deux
éléments indispensables et suffisants pour faire le
diagnostic de la maladie (Fig. 1).
Physiopathologie
On observe d’une part l’apparition d’un infiltrat inflammatoire lymphoplasmocytaire périvasculaire se développant à
la zone de jonction du tissu conjonctif et aréolaire avec
sécrétion de cytokines. On observe dans le même temps une
destruction des fibres d’élastine et une hyperproduction de
collagène de type 1 et 3. Ce système est auto-entretenu par
une hypersécrétion de b1TGF par les fibroblastes [7], qui
stimule les cellules de l’inflammation. Par ailleurs, dans le
même temps, on observe une diminution du NO qui a un rôle
protecteur en permettant la différenciation des fibroblastes
en myofibroblastes [8]. Ce phénomène de fibrose s’étend
Fig. 1. Maladie de La Peyronie : le diagnostic est « clinique » sur
photographie
137
L’âge moyen du début de la maladie se situe vers 53 ans
avec 2/3 des patients ayant entre 40 et 60 ans [16,17].
La courbure est presque toujours présente, mais pas tout
le temps, notamment en cas de plaque circonférentielle,
elle varie de 20 à plus de 90 . Les deux moyens utilisés
préférentiellement pour l’évaluer sont les injections intracaverneuses et la photographie qui est devenue plus facile à
réaliser pour le patient, grâce au numérique notamment. Elle
est le plus souvent dorsale (43 à 72 %), parfois ventrale
(11 à 20 %) ou latérale (10 à 48 %) ou parfois complexe, en
sablier [16-18]. Cette courbure est responsable de difficultés
lors de la pénétration et elle est le principal motif de
consultation.
La douleur est très fréquente à la phase initiale et elle
est le deuxième motif de consultation. Il s’agit d’une
douleur survenant lors de l’érection et elle disparaı̂t
spontanément dans près de 100 % des cas [16,19].
Les troubles érectiles sont retrouvés dans 20 à 30 %
des cas et sont dus à des troubles vasculaires pour une
part, à la douleur ou aux perturbations psychologiques
induites d’autre part [16,20,21].
Certaines études retrouvent un raccourcissement de
verge pouvant atteindre 1 à 2 cm [16].
Diagnostic diffé rentiel
Le principal diagnostic différentiel est la courbure
congénitale de verge, qui est facilement éliminée par
l’âge du consultant, l’évolution de la maladie et l’absence
de plaque bien délimitée. Beaucoup plus rarement, on
évoquera les tumeurs de type sarcome ou hémangioendothéliome épithélioı̈de des corps caverneux.
E´volution et complication
L’évolution naturelle de la maladie de La Peyronnie est très
variable et on peut schématiquement distinguer trois
évolutions : amélioration, stabilisation ou aggravation.
Sur le plan de la douleur, l’ensemble des auteurs s’accorde
pour dire que la douleur disparaı̂t dans près de 100 % des
cas [16,19]. Pour la courbure, la littérature est beaucoup
moins univoque, avec une amélioration dans 10 à 80 % des
cas, surtout si la plaque mesure moins de 2 cm [16,19,22],
une aggravation dans 30 à 50 % des cas lorsque la plaque
mesure plus de 2 cm [16,22] ou une stabilisation [16,19].
Les complications de la maladie sont les troubles de
l’érection vus plus haut et on retrouve quelques cas de
fractures de verges [23].
Examens complémentaires
La deuxième consultation internationale de Paris sur les
dysfonctions sexuelles recommande de ne pas réaliser
d’examens complémentaires en pratique courante. Elle
émet même des doutes sur l’intérêt de l’utilisation d’examens
complémentaires dans les études, arguant que la clinique
permet une évaluation très bonne et très fiable [6].
L’écho-doppler avec injection intracaverneuse retrouve
la plaque dans plus de 3/4 des cas, il peut mesurer la taille
de la plaque et évaluer les flux vasculaires [18]. Il retrouve
30 % d’anomalies vasculaires en l’absence de troubles
érectiles et 70 % d’anomalies vasculaires en cas de
dysérection [24]. La réalisation d’une injection intracaverneuse (IIC) permet aussi de repérer les patients non ou peu
répondeurs aux IIC, ce qui aidera au choix du traitement.
L’IRM peut aussi être utilisée, mais son coût la rend
peu intéressante, même pour la recherche, et dans notre
expérience, l’interprétation des résultats varie énormément d’un radiologue à l’autre.
Enfin, on citera la cavernométrie et la cavernographie
qui seront utiles en recherche avant tout.
Traitements
L’absence de bases physiopathologiques bien claires et
l’absence de traitements très efficaces expliquent le très
grand nombre de traitements proposés.
Indications thé rapeutiques
Le premier traitement est bien souvent une information
du patient avec une explication claire des évolutions
possibles, des traitements disponibles et de leur efficacité. Il faut faire comprendre la nécessité d’attendre.
Toutes les équipes attendent au moins six à douze mois
et l’absence de douleur avant de proposer un traitement
chirurgical, car il est nécessaire que la plaque soit stabilisée
au moment de la chirurgie. Il est parfois nécessaire vis-à-vis
de la douleur de proposer un traitement médical. Il paraı̂t
tout à fait licite durant cette phase d’attente d’essayer des
traitements médicaux pour tenter de réduire la courbure et
la taille de la plaque, même si aujourd’hui les études
réalisées ont du mal à faire la preuve de leur efficacité.
Traitements médicaux
Le but des traitements médicaux est d’inhiber la formation
de la fibrose entraı̂nant la courbure ou de diminuer la
réaction inflammatoire responsable de la douleur.
Traitements par voie orale
La Vitamine E
Ce traitement est utilisé pour son activité anti-oxydante.
C’est probablement le plus ancien traitement proposé, le
moins cher et il n’a pas d’effet secondaire. Une étude
randomisée, en double insu contre placebo, a établi un
possible effet sur la douleur (niveau de preuve 2) [25].
Une étude rétrospective ne retrouve pas d’intérêt à
prendre de la vitamine E [22].
138
Le Potassium para-aminobenzoate (Potaba)
Injection de calcium bloquant (vérapamil)
Il aurait un effet réducteur sur la fibrinogenèse. Deux
études randomisées, en double insu, ont montré des effets
positifs, l’une sur la douleur avec 73 % d’amélioration de la
douleur versus 43 % dans le groupe placebo (niveau de
preuve 2) [26], l’autre montre des effets sur la taille de la
plaque (p = 0,04) et réduit le risque d’aggravation de la
courbure (p < 0,01) [27]. En revanche, plusieurs équipes
ont décrit des effets secondaires pénibles de type intolérance gastrique, voire des lésions hépatiques mortelles [28]
dont deux reportées par notre équipe.
Il aurait une action anti-inflammatoire en réduisant l’action
des cytokines et améliorerait la phase de cicatrisation. Une
étude en simple insu retrouve une amélioration de la
courbure et une diminution de taille de la plaque (niveau
de preuve 2) [35].
La Colchicine
Elle a une action anti-inflammatoire et réduirait la synthèse de
collagène. Son efficacité a été prouvée lorsqu’elle était associée
à la vitamine E [29]. Cette étude montre une efficacité
significative sur la courbure et la taille de la plaque (niveau de
preuve 2). Le principal effet secondaire est la diarrhée.
Autres traitements
On citera deux traitements abandonnés car n’ayant pas
fait leurs preuves : la procarbazine et le tamoxifène.
D’autres médicaments sont actuellement en évaluation, le sildénafil pour son action sur le NO qui aurait des
activités antifibrotiques sur le rat [30] et aussi la
carnitine-ester qui semble prometteuse [31].
Traitements mé dicamenteux locaux
Les gels n’ont pour l’instant jamais montré d’efficacité
mais de nouveaux procédés sont prometteurs. Les études
sur les injections dans la plaque sont très anciennes mais
ont presque toujours eu un niveau de preuve faible [32].
Gel à base de liposomes superoxyde dismutase
Il s’agit d’un chélateur de radicaux libres afin de diminuer
l’inflammation. L’étude est randomisée, en double insu, et
les résultats montrent une très bonne efficacité sur la
douleur (p = 0,017) et il n’y a plus de progression de la
maladie dans le groupe traité [33].
Injections intraplaques de stéroı̈des
L’action recherchée est anti-inflammatoire, mais on ne
retrouve pas d’études avec un bon niveau de preuve qui
prouve une certaine efficacité, même si des études
rétrospectives récentes montrent une action positive
sur la douleur [34]. Au contraire, une étude comparant
une injection de stéroı̈des versus du sérum physiologique
ne montre aucune différence, mais établit en revanche
une bonne efficacité sur la douleur dans les deux cas.
L’hypothèse avancée est qu’il existe un effet mécanique
au moment de l’injection qui diminue les douleurs [6].
Injection d’interféron 2b
Traitement plus récent utilisé depuis le milieu des années
1990 qui inhiberait la production de fibroblastes et de
collagène. Deux études randomisées versus placebo
retrouvent une différence significative au niveau de la
courbure et de la douleur [36].
Autres traitements non invasifs
Radiothérapie
Il y a des résultats encourageants sur la douleur et parfois
sur la courbure [37]. Mais des études ont montré
l’absence d’effets de ce traitement [38]. Cette discordance
entre les résultats rend souhaitable une étude randomisée contre groupe témoin.
Lithotritie extra-corporelle
Elle est réalisée de deux façons différentes, soit par un
appareil de contact avec un impact direct sur la verge,
soit un lithotripteur classique. La technique la plus
évaluée est la lithotritie classique. Les résultats sont
contradictoires selon les auteurs [39], mais on retrouve
dans la période récente de plus en plus d’études prouvant
une efficacité tant sur la douleur (amélioration chez 50 à
70 %) [22,40] que sur la courbure (amélioration chez
40 à 60 % des patients) [40]. Cette technique semble
devoir être utilisée de manière privilégiée sur les petites
plaques et les courbures modérées, une plus grande
homogénéité dans le type de lithotripteur utilisé faciliterait l’interprétation des résultats (Fig. 2).
Certaines techniques sont actuellement en cours
d’évaluation comme la thermothérapie, mais demandent
des études supplémentaires pour être validées.
En conclusion, on peut dire qu’il n’y a pas de
traitements médicaux pouvant être cités comme traitement de référence. L’avenir tiendra peut-être dans une
association entre un traitement par voie orale, des
injections intraplaques et/ou une lithotritie extracorporelle. Dans notre équipe, nous utilisons volontiers
la vitamine E ou la colchicine par voie orale, les
injections de corticoı̈des intraplaques et la lithotritie
extra-corporelle. Mais il n’existe pas encore d’études
permettant de hiérarchiser ces traitements et de proposer
un algorithme de traitement. On peut espérer qu’avec le
traitement des comorbidités associées, l’incidence de la
maladie de La Peyronie diminue, puisqu’il semble exister
un lien fort entre les facteurs de risques cardiovasculaires et les plaques de La Peyronie.
139
Fig. 2. Lithotritie de contact dans la maladie de La Peyronie
Traitements chirurgicaux
Il existe un très grand nombre de techniques chirurgicales et de très nombreux critères d’évaluation non
standardisés, ce qui rend difficile un travail comparatif.
Il faut bien prendre en compte l’extrême éclatement de la
prise en charge thérapeutique comme l’a montré une
étude allemande [41]. Six cents urologues ont été
interrogés sur leurs pratiques. Ils disent traiter entre
3 et 15 patients par an, avec une moyenne de 10 par an.
Cela ne facilite pas la diffusion des techniques et
l’existence d’experts pouvant évaluer les différentes
techniques. Les indications chirurgicales sont en revanche consensuelles et assez bien codifiées.
Indications
La plaque de La Peyronie ne doit être opérée qu’après un
délai d’évolution de la maladie d’au moins six mois à un
an depuis le début des symptômes [6,42]. Les lésions
doivent être stables depuis au moins trois mois, six mois
le plus souvent [6]. On peut déroger à cette règle
lorsqu’on s’occupe de patients âgés présentant d’importants troubles de l’érection et qui consultent pour leur
maladie de La Peyronie. On peut alors proposer une
chirurgie avec pose de prothèse sans attendre un an,
puisque le fait de mettre la prothèse stabilise la lésion et
traite le trouble de l’érection.
L’indication opératoire est posée devant des difficultés à avoir des rapports sexuels, un raccourcissement de
la verge et des troubles de l’érection [6]. Dans un certain
nombre de cas, des motivations esthétiques font poser
l’indication chirurgicale, ce qui nécessite alors une
information très exhaustive des risques chirurgicaux et
des explications très précises sur ce qu’il est possible
d’obtenir.
Le type de chirurgie proposé dépend essentiellement de
quatre données : angle de la courbure, taille de la verge,
qualité des érections et priorités du patient. Certains
proposent, en cas de courbure > 60 et de verge < 13 cm
en érection, une incision de plaque accompagnée d’une
greffe, et si la courbure est < 60 et la verge > 13 cm, un
Nesbit ou une plicature simple [43]. Ce type d’algorithme
pose le problème de la norme en terme de taille et de
rectitude. Est-il préférable d’avoir une verge de 15 cm avec
un risque de troubles de l’érection situé autour de 30 % ou
une verge de 12 cm avec un risque de troubles de l’érection
de 6 % ? Il faut donc toujours intégrer les souhaits et
priorités du patient avant de prendre une décision
thérapeutique. La fonction érectile doit être très soigneusement évaluée et, en cas de dysérection, il faut tester la
réponse aux différents traitements afin de choisir la
meilleure technique chirurgicale et prévenir le patient des
risques encourus.
Traitements sans geste sur la plaque
Techniques de plasties caverneuses
Cela reste la technique de référence pour la correction
des courbures de verge, car elle obtient de très bons
résultats avec un très long recul. Il existe essentiellement
trois techniques avec de nombreuses variantes. Elles sont
simples, reproductibles, ce qui explique aussi leur place
de choix dans les techniques proposées.
Technique de la plicature simple : elle consiste en la
réalisation de points transfixiants en oméga dans l’albuginée
sur la face convexe de la courbure, après avoir au besoin
refoulé les bandelettes nerveuses dorsales ou en réclinant
légèrement l’urètre. La technique est très simple et efficace
(57 à 93 % de patients satisfaits), avec de rares troubles de
l’érection, mais avec un taux important de récidives (15 à
47 %) [44,45]. Le taux de récidive vient peut-être du type
de fil utilisé : résorbable ou non. Il semble préférable de
réserver cette technique aux courbures inférieures à 60 .
Technique de Nesbit : il s’agit d’une excision en
losange, sur la convexité de la courbure, d’une pastille de
corps caverneux et d’une suture bord à bord des deux
140
berges par du fil non résorbable souple. Un contrôle en fin
de suture doit être réalisé avec injection intracaverneuse de
sérum physiologique. Les résultats sont bons avec une
correction de la courbure dans 83 à 92 % des cas,
raccourcissement de verge dans 15 à 20 %, troubles de
l’érection dans 3 à 13 % et récurrence dans 4 à 11 %
[20,46,47]. Elle reste aujourd’hui la technique de référence.
Techniques d’incision-suture : techniques décrites
par Yachia et Lemberger qui proposent d’inciser en
longitudinal et de suturer en transversal. Ces techniques
sont équivalentes aux précédentes en termes de résultats,
mais les séries reportées sont de moindre importance.
Techniques comportant un geste sur la plaque sans
greffes tissulaires
Technique de Leriche : il s’agit d’une adaptation récente
d’une technique chirurgicale utilisée en orthopédie pour
traiter de manière percutanée les brides fibreuses dues à la
maladie de Dupuytren. Adaptée à la maladie de La Peyronie,
elle consiste en une ponction latérale du corps caverneux
par une aiguille biseautée. Cette aiguille est alors insérée
dans la plaque fibreuse et des mouvements latéraux de celleci permettent une dilacération de la plaque fibreuse. Il faut
réaliser plusieurs points d’entrée dans la plaque et répéter
ce geste de nombreuses fois jusqu’à ce que l’on perçoive
plusieurs zones d’amincissement, voire de disparition de la
plaque. Le patient devra par la suite utiliser une pompe à
vide type Vacuum, dès le lendemain de l’intervention, à un
rythme de 2 fois par jour pendant deux-trois mois. Il s’agit
d’une technique simple, sans complications, à l’exception de
quelques hématomes [48]. Cette technique semble particulièrement adaptée aux plaques longues et fines, elle est peu
efficace sur les plaques très calcifiées. Le délai d’un an après
le début de la maladie et la stabilisation depuis au moins
trois mois qui sont requis avant chaque chirurgie n’est pas
aussi nécessaire dans cette technique puisque l’on peut
toujours réaliser d’autres traitements par la suite, sans
compromettre les chirurgies ultérieures. Le seul élément qui
plaide pour une attente est la possibilité de régression
spontanée dans 10 à 15 % des cas. Les résultats sont
encourageants et on retrouve 50 % de patients qui peuvent
avoir un rapport sexuel après traitement et 50 % qui ont
besoin d’un retraitement [49]. Cette technique demande à
être réalisée sur un plus grand nombre de patients pour une
meilleure évaluation (Fig. 3).
Une technique dérivée de celle-ci, mais plus inspirée de
la technique d’incision du canal carpien par voie endoscopique est en cours d’évaluation [50]. Après avoir déshabillé
la verge et mobilisé sommairement la bandelette nerveuse
dorsale, une incision est réalisée sur la face latérale du
corps caverneux et un bistouri à lame rétractable, utilisé
pour le traitement endoscopique des canaux carpiens, est
introduit par incision latérale et glissé sous la plaque. La
lame est ensuite sortie de quelque 1/10 de millimètre et
va sectionner à plusieurs reprises la plaque fibreuse. Les
Fig. 3. Dilacération de plaque à l’aiguille : technique de Leriche
résultats sont très bons : 80 % de rapports sexuels possibles, 90 % de courbures corrigées. Ces très bons résultats
s’expliquent aussi par le choix de ne traiter que les plaques
de moins de 2 cm. Cette technique semble prometteuse
mais reste assez lourde : déshabillage complet de la verge et
libération des bandelettes vasculo-nerveuses, ce qui n’est
pas sans risque et sans difficulté dans les plaques de La
Peyronie. Une technique simplifiée est proposée par section
de plaque à la serpette [49].
Techniques comportant un geste sur la plaque avec
greffes tissulaires
La plupart des équipes [6] ont aujourd’hui renoncé à
l’excision complète de la plaque, car il s’agit d’une
technique très délabrante qui emporte toujours du tissu
érectile et qui nécessite de très grandes greffes ce qui
majore les complications (troubles de l’érection 20 %,
raccourcissement de verge, chirurgie complémentaire
17 % ...). La première étape consiste donc le plus souvent
en une incision de la plaque au niveau de la concavité de
façon transversale, en h ou encore selon des calculs
géométriques [51], puis on réalise une greffe tissulaire
après avoir fait un test d’érection avec du sérum
physiologique pour évaluer la taille du défect à recouvrir.
Cette technique est plus adaptée aux déformations
majeures et aux plaques calcifiées même si la morbidité
est importante (récidive de la déformation, dysérections
et troubles de la sensibilité). De très nombreux patchs
existent et seule une partie sera décrite ci-dessous.
Avec patchs veineux
Technique décrite par Lue, qui propose une incision de
la plaque de La Peyronie puis la réalisation d’un patch
veineux avec la veine dorsale de la verge ou avec la veine
saphène. La correction de la courbure est présente dans
73 à 86 % des cas, des troubles de l’érection sont présents
dans 8 à 30 % et un raccourcissement de verge dans 15 à
141
40 % [52-54]. Il s’agit de la technique avec le plus long
recul et qui présente les meilleurs résultats.
Avec sous-muqueuse d’intestin de porc (Surgisis, etc.)
Les résultats sont très variables et les séries sont petites.
Le taux de correction de la courbure est de 63 à 78 %, le
taux de récidive est de 22 à 75 %, on retrouve de 0 à 7 %
de dysérections et il existe un raccourcissement dans
28 % des cas [55,56]. Cette technique manque encore de
recul et d’adaptations techniques : prévoir du tissu en
excès lors de la pose du greffon pour éviter la rétraction.
Autres types
On citera des greffons prometteurs, mais dont les résultats
méritent d’être contrôlés : muqueuse buccale [57] et
matrices cellulaires [58]. On rappelle l’existence de greffes
prépuciales ou de vaginale testiculaire.
Prothèses et greffes
La prothèse pénienne sera associée d’emblée à une
chirurgie d’incision-greffe, lorsque le patient présente
une dysérection en préopératoire et qu’il ne répond pas
ou mal aux traitements par inhibiteurs de la PDE5 et aux
injections intracaverneuses. Si le patient répond bien aux
traitements de la dysérection, on discutera avec lui, en
tenant compte de son âge et de ses comorbidités, de
l’intérêt ou non de mettre une prothèse.
Les résultats sont globalement bons avec les prothèses
gonflables : 95 à 100 % de patients satisfaits, 4,4 % d’infections, 80 % qui utilisent leur prothèse [59,60]. La mise en
place de prothèses gonflables semble actuellement la
meilleure solution et donne les meilleurs résultats à
condition de les activer plus systématiquement et plus
précocement. Les prothèses semi-rigides peuvent être mises
en place, mais les résultats sont moins bons : 48 % des
patients seulement utilisent leur prothèse et seulement 42 %
des partenaires en sont satisfaits [61].
Techniques par mise en place d’un tuteur
Certaines équipes proposent la mise en place d’implants
souples (cylindres fins en silicone qui permettent la
conservation de tissu caverneux afin de permettre les
érections spontanées tout en réalisant un effet tuteur) chez
les patients porteurs d’une maladie de La Peyronie et sans
troubles érectiles. Dans un cas, cette technique était
associée à des incisions de la plaque et à des greffes de
patchs veineux. Quatre-vingt-quinze pour cent des patients
sont satisfaits, mais le nombre de perdus de vue est de 65 %
ce qui rend les résultats beaucoup moins fiables [62].
Conclusion
La maladie de La Peyronie est une pathologie dont
l’incidence augmente. La physiopathologie reste encore
mystérieuse et on retient actuellement quatre processus
pouvant expliquer la formation des plaques de La
Peyronie : un facteur génétique, un terrain vasculaire,
un trouble auto-immun et l’existence de micro-traumatisme comme facteur déclenchant. Des études croisées,
avec la maladie de Dupuytren notamment, devraient
apporter un éclairage intéressant. Les examens complémentaires ne sont pas recommandés en pratique
courante, mais des photos en érection sont indispensables avant une décision chirurgicale. Peu de traitements
médicaux semblent pouvoir rendre service aux patients
actuellement (aucun traitement médical n’a d’études
ayant un niveau de preuve de 1). On retiendra la douleur
comme indication de traitement médical. Tous les
traitements n’ayant pas d’effets secondaires graves et
ayant prouvé une bonne efficacité sur la douleur peuvent
être essayés : vitamine E, colchicine per os, stéroı̈des,
vérapamil et interféron B en injections dans la plaque.
Par ailleurs, la lithotritie extra-corporelle semble avoir
de bons résultats. Une meilleure compréhension de la
physiopathologie devrait permettre d’améliorer les traitements médicaux. Il semble logique pour les traitements
à visée antifibrose de commencer le traitement le plus tôt
possible et de réaliser un dépistage. Mais on prend le
risque de réaliser un surtraitement car une partie des
patients aurait guéri spontanément. Par ailleurs si on
réalise un dépistage, on découvrira peut-être de nombreuses plaques de La Peyronie qui n’auraient jamais été
symptomatiques. Sur le plan chirurgical, la technique de
référence pour les courbures < 70-80 reste la technique
de Nesbit et pour les courbures > 80 et les grandes
plaques, l’incision-greffe est indiquée. L’indication de
prothèse de verge sera retenue si le patient présente des
troubles érectiles qui répondent mal aux traitements de
la dysérection.
On notera des pistes intéressantes avec la technique de
Leriche qui a une morbidité nulle et une bonne efficacité
dans les plaques longues et fines. Autre piste intéressante :
la mise en place d’implants souples pour corriger les
courbures, étirer la plaque et aider les érections. Mais des
études complémentaires sont nécessaires pour valider ces
nouvelles techniques.
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DOI 10.1007/s11608-007-0119-z
MISE AU POINT / UPDATE
Indications de l’opération de Malone ou dérivées
chez le patient neurologique
J.-H. Lefèvre 1,2,3 , Y. Parc 1,2 , R. Parc 1,2
1
2
3
Département de chirurgie digestive, hôpital Saint-Antoine, AP-HP, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, F-75012 Paris, France
Université Paris-VI (Pierre-et-Marie-Curie), Paris, France
Service de chirurgie générale et digestive, hôpital Saint-Antoine, AP-HP, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, F-75571 Paris, France
Résumé : Les étiologies neurologiques d’incontinence
anale ou de constipation chronique sont variées. Les
incontinences d’origine neurologiques sont principalement de type passif. Les traitements actuels sont peu
efficaces étant donné l’absence de perception du besoin
chez ces patients. L’alternative à la colostomie est le
développement d’un accès au côlon pour permettre des
lavements antérogrades afin de vider entièrement le
côlon. L’intervention de Malone et ses alternatives
permettent généralement d’obtenir un résultat fonctionnel bon ou excellent avec une amélioration de la qualité
de vie et la disparition des pertes de selles ou de gaz.
L’accès au tube digestif est rendu possible en utilisant
soit l’appendice, l’iléon terminal, le cæcum, le côlon droit
ou sigmoı̈de. Ces interventions ne traitent pas le
problème organique de continence fécale et doivent
être proposées aux patients avec un retentissement
important : patients atteints d’une incontinence passive
chez qui les thérapeutiques actuelles ne sont pas adaptées
ou ont été inefficaces ; constipation intraitable ; enfants
avec des troubles combinés de la continence urinaire et
fécale. Les antécédents de chirurgie digestive, de maladie
de Crohn et les affections empêchant la réalisation des
lavements constituent les contre-indications de l’intervention de Malone ou de ses alternatives.
Mots clés : Constipation – Incontinence anale – Intervention
de Malone – Lavements antérogrades
Indications for the Malone procedure or its equivalent
in patients with neurological disorders
Abstract: The neurological causes of fecal incontinence
and chronic constipation are varied. Incontinence caused
by neurological disorders is usually passive. Current
treatment modalities are marginally effective given that
patients generally do not recognize the need for them.
The alternative to colostomies is the development of a
method to access the colon to perform anterograde
Correspondance : E-mail : [email protected]
enemas, which would empty the entire colon. The
Malone procedure and its variations usually result in
good to excellent function, with improvement in quality
of life and relief from the involuntary release of stool or
gas. Access to the digestive tract is made possible by
using the appendix, terminal ileum, cæcum, right colon
or sigmoid colon. These interventions do not treat the
underlying organic problem of fecal continence and must
only be offered to patients affected by advanced disease:
patients suffering from passive incontinence for whom
current therapeutic measures fail to meet their needs or
had been ineffective; intractable constipation; children
with both urinary and fecal continence disorders.
A history of gastrointestinal surgery, Crohn’s disease,
or disorders that preclude the use of enemas contraindicates the Malone procedure and its alternatives.
Keywords: Constipation – Fecal incontinence – Malone
procedure – Antegrade enema
Introduction
La prévalence de l’incontinence fécale dans la population
générale est d’environ 2 % [1]. La continence anale est
sous la dépendance de plusieurs appareils : l’appareil
digestif, l’appareil sphinctérien et le système nerveux.
Chaque dysfonctionnement d’un ou plusieurs de ces
appareils peut être responsable de troubles de la
continence dont les étiologies peuvent être donc multiples (séquelles chirurgicales, obstétricales, troubles
neurologiques, traumatismes pelviens, etc.).
Les symptômes de l’incontinence fécale restent
globalement identiques quelle que soit l’étiologie en
cause. Deux grands types d’incontinence peuvent être
distingués selon le caractère passif ou actif de celle-ci.
L’incontinence active est définie par la perception du
besoin mais l’impossibilité de contrôler l’exonération.
En revanche, l’incontinence passive est caractérisée par
145
l’absence de perception du besoin d’exonérer et la
découverte des fuites fécales après leur survenue.
Les incontinences d’origine neurologiques sont principalement de type passif. Certaines affections neurologiques peuvent également être responsables d’une
constipation chronique qui peut aggraver l’inconfort.
Enfin, les étiologies peuvent être congénitales ou
acquises :
– congénitales : spina bidifa, myéloméningocèle,
syndrome de Currarino,...
– acquises :
périphérique : traumatisme médullaire ou sacré,
traumatisme obstétrical ou prolapsus associé à une
neuropathie pudentale d’étirement...
centrale : sclérose en plaques, accident vasculaire
constitué, thrombose cérébrale, séquelles de méningite...
Parmi toutes ces étiologies, seule la neuropathie
d’étirement entraı̂ne une incontinence active principalement dominée par l’impériosité. Ce symptôme se
caractérise par un délai entre la sensation de besoin et
la nécessité d’évacuer les selles extrêmement court,
rendant toute tentative de retenue impossible et dégradant considérablement la qualité de vie. Dans cette
circonstance, l’appareil sphinctérien est normal et en
modifiant les conditions de fonctionnement du périnée,
il est possible d’améliorer la continence. La neuromodulation s’avère ici particulièrement efficace.
Pour les autres étiologies, les traitements actuels
(médicaux, sphinctérorraphie, neuromodulation, sphincter artificiel, gracyloplatie dynamisée) sont peu efficaces
dans ces incontinences passives étant donné l’absence de
perception du besoin. Les lavements évacuateurs rétrogrades ne sont pas usuellement aisés à réaliser et ne sont
le plus souvent pas acceptés. Pour ces patients, la
solution extrême est la colostomie définitive avec des
conséquences psychologiques et physiques d’une importance variable.
L’alternative à cette colostomie est le développement
d’un accès au côlon pour permettre des lavements
antérogrades afin de vider entièrement le côlon et de
prévenir toute fuite, épisode d’incontinence ou écoulement.
C’est le principe de l’intervention de Malone et al. [2]. Le
principe dérive d’une intervention initialement décrite en
1980 par Mitrofanoff [3] pour traiter les troubles mictionnels
chez l’enfant par la création d’un accès continent vésicale
transabdominal. La technique a été transposée dix ans plus
tard pour la gestion de l’incontinence fécale [2]. L’extériorisation de l’extrémité distale de l’appendice afin de réaliser
les lavements au moyen d’un petit drain fut le premier
procédé utilisé. Chez les patients appendicectomisés ou avec
un appendice trop court, quatre solutions alternatives sont
décrites : soit l’iléon terminal est mis à la peau après
tubulisation et une anastomose terminolatérale entre l’iléon
et le côlon est confectionnée afin de rétablir le circuit digestif
[4], soit une cæcostomie continente [5] est réalisée, soit un
conduit peut-être élaboré à partir d’une section transversale
de la paroi colique pédiculisée sur une petite artère [6], soit
enfin un conduit colique continent peut être réalisé en
dérivation du cadre colique [7].
Principes chirurgicaux du Malone ou équivalent
Sous anesthésie générale, on réalise une incision médiane
péri-ombilicale. Après exploration abdominale, si
l’appendice apparaı̂t utilisable, on procède à la confection d’un système antireflux au niveau de la base
appendiculaire avant d’extérioriser sa pointe par une
petite incision circulaire en fosse iliaque droite. La base
appendiculaire est fixée à la paroi afin d’assurer un trajet
direct de l’appendice indispensable pour son cathétérisme aisé (Fig. 1). Cette intervention chirurgicale peut
être réalisée par laparoscopie [8].
Lorsque l’appendice n’est pas utilisable, il est le plus
souvent réalisé une tubulisation de la dernière anse
iléale. L’iléon est sectionné en amont de la valvule
iléocæcale à une distance équivalente à l’épaisseur de la
paroi abdominale. Un drain de 14 Fr est placé ensuite
dans l’iléon afin de calibrer la lumière du conduit que
l’on confectionne contre le mésentère par l’application de
pince autosuture (Fig. 2). La partie antimésentérique du
tube intestinal est réséquée. La partie du tube restant en
continuité avec la valvule iléocæcale est extériorisée en
fosse iliaque droite. Une anastomose iléocolique est
ensuite confectionnée pour rétablir la continuité digestive (Fig. 3). La base du conduit est fixée à la paroi.
Le cæcum peut être ourlé à la peau avec confection
d’un mécanisme antireflux afin de permettre les irrigations [5] ou être tubulisé autour d’un drain (Fig. 4).
La technique de Macedo-Malone [6] a été décrite pour
raccourcir le temps des lavements qui sont introduits au
niveau du côlon descendant. Les rapporteurs de cette
technique la proposent chez les enfants pour plusieurs
Fig. 1. Schéma final de l’intervention de Malone avec appendicostomie
146
3 cm de hauteur est ouvert au niveau du côlon gauche. Ce
lambeau est tubulisé sur une sonde de Foley avec
confection d’un mécanisme antireflux (Fig. 5).
La technique de Williams et al. [7] utilise le côlon
droit pour réaliser les lavements. Le côlon est sectionné
au tiers droit du côlon transverse. L’extrémité en
continuité avec le côlon gauche et le rectum est
extériorisée à travers la paroi abdominale. La continuité
digestive est assurée par une anastomose colocolique.
Une valve antireflux identique à celle décrite par Koch
[9] pour les iléostomies définitives est confectionnée afin
d’assurer la continence de la stomie colique.
Les principales complications de ces techniques sont
la sténose de l’orifice cutané (moins fréquente après
iléostomie) et le reflux par la stomie (plus fréquent après
cæcostomie). Dans notre expérience [10], nous avons
observé deux reflux (25 %) après Malone qui ont été
responsable de l’arrêt des lavements et cinq sténoses
(22 %) dont deux ont nécessité une reprise chirurgicale.
Les autres complications décrites dans la littérature
sont : nécrose de la stomie (surtout après cæcostomie),
perforation de la stomie avec confection d’un faux trajet
[11] et les complications relatives (abcès [12], péritonite),
abcès de paroi, occlusion sur bride.
Fig. 2. Vue peropératoire d’une iléo-néoappendicostomie.
b
Principes d’utilisation et résultats
Le drain de 14 Fr est laissé en place dans la stomie
(appendiculaire, iléale, cæcale ou colique) pendant trois
semaines. À j + 15, des lavements quotidiens sont
débutés avec 500-1 000 ml d’eau du robinet.
Par la suite, les patients déterminent la fréquence des
lavements pour rester propres. En moyenne, ils sont
nécessaires tous les deux jours. Le patient place le cathéter
dans la stomie, s’assit sur les toilettes et place la poche
contenant 1,5 l d’eau du robinet en hauteur sur un crochet. La
durée du lavement est en moyenne de quarante minutes. Il
s’agit de soins simples pouvant être réalisés sans aide. Dans
notre expérience, sur une série de 25 Malone (sept appendicostomies et 18 iléostomies), 72 % des patients (n = 18)
a
Fig. 3. Schéma final de l’iléo-néoappendicostomie (a) avec anastomose
iléo-colique (b)
raisons : réduction du temps des lavements, absence de
recours au PEG avec utilisation simple d’eau du robinet,
absence d’anastomose iléo-colique, éloignement de la
stomie par rapport à celui d’un Mitrofanoff si un
drainage vésical est également indiqué. Un volet de
a
b
c
Fig. 4. Schéma du « cæcal-flap ». (a) : tracé du volet cæcal ; (b) : volet cæcal sectionné, toujours vascularisé par son bord interne ; (c) : aspect final
après suture du côlon et du volet autour du drain qui est extériorisé à la peau
147
b
a
c
d
Fig. 5. Schéma du Macedo-Malone. (a) : tracé du volet colique ; (b) : volet colique sectionné, toujours vascularisé par son bord interne, la sonde est
posée ; (c) : début de la tubulisation par le volet colique ; (d) : aspect final avec extériorisation de la sonde
utilisant leur stomie considéraient le résultat fonctionnel
comme bon ou excellent [9]. Seul un patient avait besoin d’aide
pour réaliser les lavements et un autre ajoutait du PEG pour les
réaliser. La stomie était le plus souvent laissée à l’air chez
quatre patients et sous un simple pansement chez les autres.
Aucun patient ne présentait d’épisode de souillures par des
selles ni d’évacuations intempestives de gaz. Seul un patient
décrivait quelques épisodes de soiling, mais cela ne nécessitait
pas de port d’une protection.
Le retentissement sur la qualité de vie des patients est
nettement bénéfique dans de nombreuses études [13-15].
Nos 18 patients utilisant leur stomie avaient un score SF-36
physique normal. En revanche, le score de bien-être mental
restait inférieur à celui de la population normale probablement en rapport avec la chronicité de leur affection
(le délai moyen entre le diagnostic de l’incontinence et la
réalisation du Malone était de 18,5 années). La motivation
du patient est donc fondamentale pour le succès de cette
intervention. De plus, les complications (infections, sténose, incontinence, ...) sont plus fréquentes chez les
patients ayant une mauvaise compliance [12]. Chez l’adulte,
l’utilisation de l’iléon terminal est de plus en plus
recommandée, l’appendice étant très souvent atrésique,
mais aussi expose à un taux de complications moindre [16].
Indications
Il faut bien comprendre que cette intervention ne traite
pas le problème organique de continence fécale. Elle
Tableau I. Étiologies des pathologies traitées par Malone ou équivalent
Teichman
et al. [19]
Étiologies neurologiques
Spina bifida
3 (43 %)
Myéloméningocèle
Paraplégie
Traumatisme médullaire 4 (57 %)
Agénésie sacrée
Séquelles de méningite
Syndrome de Currarino
Syndrome de Vater
Thrombose cérébrale
Sclérose en plaque
Étiologies non neurologiques
Constipation intraitable
Imperforation anale
Cloaque
Séquelles chirurgicales
Traumatisme obstétrical
Clarck et al.
[12]
Mor et al.
[17]
23 (49 %)
6 (13 %)
5 (28 %)
Yerkes et al.
[20]
Lefevre et al. Calado et al. Krogh et
[10]
[6]
Laurberg [15]
58 (91 %)
2 (8 %)
3 (19 %)
7 (78 %)
1 (1,5 %)
7 (28 %)
7 (15 %)
4 (22 %)
2 (8 %)
1 (4 %)
2 (4 %)
1 (5 %)
2 (12 %)
1 (6 %)
5 (28 %)
1 (1,5 %)
4 (6 %)
6 (37 %)
7 (28 %)
2 (22 %)
2 (4 %)
4 (16 %)
2 (8 %)
4 (26 %)
148
traite les symptômes responsables de troubles physiques
et psychiques parfois sévères. De ce fait, elle ne doit
être proposée, comme l’ensemble des thérapeutiques
luttant contre les troubles de la continence, qu’aux
patients avec un retentissement important et en alternative à la colostomie terminale avec sa morbidité propre
et les complications psychologiques communes à toute
stomie productive définitive. L’intervention de Malone
est une alternative satisfaisante pour les patients chez
qui des lavements itératifs par le rectum n’ont pas
permis d’obtenir un résultat fonctionnel satisfaisant.
Les articles détaillant une expérience sur les lavements
antérogrades sont résumés dans le Tableau I. Dans notre
expérience, les patients neurologiques pouvant bénéficier
d’une intervention de Malone ou équivalent sont :
– patients atteints d’une incontinence passive chez
qui les thérapeutiques actuelles (sphincterroraphie,
neurostimulation, sphincters artificiels) ne sont pas
adaptées ou ont été inefficaces ;
– constipation intraitable ;
– enfants avec des troubles combinés de la continence
urinaire et fécale (spina bifida, myéloméningocèle, ...).
L’opération de Malone ou équivalent peut être associée à
un Mitrofanoff sans augmentation de la morbidité [17].
Dans une série récente [18], le Malone était un succès
chez tous les patients avec une origine neurologique ou
congénitale à leur incontinence par opposition aux
autres étiologies (côlon irritable, mégarectum, séquelles
chirurgicales).
Les contre-indications au Malone :
– antécédents digestifs : hémicolectomie droite (la
technique du Macedo-Malone peut être alors envisagée),
maladie de Crohn ;
– patients ne pouvant pas réaliser les lavements :
maladies neurologiques empêchant l’utilisation des
membres supérieurs avec précision comme la maladie
de Parkinson, hémiplégie, cécité, ...
En revanche, les patients en chaise roulante pour une
paraplégie des membres inférieurs peuvent bénéficier de
l’intervention de Malone et réaliser eux-mêmes les
lavements [6].
Conclusion
L’intervention de Malone ou équivalent permet d’obtenir
une propreté chez la majorité des patients avec des troubles
de la continence fécale secondaire à une étiologie
neurologique. Elle peut être associée à des interventions
prenant en charge les troubles urinaires associés. Chez les
patients atteints d’affection neurologique, le facteur limitant à l’indication des interventions de Malone ou
équivalent est l’autonomie et la capacité à réaliser des
gestes précis avec leurs membres supérieurs.
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© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0133-1
DOSSIER THÉMATIQUE / THEMATIC FILE
Incontinence urinaire et ménopause : données épidémiologiques
B. Fatton
Unité d’uro-gynécologie, maternité de l’Hôtel Dieu, CHU de Clermont-Ferrand, F-63000, Clermont-Ferrand, France
Résumé : La ménopause s’accompagne d’un cortège de
symptômes uro-génitaux parmi lesquels l’incontinence
urinaire (IU). La prévalence de l’IU au moment de la
ménopause varie de 8 à 55 % selon la définition de l’IU
retenue et la population étudiée. Bien que la ménopause
soit classiquement associée à l’IU, elle n’apparaı̂t pas
toujours dans les enquêtes épidémiologiques comme
un facteur de risque indépendant de l’IU féminine. En
revanche, l’IU apparaı̂t bien corrélée à l’âge. La prévalence
de l’IU augmente avec l’âge : estimée à 20-30 % dans
une population d’adultes jeunes, elle est de 30-40 % en
milieu de vie et atteint 30 à 50 % dans la population âgée.
Si l’on s’intéresse aux différents types d’IU, la prévalence
de l’incontinence urinaire d’effort (IUE) diminue avec
l’âge et la prévalence de l’incontinence par urgences
mictionnelles et de l’incontinence mixte augmente
avec l’âge. L’estrogénothérapie ne semble pas prévenir
ou corriger l’IUE. En revanche, elle semble être efficace
pour soulager les symptômes de l’hyperactivité vésicale
avec, notamment, une réduction du nombre des épisodes
de fuites par urgences mictionnelles.
Mots clés : Incontinence urinaire – Ménopause – Incontinence urinaire d’effort – Incontinence par urgences
mictionnelles – Épidémiologie de l’incontinence urinaire
féminine – Estrogénothérapie
Urinary incontinence and menopause: epidemiological
data
Abstract: Menopausal status is associated with various
urogenital symptoms, including urinary incontinence.
The prevalence of urinary incontinence during the
menopausal transition varies from 8 to 55%, depending
on the definition of incontinence and the sample
population. Although menopause has been shown to be
associated with urinary incontinence, it doesn’t always
appear as an independent risk factor in epidemiological
surveys. Urinary incontinence is significantly associated
with age. Its prevalence increases with age, estimated at
20-30% in young adults, 30-40% at middle-aged adults
Correspondance : E-mail : [email protected]
and 30-50% in the elderly population. When examining
the various types of urinary incontinence, we find that
the prevalence of stress urinary incontinence (SUI)
decreases with age, while the prevalence of urge and
mixed incontinence increases. Estrogen therapy seems
ineffective in preventing or improving SUI, but it
appears effective in alleviating the symptoms of overactive bladder, significantly decreasing the number of urge
incontinence episodes.
Keywords: Urinary incontinence – Menopause – Stress
urinary incontinence – Urge incontinence – Epidemiology of female urinary incontinence – Estrogen therapy
La ménopause s’accompagne de tout un cortège de
symptômes uro-génitaux aux premiers rangs desquels on
retrouve l’atrophie vulvo-vaginale, les infections du bas
appareil urinaire et l’incontinence d’urine. Néanmoins, la
ménopause n’apparaı̂t pas toujours dans les enquêtes
épidémiologiques comme un facteur de risque indépendant de l’incontinence urinaire (IU). Par ailleurs, si la
carence hormonale est reconnue comme responsable de
tout ou partie des symptômes rapportés par les femmes
en période de ménopause, l’effet du traitement hormonal
supplétif sur l’IU reste controversé.
Concernant la prévalence de l’IU dans la population
générale, l’influence raciale et ethnique est actuellement
bien documentée avec une prévalence abaissée chez les
femmes noires, hispaniques et asiatiques en comparaison
avec les femmes blanches [1]. Nous centrerons notre
propos en grande partie sur la race caucasienne et plus
précisément sur les résultats provenant des enquêtes
européennes, plus en adéquation avec notre pratique
quotidienne. Les données disponibles en Europe sont le
plus souvent obtenues sous l’impulsion des équipes,
scandinaves très actives dans le domaine, et nous nous
inspirerons entre autre très largement pour la rédaction
de cet article des nombreuses publications de S. Hunskaar,
spécialiste unanimement reconnu de l’histoire naturelle
et de l’épidémiologie de l’incontinence d’urine de la femme
[1,2] et des données de l’étude EPINCONT [3].
150
Pré valence en fonction de l’âge
Prévalence de l’incontinence urinaire
La prévalence de l’incontinence d’urine dans la population
féminine varie considérablement selon les séries, dépendant
entre autres du type d’étude, de la définition retenue pour
l’incontinence (définition ICS, gêne sociale, port de
garnitures...), de la population étudiée (race, population en
institution...), de la classe d’âge considérée et du type
d’incontinence concerné. L’International Continence
Society (ICS) a défini l’incontinence comme « toute plainte
pour perte d’urines involontaire ». Les enquêtes épidémiologiques font le plus souvent appel à des définitions
qui incluent des critères de fréquence des fuites (par
exemple « toute » fuite, ou de façon plus restrictive « dans
le mois précédent l’enquête » ou « n fois » par période de
temps défini etc.) ou de gravité (gêne sociale, atteinte de la
qualité de vie). Cette variabilité dans les symptômes analysés
rend compte de celle retrouvée à la comparaison des
résultats disponibles dans la littérature (Tableau 1).
Tableau 1. Prévalence de l’IU
É tude
Anné e
Nombre
 ge
Pré valence (%)
Yarnel [4]
Holst [5]
Sommer [6]
Brocklehurst [7]
Sandvik [8]
Swithinbank [9]
Hannestad [3]
Temml [10]
Bortolotti [11]
Moller [12]
Nygaard [13]
Chen [14]
Hunskaar [15]
Melville [16]
Kocak [17]
Jackson [18]
1981
1988
1990
1993
1993
1999
2000
2000
2000
2000
2003
2003
2004
2005
2005
2006
1022
851
414
2124
1820
2075
27936
1262
2767
2860
5701
1253
17080
3536
1012
1017
17
18
20-79
30
20
18
20
20
40
40-60
50-69
20
18
30-90
18
55-75
44
31
40
14
29
69
25
26
11
72
16
53,7
35
42
23,9
66
La relation intime qui existe entre le facteur âge (et donc le
processus de vieillissement) et la ménopause (et les
variations hormonales qui l’entourent) explique qu’il
reste difficile d’établir ce qui revient à l’un et à l’autre des
mécanismes dans la survenue de l’incontinence d’urine.
Ainsi, les symptômes urinaires classiquement attribués
à la ménopause pourraient être, en fait, corrélés plus
directement à l’âge [19]. Un travail récent a révélé que
l’existence d’une nycturie chez la femme âgée était
directement corrélée à l’âge et non au passage du statut
pré-ménopausique à post-ménopausique [20]. La prévalence de l’incontinence d’urine augmente avec l’âge.
Cependant, cette augmentation ne serait pas linéaire
(Fig. 1) : il existe une augmentation graduelle de la
prévalence jusqu’à 50 ans où elle atteint 30 %, puis on
constate une stabilisation, voire même une discrète
diminution jusqu’à l’âge de 70 ans, période où la
prévalence augmente à nouveau [3]. L’âge apparaı̂t
comme un facteur de risque, à la fois pour l’incontinence
par urgences mictionnelles (IUM) et l’incontinence
urinaire d’effort (IUE) dans certaines publications [1,21],
alors qu’il n’est associé qu’à l’IUM dans d’autres [19,22].
Le Tableau 2 rapporte quelques chiffres disponibles
dans la littérature en fonction de l’âge, en privilégiant les
classes d’âge de 45 ans et plus qui concernent plus
spécifiquement notre propos. La fréquence de l’IU dans
la population âgée explique que l’IU soit souvent
considérée comme une conséquence normale et inévitable
du vieillissement [1]. Pourtant, si des modifications
histochimiques surviennent avec l’âge au niveau des
structures musculaires et conjonctives de la sphère urogénitale, elles interviennent le plus souvent avec d’autres
facteurs tels que certaines pathologies plus fréquentes chez
le sujet âgé (diabète, troubles cognitifs) pour expliquer la
survenue d’une IU.
Prévalence (%)
inconnue
légère
modérée
sévère
inconnue
légère
modérée
sévère
Âge
Fig. 1. Prévalence de l’IU selon l’âge d’après l’étude EPINCONT [3]
151
Tableau 2. Prévalence en fonction de l’âge
Tableau 3. Prévalence en fonction du type d’incontinence
Anné e
Classe d’âge
Pré valence (%)
Yarnell [4]
1981
Reckers [23]
1992
Sandvik [8]
1993
Brocklehurst [7]
1993
Holtedahl [24]
1998
35-64
65-74
75
35-59
60-64
65-69
75-79
40-49
50-59
60-69
70-79
80
30-59
60
50-54
55-59
60-64
65-69
70-74
30-39
40-49
50-59
60-69
70
50-60
70
40
60
30-39
80-90
49
43
59
31
24
14
26
33
38
30
31
34
6
9
43
55
45
39
56
10,8
22,9
34,9
36,9
36
11
16
9
19
8
33
Auteurs
Temml [10]
2000
Bortolotti [11]
2000
Eva [25]
2003
Melville [26]
2005
Pré valence en fonction du type d’incontinence
La prévalence de l’incontinence varie en fonction du type
d’incontinence concernée : IUE, IUM ou incontinence
mixte (IMixte). De même, la prévalence des différents
types d’incontinence varie en fonction de l’âge. L’IUE
prédomine dans les enquêtes conduites chez les femmes
jeunes ou en milieu de vie, alors que dans les cohortes de
femmes âgées, l’IUM et l’IMixte sont prépondérantes
[27]. Ces variations dans les proportions respectives des
différents types d’IU au cours de la vie rendent plus
complexes encore la lecture des données publiées. Le
Tableau 3 rapporte la distribution des différents types
d’incontinence selon les séries.
Les résultats de l’enquête européenne conduite
conjointement en France, en Espagne, en Allemagne et
au Royaume-Uni sont colligés dans le Tableau 4 [15]. La
prévalence de l’IUE, tous âges confondus, est la plus
élevée. La prévalence de l’IMixte augmente régulièrement
avec l’âge. La part de l’IUM reste la plus faible dans la
plupart des classes d’âge concernées.
On peut retenir, en synthèse, que l’IUM augmente
avec l’âge alors que l’IUE diminue avec l’âge, peut être en
partie à cause de la réduction des activités [27]. L’enquête
américaine MESA de Diokno et al. [31], chez les patientes
de 60 ans et plus, a rapporté la répartition sui-
Auteurs
Anné e
N
Yarnell [4]
1981 1000
Elving [28]
1989 2631
Hannestad [3] 2000 27936
Bortolotti [11] 2000 5488
Hunskaar [15] 2004 17080
Swanson [29] 2005 606
Oskay [30]
2005 500
Kocak [17]
2005 1012
IUE (%) IUM (%) I Mixte (%)
49
48
50
55
46
34,1
37,2
33,1
21
7
11
12
26
14,5
32,3
25,6
30
45
36
24
28
51,4
30,5
41,3
Tableau 4. Prevalence selon l’âge et le type d’incontinence dans
4 pays européens [15]
Pays
France
Espagne
Allemagne
Royaune-Uni
N
Classe
d’âge
IUE
(%)
IUM
(%)
IMixte
(%)
I autre
698
617
399
582
273
600
564
478
534
461
441
329
18-44
45-59
60
18-44
45-59
60
18-44
45-59
60
18-44
45-59
60
29
33
29
41
55
30
47
41
31
44
42
35
31
24
25
21
11
24
14
14
19
18
11
19
26
38
41
17
21
37
27
40
46
25
39
40
15
5
4
21
13
9
12
4
4
13
7
6
vante : 55,5 % pour l’IMixte, 26,7 % pour l’IUE, 9 %
pour l’IUM et 8,8 % pour les types autres et inclassables.
Pré valence en fonction de la sé vé rité de l’incontinence
La prévalence de l’incontinence sévère augmente avec
l’âge [3]. L’étude EPINCONT a révélé que dans la
cohorte des femmes de moins de 45 ans, l’IU était légère
dans 57 % des cas, modérée dans 31 % des cas et sévère
dans 12 % des cas. La répartition est respectivement de 46,
33 et 21 % dans la classe d’âge de 45 à 59 ans et de 24, 31 et
44 % chez les plus de 60 ans. La sévérité de l’incontinence
varie aussi en fonction du type d’incontinence. Ainsi, la
part de l’incontinence sévère est de 17 % chez les femmes
souffrant d’IUE, de 28 % en cas d’IUM et de 38 % en cas
d’IMixte.
Pré valence en fonction de la population é tudié e
En dehors de l’influence raciale et ethnique que nous
avons déjà évoquée, la prévalence de l’IU dépend aussi
du type de population étudiée. Plusieurs études ont
trouvé une prévalence de l’IU augmentée chez les femmes
vivant en institutions par rapport à celles vivant en
communauté. L’impact précis de la vie en institution sur
152
la prévalence de l’IU est difficile à estimer car plusieurs
autres facteurs interviennent aux premiers rangs desquels
la perte de mobilité, la démence et la qualité de l’offre de
soin de la structure de long séjour. Ainsi, les troubles des
fonctions cognitives multiplieraient le risque d’IU par
3,6 dans les études en analyses multivariées [32]. Une
corrélation forte a été démontrée entre la démence et la
prévalence de l’IU chez les femmes âgées [33]. De même la
dépression sévère serait corrélée au risque d’incontinence
[13,16,33] : la prévalence de la dépression sévère atteint
3,7 % chez les femmes incontinentes contre 2,2 % chez
les femmes continentes [16].
La ménopause est-elle un facteur de risque
de l’incontinence urinaire ?
Les nombreuses études cliniques et épidémiologiques
ont permis de dégager de nombreux facteurs de risque de
l’IU aux premiers rangs desquels on peut citer entre autre
et de manière non exhaustive, l’âge, la parité, l’obésité,
le diabète, la grossesse et les facteurs obstétricaux,
l’hystérectomie, les pathologies du bas appareil urinaire,
la ménopause, le tabagisme, l’atteinte des fonctions
cognitives et la réduction de la mobilité. Néanmoins, si
les rôles de l’âge ou de la parité par exemple ont fait l’objet
de très nombreux travaux rigoureux et concordants,
l’impact de la ménopause reste discuté et les données de
la littérature parfois contradictoires. Plusieurs travaux
n’ont pas retrouvé de différence en termes de prévalence
ou de fréquence de l’IU chez les femmes ménopausées
ou non [34-36]. Ainsi, Milsom et al. [37] dans une enquête
publiée en 1993 ne constatent aucune différence de
prévalence de l’IU entre les femmes de 46 ans (préménopause) et celles de 56 ans (ménopause), avec un taux
de 12 % dans les deux cohortes. Dans une étude
longitudinale de cohorte, Sherburn et al. [38] ne
retrouvent aucune association entre IU et entrée en
ménopause. Certains auteurs rapportent même une
prévalence de l’IU augmentée chez les femmes non
ménopausées en comparaison avec celles qui sont
ménopausées [39,40]. Dans le travail de Kuh et al. [35],
l’effet « protecteur » de la ménopause ne concerne que
l’IUE. A contrario, une corrélation positive prévalence IU/
ménopause est rapportée par d’autres. Ainsi, l’enquête
française conduite par le Centre de documentation et de
recherche en médecine générale (CDRMG) a montré que,
quelle que soit la définition de l’IU retenue, les femmes
ménopausées étaient significativement plus incontinentes
que les femmes non ménopausées, ce résultat étant aussi
en relation avec l’âge [41]. Les conclusions sont similaires
dans les enquêtes suédoises de Samuelsson et al. [42] et
Simeonova et al. [43], pourtant réalisées en milieu rural
pour la première et en milieu urbain pour la seconde. Le
lien de causalité existe aussi, mais de manière incomplète
pour Reckers et al. [23]. Les auteurs ont comparé un
groupe de 355 femmes en préménopause et un groupe
de 858 femmes ménopausées. La prévalence était comparable dans les deux groupes respectivement de 25 et 26 %,
mais il existait une incontinence significativement plus
sévère chez les patientes ménopausées (l’incontinence
quotidienne étant deux fois plus fréquente dans ce
groupe). Ce même auteur a cherché à analyser le délai
entre la ménopause et le début de l’incontinence. Parmi
les patientes ménopausées présentant une incontinence,
le début des troubles précède la ménopause dans
28 % des cas, survient au moment de la ménopause
dans 18 % des cas et survient après la ménopause chez
54 % des patientes. Dans l’étude turque de Oskay et al.
[30], 75 % des femmes incontinentes rapportent un début
de l’incontinence après la ménopause. Enfin, les patientes
ayant subi une ménopause chirurgicale présenteraient un
risque plus élevé d’incontinence (36 %) que celles ayant
eu une ménopause naturelle (22 %) [23].
Un travail prospectif récent a enrôlé 1017 femmes
ménopausées, âgées de 55 à 75 ans, qui ont été suivies sur
une période de deux ans [18]. Parmi les 345 femmes
continentes à l’entrée dans l’étude, 65 (18,8 %) rapportent
une incontinence au contrôle à un an et 66 (19,1 %) au
contrôle à deux ans. A contrario 13,7 et 14,3 % des femmes
incontinentes à l’inclusion se déclarent sèches au contrôle
à un et deux ans respectivement. Selon la revue de
Hunskaar, l’incidence annuelle de l’IU est de 1 à 3 % chez
les femmes de moins de 60 ans alors qu’elle atteint 5 à 11 %
chez les 60 ans et plus [1].
Y a-t-il un effet du traitement hormonal
sur l’incontinence urinaire ?
Il n’était pas illogique de penser que le TSH puisse avoir
un effet sur les troubles urinaires de la femme
ménopausée. Des récepteurs aux estrogènes ont été
identifiés au niveau de l’épithélium de l’urètre distal et
proximal, du vagin et de la région trigonale. Par ailleurs,
des études rapportent le caractère « estrogéno-sensible »
de la musculature du plancher pelvien même si la
présence de récepteurs à ce niveau n’est pas confirmée.
Certains travaux ont précisé le rôle des estrogènes sur le
tractus uro-génital [44] avec, notamment, une élévation
de la pression de clôture urétrale (PCU) [45] et une
amélioration de la transmission des pressions au niveau
de l’urètre proximal, deux mécanismes qui favorisent la
continence [46]. On sait aussi que les estrogènes
améliorent la qualité du flux vasculaire au niveau de
l’urètre et plus particulièrement de la zone sphinctérienne. La composante vasculaire agirait pour un tiers
dans la valeur de la PCU au repos [47]. La composante
musculaire striée, par ailleurs, et la composante musculaire lisse urétrale et péri-urétrale se partagent les deux
tiers restants [47]. L’implication des plexus vasculaires
sous-muqueux dans les mécanismes de continence
passive a donc logiquement conduit à penser que
l’hormonothérapie substitutive, chez les femmes méno-
153
pausées incontinentes pouvait avoir un effet urinaire
favorable. Au niveau de la vessie, la carence estrogénique
induit une atrophie épithéliale, une perte de l’élasticité
vésicale et un renforcement du système parasympathique,
autant de paramètres susceptibles de favoriser l’apparition d’un syndrome d’hyperactivité vésicale.
Pourtant l’hormonothérapie substitutive serait sans
effet, aussi bien dans la prévention que dans la correction
des symptômes d’incontinence [48]. Plusieurs essais
randomisés ont conclu à l’absence d’effets bénéfiques
du traitement hormonal substitutif sur les symptômes
urinaires, que les estrogènes soient prescrits seuls [49]
ou en association avec un progestatif [50,51]. Une revue
récente [52] rapportant les résultats de 14 études non
randomisées, six études randomisées, quatre essais
randomisés versus placebo dont deux méta-analyses n’a
pas conclu au bénéfice de l’estrogénothérapie chez les
femmes ménopausées présentant une IUE (une seule
étude non randomisée a révélé une amélioration clinique
et symptomatique sous traitement supplétif). Une large
enquête australienne a révélé que ni le traitement, ni la
durée de celui-ci n’était susceptible d’influencer l’IU [53].
Pour certains, le THS pourrait même augmenter le risque
[51,54,55], et ce, quels que soient la voie d’administration,
le type d’hormones ou la posologie employée [54]. Les
études sur l’influence des estrogènes par voie orale sur les
paramètres urodynamiques de patientes souffrant d’IUE
pure sont contradictoires, le gain sur la pression urétrale
maximale et l’amélioration clinique rapportés par
certains n’étant pas confirmés par d’autres [55].
Les résultats concernant les symptômes d’hyperactivité
vésicale sont plus optimistes. Selon une revue de Cardozo
et al. [57] qui a identifié 11 études randomisées versus
placebo incluant 430 patientes, l’estrogénothérapie améliorerait significativement tous les symptômes d’hyperactivité
vésicale, notamment la pollakiurie (p = 0,0011), la nycturie
(p = 0,0371), les urgences (0,0425) et les mictions
impérieuses (p = 0,0002), la voie d’administration vaginale
s’avérant la plus bénéfique [57]. Le mécanisme d’action
serait davantage la conséquence d’une correction de
l’atrophie plutôt qu’une action directe sur le bas appareil
urinaire [58].
La distinction difficile des effets de l’âge et de ceux de
l’hypo-estrogénie est un facteur limitant majeur dans les
travaux de recherche sur la physiopathologie de l’IU.
Certains auteurs ont évoqué l’hypothèse que la carence
estrogénique pouvait être un des paramètres impliqués
dans le processus de vieillissement et qu’à ce titre, elle
n’interviendrait dans le développement de l’IU, non pas
comme un facteur causal isolé, mais selon un schéma de
« sommation » de facteurs.
Conclusion
La relation IU-ménopause reste encore mal connue. Si l’on
peut citer (et encore cette association n’est pas admise par
tous !) la ménopause comme un facteur de risque « classique » de l’IU, il n’est pas certain que celle-ci, étroitement
corrélée à l’âge, soit un facteur de risque indépendant. Les
résultats semblent plus concordants à propos de l’effet de
l’estrogénothérapie substitutive sur l’incontinence d’urine : elle ne semble pas prévenir ou corriger l’IUE, mais elle
améliore l’incontinence par urgences mictionnelles. Ces
conclusions doivent bien évidemment être prises en compte
dans nos pratiques cliniques. Elles impliquent la diffusion et
l’utilisation d’outils diagnostiques validés et standardisés,
seuls garants d’une évaluation et d’une prise en charge
optimale de nos patientes. Cette conclusion prend tout son
sens lorsqu’on sait, à la lumière des derniers travaux
épidémiologiques, que seulement 24 à 40 % des femmes
concernées consultent [3,14,15], et que ce taux ne dépasse pas
50 % quand l’incontinence est qualifiée de modérée à sévère.
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© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0134-0
DOSSIER THÉMATIQUE / THEMATIC FILE
Estrogènes et fonction ano-rectale
L. Siproudhis, A.-S. Thirouard, M. Eléouet
F-35000, Rennes, France
Résumé : Les périodes de la vie génitale de la femme
(menstruation, grossesse, ménopause) sont fréquemment
associées à des troubles fonctionnels ano-rectaux ou du
transit intestinal. Pour autant, la partie basse du tube
digestif (anus, rectum et côlon) ne semble pas une cible
privilégiée d’action des estrogènes et de la progestérone,
ni sur le plan expérimental ni dans le cadre d’une prise
en charge thérapeutique.
Mots clés : Estrogènes – Progestatifs – Récepteurs –
Traitement substitutif – Ménopause – Incontinence –
Constipation – Dyschésie
Estrogens and anorectal function
Abstract: Functional disorders of the intestines, anus, and
rectum frequently occur throughout the reproductive life
cycle (menstruation, pregnancy and menopause) of
women. However, sex steroid hormones (estrogens and
progesterone) do not target the lower digestive tract
(anus, rectum and colon), according to both experimental and therapeutic studies.
Keywords: Estrogen – Progesterone – Receptors –
Replacement therapy – Menopause – Incontinence –
Constipation – Dyschezia
Préambule
Les troubles fonctionnels colo-rectaux et de l’anus représentent un motif fréquent de consultation, notamment chez
les femmes. Des variations d’expression symptomatique à
l’occasion des périodes de la vie génitale sont souvent
rapportées spontanément par les patientes (période menstruelle, grossesse, préménopause), au point que l’hypothèse
d’une influence hormonale sur le transit intestinal et la
continence fécale est souvent discutée. Pour autant, les
données scientifiques expérimentales actuellement disponibles sont peu nombreuses et ne sont pas unanimes dans
leurs conclusions. Les perspectives thérapeutiques en sont
encore lointaines et, de fait, assez aléatoires dans leurs
objectifs et dans leurs résultats.
Considérations épidémiologiques
Les troubles fonctionnels ano-rectaux ont une prévalence
élevée dans la population générale. Une enquête française
par questionnaire auto-administré (31 items), adresse par
voie postale, s’est attachée à préciser les principaux
symptômes ano-rectaux survenus dans l’année qui a
précédé l’envoi du questionnaire : 10 000 personnes de
plus de 15 ans, représentatifs de la population française, ont
été sollicitées en mai 2003 et 7196 questionnaires retournés
ont pu être analysés. Les troubles fonctionnels ano-rectaux
concernaient plus d’une personne sur quatre : les troubles
de la continence étaient rapportés chez 17 % (n = 1208) et
des troubles de l’évacuation chez 22 % (n = 1611) d’entre
eux. Les éléments marquants des résultats concernent la
fréquence des associations symptomatiques, le retentissement symptomatique sur la qualité de vie et le caractère
limité de demande de prise en charge médicale. La
prévalence des plaintes s’accentue dans les tranches d’âge
les plus élevées [1].
Les troubles de la continence fécale ont donné lieu à des
travaux épidémiologiques d’envergure, à la fois en termes
de prévalence postobstétricale chez les primipares, mais
aussi lors de l’évaluation des troubles fonctionnels intriqués
chez les femmes souffrant de troubles de la statique
pelvienne. Le lien entre les troubles de la continence fécale
et la vie génitale n’a pas fait l’objet d’études scientifiques
nombreuses. De façon quasi universelle, les troubles de la
continence fécale sont élevés dans les enquêtes de
population, et notamment dans les tranches d’âge les plus
élevées et chez les femmes ménopausées [2-4].
Certains travaux épidémiologiques suggèrent une prévalence plus élevée de la constipation chez les femmes que
chez les hommes, et notamment chez les personnes les plus
âgées [5-8]. Les femmes, et particulièrement chez celles qui
sont en préménopause, souffrent plus fréquemment de
constipation que les hommes et leur temps de transit colique
global et segmentaire est habituellement plus long [5,8].
Certains arguments épidémiologiques indirects suggèrent là
que le niveau d’imprégnation hormonale pourrait influencer
le transit intestinal, parce que les troubles du transit
débutent habituellement au moment de la puberté, que les
Correspondance : E-mail : [email protected] ; [email protected] ; [email protected]
157
Tableau I. Identification et quantification (0 à +++) des récepteurs des hormones sexuelles ont été effectuées par méthode
immunohistochimique à partir des prélèvements tissulaires (fixés et inclus en paraffine) [d’après 14]
Marquage cellulaire
N
0
+
++
+++
Lymphoı̈de
Épithéliale superficielle
Périnerveux
Musculaire vasculaire
Endothéliale vasculaire
De la musculaire muqueuse
De la musculeuse propre
Du sphincter anal interne
26
26
26
26
26
26
26
05
26 E ; 25 P
21 E ; 26 P
26 E ; 26 P
26 E ; 25 P
25 E ; 23 P
26 E ; 22 P
14 E ; 09 P
03 E ; 03 P
00 E ; 01 P
04 E ; 00 P
00 E ; 00 P
00 E ; 01 P
01 E ; 03 P
00 E ; 04 P
09 E ; 08 P
01 E ; 02 P
00 E ; 00 P
01 E ; 00 P
00 E ; 00 P
00 E ; 00 P
00 E ; 00 P
00 E ; 00 P
03 E ; 08 P
01 E ; 00 P
00
00
00
00
00
00
00
00
E
E
E
E
E
E
E
E
;
;
;
;
;
;
;
;
00 P
00 P
00 P
00 P
00 P
00 P
01 P
00 P
La quantification a tenu compte de l’intensité du marquage et du pourcentage de cellules positives. N : nombre de spécimens analysés.
troubles du transit ou une modification de la consistance des
selles est souvent rapportée en période permenstruelle et
que la grossesse est un facteur documenté de constipation
[7,9,10]. On ne dispose en revanche que d’assez peu de
données épidémiologiques concernant les troubles de
l’évacuation rectale. Une étude d’observation avec recueil
symptomatique standardisé a analysé les paramètres de la
défécation sur une période de deux cycles menstruels chez
58 femmes. La consistance des selles, leur fréquence et les
paramètres de défécation n’étaient pas influencés par les
phases du cycle, que les personnes interrogées aient ou
n’aient pas de syndrome de l’intestin irritable [11].
Bases fondamentales
On dispose aujourd’hui de plusieurs travaux ayant analysé
les récepteurs hormonaux au niveau des muqueuses du bas
rectum, du canal anal et des structures sphinctériennes [1214]. Un travail très structuré s’est attaché à analyser
quantitativement et qualitativement les récepteurs aux
androgènes, aux estrogènes et à la progestérone sur des
échantillons tissulaires ano-rectaux humains (pièces
d’amputation abdomino-périnéale) [12]. Les structures
épithéliales cylindriques ne comportaient pas de récepteurs
à la différence des structures malpighiennes du canal anal.
Moins d’un tiers des cellules musculaires lisses du sphincter
anal interne était pourvu de récepteurs hormonaux estrogéniques et androgéniques. Les cellules musculaires striées du
sphincter anal externe n’avaient aucun récepteur hormonal,
mais le tissu conjonctif de soutien était riche en récepteurs
androgéniques. Faits importants, la répartition des récepteurs était comparable chez l’homme et la femme. En outre,
les récepteurs à la progestérone n’étaient présents que
lorsque coexistaient des récepteurs estrogéniques et dans
l’ensemble, le volume et la répartition des récepteurs
hormonaux étaient assez pauvres. Cette analyse confirmait
des données préliminaires antérieures reposant sur une
méthodologie similaire [13]. Un travail plus récent s’est
attaché à l’identification et à la quantification (0 à +++) des
récepteurs des hormones sexuelles par méthode immunohistochimique à partir des prélèvements tissulaires (fixés
et inclus en paraffine) de résection rectale basse de
26 malades (âge moyen : 44 13 ans) opérés d’une maladie
hémorroı̈daire ou d’un trouble de la statique pelvienne par
section–agrafage circulaire mécanique. Les données de
marquage étaient comparables chez les hommes et chez les
femmes. En dépit d’un marquage quantitativement modeste,
les récepteurs estrogéniques et progestatifs étaient présents
au niveau de l’ano-rectum et principalement au niveau des
structures musculaires lisses de la musculeuse propria
(Tableau I). Ces données pourraient, à l’inverse des travaux
précédents, faire considérer la paroi du bas rectum et de la
partie haute du canal anal comme des cibles thérapeutiques
potentielles des estrogènes et de la progestérone [14].
Lors d’études réalisées dans des modèles tissulaires
isolés [15], la progestérone induit habituellement une
inhibition de l’activité contractile des muscles lisses, et
notamment des structures du tube digestif [16]. Les
estrogènes n’ont pas d’effet direct, mais ils ont la
capacité d’induire et de potentialiser les récepteurs à la
progestérone [17].
Données cliniques disponibles
Les études physiologiques suggèrent une diminution
significative des pressions de repos du canal anal chez les
femmes les plus âgées lorsqu’on les compare à des femmes
plus jeunes ou des hommes appariés sur l’âge [18,19]. Cela
pourrait être un argument direct suggérant le rôle potentiel
trophique et fonctionnel de l’imprégnation hormonale
tissulaire dans le maintien des pressions de repos du canal
anal. Cependant, ces études physiologiques sont anciennes
et elles ont été menées avant le développement de méthodes
explorant les défects sphinctériens post-obstétricaux de
façon sensible (endosonographie anale).
Dans un travail contrôlé randomisé récent, la motricité
colique a été analysée par méthode scintigraphique chez
49 patientes ménopausées n’ayant aucune plainte digestive et
à qui un traitement hormonal substitutif était proposé [20].
L’étude a été menée sur groupes parallèles et le traitement
hormonal dispensé en double insu était un estrogène
(estradiol), un progestatif micronisé ou l’association des
deux. Les progestatifs mais pas les estrogènes induisaient une
diminution nette de la durée du transit intestinal.
158
Évaluations thérapeutiques
Plusieurs études ont évalué l’impact du traitement
estrogénique sur la fonction ano-rectale. Deux premières
études pilotes reposant sur de petits effectifs n’ont pas
montré de bénéfice symptomatique ou physiologique à
court terme (trois à six mois) d’un traitement estrogénique substitutif chez des femmes ménopausées [21,22].
Dans le cadre d’une étude ouverte (n = 20), le maintien
d’un traitement d’entretien estrogénique de six mois au
moins a permis de faire disparaı̂tre les troubles de la
continence fécale dans un quart des cas et d’améliorer les
contrôles des gaz, des suintements et des impériosités
chez deux tiers d’entre elles [23]. Dans ce travail, les
pressions de repos et lors de la contraction volontaire
anale étaient également favorablement modifiées par
le traitement estrogénique. On ne dispose aujourd’hui
d’aucun travail contrôlé randomisé évaluant le bénéfice
d’un traitement hormonal substitutif sur les troubles
de la continence fécale.
Dans le travail randomisé précédemment cité [20], la
fréquence des selles n’était pas significativement modifiée par le traitement hormonal substitutif. En revanche,
il était noté une amélioration de la défécation et une
modification de la consistance des selles (selles molles)
après imprégnation estrogénique ou progestative.
Conclusions et perspectives
Alors qu’une approche intuitive de pratique clinique
pourrait accorder un rôle vraisemblable aux stéroı̈des
estroprogestatifs, à la fois dans la genèse et le traitement
des troubles fonctionnels ano-rectaux chez la femme, les
données scientifiques actuellement disponibles en donnent un paysage contrasté et contradictoire : les effets
paradoxaux des hormones stéroı̈des sexuelles lorsqu’elles sont testées in vitro et in vivo ; la relative
pauvreté des récepteurs hormonaux au sein des structures sphinctériennes ; leur apparence quantitative et
qualitative comparable chez l’homme et la femme ;
sont autant d’éléments qui limitent la pertinence actuelle
d’une approche thérapeutique hormonale de la constipation d’évacuation ou des troubles de la continence chez
la femme ménopausée.
De fait, on dispose aujourd’hui d’essais thérapeutiques anecdotiques, anciens et de faible poids méthodologique qui n’entraı̂nent la conviction ni du praticien
sensible à l’approche factuelle de sa discipline, ni des
équipes de recherche en quête d’une thérapeutique
rationnelle des troubles fonctionnels ano-rectaux.
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© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0135-z
DOSSIER THÉMATIQUE / THEMATIC FILE
Estrogènes et fonction vésicale
X. Gamé 1 , J.-F. Arnal 2 , P. Rischmann 1 , B. Malavaud 1
1
2
Service d’urologie, de transplantation rénale et d’andrologie, CHU Rangueil, F-31059 Toulouse cedex, France
Inserm U589, laboratoire de physiologie, CHU Rangueil, F-31059 Toulouse cedex, France
Résumé : L’objectif de cette étude est de décrire l’impact
des estrogènes sur la fonction vésicale. Les récepteurs
aux estrogènes sont exprimés au niveau du dôme et du
trigone vésical et au niveau du système nerveux central et
périphérique innervant la vessie.
En cas de déprivation estrogénique, il apparaı̂t, au
niveau de la paroi vésicale, une atrophie musculaire lisse,
une augmentation du collagène et une augmentation du
ratio collagène/muscle lisse. L’estrogénothérapie
entraı̂ne une hypertrophie musculaire, une augmentation
du poids de la vessie, une néo-angiogenèse et une
modification de la densité des récepteurs a-adrénergiques, muscariniques et purinergiques.
Au niveau fonctionnel, ces modifications de structure
sont responsables lors d’une déprivation estrogénique d’une
hypocontractilité vésicale, et en cas de traitement estrogénique, d’une augmentation de la contractilité vésicale.
Au niveau de l’innervation vésicale, les estrogènes
semblent avoir une action prédominante au niveau de
l’innervation afférente et en particulier au niveau des
neurones vanilloı̈des.
Mots clés : Vessie – Estrogènes – Physiologie
Estrogens and bladder function
Abstract: The objective of this study was to describe the role
of estrogens in bladder function. Estrogen receptors have
been shown to be expressed in the dome and trigone of the
bladder and in the central and peripheral nervous systems.
Estrogen deprivation is associated with smooth
muscle atrophy of the bladder wall and an increase in
collagen levels and the collagen-to-smooth muscle ratio.
Estrogens induce muscular hypertrophy, increased
bladder weight, angiogenesis and changes in muscarinic,
a-adrenergic and purinergic receptor densities.
Consequently, these structural changes, induce
bladder hypocontractility in the case of estrogen
deprivation; estrogen replacement improves bladder
contractility. Concerning neurological control, estrogens
seem to impact predominantly afferent nerve pathways,
especially capsaicin-sensitive afferent fibres.
Correspondance : E-mail : [email protected]
Keywords: Bladder – Estrogens – Physiology
Introduction
Les estrogènes ont un effet physiologique important sur
l’appareil génital féminin tout au long de la vie adulte. Ils
sont responsables de changements histologiques et
fonctionnels. L’origine embryologique commune entre
l’appareil génital féminin et l’appareil urinaire, à partir du
sinus uro-génital, plaide pour une sensibilité de ce dernier
aux estrogènes. La mise en évidence de récepteurs aux
estrogènes et à la progestérone au niveau du vagin, de
l’urètre, de la vessie et des muscles du plancher pelvien a
renforcé le concept d’un rôle des hormones sexuelles
féminines sur la physiologie urétro-vésicale [1,2].
L’influence des hormones sexuelles féminines sur la
miction a été rapportée pour la première fois en 1966 [3].
Depuis, de nombreuses études épidémiologiques ont
montré la présence de liens entre les estrogènes, et en
particulier le déficit estrogénique, et l’apparition de
dysfonctionnements de l’appareil vésico-sphinctérien.
Ainsi, les symptômes du bas appareil urinaire sont très
fréquents chez la femme ménopausée. Vingt pour cent des
femmes ménopausées ont une pollakiurie sévère et presque
50 % ont une incontinence urinaire d’effort [4-7]. En ce qui
concerne l’incontinence urinaire par urgences, sa prévalence
augmente après la ménopause [8]. De plus, elle augmente
avec l’ancienneté du déficit estrogénique [8].
Enfin, il a été montré que les estrogènes permettaient
de prévenir, après la ménopause, la survenue de cystites
[9], d’atrophie de l’appareil urinaire [10] et d’une
hyperactivité vésicale [11].
Le but de ce travail est de décrire l’impact des
estrogènes sur la fonction vésicale.
Récepteurs aux estrogènes
Les estrogènes sont sécrétés majoritairement par l’ovaire.
L’estrogène majeur, chez l’être humain, est l’estradiol.
Toutefois, deux autres estrogènes sont également sécrétés : l’estriol et l’estrone. L’effet biologique des estrogènes
160
est médié par un récepteur protéique [12]. Il existe deux
récepteurs aux estrogènes (ER) : le récepteur alpha
(ERa) et le récepteur bêta (ERb). Tous deux sont des
récepteurs intranucléaires agissant comme des facteurs
d’activation de la transcription. L’ERa a été découvert en
1958, mais n’a pu être cloné qu’en 1986, à partir de tissu
utérin [13,14]. En 1995, à partir de prostate de rat, a été mis
en évidence l’ERb [15]. Ces deux récepteurs ont un haut
degré de séquences similaires au niveau du domaine
central de l’ADN et du domaine ligand C-terminal. De ce
fait, ces deux récepteurs communiquent avec des éléments de réponse identiques et ont des profils d’affinité
identiques pour l’ensemble des estrogènes endogènes,
synthétiques ou naturels [16,17]. Ces récepteurs, et par
conséquent l’action physiologique de chacun, diffèrent
principalement par leur localisation [18]. L’ERa est le
sous-type prédominant au niveau de la glande mammaire,
de l’utérus, des vaisseaux et de l’os. L’ERb est exprimé
principalement au niveau de l’ovaire, de la prostate, du
testicule, du poumon, du thymus, de la rate et dans
certaines régions du système nerveux central [19]. Enfin,
ERb est impliqué dans la régulation de l’ovulation, dans
certains comportements et dans la réponse immunitaire
[20,21]. Il a également été décrit une interaction entre les
deux types de récepteurs avec un effet inhibiteur d’ERb
sur ERa [22].
Au niveau vésical, Iosif et al. sont les premiers à
montrer la présence dans l’espèce humaine de récepteurs
aux estrogènes [1]. Ils les ont identifiés au niveau du
trigone et de la partie mobile de la vessie. Depuis, de
nombreuses études ont étudié la distribution des différents types de récepteurs aux estrogènes au niveau vésical,
et l’impact de l’imprégnation hormonale sur l’expression
des récepteurs. Il apparaı̂t que les deux types de
récepteurs sont présents au niveau de la vessie, au sein
des cellules urothéliales et des cellules musculaires lisses
[23]. La proportion de chaque type de récepteur au niveau
vésical chez l’être humain est mal connue. En revanche, il
a été montré chez la souris et le rat que le récepteur
prédominant était l’ERb [24-26]. La localisation des
récepteurs dans l’épaisseur de la paroi vésicale diffère
toutefois entre le dôme vésical et le trigone. Ainsi,
Blakeman et al. ont montré que les ER étaient exprimés
au niveau de l’urothélium trigonal mais absent au niveau
de l’urothélium du dôme vésical. En revanche, ils étaient
présents de manière équivalente au niveau du sousurothélium dans les deux cas [27]. Aucune étude réalisée
sur des échantillons humains ou animaux n’a montré de
différence selon le sexe en termes d’expression ou de
localisation des récepteurs aux estrogènes [23,25,26].
Enfin, il a été montré que le niveau d’imprégnation
estrogénique n’influençait pas l’expression des ER au
niveau vésical [27].
Les estrogènes ont également une action au niveau du
système nerveux et par ce fait peuvent agir sur le contrôle
de la fonction vésicale. Ainsi, des ER sont présents dans
les neurones, dans différents centres de l’encéphale, du
tronc cérébral et de la moelle épinière liés à la miction. Le
principal ER exprimé au niveau cortical, du cervelet et de
la protubérance est l’ERb [23]. Toutefois, chez le chat, des
ERa ont été mis en évidence au niveau des neurones
préganglionnaires parasympathiques innervant la vessie
[28]. Enfin, il a été rapporté la présence d’ERa et b au
niveau des cellules ganglionnaires des racines lombosacrées postérieures innervant la vessie [29].
Estrogènes et paroi vésicale
À partir d’études réalisées chez la femme et chez l’animal,
il a été montré que les variations de l’imprégnation
estrogénique avaient des conséquences sur la trophicité
et la vascularisation de la paroi vésicale et sur la densité en
récepteurs a-adrénergiques et muscariniques [30-34].
La déprivation estrogénique est responsable, chez la
femme, d’une altération de l’activité collagénase [35,36].
Cette dernière est responsable chez le lapin d’une
augmentation du collagène au sein de la paroi vésicale
après ovariectomie [37,38]. Parallèlement, il s’y associe
une atrophie musculaire lisse [30,37,38]. Ces deux
modifications sont responsables, comme cela a été montré
chez le rat et le lapin, d’une augmentation du ratio
collagène/fibres musculaires lisses au sein de la paroi
vésicale [30,37]. Chez l’animal, ces modifications de
structures sont réversibles après estrogénothérapie
[30,38,39].
À l’inverse, après ovariectomie bilatérale ou à la
naissance, lorsque le rat ou le lapin est traité d’emblée par
estrogènes, apparaissent une hypertrophie de la paroi
vésicale en rapport avec une augmentation des fibres
musculaires lisses, une diminution de la teneur en
collagène et une augmentation de la vascularisation de
la vessie [33,34,37-41]. L’hypertrophie intéresse la partie
mobile de la vessie. Elle s’accompagne d’une augmentation du poids de la vessie [31,37,38]. L’hypertrophie
est probablement multifactorielle. Elle est liée, pour Lin
et al., à une action des estrogènes sur la paroi vésicale et
sur le muscle lisse [37]. Toutefois, nous ne pouvons pas
éliminer un effet indirect secondaire à une obstruction
sous-vésicale par augmentation des résistances urétrales
liée au traitement estrogénique [42]. L’augmentation de
la vascularisation de la vessie est liée, d’après les données
expérimentales, à une induction de l’angiogenèse par les
estrogènes [41]. Cette néovascularisation se fait au sein
de la musculeuse au milieu des fibres musculaires.
Dès 1980 ont été rapportées des variations de la densité
des récepteurs a-adrénergiques, cholinergiques et purinergiques selon l’imprégnation hormonale [31,40]. Toutefois, les résultats sont contradictoires. Levin et al. ont
rapporté, chez le lapin, une augmentation de la réponse
aux agonistes a-adrénergiques, cholinergiques et purinergiques après traitement par estrogénothérapie [40].
Inversement, Batra, Iosif, et Shapiro ont rapporté,
161
également chez le lapin, une diminution de la densité des
récepteurs muscariniques après castration et estrogénothérapie [2,31]. Dans ces deux études, aucune différence
n’a été mise en évidence entre le groupe témoin et le
groupe ovariectomisé. Il est à noter que la différence de
résultats entre l’étude de Levin et al. et celle de Shapiro,
Batra et Iosif peut s’expliquer par la dose d’estrogènes
utilisée et surtout par la durée de traitement qui n’était
que de quatre jours dans le premier cas. De plus, Levin et
al. avaient utilisé comme modèle des lapins immatures.
Enfin, Liang et al., chez le rat, ont rapporté l’absence de
variations de l’affinité des récepteurs muscariniques selon
le degré d’imprégnation estrogénique [32].
Estrogènes et fonction vésicale
À partir d’études réalisées chez la femme et chez l’animal,
il a été montré que les variations de l’imprégnation
estrogénique avaient des conséquences sur la contractilité
vésicale et sur la réponse inflammatoire au niveau vésical
[27,37,38,43-49]. Les variations du cycle menstruel
influencent la survenue de symptômes urinaires et la
mise en évidence d’une hyperactivité détrusorienne à la
cystomanométrie. Ces derniers sont ainsi plus fréquents
au cours de la phase folliculaire [43]. De plus, chez la
femme ménopausée, un mode de fonctionnement vésical
fréquent est le syndrome « DHIC » (detrusor hyperreflexia – impaired contractility) caractérisé par l’association d’une hyperactivité vésicale et d’une réduction de
la contractilité mictionnelle [50]. Chez le lapin, après
ovariectomie, l’étude du calendrier mictionnel montre
une pollakiurie [30]. Les études en bains d’organes isolés
de vessie de lapin et de rat révèlent une hypocontractilité
vésicale à toutes les formes de stimulation (stimulation
électrique, ATP, carbachol, KCl) [33,37,44,51,52]. Cette
hypocontractilité se corrige après traitement par estrogène. Cependant, ces effets n’étaient totalement réversibles que chez les animaux matures lors de la réalisation de
l’ovariectomie [44].
Inversement, les lapins et rats traités par estrogènes
après ovariectomie, ont une contractilité augmentée
[33,37,44,51,52]. Parallèlement, il a été rapporté que les
lapins traités par estrogènes avaient une augmentation
de la relaxation médiée par les récepteurs b2- et b3adrénergiques, qui pourrait être liée à une augmentation
de l’AMPc dans les cellules musculaires lisses du détrusor
[53-55].
Le mécanisme d’action des estrogènes sur la contractilité vésicale est multifactorielle. Interviennent l’effet
trophique des estrogènes et l’action sur la densité des
récepteurs muscariniques, purinergiques et a-adrénergiques comme nous l’avons déjà vu. S’y ajoutent des
modifications de concentrations intracytoplasmiques en
calcium. Ainsi, chez le lapin ovariectomisé, le flux
transmembranaire de calcium est diminué, entraı̂nant
une baisse de la contractilité [51,52].
Nous avons vu que les estrogènes avaient une action
sur la réponse immunitaire [21]. Au niveau vésical, chez
le rat, la réponse inflammatoire à une agression est
différente en fonction de la période du cycle menstruel,
et ou en fonction du traitement ou non par des
estrogènes après ovariectomie [46,47]. Intervient également le taux d’ER. Ainsi, les rats ayant un taux élevé
d’ERb étaient moins sensibles à l’agression ou avaient un
meilleur pronostic de guérison [47].
Estrogènes et commande neurologique
de la vessie
D’une manière générale, les variations de l’imprégnation
estrogénique peuvent avoir un impact sur la fonction
neuronale [56]. Au niveau des centres de la miction, leur
effet est mal connu. Il a toutefois été rapporté que traiter
des macaques femelles par des estrogènes augmentait
la production de 5-hydroxytryptamine, neuromédiateur
ayant une action inhibitrice sur le réflexe mictionnel, au
niveau du système nerveux autonome [57]. Au niveau du
système non adrénergique, non cholinergique, Ehren
et al. ont montré que les estrogènes augmentaient
l’activité de la monoxyde d’azote synthase calciumdépendante au niveau de la vessie du cochon d’Inde
[58]. Il n’était en revanche pas précisé dans cette étude si
l’augmentation d’activité était liée ou non à l’isoforme
neuronal de la monoxyde d’azote synthase.
Une étude réalisée chez des souris déficientes en ERa
ou ERb montre en bains d’organes isolés et par
cystomanométries chez l’animal vigil, un impact limité
sur la contractilité vésicale de l’absence d’ER. En
revanche, ces souris n’ont plus de réponse à l’instillation
de capsaı̈cine. Cela suggère que les ER interviennent au
niveau de la voie afférente, et en particulier sur la fonction
des récepteurs vanilloı̈des [59]. Ces résultats sont
corroborés par la localisation des ER au niveau des
cellules ganglionnaires des racines postérieures lombosacrées innervant la vessie, où ils ne sont exprimés qu’au
sein des neurones exprimant le VR1, marqueur des
neurones sensibles à la capsaı̈cine [59].
Conclusion
Le niveau d’imprégnation estrogénique a un impact sur
la structure, la fonction et la commande neurologique
vésicale.
Les variations de l’imprégnation estrogénique ont des
conséquences sur la trophicité, la vascularisation vésicale,
la densité et la réponse des récepteurs a-adrénergiques,
muscariniques et purinergiques, ce qui influe sur la
contractilité vésicale.
La réponse inflammatoire locale dépend aussi du
degré d’imprégnation hormonale.
162
En l’état des connaissances actuelles, l’impact des
estrogènes sur l’innervation vésicale semble prédominer
au niveau de la voie afférente.
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DOI 10.1007/s11608-007-0120-6
DOSSIER THÉMATIQUE / THEMATIC FILE
Estrogènes et fonction urétrale
F. Demaria, B. Boquet, J.-L. Benifla
Service de gynécologie obstétrique, hôpital Rotschild, 33, boulevard de Picpus, F-75012 Paris, France
Résumé : Parmi les différents traitements médicaux de
l’incontinence urinaire féminine, l’utilisation des estrogènes, quelle que soit la voie d’absorption, est fréquente
du fait d’une sensibilité connue du tractus urogénital. Les
estrogènes apportent-ils un réel bénéfice pour ce type
de pathologie ? L’objectif de cet article est d’analyser les
différentes publications sur ce sujet.
Mots clés : Fonction urétrale – Récepteurs – Estrogènes –
Traitement hormonal – Ménopause – Incontinence urinaire
Estrogens and urethral function
Abstract: Among the various medical treatments for female
urinary incontinence, the use of estrogens is common
because of the demonstrated responsiveness of the
urogenital system. Do estrogens offer a real benefit in
treating this type of disorder? The objective of this article
is to review the literature on this subject.
Keywords: Urethral function – Receptors – Estrogens –
Hormone treatment – Menopause – Urinary incontinence
Introduction
L’incontinence urinaire est un problème fréquent et gênant
pouvant affecter des personnes de tout âge. Elle est définie
par l’International Continence Society (ICS) comme la
plainte d’une perte involontaire d’urines. Cette incontinence urinaire peut se produire lors de la toux, l’éternuement ou lors d’efforts physiques et est appelée
« incontinence urinaire à l’effort ». Si elle est accompagnée
ou précédée d’une forte envie d’uriner, elle est dite
impérieuse. Quand elle présente ces deux caractéristiques,
elle est dite mixte [1]. Sa prévalence, quelle que soit sa
forme, est d’environ 4 % entre 20 et 29 ans, et va atteindre
jusqu’à 37 % au-delà de 70 ans. L’incontinence urinaire à
l’effort est probablement la forme la plus fréquente
puisqu’elle représente 92 % des patientes incontinentes,
avec un réel impact sur la qualité de vie puisque plus de
65 % des patientes se disent affectées [2].
Un certain nombre de traitements sont disponibles,
notamment la rééducation pelvi-périnéale avec ou sans
stimulation électrique, différents types de médications et la
chirurgie. Parmi les différentes médications possibles, dont
l’effet escompté est l’augmentation du tonus du sphincter
urétral, les estrogènes sont utilisés pour traiter l’incontinence
urinaire depuis de nombreuses années, mais leur efficacité
reste controversée et est, donc, le sujet de cet article.
Données sur l’incontinence urinaire
et les hormones féminines
Les organes génitaux féminins et le tractus urinaire
dérivent tous deux du sinus urogénital et se développent
de façon très proche anatomiquement. Des récepteurs aux
estrogènes ont été identifiés de façon ubiquitaire, aussi bien
dans le tissu vaginal que dans la vessie ou l’urètre proximal
et distal ou les muscles du plancher pelvien. Ces récepteurs
sont présents de façon aussi fréquente quantitativement
quel que soit le statut hormonal de la femme (ménopausée
ou non) [3]. Les récepteurs à la progestérone sont présents,
mais à une quantité moindre et dépendante de la
concentration en estrogènes circulants [3]. Il est donc
probable que les hormones sexuelles féminines aient une
influence sur le tractus urinaire du point de vue macroscopique, histologique et symptomatique [4]. Des symptômes urinaires peuvent apparaı̂tre pendant les règles ou à
des moments particuliers du cycle menstruel, pendant la
grossesse [5] et surtout au moment de la ménopause [6],
c’est-à-dire au moment de variations des concentrations
plasmatiques en estrogènes. Ces données sont confirmées
par des études urodynamiques [7].
Les tissus impliqués dans les mécanismes de continence sont estrogènes sensibles. Il est probable que
l’insuffisance en estrogènes puisse être une des étiologies
de l’apparition de l’incontinence urinaire. Des études
épidémiologiques ont montré que le pic de prévalence de
l’incontinence urinaire d’effort survenait aux alentours
de l’âge de la ménopause (55 ans), notamment chez les
multipares [8]. Certaines patientes ménopausées et
incontinentes rapportent l’apparition de leurs symptômes urinaires au moment de la ménopause [9], alors que
d’autres montrent un taux plus important de femmes
incontinentes avant la ménopause qu’après, avec une
prédominance de l’IUE après la ménopause [8].
Ces données sur le lien entre hormones sexuelles
féminines et incontinence urinaire sont connues depuis
longtemps. Des études anciennes évaluant l’effet des
165
estrogènes sur l’incontinence ont été réalisées, pour
certaines avant même l’apparition des épreuves urodynamiques. Ainsi, ces études ont probablement inclus des
populations simplement sur l’interrogatoire, donc hétérogènes et présentant différents troubles urinaires aussi bien à
l’effort que par hyperactivité du détrusor ou encore des
patientes dysuriques ou dyssynergiques. De plus, les estrogènes utilisés sont souvent différents, prescrits à différentes
posologies, avec des voies d’absorption différentes, sur des
durées variables, associés parfois à d’autres thérapeutiques
et le plus souvent dans des études non randomisées, sans
véritable recul, avec des effectifs assez faibles.
Données sur les effets des estrogènes
Quelques essais récents comparent un traitement aux
estrogènes contre un placebo, avec différents types d’estrogènes, doses, voies d’administration, durées de traitement et
de suivis. Les résultats sont différents en fonction des essais.
Effets des estrogè nes par voie orale
Jackson et al., sur 67 patientes, toutes incontinentes à
l’effort pur, randomisées contre placebo (33 estrogènes
per os versus 34 placebos), évaluées sur six mois de façon
subjective (Bristol Female Lower Urinary Tract Symptoms [BFULTS]) et objective (SF-36, pad-test, calendrier
mictionnel, urodynamique [pression de clôture, cystomanométrie]) ne montrent aucune différence entre les
deux groupes [10]. Alors que pour Cardozo et al., selon la
même méthodologie, mais dans une étude multicentrique de 64 patientes ménopausées randomisées, estrogènes par voie orale contre placebo et présentant toutes
une incontinence urinaire par impériosités, montrent un
bénéfice. En effet, il semble exister une amélioration
subjective et objective dans le groupe estrogènes sans
atteindre la significativité [11]. De façon identique,
l’étude de Samsioe et al., réalisée en cross over, estrogènes per os puis placebo sur trois mois chez 34 patientes
semble montrer une amélioration des symptômes
d’urgence et d’incontinence urinaire mixte, mais aucun
effet sur la composante à l’effort [12].
Ces différentes études ont été réalisées avec différents
types d’estrogènes per os (estradiol, estriol). Les résultats
semblent identiques quel que soit le type d’estrogènes.
Effets des estrogè nes par voie vaginale
Les estrogènes utilisés localement en crème contre un
groupe témoin, utilisant une crème placebo dans une
étude de 34 patientes (17 versus 17) sur quatre-vingt-dix
jours, toutes incontinentes à l’effort avec une insuffisance sphinctérienne, montre une guérison de l’incontinence dans 17 % et une amélioration de 41 % [13].
En termes de dose d’estrogènes, Lose et al. rapportent
dans une étude randomisée multicentrique de 251 patientes,
dont 134 recevaient un traitement pendant vingt-quatre
mois à l’aide d’un anneau vaginal délivrant 7,5 mg
d’estradiol par jour et l’autre groupe de 117 patientes
recevant 0,5 mg d’estradiol tous les deux jours à l’aide d’un
pessaire pendant la même durée, une amélioration de tous
les symptômes, sans réellement les mentionner et sans
groupe contre placebo. Cependant, ils ne notent aucune
différence significative subjective en termes de symptômes
urinaires impérieux ou à l’effort, quelle que soit la dose
employée. Dans cette étude, les patientes préfèrent l’anneau
vaginal qui est changé tous les trois mois (p = 0,0001) [14].
Mé ta-analyse sur l’effet des estrogè nes
Les faibles effectifs dans toutes ces études rendent
l’interprétation difficile en termes d’efficacité. Moehrer
et al., dans leur revue de la littérature sur l’efficacité des
estrogènes, quelle que soit la voie d’absorption contre
placebo, ont colligé 15 travaux sur ce sujet leur permettant
de porter l’effectif de patientes à 374 dans le groupe
estrogènes contre 344 dans le groupe placebo. Leurs
conclusions semblent montrer une amélioration subjective
de tous les types d’incontinence (RR = 1,61), notamment
sur la composante impérieuse. Ces données suggèrent
qu’environ 50 % des patientes traitées par des estrogènes
sont guéries ou améliorées, comparées à 25 % pour celles
traitées par le placebo [15]. Cependant, étant donné la faible
durée de la prescription et le suivi réduit, aucune étude ne
peut affirmer que ce bénéfice se poursuivra à long terme en
cas d’arrêt du traitement.
Aucun effet secondaire très important n’est rapporté
en dehors des spottings, des tensions mammaires et des
nausées.
Données sur les effets des estrogènes
associés à la progestérone
Dans le cas d’une association d’estrogènes à la progestérone, les résultats semblent converger vers la non-efficacité
de ce type de médications sur les symptômes urinaires,
qu’ils soient présents à l’effort ou par impériosités. Fantl
et al., dans une étude randomisée contre placebo pendant
trois mois chez 87 patientes ménopausées montrent une
absence de différences, qu’elles soient subjectives, objectives (nombre de mictions diurnes, nocturnes, de fuites,
poids de pad-test, SF-36 Health Survey, Incontinence
Impact Questionnaire-Revised [IIQ-R], Urogenital Distress
Inventory [UDI]) ou urodynamiques entre les deux
groupes (p = 0,435) [16]. Une autre, celle de Ouslander
et al., réalisée selon une méthodologie proche, montre les
mêmes résultats chez 32 patientes sur six mois, mais avec
cependant un bénéfice en terme d’amélioration de la
trophicité vaginale [17]. La pollakiurie nocturne est le seul
paramètre amélioré dans le travail de Kok et al., en cas de
prise de cette même bithérapie [18]. L’étude de Grady et al.,
semblant faire référence étant donné le nombre de
166
patientes incluses, montre, elle, un résultat pire en terme
d’amélioration ou de guérison subjective (p = 0,001) chez
1 525 patientes randomisées sur trois ans [19]. Ces auteurs
concluent que l’association de la progestérone rend l’action
des estrogènes inefficace [19].
noter que ce type de médication à long terme présente
des risques non négligeables pour les patientes. Il reste
donc à développer des molécules plus efficaces et moins
dangereuses que les traitements hormonaux.
Références
Effets secondaires et/ou indésirables
et recommandations de prescription
Les effets secondaires, rarement rapportés dans ces études,
ne semblent pas très importants. Les plus fréquents sont les
métrorragies (25 %) et les tensions mammaires (20 %) [15].
Cependant, il faut garder à l’esprit qu’utiliser des estrogènes
seuls n’est pas une recommandation en gynécologie,
notamment chez les patientes non hystérectomisées.
L’Anaes indique dans son rapport sur les recommandations du traitement hormonal substitutif (THS) de la
ménopause qu’il n’est pas démontré qu’il améliore les
symptômes d’incontinence urinaire (niveau de preuve
[NP] 2) [20]. De plus, il existerait un surrisque de cancer
du sein chez les femmes utilisant un THS associant
estrogènes et progestatifs (NP1). Ce surrisque augmenterait avec la durée du traitement (NP2), notamment pour
une durée d’utilisation supérieure à cinq ans. Aucune
différence n’est démontrée en fonction de la voie
d’administration (orale ou extradigestive) (NP2), ni en
fonction du schéma d’administration (séquentiel ou
continu) (NP2). Les données des études ne permettent
pas non plus de conclure si un THS par estrogènes seuls
majore le risque de cancer du sein (NP1).
Concernant le cancer de l’endomètre, le THS par
estrogènes seuls augmente le risque d’hyperplasie de
l’endomètre et ainsi le risque de cancer (NP1), notamment en cas d’utilisation prolongée. L’association d’un
progestatif aux estrogènes diminue ce surrisque, notamment en cas d’administration séquentielle, et l’annule en
cas de traitement continu (NP1).
En cas d’antécédent d’hystérectomie, il est recommandé de ne pas prescrire de THS estroprogestatif, mais
de prescrire un THS par estrogènes seuls (NP1). Ce THS
estroprogestatif expose en effet à un surcroı̂t de risque
de cancer du sein sans que l’on puisse attendre chez ces
femmes un bénéfice sur le cancer de l’endomètre.
Conclusion
Le tractus urogénital féminin est dépendant des estrogènes. Leur absence ou leur diminution franche lors de la
ménopause pourrait être une des étiologies de l’incontinence urinaire. Ceux-ci semblent avoir une relative
efficacité, notamment sur l’incontinence urinaire par
impériosité. Cependant, leur efficacité réelle et à long
terme sur ce type de pathologie reste encore à démontrer
avec des études comportant un suivi à long terme. Il faut
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DOSSIER THÉMATIQUE / THEMATIC FILE
Vrais et faux bénéfices et risques des traitements
hormonaux de la ménopause
C.-G. Jamin 1,2
1
2
Service de gynécologie obstétrique, CHU Bichat, 46, rue Henri-Huchard, F-75877 Paris Cedex 18, France
169, boulevard Haussmann, F-75008 Paris, France
Résumé : Le traitement hormonal de la ménopause (THM)
a été largement proposé aux femmes ménopausées jusqu’en
2002 tant les bénéfices attendus semblaient importants.
À la suite de la publication de deux études randomisées
versus placebo, un brutal coup d’arrêt s’est produit dans sa
prescription, même si de nombreux auteurs contestent la
validité des résultats de ces études dites basées sur des preuves.
Cinq ans après ces publications, des zones d’ombre persistent,
mais l’on peut trier ce qui est prouvé de ce qui ne l’est pas.
Le THM a sans conteste un effet bénéfique sur le
syndrome climatérique et la qualité de vie en général,
pourvu que ce syndrome climatérique existe. Le THM a un
effet préventif sur la perte osseuse postménopausique et le
risque fracturaire. Il prévient aussi le cancer du côlon et la
survenue d’un diabète de type 2.
L’augmentation du risque thromboembolique veineux
dépend du terrain et ne se produit pas si l’on utilise des
estrogènes par voie non digestive. Le risque coronarien
n’apparaı̂t pas si le traitement est débuté en postménopause
immédiate et il est possible que l’administration cutanée des
estrogènes et de la progestérone naturelle le minimise alors.
Dans ces conditions, le THM peut probablement encore
revendiquer un effet préventif de l’athérogenèse. Le THM n’a
pas de place en prévention coronarienne secondaire. Pour les
AVC, l’âge est un facteur limitant à l’utilisation du THM (âge
d’arrêt suivant les facteurs de risque d’AVC). Le cancer du sein
voit son incidence augmenter lors de l’association d’estrogènes
progestatifs artificiels surtout au-delà de 60 ans et pour une
administration de plus de cinq ans. La tibolone et l’association
estrogènes-progestérone naturelle-rétroprogestérone sont
moins promoteurs des tumeurs préexistantes. Le THM
donné à des femmes âgées aggrave les risques de pertes
d’urines.
Ainsi, il n’y a aujourd’hui aucune raison d’interdire,
lorsqu’il est nécessaire et bien choisi, ce traitement en
postménopause immédiate.
True and false benefits and risks of hormonal
therapy for menopause
Mots clés : Ménopause – Traitement hormonal de substitution – Estrogènes – Progestérone
Keywords: Menopause – Hormone replacement therapy –
Estrogens – Progesterone
Correspondance : E-mail : [email protected]
Abstract: With many anticipated benefits, hormone
replacement therapy (HRT) was widely prescribed until
2002. After the publication of two randomised, controlled studies, it ceased to be prescribed, although
numerous authors contested the validity of those results,
which argued to be evidence based. Five years after
publication, and despite many lingering questions, we
now know what has been proved and what has not.
HRT clearly has a beneficial effect on climacteric
syndrome, and more generally on quality of life in patients
with the syndrome. HRT prevents postmenopausal bone
loss and lowers the risk of fractures. It also prevents colon
cancer and type 2 diabetes. There is no increase in the risk of
venous thromboembolic disease when estrogens are administered orally. Moreover, there is no increase in coronary
risk if treatment begins immediately after the onset of
menopause, and the cutaneous administration of estrogens
and natural progesterone is likely to further decrease that
risk. Under these conditions, HRT can probably prevent
coronary artery disease but does not play a part in secondary
prevention of coronary artery disease.
With regard to stroke, age limits the use of HRT (the
time when treatment is stopped depends on stroke risk
factors). There is an increase in breast cancer incidence
when associating estrogens and progestogens, particularly in women over 60 and those who have received
treatment for more than 5 years. Tibolone and the
combination of estrogens and natural progesterone
promote the growth of pre-existing tumours to a lesser
extent. HRT administered to older women increase the
risk of urinary incontinence.
This treatment can, therefore, be prescribed when it is
needed and appropriately indicated.
169
Le traitement hormonal de la ménopause (THM) après
avoir été paré de toutes les vertus est à ce jour fortement
décrié dans les revues scientifiques, les médias et par les
pouvoirs publics. Il est à ce jour quasiment impossible,
tant sont vives les polémiques, de se faire une opinion
claire sur la réalité des bénéfices atteints et des risques
encourus par les patientes qui poursuivent le THM
malgré cette campagne de dénigrement. Cela est d’autant
plus vrai que les études répondant aux critères de la
médecine basée sur les preuves (MBP) se résument à
deux essais américains [1,2] proposant des traitements
non utilisés en France et appliqués à des patientes qui ne
sont pas celles à qui ces traitements sont en principe
destinés. De nombreux travaux, malheureusement non
randomisés et ouverts, permettent de nuancer les
craintes venues d’outre-Atlantique.
Pourquoi ces études « basées sur les preuves »
n’existent-elles pas ?
Il existe deux raisons majeures pour expliquer cette
carence et comprendre pourquoi nous n’aurons jamais
la réponse idéale souhaitée par les monomaniaques de
cette MBP.
La première est purement technique. Les grandes
complications de la ménopause : coronaropathies et ostéoporose surviennent en moyenne treize ans après la
survenue de celle-ci. Pour mettre en évidence un effet
bénéfique du THM, il faudrait faire une étude randomisée
versus placebo sur une durée de quinze ans pour espérer
voir un bénéfice clinique du THM, ce qui à l’évidence est
impossible. Pour contourner cet obstacle insurmontable,
les épidémiologistes ont eu l’idée de débuter les études à
l’âge où surviennent les accidents ! (WHI [1] et HERS [2]),
pour mettre en évidence un effet préventif, ils se sont mis
en situation curative et de plus les femmes dans leur
majorité ont débuté le traitement après quinze ans de
carence. À partir des résultats, ils ont postulé que ce qui est
vrai dans cette situation purement expérimentale, l’est chez
des femmes saines de 50 ans récemment ménopausées
ayant un syndrome climatérique.
La seconde raison est beaucoup plus prosaı̈que. Les
hormones sont des substances naturelles non brevetables
donc aucune firme pharmaceutique ne financera les
recherches. Signalons cependant que WHI [1] a été
financé par l’état nord-américain.
Avantages du THM
Qualité de vie
Il ne fait de doute pour personne que le THM améliore le
syndrome climatérique avec un effet net sur les bouffées
de chaleur, les sueurs nocturnes et la sécheresse vaginale.
Ces effets sont dose-dépendants et l’utilisation des doses
minimums efficaces sur la durée minimum nécessaire
comme proposée par les autorités de santé est raisonnable, bien que les courtes durées et les faibles doses
n’aient jamais démontré une plus grande innocuité que
les doses standards, comme nous le verrons plus loin. Il
s’agit des items majeurs entrant dans le plus vaste
domaine de l’amélioration de la qualité de vie (QdV)
démontrée avec le THM. Il semble acquis aussi que
les bénéfices sur la QdV disparaissent chez les femmes
plus âgées en l’absence de bouffées de chaleur [2].
Aucune étude ne permet de savoir si le THM en
postménopause immédiate améliore la QdV de femmes
dénuées de bouffées de chaleur.
En terme de sexualité, il est prouvé que l’amélioration de
la sécheresse vaginale améliore la qualité des rapports sexuels
et par ce biais la libido. En revanche, pour obtenir un effet
direct sur la libido, il faut soit ajouter des androgènes à doses
pharmacologiques supraphysiologiques non dénuées d’effets
secondaires et potentiellement délétères sur le sein [3]
ou plus simplement donner de la tibolone.
Pré vention de la perte osseuse et osté oporose
postmé nopausique
Le THM a sans conteste démontré son efficacité dans la
prévention primaire et secondaire du risque de perte osseuse
postménopausique ainsi que du risque fracturaire [1]. Le
THM est le seul traitement ayant démontré une efficacité
antifracturaire en prévention primaire dans une population
non sélectionnée et qui plus est, à faible risque. Il a été
démontré que les estrogènes administrés en début de
ménopause prévenaient la perte osseuse postménopausique
et qu’il s’agissait d’une prévention de la diminution du
contenu minéral osseux et de l’altération de la structure
osseuse (micro-architecture). Cet effet se poursuit tout au
long de la prise du traitement et la perte osseuse reprend son
rythme normal à l’arrêt de la substitution hormonale. Les
femmes sous traitement ont un contenu minéral osseux
supérieur à celles qui n’en ont jamais pris ou qui ont cessé
d’en prendre.
Il existe un effet-dose apparent des estrogènes sur la
perte osseuse postménopausique. En réalité ce n’est pas
tout à fait le cas : plus la dose d’estrogènes augmente,
plus le pourcentage de femmes qui perdent de l’os
diminue. Ainsi, si l’on prend l’administration par patch
en postménopause immédiate, environ 80 % des femmes
sous placebo perdent de l’os ; ce chiffre tombe à 50 %
avec 25 microgrammes d’estradiol par jour, 25 % avec
50 microgrammes et moins de 10 % avec 100 microgrammes. Avec l’âge, au fur et à mesure que le
remaniement osseux s’amenuise, les doses d’estrogènes
peuvent peut-être être revues à la baisse.
Le risque fracturaire est diminué chez les femmes en
cours de traitement, que celui-ci ait été débuté tard ou
tôt. La diminution du risque fracturaire est cependant
plus importante chez les femmes ayant débuté le
traitement tôt après la ménopause. L’efficacité préventive
du THM s’observe quel que soit le groupe de femmes
étudié, en particulier la diminution du risque relatif de
170
fracture est le même quels que soit l’âge, le poids, le
statut tabagique, l’histoire des chutes et les antécédents
personnels ou familiaux de fracture, la prise de calcium,
l’utilisation d’un traitement hormonal substitutif antérieur et le poids. Bien évidemment, cela n’est vrai qu’en
termes de risque relatif (RR) et en termes de risque
attribuable, l’influence bénéfique du THM augmente avec
les facteurs de risques de fracture classiques. Après
l’arrêt du traitement, le bénéfice en termes de contenu
minéral osseux de même qu’en termes de risque
fracturaire, tant au niveau vertébral que périphérique,
semble disparaı̂tre rapidement.
La dose d’estrogène nécessaire à la diminution du risque
fracturaire n’est pas aujourd’hui déterminée, cette baisse est
prouvée avec les doses dites classiques, 50 microgrammes
par patch ; pour les doses plus faibles rien n’est prouvé. En
revanche, le type d’estrogène (en dehors de l’estriol) et sa
voie d’administration sont sans importance.
Pour conclure, on peut dire à ce jour que le bénéfice
du THM en termes osseux est d’autant plus important
que le traitement a été commencé plus tôt avant
l’altération de la micro-architecture osseuse et poursuivi
sur une longue durée. Cependant, le traitement reste
efficace quel que soit l’âge auquel il a été débuté, y
compris pour des débuts très tardifs [4-7].
Il existe par ailleurs des effets antifracturaires des
traitements hormonaux de la ménopause, par d’autres
biais que la structure osseuse ou son contenu en calcium
comme l’équilibre et la force musculaire. La diminution
du risque fracturaire à distance de la ménopause est en
effet beaucoup trop rapide pour être expliquée par ces
simples phénomènes structurels.
Cancer du cô lon
Depuis de nombreuses années, les études épidémiologiques
étaient en faveur d’un effet préventif du THM sur le cancer
colique. La récente étude WHI [1] randomisée versus
placebo chez des femmes de 63 ans en moyenne confirme
cet effet bénéfique avec une diminution de 40 % des cas
sous traitement actif. Un résultat identique a été aussi
observé dans une autre étude lors de l’administration
cutanée de l’estradiol. Le mécanisme ne serait donc pas lié à
une diminution de l’excrétion des sels biliaires, mais par un
effet génomique. Dans le bras WHI par estrogènes seuls [8],
cet effet semble moins net. Rappelons que la mortalité par
cancer du côlon est de 50 % ; une baisse de ce cancer pèse
donc lourd dans le rapport bénéfice/risque.
Diabè te de type 2
Toutes les études concordent pour montrer que le THM
prévient l’apparition du diabète de type 2. Cela est une
bonne nouvelle quand on se souvient que cette pathologie est en constante augmentation et entraı̂ne une forte
morbimortalité [9-11].
Risques annoncés du THM
Les risques du traitement hormonal de la ménopause
dépendent du terrain, de l’âge et de la durée de celui-ci.
Ces trois notions sont extrêmement importantes. En effet
comme nous le verrons ci-dessous, certains risques sont
directement liés à la durée du traitement (lithiases biliaires)
et ne seront donc pas à prendre en compte dans la balance
bénéfice/risque de la grande majorité des traitements
proposés pour la prise en charge du syndrome climatérique,
en effet dans cette seule indication, les durées sont et ont
toujours été de faible durée (inférieure à cinq ans). D’autres
risques dépendent du terrain, le THM venant révéler (cancer
du sein) ou déclencher un accident sur une pathologie sousjacente (infarctus du myocarde). L’âge étant en soi un
facteur de risque (phlébite, pathologies coronariennes et
vasculaires cérébrales), il est logique que les risques
attribuables (nouveaux cas induits par le traitement) à la
différence du risque relatif augmentent lui aussi avec l’âge.
Certains enfin, comme probablement le cancer du sein,
dépendent à la fois de la durée (temps nécessaire à
l’apparition d’une tumeur détectable) et de l’âge (augmentation âge-dépendant du risque spontané), et il y a sommation
de ces deux paramètres puisque, plus on a été traité
longtemps, plus on est âgé !
Lithiases biliaires
Il est connu depuis longtemps que la prise orale d’estrogènes
modifie la composition de la bile vers un risque lithogène.
Le risque a été confirmé, en particulier dans l’étude HERS
[2] randomisée versus placebo OR = 1,38 (1,00-1,92). La
modification de la bile n’est pas observée avec l’administration cutanée des estrogènes, ce qui, en l’absence d’étude,
rend cependant optimiste sur ce risque avec cette voie
d’administration.
Risque thromboembolique veineux
L’administration orale d’estrogènes s’accompagne de
modifications des facteurs de coagulation veineuse vers
un versant thrombogène [12]. Depuis de nombreuses
années, il était craint par certains que cela ait une
sanction clinique [13]. Cette sanction est confirmée dans
les études HERS [2] et WHI [1,8] avec un OR de 2 à 3. Le
risque d’embolies pulmonaires est augmenté dans les
mêmes proportions. Le risque de thrombose veineuse est
maximum en termes de RR en début de traitement, mais
se poursuit tout au long de sa durée, pour peu qu’il soit
administré par voie orale. Comme le risque spontané est
relativement faible à l’âge de 50 ans, l’augmentation du
risque attribuable en dehors des femmes à risque
(thrombophilie, surpoids, immobilisation...) est modeste
jusqu’à l’âge de 60 ans. Au-delà, l’augmentation du
risque spontané rend l’augmentation du RR beaucoup
moins acceptable. Le risque thromboembolique veineux
171
est très loin d’être négligeable chez les femmes au-delà de
60 ans puisque, en particulier dans l’étude WHI [1], il
représente 44 % de surrisque induit par le traitement. La
publication de Scarabin et al. [14] semble innocenter
l’administration cutanée des estrogènes vis-à-vis de ce
risque, comme le laissait présager l’absence d’activation
de la coagulation sous cette voie d’administration de
l’estrogène [12]. Scarabin innocente l’administration cutanée des estrogènes, y compris lorsqu’il existe un surpoids
et une thrombophilie par mutation des facteurs V
et II [15]. Ce même auteur évoque un possible effet
thrombogène propre de certains progestatifs (les norprégnanes) en l’absence, il est vrai aujourd’hui, de plausibilité
biologique [16].
Risque coronarien
La prévention du risque coronarien a très longtemps été
l’une des raisons principales de la diffusion du THM.
Cependant, depuis toujours, quelques voix, françaises en
particulier, s’élevaient contre cette assurance basée sur
des études épidémiologiques redoutant l’effet « bonne
santé », c’est-à-dire la prescription préférentielle de ces
traitements à des femmes sélectionnées. De plus, si les
propriétés pharmacologiques de l’estrogénothérapie
orale montraient de nombreuses propriétés favorables
(effets endothéliaux, élévation du HDL cholestérol,
baisse du LDL cholestérol...), elles étaient aussi souvent
en contradiction avec celles observées lors du fonctionnement ovarien préménopausique (élévation des triglycérides, modification des facteurs de coagulation et de
la CRP...). De plus, très récemment, a été mis en évidence
sous estrogénothérapie orale une élévation des matrix
métalloprotéinases, facteur d’instabilité des plaques non
observées sous estrogénothérapie cutanée. Enfin, on
connaı̂t le rôle joué par l’insulinorésistance dans la
régulation de la fibrinolyse en relation avec l’élévation du
PAI1 et la totalité des progestatifs artificiels altère
l’insulinosensibilité et certains, par leurs propriétés
glucocorticoı̈des, augmentent la génération de récepteurs
de la thrombine au niveau des muscles lisses endothéliaux [17]. Dans les études HERS [2] et WHI [1] le
traitement associant estrogènes conjugués équins et MPA
augmente le risque coronarien la première année
OR = 1,8 puis le surrisque disparaı̂t rapidement faisant
fortement suspecter un effet prothrombotique sur
plaques d’athérome préexistantes. Il ne semble pas à ce
jour que les bénéfices de l’estrogénothérapie sur l’athérogenèse tout au moins en début de carence hormonale
soient remis en cause. La responsabilité du progestatif
dans les accidents observés dans HERS et WHI est bien
mise en exergue par l’absence de surrisque coronarien
observé dans le bras estrogènes seuls de l’étude WHI [8].
Là encore, le risque spontané augmentant avec l’âge, le
risque attribuable est relativement faible chez les femmes
récemment ménopausées, mais devient préoccupant au-
delà d’un certain âge, surtout lors de l’induction tardive
des traitements. L’un des faits majeurs récents est la
notion de fenêtre d’intervention. Le bénéfice coronarien
du THM dépend de la précocité de sa mise en œuvre
après la ménopause. Si le traitement est débuté en
postménopause immédiate (moins de dix ans), il protège
des maladies coronariennes [18]. En revanche, lorsqu’il
est débuté à distance de la ménopause, il perd son effet
protecteur comme dans HERS [2] et pourrait même
devenir délétère comme dans WHI [1]. La réanalyse
récente de la Nurse Health Study [19] et du bras
estrogène seul de WHI [18] vient confirmer cette notion
déjà largement évoquée dans le modèle de la guenon
castrée. Par ailleurs, dans l’étude d’observation des
infirmières américaines, le THM protège en moyenne
des maladies coronariennes, car dans leur grande
majorité, les femmes ont débuté le traitement en postménopause immédiate. Cependant, dans cette étude, un
petit contingent de femmes a débuté tardivement le
traitement, et dans ce sous-groupe, il n’y a pas de bénéfice
coronarien comme dans HERS et WHI ; ainsi les études
d’observations rejoignent les études d’intervention !
Accidents vasculaires cé ré braux
Le risque d’AVC a été trouvé élevé dans les deux bras
(estroprogestatifs et estrogènes seuls) de l’étude WHI [1,8]
OR = 1,41 (0,86-2,31) et dans l’étude HERS [2]. Cette même
augmentation est présente aussi chez les femmes âgées
utilisant la tibolone (étude LIFT sous presse). L’augmentation en risque attribuable est faible : de 0,01 cas
supplémentaire pour 100 femmes par an. Mais en fonction
de l’âge, cette augmentation n’est pas homogène et le
surrisque s’observe principalement chez les femmes de plus
de 70 ans. Une élévation de la tension artérielle observée
sous estrogènes conjugués équins per os dans ces études
peut en partie être incriminée. Ici encore, les effets de la
prise orale d’estrogène sur le foie, en stimulant le système
rénine-angiotensine, ont pu jouer un rôle néfaste.
Dé mences
On attendait une diminution des risques de démence, en
particulier de maladies d’Alzheimer sous THM et c’est
une augmentation qui a été observée : + 0,02 cas pour
100 femmes par an dans WHI [1]. Les fonctions
cognitives ont aussi été faiblement perturbées statistiquement par le traitement.
Il n’est pas possible actuellement de se faire une idée sur
la physiopathologie de cette mauvaise nouvelle. Ces
résultats sont en opposition avec les effets pharmacologiques des estrogènes sur le cerveau. Il n’est surtout pas
possible d’éliminer une composante vasculaire par les
microthromboses induites par ce traitement à l’âge où il a
été débuté (cf. supra) dans la genèse de ces détériorations
intellectuelles.
172
Cancer du sein
Jusqu’en 1997, il y a eu environ 60 études sur
l’association potentielle entre THM et cancer du sein.
Les résultats de ces études étaient tellement discordants
qu’il était impossible de se faire une opinion. Ce qui
différencie ces études des suivantes est qu’elles portaient
sur des populations en postménopause immédiate et que
la majorité des traitements ne comportaient que des
estrogènes. La méta-analyse du Lancet [20] en les
compilant trouva un RR de 1,26, ce qui était trop faible
pour être affirmatif sur la réalité du risque, du fait des
innombrables biais, en particulier d’inclusion et de
surveillance inhérents à ces études d’observation.
L’étude WHI [1] a, pour certains, levé le doute sur
l’augmentation du risque de cancer du sein au-delà d’une
durée de cinq ans d’utilisation. Il faut noter que le risque
n’est augmenté que chez les femmes traitées avant l’étude
par un THM ; dans le groupe non antérieurement traité,
le risque n’est pas modifié : 1,06 (NS). Même si cette
étude est ce que nous avons et aurons de mieux, elle ne
permet cependant pas de lever toutes les incertitudes
avec son RR de 1,26 (0,83-1,92), tant est faible cette
augmentation non significative + 0,08 cas par an pour
100 femmes traitées [1,14,21]. Elle est cependant, concordante avec la méta-analyse du Lancet [20] et d’autres
études publiées depuis. Mais, les mêmes biais ne sont-ils
pas susceptibles de reproduire les mêmes résultats ? Il
n’y a à ce jour pas de raison de penser que le risque est
différent suivant l’estrogène utilisé et sa voie d’administration [22]. Le risque augmente avec la durée du
traitement. Globalement le RR est faible, mais il semble
que sur de longues durées de traitement (dix ou quinze
ans), le RR devient élevé, induisant de ce fait un risque
attribuable élevé. On manque de données sur l’influence
des traitements sur de très longues durées. En effet, s’il
s’agit d’un risque de promotion, il serait logique de
constater une diminution après un certain temps. Cette
diminution, possible d’après certains travaux, est cependant loin d’être prouvée. La rapidité d’apparition de
surrisque, associée au fait que cette augmentation du
risque disparaı̂t rapidement à l’arrêt du traitement [22] et
associée à l’absence d’augmentation des cancers in situ,
rend très probable le fait qu’il s’agisse d’un phénomène
de promotion de cancers existants et non d’initiation.
Ainsi, comme le risque spontané de cancer du sein
augmente avec l’âge, la révélation de ces cancers par
stimulation exogène augmente, elle aussi, logiquement
avec l’âge. Le bras estrogène seul de l’étude WHI et de
nombreuses autres études de cohorte ne montrent pas
d’augmentation avec les estrogènes seuls (RR = 0,77
[0,57-1,06]) [8]. Enfin dans l’étude E3N [23], il n’est pas
mis en évidence d’augmentation du risque sous l’association estrogènes-progestérone naturelle ou rétroprogestérone. En revanche, l’étude E3N trouve une élévation
du risque sous estrogènes seuls après cinq ans de
traitement et lors de l’association estrogènes-progestatifs
de synthèse quels qu’ils soient : RR = 1,7 (S). Tous ces
résultats sont en harmonie avec la mesure des rapports
apoptose/prolifération mesurés ex vivo chez la femme
qui montre une promotion maximum avec l’association
estrogènes-MPA ou NETA (ce qui concorde avec l’étude
MWS [22] dite du Million), intermédiaire avec les
estrogènes seuls et minimum avec l’association estrogènes (rétro) progestérone [24] ou la tibolone.
L’influence des traitements sur la mortalité globale par
cancer du sein est aujourd’hui encore objet de débats. Il reste
admis, malgré les récents résultats de l’étude WHI, que les
cancers découverts seraient de forme histologique mieux
différenciée comportant d’avantage de formes hormonosensibles (E3N) et de meilleur pronostic.
Troubles urinaires
Depuis toujours, le THM était considéré comme bénéfique sur les symptômes urinaires de la femme âgée [25].
Cette assertion était surtout basée sur des considérations
théoriques (origine embryologique commune du tractus
génito-urinaire, amélioration neuromusculaire, présence
de récepteurs des stéroı̈des sexuels...). Les études
cliniques montraient une amélioration subjective des
symptômes, mais peu d’études avec mesures objectives
confirmaient cette bonne impression [26]. Il faut noter
que déjà dans la Nurse Health Study, quels que soient la
voie d’administration (oral, transdermique), le type
d’hormone, la présence ou non d’un progestatif et la
dose, les THM augmentaient les incontinences urinaires
[27].
Les deux grandes études HERS [28,29] et WHI [30]
randomisées versus placebo ont, elles aussi, montré une
aggravation des troubles urinaires, incontinences d’effort
ou urgences mictionnelles, chez les femmes sous
traitement.
L’affaire est-elle entendue pour autant [31] ?
– Des études continuent à trouver une amélioration
des troubles urinaires sous THM, en particulier chez les
femmes hystérectomisées [31] et sous tibolone [32] ;
– Les femmes dont les troubles urinaires sont
aggravés par le THM ont, dans les études randomisées,
plus de 60 ans. Qu’en est-il des femmes plus jeunes ?
Un traitement purement préventif est-il envisageable ? Les troubles n’étant aggravés que chez des
femmes déjà atteintes ?
– Qu’en est-il aussi de l’effet d’une administration
locale des estrogènes ?
– Existent-ils des sous-groupes à réponse différente ?
Pour conclure, le THM a une efficacité prouvée vis-à-vis
de l’amélioration de la qualité de vie, de la prévention du
cancer du côlon, de la perte osseuse, du risque fracturaire et
de l’apparition d’un diabète de type 2. Il se confirme que le
traitement hormonal de la ménopause, pourvu qu’il soit
débuté dès le début de la carence hormonale, ait un effet
173
protecteur vis-à-vis de l’athérogenèse et du risque coronarien. L’utilisation d’estradiol par voie cutanée permet
d’éviter l’augmentation du risque thromboembolique veineux observé avec les estrogènes administrés par voie orale.
De plus, cette voie d’administration permet d’éviter
l’augmentation des marqueurs de fissuration de plaque
observés sous estrogènes oraux. Enfin, pour ce qui est du
risque de thrombose artérielle, l’association de progestérone naturelle à l’estrogénothérapie, contrairement au
MPA, n’altère pas l’insulinosensibilité. Enfin, pour ce qui
est du risque de cancer du sein, le THM a un effet promoteur
sur des cancers préexistants, donc d’autant plus visible que
les femmes sont plus âgées. Il semble que l’association
estrogènes (rétro) progestérone n’ait pas cet effet promoteur.
Y a-t-il d’autres stratégies ?
La tibolone pourrait être proposée en début de
ménopause à la place du traitement hormonal classique
ou en relais de celui-ci. Elle est en effet efficace sur la
symptomatologie ménopausique. La tibolone prévient la
perte osseuse postménopausique et le risque fracturaire
(étude LIFT sous presse) au même titre que les
traitements estrogéniques. Certains arguments (biochimiques, expérimentation animale, rapport apoptose/
prolifération chez la femme) et des études suggèrent
que ce traitement n’aurait pas les mêmes inconvénients
mammaires que le traitement hormonal classique, ce qui
permettrait de le poursuivre bien au-delà des durées
admises aujourd’hui pour le THM. Les travaux disponibles sur le risque veineux ne nous donnent pas les mêmes
inquiétudes qu’avec le THM oral. Nous manquons en
revanche de résultats sur le risque coronarien. Pour le
risque d’accident vasculaire cérébral, la tibolone a les
mêmes inconvénients que le THM chez les femmes âgées.
La prise en charge du syndrome climatérique par le
THM (au mieux estradiol cutané + (rétro)progestérone ou
tibolone) ne pose ainsi pas de réel problème tant en termes
d’efficacité que de tolérance. La prise en charge préventive
précoce du risque d’ostéoporose est aujourd’hui encore
ouverte à discussion, mais le THM est dans cette indication
le seul disponible. Ce traitement doit être débuté en
postménopause immédiate (avant dix ans). Il doit être
interrompu au fur et à mesure que les facteurs de risque
vasculaire et mammaire apparaissent : un relais pour l’os
est donc nécessaire, soit par le raloxifène, soit par le
strontium, soit enfin par les bisphosphonates, sachant
qu’aujourd’hui aucun d’entre eux ne représente de solution
validée sur de très longues durées de traitement.
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© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0121-5
FOCUS / FOCUS
La proctalgie fugace : restons zen...
V. de Parades 1,2 , I. Etienney 1 , P. Bauer 1 , P. Atienza 1
1
2
Service de proctologie médico-interventionnelle, centre hospitalier Diaconesses-Croix-Saint-Simon, 18, rue du Sergent-Bauchat,
F-75012 Paris, France
Service d’hépato-gastro-entérologie, hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, F-75015 Paris, France
Résumé : La proctalgie fugace est une algie ano-rectale
intermittente évoluant en général de façon chronique. Sa
prévalence dans la population générale varie entre 3 et 15 %
avec une prédominance féminine. L’âge moyen de survenue
de la première crise douloureuse se situe entre 45 et 55 ans.
Le diagnostic repose sur l’interrogatoire. Typiquement, la
douleur est d’apparition brutale et inopinée sans facteur
déclenchant. Elle semble survenir plus volontiers la nuit.
Elle est d’emblée paroxystique et en général intense. Elle
siège au niveau du canal anal et/ou du bas rectum, et
n’irradie pas. Elle est décrite comme une crampe, un
spasme ou un coup de poignard. Sa durée est variable, mais
elle cesse complètement de façon spontanée. Les patients
sont asymptomatiques entre les crises. L’examen clinique
ainsi que les explorations complémentaires sont normaux.
Le mécanisme n’est pas clair mais l’hypothèse d’un spasme
du sphincter interne anal et/ou de la musculeuse rectale est
le plus probable. Une simple explication sur la bénignité de
leurs douleurs suffit à rassurer l’immense majorité des
patients.
sphincter or rectal musculature. A simple explanation of
the benign nature of the pain is enough to reassure the
large majority of patients.
Keywords: Proctalgia fugax – Rectal pain
« Une fois qu’on a pris connaissance de ce dont il s’agit, si
le corps est resserré , il faut procé der à un relâchement » [1].
Introduction
La proctalgie fugace est une algie ano-rectale intermittente
évoluant en général de façon chronique. Son existence a été
mentionnée pour la première fois il y a plus d’un siècle [2],
mais c’est en 1935 qu’elle a été explicitement individualisée
par le médecin danois T.E. Thaysen [3]. Depuis cette date,
cette algie a été intégrée dans les douleurs ano-rectales
des troubles fonctionnels intestinaux et fait désormais
partie intégrante de la classification de Rome III (Tableau I)
[4,5].
Mots clés : Proctalgie fugace – Algies ano-rectales
Épidémiologie
Proctalgia fugax: nothing to worry about
Abstract: Proctalgia fugax is episodic rectal pain that
generally develops into a chronic condition. Its prevalence in the general population is between 3 and 15 %,
predominantly affecting women. The first bout of pain
usually occurs between ages 45 and 55. Diagnosis is based
on the patient interview. Typically, the pain occurs
suddenly and unexpectedly without a triggering factor; it
occurs most often at night and is paroxysmal and
generally intense. The pain strikes the anal canal or lower
rectum with no radiation from the point of origin. It is
described as a cramp, spasm or stabbing pain that lasts
for a variable length of time and completely subsides
spontaneously. Patients are asymptomatic between
bouts. Clinical examination and additional exploration
produce normal results. The mechanism is not clear, but
the most probable cause is spasm of the internal anal
Correspondance : E-mail : [email protected]
La prévalence de la proctalgie fugace dans la population
générale varie entre 3 et 15 % [6-11]. Des prévalences plus
élevées ont été rapportées au sein de populations
spécifiques, notamment chez des patients ayant une
incontinence urinaire (17 %) [9], un ulcère peptique
(20 %), une maladie inflammatoire de l’intestin (29 %)
[12], un prolapsus pelvien (36 %) [9] ou un syndrome de
l’intestin irritable (50 %) [12]. Une prévalence de 25,5 %
a également été rapportée au sein d’une population
d’étudiants bien portants mexicains [13]. Il n’y a pas
d’explication claire pour ces écarts de prévalence aussi
importants. Cependant, le fait que plus de 80 % des
patients ayant des proctalgies fugaces ne consultent pas
un médecin pour ce seul motif pourrait expliquer que la
prévalence soit plus importante, dès lors que cette
pathologie est recherchée à l’interrogatoire systématique
[8,11]. Une autre explication serait liée aux critères
176
Tableau I. Douleurs ano-rectales dans la classification des
troubles fonctionnels intestinaux de Rome III [5]
F2a. Douleurs ano-rectales chroniques :
Douleur rectale chronique ou récidivante
Épisodes durant moins de 20 minutes
Exclusion des autres douleurs rectales comme l’ischémie,
une maladie inflammatoire intestinale, une cryptite, un abcès
intersphinctérien, une fissure, une maladie hémorroı̈daire,
une prostatite et une coccygodynie
F2a1. Syndrome du releveur : critères diagnostiques des
douleurs ano-rectales chroniques avec une tension douloureuse du puborectal au toucher rectal
F2a2. Douleurs ano-rectales fonctionnelles non spécifiques :
critères diagnostiques des douleurs ano-rectales chroniques
sans tension douloureuse du puborectal au toucher rectal
F2b. Proctalgie fugace :
Épisodes répétés de douleurs de l’anus et/ou du bas rectum
Épisodes durant de quelques secondes à quelques minutes
Absence de douleur ano-rectale entre les épisodes
Fig. 1. Distribution du sexe et de l’âge des patients ayant des proctalgies
fugaces dans la série de de Parades et al. [11] (hommes en blanc, femmes
en gris)
diagnostiques retenus et à certains problèmes de diagnostic différentiel. Ainsi, dans notre série, nous avions
été gênés par certaines pathologies concomitantes
(maladie hémorroı̈daire, fissure anale, endométriose
pelvienne, fibromyalgie) dont les douleurs sont parfois
trompeuses et difficiles à interpréter de façon formelle
[11]. De même, les autres douleurs ano-rectales fonctionnelles peuvent induire en erreur (Tableau I).
La proctalgie fugace est plus fréquente chez la femme
que chez l’homme (Fig. 1) (Tableau II) [7,10-12,14-18]. Là
encore, cette prédominance féminine reste inexpliquée.
L’âge moyen de survenue de la première proctalgie
fugace se situe entre 45 et 55 ans [11,15,16,18-20].
Cependant, dans notre série, la fourchette des âges était
large (extrêmes de 18 à 87 ans) (Fig. 1) à l’instar de ce qui
a déjà été rapporté [6,8,15-21] (Tableau II).
La proctalgie fugace surviendrait plus volontiers chez
des sujets stressés et/ou asthéniques [20,22]. En outre,
dans une étude réalisée dans une université mexicaine,
elle était significativement plus fréquente chez les
étudiants que chez les enseignants ou les membres du
personnel administratif [13].
Clinique
Le diagnostic de proctalgie fugace repose sur le seul
interrogatoire puisque les patients sont asymptomatiques
entre les crises douloureuses et, de fait, lors de la
consultation éventuelle pour ce problème. L’examen
clinique ainsi que les éventuelles explorations complémentaires sont alors strictement normaux et n’ont pour seul
intérêt que d’écarter les diagnostics différentiels [22-25].
Typiquement, la douleur est d’apparition brutale et
inopinée, sans facteur déclenchant dans plus de 80 % des
cas [11]. Lorsqu’ils existent, les facteurs déclenchants sont
très variés : stress, défécation, menstruations, rapports
sexuels, prise d’alcool, administration de suppositoire
ou sclérothérapie hémorroı̈daire [6, 11, 12, 14, 15, 17, 19, 21].
La douleur semble survenir plus volontiers la nuit
[6, 14-19, 21]. Cependant, elle survenait aussi bien le jour que
la nuit dans notre série [11] ou plutôt le jour dans d’autres
[7,12] (Tableau II). Cette discordance pourrait s’expliquer
par le caractère probablement plus mémorable des crises
nocturnes du fait du réveil brutal qu’elles provoquent.
La douleur est d’emblée paroxystique et en général
intense. Elle siège au niveau du canal anal et/ou du bas
rectum. Elle était décrite comme une crampe, un spasme
ou un coup de poignard par plus de 75 % des patients
de notre série. Les autres décrivaient des sensations de
piqûre, de brûlure, de broiement, de fourmillements, de
gonflement, d’étirement ou de décharge électrique [11].
Cette variabilité est retrouvée dans la littérature. Elle
s’explique probablement par le fait que la description de
la douleur dépend surtout du contexte socioculturel et du
vocabulaire du patient.
La douleur n’a pas d’irradiation dans plus de 90 % des
cas. Les rares irradiations peuvent se faire au niveau du
scrotum, des fesses, du pelvis ou de l’abdomen (11).
La douleur est isolée dans plus de 80 % des cas.
Certains patients signalent parfois la survenue concomitante d’un ténesme, d’épreintes, de douleurs abdominales,
ainsi que de signes neurovégétatifs comme une pâleur, des
nausées, voire des vomissements, des sueurs ou des
frissons, des palpitations et/ou un malaise lipothymique
[6,14,19,21]. D’autres symptômes plus curieux ont été
décrits comme une érection [19] ou un priapisme [6,21].
La douleur cesse de façon spontanée dans la majorité
des cas [11]. Parfois, les patients ont recours à un expédient
pour interrompre la crise, notamment la défécation, un
toucher anal, l’administration d’un suppositoire ou d’un
lavement, et/ou un bain de siège [11,25-27].
La douleur évolue par crises dont la durée semble
variable (Tableau II). En effet, la durée moyenne d’une crise
était de quinze minutes dans notre série [11], ainsi que dans
celle de Gracia Solanas et al. [18]. Cependant, les crises
177
Tableau II. Principales séries de proctalgie fugace
Premiers auteurs
(ré fé rences)
Anné es Nombre
de
patients
Âge moyen
(extrê mes)
Femmes
(%)
Survenue le
jour (%)
Survenue Duré e de la
la nuit
crise (minute)
(%)
Nombre
annuel
maximal
de crises
Karras JD [19]
McEwin R [21]
Ibrahim H [6]
Pilling LF [20]
Thompson WG [7]
Thompson WG [12]
Lans WR [15]
Eckardt VF [16]
1951
1956
1961
1965
1980
1984
1994
1996
12
10
24
48
60
49
12
18
47 (30-63)
DM (30-70)
DM (18-65)
55 (34-75)
DM
DM
51 (34-73)
57,5 (35-75)
42
0
37,5
50
DM
84
75
72
33
0
DM
DM
66
63
8
DM
58
100
DM
DM
12
6
75
83
Takano M [17]
Gracia Solanas JA [18]
Boyce PM [10]
de Parades V [11]
2004
2005
2006
2007
68
15
50
54
DM (10-70)
46 (36-60)
DM
51 (18-87)
60
73
58
69
DM
DM
DM
33
DM
73
DM
35
12
100
DM
DM
> 12
> 52
30
> 6 dans
67 % des cas
730
365
DM
180
5-30
5-60
10-90
DM
DM
1-30
< 30
> 30 dans
78 % des cas
< 120
5-20
DM
< 90
DM : données manquantes.
duraient moins de cinq minutes dans 90 % des cas de la
série de Thompson et al. [22], et plus de trente minutes
dans 78 % des cas de la série d’Eckardt et al. [16]. En outre,
des extrêmes de quelques secondes à plus de 120 minutes
ont été rapportés [11,12,15,17-21].
La périodicité des crises est également variable. Dans
notre série, le nombre annuel moyen de crises était de 13,
mais les extrêmes allaient de 1 à 180 crises par an [11]. Cette
notion a également été rapportée par d’autres auteurs
(Tableau II). En fait, il est probablement difficile pour les
patients de faire une telle évaluation car les douleurs
surviennent à des intervalles de temps aléatoires.
Mécanisme
Autant la sémiologie de la proctalgie fugace est
clairement individualisée, autant son mécanisme reste
hypothétique. Le caractère paroxystique et la durée brève
de la douleur ont fait évoquer une pathologie neurologique [3], un spasme vasculaire entraı̂nant une ischémie
transitoire (« angor » anorectal) [28,29], un spasme du
sigmoı̈de [22,30] ou une contraction du sphincter externe
et/ou du releveur de l’anus [14,31]. Toutefois, l’hypothèse
qui prévaut actuellement est plutôt celle d’une contraction du muscle lisse (sphincter interne anal et/ou
musculeuse rectale) [16,32]. Du reste, plusieurs équipes
ont décrit le cas particulier et exceptionnel de familles
de patients qui avaient des « myopathies » héréditaires
de l’anus, se manifestant notamment par des proctalgies
fugaces. Ces « myopathies » se caractérisaient par une
hypertonie anale de repos en manométrie, un épaississement du sphincter interne en endosonographie (Fig. 2)
et un aspect caractéristique du muscle en histologie
(fibres hypertrophiques avec des vacuoles PAS positif).
Le mode de transmission était autosomique dominant
avec une pénétrance variable [33-37].
Traitement
Dans l’immense majorité des cas, une simple explication
sur la bénignité et le caractère stéréotypé de leurs
douleurs suffit à rassurer les patients [11,22,25].
Toutefois, certains patients sont demandeurs d’un
traitement spécifique en raison de douleurs particulièrement intenses, prolongées et/ou fréquentes. Il est alors
délicat de leur faire des recommandations précises. En
effet, la littérature sur ce sujet est pauvre, notamment,
car le traitement de la proctalgie fugace est difficile à
évaluer du fait de la survenue aléatoire et de la brièveté
des crises.
Traitement de la crise
Le salbutamol en inhalation a fait l’objet de deux
publications dont la seule étude contrôlée dans cette
indication [38,39]. Dans cet essai, les auteurs ont démontré
Fig. 2. Aspect endosonographique tridimensionnel d’un épaississement
du sphincter interne (flèches blanches) [sonde Bruel & Kjaer]
178
la supériorité du salbutamol versus le placebo pour écourter
la durée des crises dans une étude randomisée en double
insu et en cross-over, réalisée chez 18 patients [39].
D’autres molécules ayant, pour la plupart, un effet
relaxant sur le muscle lisse digestif pourraient également
raccourcir la durée des crises douloureuses mais elles
n’ont fait l’objet que de cas cliniques isolés. Il s’agit de la
clonidine par voie orale [31], des inhibiteurs calciques
par voie orale (ou mieux sublinguale) comme la
nifédipine [34] ou le diltiazem [35], et de la trinitrine
en applications locales [40] ou en patchs [35], ces deux
modes d’administration ayant l’avantage de leur rapidité
d’action.
Traitement de fond
En cas de crises douloureuses excessivement fréquentes,
certains ont conseillé une prise en charge psychologique,
voire l’administration d’anxiolytiques ou d’antidépresseurs [24]. D’autres ont proposé la prise orale au long
cours de diltiazem [29,41], des injections de toxine
botulique dans l’appareil sphinctérien anal [42,43] ou des
perfusions intraveineuses de lidocaı̈ne [44]. En revanche,
la chirurgie n’a aucune place dans le traitement de la
proctalgie fugace.
Conflits d’intérêts : aucun.
Remerciements
Le premier auteur remercie vivement Marie-Pierre Lang
pour ses conseils avisés et Clara pour sa patience.
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© Springer 2007
DOI 10.1007/s11608-007-0103-7
PRATIQUE MÉDICALE / MEDICAL PRACTICE
Le bloc pudendal : technique d’analgésie postopératoire
en chirurgie proctologique
B. Vinson-Bonnet
Service de chirurgie viscérale, centre hospitalier de Poissy-Saint-Germain-en-Laye,
10, rue du Champ-Gaillard, BP 3082, F-78303 Poissy Cedex, France
Résumé : Le bloc pudendal consiste à infiltrer les
branches périnéale et rectale inférieures du nerf pudendal avec une solution d’anesthésique local de longue
durée d’action. L’injection bilatérale est précédée d’un
repérage des troncs nerveux à l’aide d’un neurostimulateur qui provoque une contraction du sphincter anal. Elle
est complétée par une infiltration de l’espace présacré. Le
bloc pudendal permet une analgésie de plusieurs heures
et améliore le confort des patients en évitant le recours
aux opiacés associés à des effets secondaires (constipation – rétention d’urines) particulièrement gênant dans
ce type de chirurgie.
Mots clés : Anesthésiques locaux – Bloc pudendal –
Chirurgie hémorroı̈daire – Chirurgie proctologique –
Hémorroı̈des
Pudendal block: postoperative analgesia
after proctology surgery
Abstract: The pudendal block consists in injecting a
long-acting local anaesthetic into the area around the
lower perineal and rectal branches of the pudendal
nerve. The bilateral injection is preceded by the location
of the nerve trunks using a nerve stimulator, which
stimulates contraction of the anal sphincter. The
procedure is then completed by infiltration of the
presacral space. The pudendal block achieves pain
relief for several hours and increases patient comfort
by avoiding the use of opiates associated with adverse
effects that are particularly troublesome in this type of
surgery, such as constipation and urine retention.
Keywords: Local anaesthetics – Pudendal block – Hemorrhoid surgery – Proctology surgery – Hemorrhoids
L’intensité des douleurs postopératoires en chirurgie
proctologique est corrélée à l’importance des plaies situées
sur la jonction anocutanée et le canal anal dont l’épithélium
Correspondance : E-mail : [email protected]
est très riche en nocicepteurs. C’est pourquoi la chirurgie
hémorroı̈daire classique, avec excision de trois, voire
quatre paquets, a la réputation d’être si douloureuse.
Après hémorroı̈dectomie, le niveau de la douleur est estimé
supérieur à 5 sur 10 sur l’Échelle Visuelle Analogue (EVA)
pendant les 24 premières heures et lors de la première selle.
Jusqu’à très récemment, la prise en charge des douleurs
postopératoires, établie selon les RPC sur le traitement de la
maladie hémorroı̈daire [1], suivait, par accord professionnel, la proposition générale de la Société française
d’anesthésie-réanimation. Le schéma thérapeutique associait l’administration systématique d’anti-inflammatoires
non stéroı̈diens et de paracétamol et l’administration à
la demande d’opiacés dès que l’EVA dépassait 5/10.
Malheureusement, la nécessité de recourir à des doses
élevées d’opiacés engendre des effets secondaires (nausées,
vomissements, rétention d’urines, constipation) tout à fait
délétères et particulièrement gênants, dans le cadre de cette
chirurgie. Plusieurs équipes ont donc proposé l’infiltration
des nerfs pudendaux avec comme objectifs d’assurer une
analgésie de longue durée, de diminuer l’utilisation des
morphiniques et d’améliorer le confort des opérés.
Plusieurs études ont depuis validé l’intérêt du bloc
pudendal, mais la réalisation de ces blocs, bien que simple
et non dangereuse, reste encore trop peu diffusée.
Principe du bloc pudendal analgésique
Il s’agit de faire diffuser une solution d’un anesthésique
de longue durée d’action, au contact des nerfs pudendaux, sensitivomoteurs droit et gauche (ancien nerf
honteux) et plus précisément de leurs branches à visée
anale. Ces branches sont le nerf rectal inférieur (ancien
nerf hémorroı̈dal ou nerf anal) et les branches profondes
du nerf périnéal. L’infiltration se poursuit vers le nerf
sensitif ano-coccygien.
Les agents anesthésiques de longue durée d’action
qui sont actuellement commercialisés en France sont la
bupivacaı̈ne à 0,5 % (Marcaine®), la ropivacaı̈ne à 0,75 %
181
Fig. 2. Orientation de l’aiguille pour stimulation du nerf pudendal
Fig. 1. Repères du bloc pudendal
Schéma : innervation du périnée postérieur :
1) nerf pudendal ;
2) nerf périnéal (rameau profond) ;
3) nerf rectal inférieur ;
4) nerf ano-coccygien ;
5) rameaux clunéaux du nerf cutané postérieur de cuisse ;
6) nerf dorsal du clitoris ou de la verge
(Naropéine®) et la lévobupivacaı̈ne à 0,5 % (Chirocaı̈ne®).
La durée d’action du bloc varie de 5 à 24 heures dans les
différentes études, selon la définition donnée (par exemple
EVA < 40 ou délai avant l’administration d’un antalgique
de secours). L’adjonction d’un adjuvant des anesthésiques
locaux comme la clonidine (Catapressan®) prolonge l’effet
analgésique [2].
Une partie de la technique repose sur l’infiltration
des tissus périanaux et de ce fait le volume injecté est
relativement important pour atteindre tous les rameaux
nerveux périanaux. Cependant, comme toutes les techniques d’anesthésie locorégionale, le bloc pudendal
nécessite de respecter les doses maximales de l’anesthésique local utilisé (soit 225 mg pour la ropivacaı̈ne
et 150 mg pour la bupivacaı̈ne) afin d’éviter les risques
de toxicité neurologique (convulsions) et cardiaques
(tachycardie ou fibrillation ventriculaire). Le volume
maximum est donc de 30 ml pour la bupivacaı̈ne à 0,5 %
(soit 150 mg) et la ropivacaı̈ne à 0,75 % (soit 225 mg).
Technique du bloc pudendal
Rappel anatomique de l’innervation anale : le nerf pudendal est issu des racines antérieures principalement de S4 et
aussi de S2 et S4. La partie tronculaire traverse la grande
puis la petite échancrure sciatique où le nerf chemine dans
le canal d’Alcock accompagné par le pédicule vasculaire
pudendal. Le nerf pudendal se divise rapidement, soit à
l’intérieur de cette gaine, soit dès son entrée dans la fosse
ischio-rectale. Le pédicule passe au bord inférieur de la
tubérosité ischiatique tandis que le nerf se dirige en dedans
de cette tubérosité. Le nerf pudendal se divise en trois
branches, le nerf rectal inférieur, le nerf périnéal et le nerf
dorsal du clitoris ou de la verge. Le point de repère clé
(Fig. 1) de la réalisation du bloc pudendal est donc le bord
interne de la tubérosité ischiatique.
L’innervation sensitive de la marge anale et du canal
anal ainsi que l’innervation motrice du sphincter externe
est assurée essentiellement par le nerf rectal inférieur
divisé en deux branches dans 75 % des cas (une seule ou
trois branches dans les autres cas) et par les rameaux
profonds du nerf périnéal sur sa moitié antérieure.
L’innervation sensitive de la moitié postérieure de la
marge anale est complétée par les rameaux anococcygiens. Les rameaux clunéaux du nerf cutané postérieur de la cuisse peuvent participer de façon variable à la
sensibilité superficielle périanale antéro-latérale.
En revanche, l’innervation du sphincter interne et du
rectum dès la jonction ano-rectale dépend du système
nerveux autonome avec les voies parasympathiques via
le plexus sacré S2 à S4 et sympathiques via les nerfs
hypogastriques jusqu’aux racines T10 à L1.
Le bloc pudendal concerne les fibres sensitivomotrices et un très petit contingent de fibres parasympathiques contenues dans ce nerf. Certains auteurs infiltrent
également l’espace présacré dans le but d’atteindre les
voies présacrées, mais cette technique n’a donné lieu à
aucune évaluation [3]. Les repères de l’infiltration sont
donc les tubérosités ischiatiques et le coccyx.
Points de ponction : le patient anesthésié est installé en
position gynécologique puis badigeonné avec une solution
antiseptique. Le bloc est réalisé avant tout geste sur l’anus
afin d’éviter toute contamination et de façon à effectuer
l’infiltration avant le traumatisme tissulaire. Cependant,
l’analgésique s’installe dans un délai moyen de 20 minutes.
182
Fig. 3. Infiltration des rameaux ano-coccygiens
Selon les descriptions qui en sont faites, les points de
ponction varient, mais sont toujours en dehors du relief
du sphincter externe signalé par les plis radiés de l’anus.
Ils peuvent se situer aux quatre points cardinaux ou en
deux points sur la fosse ischio-anale droite et gauche, l’un
antéro-externe et l’autre franchement postérieur ou en un
seul point de chaque côté en postéro-externe (schéma).
Dans les deux derniers cas, il faut une aiguille de 10 cm. La
technique utilisant deux points de pénétration dans
chaque fosse ischio-rectale sera décrite ici.
L’infiltration est débutée après avoir placé l’aiguille en
dedans de la tubérosité ischiatique. Pour se faire, l’aiguille est
avancée jusqu’à la perception du contact osseux, légèrement
retirée et réenfoncée en dedans et en avant sur 10 à 20 mm.
Une aspiration vérifie l’absence de reflux sanguin du
pédicule vasculaire. À ce niveau, l’infiltration de 5 à 7 ml de
produit anesthésique vise le nerf pudendal ou ses branches,
soit le nerf rectal inférieur et le nerf périnéal (Fig. 2).
L’aiguille est ensuite orientée en avant et plus superficiellement pour infiltrer 5 ml de façon traçante. L’aiguille est alors
retirée afin de la réorienter par le même point d’entrée vers la
pointe du coccyx en glissant juste en avant, presque à son
contact pour ne pas pénétrer dans le rectum. Cinq millilitres
sont infiltrés vers le raphé ano-coccygien de la profondeur
vers la surface pour atteindre les rameaux ano-coccygiens
sensitifs (Fig. 3). Quinze millilitres de la solution d’anesthésique local sont infiltrés de chaque côté, soit la quantité
maximale autorisée. La précaution essentielle est d’aspirer
systématiquement avant chaque injection pour éviter tout
passage intra-vasculaire du produit anesthésique.
L’utilisation d’un neurostimulateur, qui sert à la
réalisation des blocs anesthésiques, facilite le geste et
le rend encore plus fiable. En effet, la neurostimulation
du nerf pudendal ou de ses branches déclenche une
contraction du sphincter anal et permet ainsi son
repérage précis. Après avoir placé une électrode en
dehors du champ opératoire sur la fesse, on relie le fil de
l’aiguille gainée (100 mm) au boı̂tier du neurostimulateur. Une seringue de 15 ml de la solution anesthésique
est raccordée à l’aiguille que l’on purge. Une fois
l’aiguille positionnée en dedans de la tubérosité ischiatique, on établit un courant de faible intensité (inférieur
à 3 mA) afin de détecter le nerf par l’apparition d’une
contraction franche du sphincter anal. Si la stimulation
déclenche une contraction du muscle bulbocaverneux ou
constricteur de la vulve, on est au contact du tronc
pudendal ou de sa branche périnéale et il faut se
repositionner plus en arrière. Il faut donc obtenir une
contraction élective du sphincter anal et une fois qu’elle
est obtenue l’intensité de la stimulation est progressivement abaissée jusqu’à 0,8 mA. Si l’on perd la réponse
motrice, il faut affiner le positionnement de l’aiguille en
augmentant à nouveau temporairement l’intensité. Si, au
contraire, la réponse est maintenue en deçà de 0,4 mA, il
faut retirer très légèrement l’aiguille pour ne pas risquer
de léser le nerf. Après avoir fait le test d’aspiration, on
infiltre 1 ml de la solution anesthésique. Aussitôt la
contraction sphinctérienne disparaı̂t, ce qui confirme
le bon positionnement de l’aiguille. On injecte alors 5 à
7 ml. L’infiltration est poursuivie selon les modalités
précédentes sans stimulation, en particulier en présacrococcygien puisqu’il n’y a plus de branche nerveuse
motrice. La même manœuvre est répétée du côté opposé.
Cette technique simple et rapide (quelques minutes)
nécessite la collaboration de l’anesthésiste et l’absence
de curarisation du patient.
Résultats
Plusieurs études ont démontré que le bloc à visée
analgésique permet une réduction significative de la
douleur postopératoire et de la consommation de morphiniques sur les 12 à 24 heures après une hémorroı̈dectomie
[4-7]. C’est également le cas après hémorroı̈dopexie (ou
opération de Longo) [8, 9] même si le mécanisme de la
douleur dans cette technique fait aussi probablement
intervenir le système autonome par l’agrafage sur la jonction
ano-rectale.
Dans tous les cas, il faut prévenir le patient de la
réalisation de ce geste. Il est prudent de le prévenir également du risque de diffusion temporaire de l’effet anesthésique sur le périnée antérieur et le sexe et de sa réversibilité en quelques heures. Il est nécessaire d’expliquer
au patient et à l’équipe soignante que la sensibilité et
la douleur apparaı̂tront à la levée du bloc, soit dans un
délai variant entre 5 et 12 heures et de prescrire des antalgiques à la demande dès la perception de la disparition
de l’anesthésie locale. L’adjonction de clonidine prolonge
l’analgésie jusqu’à la première selle dans l’étude de Naja
et al. [2].
Le caractère sélectif du bloc neurostimulé permet de
diminuer le risque de dysurie postopératoire [2], à
condition de l’associer aux autres mesures de prévention
comme la miction préopératoire, la restriction des
volumes perfusés et en cas de rachianesthésie la
183
limitation de la quantité d’anesthésique local utilisé et
l’éviction de la morphine intrathécale [10].
4.
Conclusion
La réalisation d’une infiltration ou mieux d’un bloc
analgésique des branches anales du nerf pudendal est
simple, rapide et peu risquée si l’on respecte la technique
d’aspiration-injection. Elle s’applique à toutes les interventions proctologiques hormis les suppurations et les
pathologies virales. Le bloc pudendal contribue à
améliorer le confort postopératoire des patients et
s’intègre donc dans le programme de réhabilitation
postopératoire rapide, voire d’une chirurgie ambulatoire.
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PRATIQUE MÉDICALE / MEDICAL PRACTICE
Traitement médical de l’hypoactivité vésicale
M. de Sèze 1 , P. Grise 2 , M.P. de Sèze 1 , J.-B. Roche 3 , E. Shao 1 , P.-A. Joseph 1
1
Équipe de recherche handicap et système nerveux, unité d’évaluation et de traitement du handicap urinaire, service de Médecine physique
et de réadaptation, CHU Pellegrin, université Victor-Segalen-Bordeaux-II, place Amélie-Raba-Léon, F-33076 Bordeaux Cedex, France
2
Service d’urologie, CHU de Rouen, 1, rue de Germont, F-76031 Rouen, France
3
Département d’urologie, CHU Pellegrin, université Victor-Segalen-Bordeaux-II, F-33076 Bordeaux Cedex, France
Résumé : L’hypoactivité du détrusor, définie par l’existence
d’une contraction détrusorienne, réduite en force ou en
durée déterminant une vidange vésicale prolongée ou un
défaut de vidange complète dans un temps habituel [1,2],
demeure un problème thérapeutique imparfaitement
résolu. Les différentes classes pharmacologiques ayant
fait l’objet d’application thérapeutique dans l’hypoactivité
du détrusor (HOD), agonistes cholinergiques, anticholinestérasiques et prostaglandines visent à renforcer les
capacités contractiles cholinodépendantes du détrusor. La
médiation non adrénocholinergique du réflexe mictionnel
n’a pas fait l’objet de développement thérapeutique dans
cette indication. Cette mise au point corrige les résultats
des travaux cliniques contrôlés évaluant l’intérêt clinique
et/ou urodynamiques des agents cholinomimétiques dans
l’hypoactivité vésicale (HOV). Leur pertinence thérapeutique, préventive ou curative, en monothérapie n’apparaı̂t
pas établie et l’intérêt de la combinaison d’agents
pharmacologiques reste à confirmer.
Mots clés : Vessie hypo-active – Acontractilité vésicale –
Cholinergiques – Cholinomimétiques – Anticholinestérasiques – Prostaglandines
Pharmacological treatment of underactive bladder
Abstract: Detrusor underactivity, defined as contraction
of reduced strength or duration resulting in prolonged
bladder emptying or failure to achieve complete bladder
emptying within a normal time frame [1,2], remains
challenging for pharmacological management. Several
pharmacological agents have been proposed in the
treatment of this condition, all targeting the cholinergic
component of detrusor contractility. These include direct
and indirect cholinergic drugs, anticholinesterasic agents
and prostaglandin. Non-adrenocholinergic control of the
micturition reflex is given little importance in the
medical treatment of detrusor underactivity. This literature review focuses on data from controlled studies
Correspondance : E-mail : [email protected]
evaluating its pharmacological treatment. The preventive
or curative efficacy of cholinomimetic drugs has not
been established, and the effectiveness of combined
therapy remains to be proved.
Keywords: Underactive bladder – Acontractile bladder –
Cholinergics – Cholinomimetics – Anticholinesterasic –
Prostaglandin
Introduction
L’hypoactivité du détrusor (HOD) est définie par l’existence d’une contraction détrusorienne réduite en force ou
en durée déterminant une vidange vésicale prolongée ou
un défaut de vidange complète dans un temps habituel
[1,2]. L’hypoactivité vésicale (HOV) n’est pas définie dans
la terminologie de l’Internationale Continence Society
[1,2]. Par analogie à l’hyperactivité vésicale et du détrusor,
on pourrait considérer que le terme « vésical » fasse
référence à une situation clinique et le terme « détrusor »
à une caractéristique urodynamique. Ces distinctions
sémantiques n’ont cependant pas été prises en compte
dans la littérature, et les travaux consacrés au traitement
médical de l’HOV mêlent indifféremment caractéristiques
cliniques et urodynamiques.
Le traitement pharmacologique de l’HOV demeure un
challenge thérapeutique en ce début du XXIe siècle. Si l’on
dispose aujourd’hui de nombreux moyens oraux, endovésicaux ou intradétrusoriens efficaces pour réduire
l’activité du détrusor lors d’HAD, peu d’agents apparaissent en revanche susceptibles de renforcer suffisamment
le détrusor hypocontractile pour permettre une miction
complète et sans effort. Afin d’éviter les conséquences
uronéphrologhiques délétères des mictions par poussées
abdominales ou par manœuvre de Crédé, la prise en
charge thérapeutique de l’HOD repose majoritairement
sur le cathétérisme vésical, et dès que possible sur
l’autosondage intermittent. Des incapacités sensorimotrices, cognitives ou psychologiques peuvent limiter le
185
recours à ces derniers et conduire à une impasse
pharmacologique imposant le recours à des moyens
thérapeutiques chirurgicaux plus invasifs.
L’objectif de cette mise au point sera de présenter les
différentes classes pharmacologiques ayant fait l’objet
d’études cliniques contrôlées dans l’HOV, et d’en exposer
les principaux résultats en discutant leur pertinence
thérapeutique.
destinées à renforcer la contraction cholinodépendante
du détrusor comprennent schématiquement des agents
agonistes directs de l’Ach sur les récepteurs muscariniques, des agents agonistes indirects favorisant la disponibilité de l’Ach auprès des récepteurs muscariniques
et des agents anticholinestérasiques visant à s’opposer à
l’hydrolyse de l’Ach par l’acétylcholinestérase [7,8].
Méthodologie
Support théorique du traitement médical de l’HOV
La physiopathologie de l’HOV peut schématiquement
impliquer deux mécanismes principaux : un défaut du
versant afférent du réflexe mictionnel, intégrant toute
perturbation du circuit impliqué dans la transduction du
signal entre libération du neurotransmetteur procontractile et atteinte de la cible effectrice musculaire, et/ou
une diminution des capacités de l’effecteur détrusorien à
répondre à cette stimulation.
Au sein des neurotransmetteurs impliqués dans la
contraction du détrusor, l’acétylcholine (Ach) est le plus
anciennement connu et a été la principale cible des essais
pharmacologiques destinés à moduler la contractilité du
détrusor. La fixation de l’Ach sur certains sous-types de
récepteurs muscariniques, principalement M2 et M3 dans
l’espèce humaine, est à l’origine d’une cascade biochimique menant à la contraction du détrusor [3,4]. La
fixation de l’Ach sur les récepteurs M3 stimule la
phospholipase C, engendrant successivement une hydrolyse de l’inositol phosphate, une augmentation du taux
intracellulaire de calcium par ouverture des canaux
membranaires et libération des stocks intracellulaires,
une phosphorylation des filaments actine-myosine par
une kinase Ca-dépendante et l’interaction de ces filaments
menant à la contraction directe du détrusor [3,5]. La
stimulation des récepteurs M2 renforce l’effet contractile
direct de la stimulation du sous-type M3, par mise en jeu
de l’adénylcyclase inhibant l’augmentation d’AMPc
médiée par les récepteurs b-adrénergiques, et s’opposant
ainsi à la relaxation adrénergique du détrusor [3,5].
Il est aujourd’hui parfaitement établi que la neurotransmission de la contraction du détrusor ne se limite pas à
l’Ach, mais implique également nombre de médiateurs non
adrénocholinergiques, au sein desquels l’ATP et les
récepteurs purinergiques P2X jouent un rôle considérable
à la fois à l’échelon muqueux et urothélial [3,4,6]. D’autres
neurotransmetteurs tels que la sérotonine et les récepteurs
5-HT, le vaso intestinal peptide (VIP), la substance P (SP),
l’histamine ou les prostaglandines participent également à
la neurotransmission autonome intrinsèque de l’appareil
vésicosphinctérien [4,6].
En dépit du rôle majeur accordé à la médiation non
adrénocholinergique des voies afférentes et efférentes du
réflexe mictionnel, la principale cible pharmacologique
du traitement médical de l’HOV demeure aujourd’hui la
voie cholinergique. Les approches pharmacologiques
Notre recherche documentaire a reposé sur une interrogation systématique des banques de données Medline, Embase
et Pascal dont l’indexation comprenait un ou plusieurs des
mots clés « vessie hypoactive, acontractilité vésicale, pharmacologie et vessie hypoactive, [cholinergiques-anticholinestérasiques-cisapride-prostaglandines] » et de leur
traduction anglo-saxonne. Elle était complétée par une
analyse de la « littérature grise » représentée par les
ouvrages et rapports de congrès abordant cette thématique.
Parmi les études cliniques documentant l’intérêt curatif ou
préventif de ces différents moyens pharmacologiques dans
l’HOV, seuls les résultats des études contrôlées randomisées
et des études de cohortes de grande échelle seront ici
rapportés (Tableau I).
Agents pharmacologiques de l’HOV
Cholinergiques
L’Ach étant peu sélective sur l’appareil urinaire et rapidement hydrolysée, le recours à ses agonistes a été préféré à
fin thérapeutique [9]. Les agonistes directs de l’Ach
comprennent essentiellement le carbachol et le bétanéchol
chloride (BC). Si le premier possède in vitro l’effet
procontractile le plus puissant, le second présente une
meilleure sélectivité sur le détrusor et a été le plus étudié
chez l’homme [9,10]. Le BC est une cholinester de synthèse
dont les caractéristiques chimiques et pharmacologiques
sont proches de l’Ach, mais qui résiste à la dégradation par
l’acétylcholinestérase [8,9,11]. Son action principale s’exerce
sur les récepteurs muscariniques des cellules effectrices
parasympathiques postganglionnaires avec un faible effet
nicotinique. Cette activité possède une sélectivité relative
pour la vessie et l’appareil digestif avec un moindre tropisme
cardiaque et ganglionnaire [11]. Au niveau vésical, le BC se
lie principalement aux récepteurs M3, simulant l’effet
procontractile de l’Ach sur ces derniers [8,9,11].
In vitro dans l’espèce humaine, le BC génère une
augmentation dose-dépendante de la tension isométrique
du détrusor et une majoration de l’amplitude et de la
fréquence des contractions rythmiques spontanées du
détrusor [7,9].
En application thérapeutique, la traduction clinique
et/ou urodynamique de cet effet expérimental dans l’HOV
reste néanmoins débattue, et les résultats des études
cliniques contrôlées, évaluant l’intérêt curatif (6 études)
186
Tableau I. Revue des essais pharmacologiques contrôlés dans l’HOV
Auteur, anné e
[ré fé rence]
(niveau
de preuve)
Moyens pharmacologiques
Indication (I) et critè res
d’é valuation (CE)
Effectif
Ré sultats
Barett, 1981
[12], (2b)
Bétanechol 25, 50 or 100 mg versus
placebo Prise unique orale, une
heure avant BUD
48
Aucune différence significative
entre les groupes
Burger, 1997
[13], (2b)
249
Aucune différence significative
entre les groupes
Gottesman,
1989 [14], (2b)
Carbachol diazépam 2 mg chacun
versus alfuzosin 2,5 mg versus
placebo Prise unique orale
Bétanéchol 10 mg et/ou midazolam
versus placebo Injection unique SC
18
69 % reprise miction sous BC,
avec ou sans midazolam versus
0 % sous placebo
Riedl, 2002
[15], (1b)
Bétanéchol 25 mg 4/j versus
placebo Oral, 2 14 j, plan croisé
16
Hindley, 2004
[16], (1b)
Bétanéchol 50 mg 4/j oral + PGE2
vés 1/sem versus placebo,
6 sem
Bétanéchol 20 mg 3 ou
distigmine 5 mg 3 versus urapidil
30 mg 2, versus combinaison
des 2 Oral, 4 sem
Bétanéchol 10 mg 3/j, et/ou
cisapride 10 mg 3/j versus placebo Oral, 1 mois
I : curative, rétention
chronique ni neurogène ni
obstructive CE : volume uriné,
RPM, Qmax, PD
I : curative, rétention aiguë
post-op CE : vidange vésicale
deux heures après traitement
I : curative, rétention aiguë
post-chir CE : pourcentage
récupération mictions
spontanées
I : curative, rétention
chronique neurogène
CE : RPM, PD, Qmax
I : curative, rétention urinaire
chronique CE : RPM
I : curative, rétention urinaire
chronique CE : RPM, IPSS,
Qmax–moy
119
I : préventive, rétention
postopératoire. CE: RPM, CCM,
Qmax–moy, PQ
79
I : préventive, rétention
postopératoire. CE : durée
drainage, hospitalisation, RPM
I : préventive, rétention
post-partum. CE : drainage,
RPM
I : curative, rétention
postopératoire CE : drainage, Q
I : préventive, rétention
postopératoire CE : RPM
40
# Significtive RPM, Qmax "
versus placebo Tendance " PD,
8/16 reprises mictions
# Significative RPM sous BC et
pas sous placebo, mais
différence RPM à l’inclusion
Aucune différence significative
sous monothérapie par rapport
à inclusion Bénéfice significatif
du traitement combiné
" RPM dans groupe placebo "
CCM, # PD, # Q moins
importante dans groupes
traités Monothérapie =
bithérapie
Amélioration significative tous
CE sous BC
Yamanishi,
2004 [17], (2b)
Madeiro, 2006
[18], (1b)
Kemp, 1997
[19], (2b)
Bétanéchol 50 mg 3, à partir j3
post-op, versus pas de traitement
Flemming, 1957
[20], (2b)
Bétanéchol 15 mg 6/j, 24 h versus
pas de traitement
Shah, 1983 [27],
(2b)
Savona-Ventura, 1991[28],
(2b)
Wyndaele, 1995
[32], (1b)
Steele, 2001
[33], (2b)
Wagner, 1985
[37], (1b)
Distigmine, 0,5 mg/j versus
placebo IM, 4 j
Distigmine, 5 mg/j oral, versus
phénoxybenzamine oral versus
PGF i.v, versus placebo, 1 j.
Cisapride, 10 mg4 vx placebo
Oral, 4 sem
Cisapride, 20 mg Prise unique
orale
PGE2, 0,5/2,25 mg, i.vés, versus
placebo, 2 j
Bergman ,1992
[38], (1b)
PGE2, 10 mg, i.vés ou PGF2, 50 mg,
rectal versus placebo i.vés
Bergman, 1993
[39], (1b)
PGE2 3 mg, vaginal versus PGF2
5 mg i.vés versus placebo i.vés
jusqu’à reprise miction
PGE2 1,5 mg, i.vés versus pas de
traitement jusqu’à reprise miction
Grignaffini,
1998 [40], (2b)
I : curative, HOV médullaire
CE : RPM, CCM, VR, PD
I : volontaire saine CE : RPM,
PQ
I : curative, rétention
postopératoire CE : RPM,
CCM, compliance, PU
I : préventive, rétention
postopératoire CE : durée
drainage
I : curative, rétention
postopératoire CE : durée
drainage, morbidité péri-op
I : curative, rétention
postopératoire CE :
pourcentage patients drainés,
RPM, durée drainage,
morbidité péri-op
19
1975
Aucune différence significative
entre les groupes
93
Aucune différence significative
entre les groupes
" RPM dans groupe traité
100
21
20
28
Aucune différence significative
entre les groupes
Aucune différence significative
entre les groupes
Aucune différence significative
entre les groupes
50
Aucune différence significative
entre les groupes
24
Réduction durée drainage et
moindre morbidité groupe PG
vaginal
Aucune différence significative
entre les groupes, excepté #
nombre de patients en rétention
supérieur à 3 jours et de leur
durée d’hospitalisation sous
PGE2.
110
BUD : bilan urodynamique ; CE : critères d’évaluation ; CCM : capacité cystomanométrique maximale ; HOV : hypoactivité vésicale ;
I : indication ; IM : intramusculaire ; i.vés : intravésical ; j : jour ; Q : débit urinaire ; max : maximum ; moy : moyen ; PD : pression
du détrusor ; PG : prostaglandines ; PQ : PD à Qmax ; PU : pression urétrale ; RPM : résidu post-mictionnel ; sem : semaine ;
VR : volume réflexe. Niveaux de preuve établis selon les recommandations d’Oxford Evidence-Based Medicine [49].
187
[12-17] ou préventif (3 études) [18-20] du BC dans l’HOA,
ne permettent pas d’établir sa pertinence thérapeutique
(Tableau I).
À visée curative et en prise unique, l’intérêt du BC
oral, isolé ou en association, n’est pas démontré [12,13].
Barett ne rapporte aucun intérêt significatif d’une prise
unique de BC oral (25, 50 ou 100 mg) par rapport au
placebo sur la qualité clinique (volume uriné, résidu
postmictionnel [RPM]) et urodynamique (pression du
détrusor [PD] à 100 ml et PDmax, débits urinaires
maximum et moyen [Qmax et moy], profilométrie urétrale)
de la vidange vésicale dans les trois premières heures
suivant sa prise chez 48 patientes en rétention chronique
d’urine (RPM > 125 ml) par HOV non neurogène ni
obstructive [12]. En association à du diazépam (2 mg), la
prise unique de carbachol (2 mg) n’apparaı̂t pas influencer
non plus davantage qu’un placebo la qualité de la miction
dans les deux heures suivant la prise de 249 patients en
postopératoire immédiat [13]. Par voie sous-cutanée (SC),
un effet bénéfique significatif du BC par rapport au placebo
sur la récupération des mictions après rétention aiguë
d’urine postopératoire a été rapporté [14]. Dans ce travail
réalisé chez 38 patients en rétention aiguë d’urine durant
les 12 premières heures suivant une chirurgie anorectale
recevant une à deux injections de 10 mg de BC ou un
placebo, Gottesman et al. rapportent une reprise des
possibilités de mictions spontanées dans l’heure suivant
l’injection chez 69 % des 18 patients ayant reçu du BC,
contre aucun des patients du groupe placebo qui nécessitèrent tous un drainage urinaire par cathétérisme [14].
À visée curative et en prise prolongée, les quelques
travaux contrôlés comparant l’intérêt du BC oral,
administré seul ou en association à des agents impactant
la contractilité du détrusor ou les résistances urétrales à
celui d’un placebo suggèrent la supériorité du BC,
particulièrement en combinaison thérapeutique, mais il
s’agit d’études menées sur de petits effectifs de patients
dont les qualités méthodologiques sont souvent contestables [15-17].
En monothérapie, un travail contrôlé randomisé
versus placebo et en plan croisé suggère que le BC oral
puisse améliorer la vidange vésicale et favoriser la reprise
des mictions spontanées dans l’HOA neurogène [15]. Dans
cette étude, 16 patients neurologiques (neuf femmes, sept
hommes), présentant une HOA définie par une PDmax au
Qmax inférieure à 20 cm H2O, sans dyssynergie vésicosphinctérienne et drainant leur vessie par autosondages
intermittents ou cathéter sus-pubien, ont été répartis
entre un groupe recevant 25 4 mg de BC oral quotidien
pendant deux semaines, puis deux semaines de placebo et
un groupe recevant la séquence inverse. Les critères
d’évaluation, mesurés en fin de deuxième et de quatrième
semaine une heure après la prise de comprimés,
associaient la mesure du RPM par sondage, le Qmax et la
PD permictionnelle. Dix des 16 patients ont présenté une
amélioration significative des paramètres mictionnels
sous BC par rapport à la période placebo, permettant à
huit d’entre eux de reprendre des mictions spontanées, les
six autres n’ayant été améliorés par aucune des séquences
thérapeutiques. Sur l’ensemble des patients, une réduction significative des RPM et une augmentation significative du Qmax étaient observées sous BC, associées à une
augmentation des PD, sans bénéfice sous placebo [15].
En combinaison thérapeutique, deux travaux contrôlés
plaident également en faveur de l’intérêt curatif du BC dans
la rétention urinaire par HOV [16,17]. Le premier compare
l’intérêt sur la rétention urinaire chronique (RPM > 300 ml)
du BC oral combiné à des prostanglandines (PG) intravésicales par rapport au placebo [16]. Dix-neuf patients
(17 hommes et deux femmes) étaient répartis en un groupe
(neuf patients) recevant 50 4 mg de BC oral par jour et une
instillation hebdomadaire de PGE2 (1,5 mg dans 20 ml de
salé isotonique) pendant six semaines et un groupe
(10 patients) recevant selon les mêmes modalités un placebo
oral et des instillations de sérum salé. Le critère principal
d’évaluation, sur lequel était basée la puissance statistique de
l’étude, était la mesure des RPM par cathétérisme. Les autres
critères d’évaluation comprenaient la qualité de vie, le Qmax
et la PD au Qmax. Au terme du traitement, une diminution
significative du RPM n’était notée que dans le groupe traité
et quatre des neuf patients de ce groupe rapportaient une
amélioration subjective de la vidange vésicale avec réduction
de la fréquence des autosondages. L’amélioration des autres
paramètres d’évaluation était également qualitativement
plus marquée dans le groupe traité, mais ces critères
n’étaient pas évalués statistiquement. L’interprétation de
ces résultats mérite cependant prudence car les deux
groupes différaient significativement à l’inclusion vis-à-vis
du critère principal d’inclusion, avec un RPM plus
important dans le groupe placebo, menant les auteurs euxmêmes à considérer que l’amélioration sous traitement
n’était pas suffisamment pertinente cliniquement pour le
recommander en pratique quotidienne [16].
Le second compare l’intérêt des cholinergiques et des
alphabloquants, administrés en monothérapie ou en
combinaison, sur la rétention urinaire chronique par
HOV [17]. Cent dix-neuf patients présentant une dysurie
et une rétention urinaire chronique par HOV sans
obstacle fonctionnel ou organique à la miction ont été
répartis en trois groupes, recevant respectivement pendant un mois un traitement cholinergique oral seul
(BC 60 mg/j ou distigmine bromide 15 mg/j), alphabloquant seul (urapidil 60 mg/j) ou la combinaison des
deux traitements. Les critères d’évaluation associaient le
score total et les sous-scores vidange-stockage de l’International Prostate Symptom Score (IPSS), les débits
urinaires et le RPM. Seule une réduction significative du
pourcentage d’urines résiduelles, mais non du RPM était
notée sous traitement cholinergique isolé, tandis que la
combinaison des traitements était supérieure aux monothérapies permettant l’amélioration significative de
l’ensemble des paramètres [17].
188
À visée préventive de la rétention urinaire postopératoire, un travail contrôlé versus placebo, mené chez
79 patientes devant subir une hystérectomie pour néoplasie du col utérin, suggère que le BC oral associé ou non
à du cisapride ait un intérêt dans l’HOV postopératoire
précoce [18]. Les patientes étaient réparties en quatre
groupes, recevant respectivement trois prises quotidiennes orales de 10 mg de BC, 10 mg de cisapride,
l’association des deux ou un placebo durant le mois
suivant leur intervention. Les critères d’évaluation
associaient RPM et paramètres urodynamiques (capacité
cystomanométrique maximale [CCM], volume de perception des besoins, Qmax-moy, étude pression débit et
profilométrie) avant et au terme d’un mois de traitement.
Alors que ces paramètres étaient identiques dans les
quatre groupes à l’inclusion, le premier besoin était perçu
à plus haut volume de remplissage dans le groupe placebo,
et les groupes traités présentaient une moindre augmentation de la CCM postopératoire et de plus fortes PD
mictionnelles que le groupe placebo à la seconde
évaluation. La diminution des débits urinaires, présente
dans tous les groupes, n’était significative que sous
placebo et seules les patientes de ce groupe présentaient
une augmentation significative du RPM. L’influence des
traitements combinés était superposable à celle des
monothérapies, excepté un taux majoré d’hyperactivité
du détrusor plus marqué sous bithérapie [18].
Les deux autres études contrôlées, menées versus
abstention thérapeutique et non versus placebo, rapportent
des résultats divergeant sur l’intérêt préventif du BC dans
la rétention urinaire postopératoire ou postobstétricale
[19,20]. La première, menée chez 40 patientes ayant subi
une chirurgie utérine pour néoplasie du col, suggère l’intérêt
préventif d’un traitement oral précoce par BC [19]. Dans ce
travail, les patientes étaient réparties entre un groupe
« préventif » recevant au troisième jour postopératoire
150 mg/j de BC en trois prises (16 patientes) et un groupe
« curatif » ne recevant de BC que s’il persistait au dixième
jour postopératoire un RPM supérieur à 50 ml (24 patientes).
Les critères d’évaluation, représentés par la durée du
drainage urinaire postopératoire, de l’hospitalisation et de
la disparition des RPM apparaissaient tous significativement
plus améliorés dans le groupe « préventif » que « curatif »,
avec des valeurs moyennes respectives de 9,6 versus
13,3 jours, 15,5 versus 18,6 jours, et 8 versus 13 jours et
18,8 versus 25 % dans ces deux groupes [19].
La seconde est l’historique série de Flemming comprenant 1975 femmes en post-partum immédiat, dont 821
recevaient 15 mg de BC oral un quart d’heure après la
délivrance, puis toutes les quatre heures pendant 24 heures,
et 975 n’en recevaient pas, qui n’objectivaient aucune
différence du taux de rétention urinaire nécessitant un
sondage urinaire et des RPM entre les deux groupes à la
vingt-quatrième heure [20].
Enfin, les quelques études cliniques comparant
l’influence clinique ou urodynamique de différentes
voies d’administration de BC rapportent des résultats
divergents ne permettant pas de statuer sur la supériorité
d’efficacité de l’une ou l’autre des voies [11,21]. Tout au
plus, elles corroborent les données pharmacocinétiques
d’un délai d’action plus rapide et bref de la voie souscutanée par rapport à la voie orale [11,21].
Anticholinesté rasiques
Leur administration est destinée à s’opposer à l’hydrolyse
de l’Ach induite par l’acétylcholinestérase pré- et postjonctionnelle et renforcer ainsi l’impact de l’Ach sur les
récepteurs muscariniques pour favoriser la réponse
contractile du détrusor [22]. Dans les conditions expérimentales, l’administration d’inhibiteurs de l’acétylcholinestérase s’est révélée susceptible d’augmenter in vitro les
réponses contractiles de lambeaux de détrusor humains
et animaux à la stimulation nerveuse et d’améliorer
l’efficacité de la vidange vésicale chez l’animal anesthésié
[23,24].
Quelques travaux ouverts supportent l’intérêt clinique
(IPSS, qualité de vie, RPM) ou urodynamique (débits
urinaires, contractilité du détrusor) de la distigmine orale
(15 mg/j pendant un mois) chez les patients présentant
une HOV symptomatique (dysurie, rétention, infections
urinaires) sans obstruction sous-vésicale [25] ou après
résection transurétrale de prostate [26].
Les rares études contrôlées, évaluant l’intérêt curatif
ou préventif des anticholinestérasiques sur la rétention
aiguë d’urine, ne plaident cependant pas pour cette
modalité thérapeutique [27,28] (Tableau I). L’administration intramusculaire quotidienne pendant quatre jours
de 0,5 mg de distigmine n’influence pas plus qu’un
placebo les débits urinaires et la nécessité de recourir au
drainage vésical après prostatectomie [27], et des effets
paradoxaux à type de majoration du résidu postmictionnel, significativement plus importants que sous placebo,
ont même été rapportés après administration préventive
orale de distigmine (5 mg/j) chez 100 femmes opérées de
prolapsus génital [28].
Cisapride
Le cisapride est un agoniste des récepteurs 5-HT4 dénué
d’effets cholinergiques directs, mais susceptible d’améliorer la contractilité musculaire lisse en favorisant d’une
part la libération d’Ach par les terminaisons nerveuses
cholinergiques postganglionnaires, et en activant le cycle
de l’inositol phosphate et du diacylglycérol, favorisant
la libération intracellulaire de calcium et la réponse
contractile musculaire conséquente [29].
Longtemps proposée pour favoriser la reprise mictionnelle lors d’HOV, la validation clinique de son
efficacité n’a jamais été établie. Si quelques études
ouvertes mentionnent son intérêt [30,31], il n’est pas
confirmé par les rares travaux contrôlés versus placebo
189
[32,33] (Tableau I). Wyndaele et Van Kerrebroeck ne
rapportent ainsi aucune modification significative des
paramètres cystomanométriques (CCM, sensibilité vésicale, compliance, volume réflexe, PDmax) ni des RPM chez
21 patients blessés médullaires complets, à distance du
choc spinal, recevant de manière randomisée et en double
insu 40 mg de cisapride oral (en 4 prises/jour) ou un
placebo pendant quatre semaines [32]. Dans un travail en
plan croisé mené chez 20 femmes volontaires, la prise
unique de 20 mg de cisapride n’apparaı̂t pas influencer
non plus davantage qu’un placebo la vidange vésicale
(PD/Qmax, RPM) et seule une réduction intra-individuelle
de la CCM était notée sous cisapride sans traduction
clinique [33].
Enfin, outre l’absence de preuve de son efficacité,
l’implication possible du cisapride dans la survenue
d’effets cardiovasculaires plaide en la défaveur de sa
recommandation en pratique quotidienne dans l’HOV
[34].
Prostaglandines
Trois types de prostaglandines apparaissent susceptibles
d’influencer l’activité contractile du bas appareil urinaire
chez l’animal, la PGE2 et la PGI2 exerçant majoritairement
un effet contractile sur le détrusor et relaxant sur le col et
l’urètre et la PGF2a contractant détrusor et urètre [4,35].
Les mécanismes de cette action contractile pourraient
mettre en jeu un effet direct sur la musculature lisse
vésicale, comme le suggère l’augmentation de l’inositol
triphosphate et du calcium intracellulaire après stimulation des récepteurs EP1 par les PGE2, et une action
indirecte sur la neurotransmission impliquant, notamment une augmentation de la libération urothéliale et
sous-urothéliale de tachykinines initiant le réflexe mictionnel par interaction sur les récepteurs NK1 et NK2
[4,36].
Si ce profil de réponse favorable à la vidange vésicale a
été rapporté chez l’animal, les résultats des rares études
contrôlées évaluant l’intérêt des PG dans l’HOV chez
l’homme sont globalement décevants (Tableau I). À visée
curative, chez la femme (28 patientes) en rétention d’urine
après colporaphie antérieure, les instillations endovésicales de PGE2 (0,75 à 2,25 mg) n’influencent pas davantage
qu’un placebo les aspects cliniques et urodynamiques de
la miction [37]. À titre préventif, l’administration rectale
ou vésicale de prostaglandine (respectivement 10 mg de
PGE2 et 50 mg de PGF2) en postopératoire immédiat de
chirurgie vaginale (50 patientes) ne modifie pas plus
qu’une instillation de sérum salé la durée de drainage
urinaire postopératoire, maintenu dans cette étude
jusqu’à ce que les RPM soient inférieurs à 50 ml [38]. Le
même auteur rapporte en revanche chez 24 femmes en
postopératoire immédiat d’hystérectomie basse, recevant
chaque jour jusqu’à reprise des mictions des prostaglandines par voie vaginale (3 mg de PGE2), vésicale (5 mg de
PGF2) ou une instillation vésicale de sérum salé, que la
récupération des mictions complètes permettant l’arrêt
du drainage urinaire était plus rapide dans le groupe traité
par PGE2 vaginales et s’accompagnait d’une moindre
morbidité périopératoire [39]. L’intérêt modeste des PGE2
sur la rétention d’urine postopératoire a également été
rapporté, comparativement à l’absence de traitement,
chez 110 femmes recevant (n = 50) ou non (n = 60), à
partir du quatrième jour postchirurgie urogynécologique
et jusqu’à ce que le RPM soit inférieur à 50 ml, une
instillation de PGE2 [40]. Seule une réduction du pourcentage de patients, ayant une rétention supérieure à trois
jours, et la durée d’hospitalisation de ces derniers
apparaissait significativement différente en faveur du
groupe traité (nombre d’instillations impécisé), sans
différence significative des autres paramètres (prévalence
RPM, comorbidité, durée d’hospitalisation) [40].
La supériorité de leur association au BC oral par
rapport au placebo dans la rétention urinaire chronique
par HOV a été évoquée plus haut sur une série limitée
de patients et à court terme [16]. La faisabilité de ce
traitement combiné, imposant des instillations hebdomadaires, et le caractère très inconstant du bénéfice limitent
son intérêt fonctionnel.
Discussion
Au total, au vu des données actuellement disponibles, il
apparaı̂t difficile de statuer sur la pertinence thérapeutique des agents cholinergiques et des prostaglandines,
tout au moins en monothérapie, dans la rétention urinaire
et la dysurie induite par une HOV.
L’hétérogénéité des populations étudiées, au regard de
l’étiopathogénie de l’HOV, de sa durée d’évolution et des
critères cliniques ou urodynamiques retenus dans la
définition de l’HOV participe probablement à la discordance des résultats sus-cités.
Il est concevable que, si les cholinomimétiques sont
dotés de capacité à renforcer la contractilité vésicale, cet effet
dépende pour partie d’une augmentation de la contraction
cholinodépendante d’un détrusor ayant conservé des
possibilités de réponse contractile à une telle stimulation
[24]. Il est ainsi possible que si l’HOA relève principalement
d’un dysfonctionnement myogène, c’est-à-dire d’une difficulté du détrusor lui-même à répondre à une stimulation
chimique ou mécanique, la surstimulation de la voie
cholinergique est moins capable de renforcer la contractilité
musculaire. La participation respective de ces deux composantes, défaut de stimulation cholinergique et facteur
myogène, n’a quasiment pas été considérée dans les études
sus-citées et apparaı̂t difficile à évaluer en pratique
quotidienne. Certains auteurs ont cependant proposé des
tests préthérapeutiques visant à évaluer la probabilité de
réponse aux cholinergiques [41-43]. Les plus anciens,
représentés par les tests de sensibilisation aux cholinergiques oraux et injectables, ne sont guère plus utilisés en
190
raison de leur faible reproductibilité et de leur médiocre
tolérance [41]. Plus récemment, un test visant à graduer les
capacités résiduelles de contraction du détrusor aréflexique
a été proposé par Riedl et al., dans l’optique d’identifier les
sous-populations de patients les plus susceptibles de tirer un
bénéfice des agents cholinergiques oraux [42]. Il consiste à
évaluer les modifications de pression du détrusor induite
par une instillation intravésicale de BC (20 mg de BC dilué
dans 150 ml salé 0,3) sous iontophorèse électromotivée [42].
Le test est considéré positif si une augmentation de la
pression vésicale d’au moins 20 cm H2O est notée durant
l’instillation [42]. L’auteur a appliqué cette procédure à
45 patients (25 femmes et 20 hommes) présentant une
aréflexie du détrusor, dans un contexte neurogène (26
patients), de dilatation vésicale chronique (11 patients), de
rétention aiguë d’urine (trois patients) ou d’HOV idiopathiques (cinq patients). Il rapporte, d’une part, la forte
influence du contexte étiologique sur la typologie des
réponses au test et, d’autre part, la valeur prédictive de ce
test sur l’efficacité ultérieure d’un traitement oral par BC. Le
taux de réponse positif au test vésical apparaissait ainsi
maximal chez les patients neurologiques (92 % de tests
positifs, gain moyen 34 cm H2O) et le groupe rétention
aiguë-idiopathique (87,5 % de tests positifs, gain moyen de
28 et 38 cm H2O respectivement), tandis que seuls 27 % des
patients aux antécédents de dilatation vésicale chronique
avaient une augmentation des pressions du détrusor dont la
valeur moyenne n’atteignait pas le seuil de positivité du test
(3 cm H2O en moyenne). Lorsqu’il fut proposé à 15 patients
de cette série, un traitement par BC oral (25 mg 4/j
pendant six semaines), le pourcentage de patients présentant une amélioration de la vidange vésicale était significativement plus important dans le sous-groupe de patients
ayant préalablement eu un test intravésical positif que
négatif. Neuf des 11 patients (82 %) ayant eu un test
intravésical positif ont recouvré des mictions volontaires
sous traitement par BC oral contre aucun de ceux ayant eu
un test intravésical négatif, conférant ainsi au test intravésical la possibilité de prédire la probabilité de succès chez
86,7 % des patients (13/15) avec une sensibilité de 100 % et
une spécificité de 67 % [42]. L’auteur suggère que 1es profils
de réponse au test traduise la participation de mécanismes
physiopathologiques différents de l’HOV. Les réponses
positives indiqueraient une préservation des mécanismes
de transduction chimicomécanique entre les récepteurs et
l’effecteur musculaire, et la forte probabilité de succès dans
cette sous-population plaiderait pour le recours en première
intention d’un traitement pharmacologique oral dans
l’HOV. Les réponses négatives suggèreraient un dysfonctionnement musculaire ou intermusculaire rendant peu
probable une restauration pharmacologique de la contractilité vésicale et incitant à proposer d’emblée des moyens
thérapeutiques non pharmacologiques comme le cathétérisme urétral [42].
Un second test reposant sur une exploration de la
sensibilité vésicale a été proposé par de Wachter dans
l’optique de prédire l’intérêt thérapeutique du BC dans
l’HOV [43]. Il s’appuie sur l’évaluation des seuils de
perception de la distension vésicale et de la stimulation
électrique intravésicale avant et après injection souscutanée de BC [43]. Une élévation du seuil de perception
électrique après injection de BC augmenterait la probabilité de réponse à un traitement ultérieur par BC souscutané. Chez 18 patientes en rétention urinaire chronique
par HOA, l’auteur rapporte que les 61 % de patientes dont
la vidange vésicale s’améliorait sous traitement par BC
injectable (5 mg/j pendant dix jours) présentaient de
manière contemporaine une augmentation du seuil de
perception électrique, tandis qu’il ne variait pas chez
celles réfractaires au traitement par BC [43]. Il n’existait
cependant pas de groupe témoin dans cette série, et
l’influence des injections de placebo sur les seuils de
sensibilité vésicale n’y est pas évoquée [43].
Il est possible que la plus large utilisation de ces tests
avant l’initiation d’un traitement cholinergique améliore
la sélection des indications et aide à préciser la place à
accorder aux agents cholinomimétiques dans l’HOV. Ces
tests nécessitent cependant un appareillage spécifique,
limitant leur faisabilité en pratique quotidienne.
L’intérêt des traitements combinés associant une
potentialisation de la tension du détrusor et une diminution des résistances urétrales mérite d’être confirmé sur
de plus grandes séries de patients dont on contrôlerait
l’homogénéité des critères d’inclusion et d’évaluation.
L’intérêt théorique d’une telle association est conforté par
la démonstration de l’impact urétral des agents cholinomimétiques. Une augmentation des pressions urétrales
dans les régions correspondant aux sphincters interne et
externe de l’urètre a été rapportée après administration
sous-cutanée de BC [2 7,44,45]. Elle est attribuée à l’impact
des agonistes cholinergiques directs sur les récepteurs
muscariniques urétraux, notamment de la couche circulaire de l’urètre [7,44,45]. Il est possible que cet effet
procontractile urétral, opposé à la vidange vésicale, soit
un des facteurs limitant l’intérêt clinique des cholinergiques dans l’HOV, mais l’influence de l’urètre sur la
réponse au traitement cholinergique n’est qu’exceptionnellement notifiée dans les études sus-citées.
En dépit de la reconnaissance du rôle majeur joué par
des neurotransmetteurs non adrénocholinergiques dans
la contraction du détrusor, la modulation pharmacologique des voies purinergiques, sérotoninergiques et
peptidergiques, n’a pas fait l’objet de développement
marquant dans l’HOV et reste confinée aujourd’hui à un
stade préclinique. On pourrait concevoir qu’une modulation pharmacologique des myofibroblastes de la paroi
vésicale, dont les capacités de conduction d’influx
émanant du système nerveux central et d’activité de
type pacemaker autonome de l’activité contractile du
détrusor est mieux identifiée [46,47], soit une cible
intéressante dans l’HOV. Une telle modulation des
myofibroblastes pourrait être assurée par des agents tels
191
l’ATP, le NO ou des agents influençant le pH urinaire
[47,48]. Il est probable que les cibles urothéliales et
myofibroblastiques ouvriront de nouvelles perspectives
thérapeutiques pour moduler la contractilité du détrusor
dans les prochaines années.
Conclusion
La place des agents cholinergiques directs ou indirects
dans l’arsenal thérapeutique de l’HOV reste aujourd’hui
marginale. Il est possible que dans une population
sélectionnée de patients présentant une HOA isolée,
dont on maintiendrait parallèlement de faibles résistances
urétrales par pharmacologie ou chirurgie et dont le
détrusor conserverait des capacités contractiles, il soit
possible de renforcer pharmacologiquement la contractilité du détrusor. Leur pertinence thérapeutique dans ces
indications spécifiques n’est pas précisée aujourd’hui.
Une alternative serait de renforcer les composantes non
adrénocholinergiques de la contraction du détrusor. C’est
peut-être un des challenges thérapeutiques de ces
prochaines années.
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DOI 10.1007/s11608-007-0125-1
©
RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS
Recommandations pour le suivi des vessies neurologiques
dans la sclérose en plaques
M. de Sèze 1,6 , A. Ruffion 2 , P. Denys 3 , B. Perrouin-Verbe 4 , les membres du Genulf 5
1
Unité d’évaluation et de traitement du handicap urinaire, service de médecine physique et de réadaptation,
CHU Pellegrin, place Amélie-Raba-Léon, F-33076 Bordeaux, France
2
Service d’urologie, CHU de Lyon-Sud, chemin du Grand-Revoyet, F-69310 Pierre-Bénite Cedex, France
3
Service de rééducation neurologique, hôpital Raymond-Poincaré, 104, boulevard Raymond-Poincaré F-92380 Garches Cedex,
France ; UFR Paris, ı̂le-de-France ouest, université de Versailles-Saint-Quentin, France
4
Service de médecine physique et de réadaptation, hôpital Saint-Jacques, CHU de Nantes, 83, rue Saint-Jacques
F-44093 Nantes Cedex, France
5
Groupe d’études neuro-urologique de langue française
6
Équipe de recherche handicap et système nerveux, université Victor-Segalen-Bordeaux-II, F-33076 Bordeaux Cedex, France
Résumé : Les troubles vésico-sphinctériens sont extrêmement fréquents dans la sclérose en plaques (SEP).
Leur impact fonctionnel lié aux conséquences des
désordres mictionnels sur la qualité de vie a été
largement souligné dans la littérature et ses modes de
prises en charge sont aujourd’hui bien documentés. Le
préjudice organique des neurovessies de la SEP reste en
revanche sous-estimé, et s’il fut longtemps considéré
modeste, l’analyse de la littérature révèle aujourd’hui que
près d’un patient SEP sur dix est susceptible de présenter
une complication uronéphrologique de sa neurovessie.
Nous avions, dans un premier temps, rapporté les
résultats d’une revue critique de la littérature consacrée
à la morbi-mortalité uronéphrologique et à ses facteurs
de risque dans la SEP réalisée selon la méthodologie
préconisée par la Haute Autorité de Santé (HAS). Celle-ci
suggérait que sept paramètres neuro-urologiques ou
démographiques pouvaient être identifiés comme facteurs de risque de retentissement uronéphrologique dans
la SEP, et envisageait, en fonction de la nature et du
nombre de facteurs de risque présentés, la distinction de
deux sous-populations de patients SEP, l’une à risque et
l’autre sans risque de préjudice uronéphrologique. Dans
cette seconde partie seront présentées les propositions de
recommandations pour la surveillance à moyen et long
terme des neurovessies dans la SEP, pondérées en
fonction des facteurs de risque uronéphrologique des
patients SEP, tels qu’ils ont été établis par le Groupe
d’étude de neuro-urologie de langue française (Genulf)
au terme de cette analyse critique de la littérature.
Mots clés : Vessie neurologique – SEP – Pronostic uronéphrologique – Recommandations – Suivi
Guidelines for the management of neurogenic
bladder in multiple sclerosis patients
Abstract: Micturition disorders are very frequent in
multiple sclerosis (MS) patients and have functional
repercussions that impact daily life and can lead to
morphological damage to the upper urinary tract. The
functional effects of bladder disorders and their management are widely documented, but their organic
consequences remain underestimated, despite occurrence in as much as 10 % of MS patients. In the first
section, we provide a critical review of the literature,
focusing on identifying the risk factors of urinary tract
complications in MS patients. In the second section, we
discuss the recommendations for long-term urological
follow-up, taking into account specific risk factors, as
developed by the Francophone Study Group on NeuroUrology (Genulf) and according to the clinical guidelines
set by French health authorities.
Keywords: Neurogenic bladder – Multiple sclerosis – Upper
urinary tract abnormalities – Recommendations – Follow-up
Introduction
La fréquence des troubles vésico-sphinctériens (TVS)
dans la SEP et l’importance de leur retentissement
fonctionnel sont aujourd’hui bien connues et ont favorisé
la diffusion d’algorithme de prise en charge thérapeutique
visant à limiter l’impact des dysfonctionnements vésicosphinctériens sur les différentes composantes de la qualité
de vie [1-6]. Le retentissement organique des TVS dans
la SEP reste en revanche grandement sous-estimé et, à
Correspondance : E-mail : marianne.de-seze@chu-bordeaux-fr (M. de Sèze) ; www.Genulf.com (Genulf)
194
la différence d’autres pathologies neurologiques telles
que les affections médullaires, il n’a pas fait l’objet d’une
sensibilisation de la communauté médicale et des sociétés
savantes à son dépistage et sa prise en charge.
Aussi apparaissait-il important de réactualiser les
connaissances en matière d’épidémiologie des TVS et de
leurs complications uronéphrologiques dans la SEP, afin de
favoriser l’identification des facteurs de risque uronéphrologiques dans cette population et de permettre l’élaboration
de recommandations éclairées pour le suivi à moyen et long
terme des neurovessies de la SEP. Le premier temps de ce
travail, réalisé conjointement avec le groupe d’étude neurourologique de langue française (Genulf), fut consacré à une
analyse exhaustive et critique de la littérature consacrée aux
neurovessies et à leurs facteurs de risque de complications
dans la SEP. La méthodologie et les principaux résultats de
cette analyse documentaire ont été préalablement rapportés
[7]. Cette revue de littérature soulignait, d’une part, que le
retentissement uronéphrologique des TVS dans la SEP n’était
pas exceptionnel, puisque plus d’un patient SEP sur dix était
susceptible de présenter une complication du haut appareil
urinaire dans les dix-huit premières années d’évolution de sa
pathologie [7-14]. Elle suggérait, d’autre part, et ce, en tenant
compte du caractère rétrospectif de la majorité des études
analysées et de l’hétérogénéité des séries rapportées, qu’il soit
possible de distinguer sept facteurs de risque démographiques ou neuro-urologiques de retentissement uronéphrologique des neurovessies dans la SEP [7]. La pondération de ces
critères, selon la méthodologie basée sur les preuves
préconisées par l’HAS [15] et le Groupe d’Evidence-Based
Medicine d’Oxford [16], permettait d’attribuer à quatre de ces
critères un niveau de preuve établie (NP1), dans la mesure où
leur identification relevait d’études de bonnes qualités
métrologiques et/ou était reconnue par la majorité des
auteurs. Il s’agissait de la durée d’évolution de la SEP, du port
d’une sonde à demeure, de la forte amplitude maximale des
contractions non inhibées du détrusor en cystomanométrie
et de l’existence de pression élevées du détrusor au cours du
remplissage cystomanométrique [7].
Trois autres facteurs bénéficiaient d’un niveau de
présomption de preuve (NP2), car fondés sur au moins
une étude de bonne qualité métrologique, mais demeurant
débattus dans la littérature : la dyssynergie vésico-sphinctérienne, l’âge supérieur à 50 ans, dont l’indépendance avec
la durée d’évolution de la maladie n’était pas établie, et le
genre masculin [17] via la présence d’indices urodynamiques péjoratifs [7].
Il apparaissait ainsi possible de distinguer deux souspopulations de patients SEP en fonction de leur
exposition à des facteurs de risque uronéphrologiques :
les patients sans risque, définis par l’absence de facteurs
de risque établi NP1 et ne présentant pas plus d’un
facteur de risque présagé NP2, et les patients à risque
présentant au moins un facteur de risque établi NP1 et/ou
au moins deux facteurs présumés NP2.
Des recommandations pour le dépistage et le suivi à
moyen et long terme des vessies neurologiques des
patients SEP, considérant ces deux types de situations à
risque, ont été proposées par le Genulf, groupe d’experts
francophones multidisciplinaires regroupant des praticiens de médecine physique et de réadaptation, d’urologie et de neurologie, spécialisés en neuro-urologie. Ces
recommandations, soumises pour aval par les sociétés
savantes internationales pour accréditation, ont pour
objectif d’aider le praticien dans la prise en charge
diagnostique et préventive des complications neurourologiques dans la SEP.
Recommandations pour le suivi des neurovessies
dans la SEP (Fig. 1)
Patients asymptomatiques sur le plan vé sico-sphincté rien
En l’absence de symptôme vésico-sphinctérien, ces
patients ne seront que rarement adressés à des praticiens
spécialisés en neuro-urologie. Ce bilan minimal d’exploration devra ainsi être préconisé auprès des médecins
généralistes, neurologues ou rééducateurs assurant le
suivi des patients. Le bilan minimal d’exploration
comprendra deux éléments :
– un interrogatoire dirigé sur les symptômes vésicosphinctériens : données sur la miction (fréquence,
nombre, volume estimé, facilité d’émission des urines,
impression de miction complète), données sur la
continence (occurrence, fréquence et volume estimé
des fuites, nécessité de garnitures), dépistage de symptômes évocateurs d’infections urinaires et symptômes
ano-rectaux ;
– une mesure du ré sidu postmictionnel par échographie vésicale. La justification de cet examen repose sur la
démonstration de la faible pertinence de l’interrogatoire
pour l’estimation de l’existence d’un résidu postmictionnel [9,18].
Si ce bilan minimal d’exploration ne met pas en
évidence de trouble vésico-sphinctérien, une simple
surveillance basée sur ces deux éléments (interrogatoire
dirigé et mesure du résidu postmictionnel) sera recommandée à chaque visite de suivi de la maladie neurologique et au rythme guidé par l’évolution de celle-ci.
Si les données recueillies au bilan minimal d’exploration révèlent ou suggèrent l’existence de troubles
vésico-sphinctériens, le patient sera alors considéré
« symptomatique » et il sera recommandé de l’adresser
à un praticien expérimenté en neuro-urologie.
Patients symptomatiques sur le plan vé sico-sphincté rien
Lorsque des troubles vésico-sphinctériens sont rapportés
spontanément par le patient ou découverts par le bilan
minimal d’exploration sus-cité, il sera conseillé d’adresser
le patient au praticien référent en neuro-urologie, qui
195
PATIENT ASYMPTOMATIQUE VS
Médecin traitant, Neurologue, MPR
PATIENT SYMPTOMATIQUE VS
Référent neuro-urologie
Évaluation initiale
Calendrier mict 72 h
Échographie vésico-rénale
ECBU
Bilan urodynamique (BUD)
Clairance créatinine
Qualité de vie
Évaluation minimale
Interrogatoire dirigé
Évaluation résidu PM (écho V)
Symptômes vésico-sphinctériens ?
Analyse des facteurs de risque
Non
Oui
Patient sans risque
Évaluation minimale
(à chaque visite de suivi de la SEP)
Interrogatoire dirigé
Résidu PM (écho V)
Évaluation annuelle
Calendrier mict 72 h
Débimétrie
Résidu PM (écho V)
Patient à risque
Évaluation annuelle
Calendrier mict 72h
Résidu PM
Echo vésico-rénale
Clairance créatinine
Qualité de vie
BUD tous les 1 à 3 ans
Évolution des facteurs de risque
Non
Oui
BUD tous les 3 ans
Nouveau BUD
Risque de tumeur vésicale
Cytologie urinaire
+ cystoscopie annuelle
Altération haut appareil
Concertation pluridisciplinaire
Examens complémentaires
Fig. 1. Recommandations pour le diagnostic et le suivi des neurovessies dans la SEP
conduira un bilan d’évaluation initial comprenant six
paramètres :
– un calendrier mictionnel sur soixante-douze heures
colligeant les horaires, volumes et nombre des fuites et
mictions, la nécessité de garniture et la puissance du jet ;
– une échographie vésico-rénale destinée à documenter
l’existence d’un résidu postmictionnel et à dépister une
cause locale favorisante et/ou un retentissement précoce sur
l’appareil urinaire ;
– un examen cytobactériologique des urines
(ECBU), destiné à dépister une infection urinaire ;
– un bilan urodynamique comprenant une cystomanométrie, une débimétrie chez les patients non cathétérisés et
une profilométrie. La fréquence d’anomalies urodynamiques chez les patients asymptomatiques [2,14,19,20] et
l’individualisation de facteurs de risque urodynamiques
de retentissement uronéphrologique justifie la réalisation
précoce de cet examen afin d’adopter au plus tôt une prise en
charge préventive et/ou thérapeutique optimale [1,2,6,21].
La réalisation systématique d’un EMG du sphincter strié
urétral couplé à la cystomanométrie n’est pas préconisée
lors du bilan initial, car ses résultats n’ont, semble-t-il, que
peu ou pas d’influence sur la prise en charge thérapeutique
initiale et le devenir des patients à moyen terme [22].
L’opportunité de sa réalisation sera laissée au jugement du
praticien neuro-urologue réalisant le bilan urodynamique ;
– une mesure de la clairance de la créatinine sur les
urines des vingt-quatre heures [23] ;
– une évaluation de l’impact des troubles vésicosphinctériens sur la qualité de vie, qui pourrait relever
196
du questionnaire Qualiveen, outil d’évaluation validé
pour cette indication, dans cette population et en langue
française [24].
Le rythme et les modalités de surveillance ultérieure
seront alors définis en fonction du nombre et de la
nature des facteurs de risque de retentissement uronéphrologiques dépistés lors du bilan initial.
Seront considérés comme facteurs de risque de
niveau 1 (Tableau I) :
– une durée d’évolution de la SEP supérieure à quinze ans ;
– l’existence de hautes pressions vésicales permanentes ou de contractions non inhibées du détrusor de
forte amplitude en cystomanométrie ;
– le port d’une sonde à demeure.
Seront considérés comme facteurs de risque de niveau 2 :
– un âge supérieur à 50 ans ;
– le genre masculin ;
– l’existence d’une dyssynergie vésico-sphinctérienne.
Deux sous-populations de patients seront considérées :
– une population de patients sans risque caractérisée
par l’absence de facteur de niveau 1 et la présence maximale
d’un facteur de niveau 2 ;
– une population de patients à risque, regroupant
tous ceux présentant au moins un facteur de niveau 1
et/ou au moins deux facteurs de niveau 2 (Tableau I).
Chez les patients sans risque, un bilan systématique
annuel est préconisé, comprenant un calendrier mictionnel
sur soixante-douze heures, une débimétrie (patients sans
cathétérismes) et une mesure du résidu postmictionnel.
Si la symptomatologie clinique et les facteurs de risque
restent stables, le bilan urodynamique ne sera préconisé que
tous les trois ans. Si les symptômes cliniques vésicosphinctériens ou les facteurs de risque évoluent, la réalisation
d’un nouveau bilan urodynamique est alors recommandée,
qui mènera en fonction de ses résultats à la poursuite de
surveillance de type patient sans risque ou à l’adoption des
recommandations pour les patients à risque.
Chez les patients à risque, le bilan annuel d’évaluation comprendra :
– un calendrier mictionnel sur soixante-douze heures ;
– une mesure du résidu postmictionnel ;
– une échographie de l’arbre urinaire ;
– une mesure de la clairance de la créatinine sur les
urines des vingt-quatre heures ;
– une évaluation de l’impact des troubles vésicosphinctériens sur la qualité de vie.
Un suivi urodynamique, dont la rythmicité sera guidée
par la sévérité des facteurs de risque, sera systématique,
incluant une cystomanométrie tous les un à trois ans. Un
bilan morphologique de l’arbre urinaire pourra être requis
pour l’exploration et le suivi d’une altération du haut
appareil urinaire.
Chez les patients présentant une altération connue du
haut appareil urinaire ou à haut risque de préjudice
uronéphrologique, une prise en charge multidisciplinaire
incluant la concertation d’experts en neuro-urologie, de
praticiens spécialisés en urologie, en médecine physique et
de réadaptation, en neurologie, du médecin traitant et du
patient sera préconisée, de manière à définir les options
thérapeutiques optimales et personnalisées en fonction de
la situation vésico-sphinctérienne, neurologique, générale
et environnementale du patient. La nature et le rythme des
examens complémentaires seront définis par cette concertation pluridisciplinaire et pourront comprendre des
examens morphologiques (urétrocystographie, scanners
abdominopelviens, cystoscopie...) ou fonctionnels (scintigraphie rénale...).
Chez les patients présentant une situation à risque de
tumeur vésicale, en particulier les patients en sondages
permanents (sonde à demeure ou cathéter sus-pubien)
[25], une cytologie urinaire et une cystoscopie annuelles
seront préconisées.
Conclusion
Les complications neuro-urologiques des troubles vésicosphinctériens sont loin d’être exceptionnelles chez les
patients SEP et méritent une sensibilisation à leur prise
en charge. Une harmonisation des modes de surveillance
des neurovessies dans la SEP, basée sur une utilisation
raisonnée des examens de surveillance, pourra favoriser la
définition et le dépistage des complications vésico-sphinctériennes, permettre ainsi l’amélioration de la qualité
de soins et de vie des patients SEP et avoir un impact
Tableau I. Facteurs de risque de complications uronéphrologique dans la SEP
Facteurs de risque de retentissement uroné phrologique
Situation à risque
Niveau de preuve
scientifique
Niveau 1, preuve établie
Niveau 2, présomption
de preuve
Nature des facteurs de
risque
Durée d’évolution de la maladie
supérieure à 15 ans
Port d’une sonde à demeure
Hautes pressions vésicales
permanentes en cystomanométrie
Contractions non inhibées du
détrusor de forte amplitude en
cystomanométrie
Dyssynergie
vésicosphinctérienne
Âge supérieur à 50 ans
Sexe masculin
Patient à risque :
1 facteur de niveau 1, et/ou
2 facteurs de niveau 2
Patient sans risque :
Aucun facteur de niveau 1,
1 facteur de niveau 2
197
socio-économique favorable sur la santé publique. Une
réévaluation régulière de ce schéma de surveillance pourra
être adoptée en fonction des progrès technologiques et de
l’évolution des pratiques médico-chirurgicales.
13.
14.
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DOI 10.1007/s11608-007-0122-4
PERSPECTIVES / PROSPECTS
Les ballonnets ajustables (ACT®) périurétraux pour le traitement
de l’incontinence de la femme
L. Le Normand
Service d’urologie, CHU de Nantes, place Alexis-Ricordeau, F-44093 Nantes Cedex 01, France
Résumé : Le traitement de l’incontinence urinaire d’effort
par la mise en place de prothèses ajustables ACT®
(Ajustable Continence Therapy, Uromedica, Inc., Plymouth, MN, États-Unis ; Medtronic, Mineapolis, MN,
États-Unis) offre une technique nouvelle destinée à traiter
les patientes présentant une insuffisance sphinctérienne et
une situation clinique complexe ne permettant pas
d’utiliser les thérapeutiques conventionnelles (colposuspension, bandelettes sous-urétrales, sphincter urinaire
artificiel). Ses avantages sont : le caractère mini-invasif de
la chirurgie, la possibilité d’ajuster le traitement par une
simple injection en consultation, et sa réversibilité par
ablation facile de la prothèse, sous anesthésie locale, en cas
de complication ou d’inefficacité.
Mots clés : Incontinence urinaire d’effort – Insuffisance
sphinctérienne – Prothèse périurétrale
ACT periurethral adjustable balloons for treating
female stress urinary incontinence
Abstract: Stress urinary incontinence treatment with the
ACT® (Adjustable Continence Therapy, Uromedica, Inc.,
Plymouth, MN, United States; Medtronic, Minneapolis,
MN, United States) adjustable prosthetic device is a new
technique intended for women with sphincter insufficiency
and complex clinical presentations that do not allow
conventional treatments (colposuspension, slings, and
artificial urinary sphincters). Its advantages are: miniinvasive surgery; the ability to adjust treatment using a
simple injection on an outpatient basis; and its reversibility
by easy ablation of the prosthesis under local anaesthesia,
in the event of complications or ineffectiveness.
Keywords: Stress urinary incontinence – Sphincter
insufficiency – Periurethral prosthesis
Introduction
Les techniques chirurgicales pour le traitement de l’incontinence urinaire d’effort de la femme sont nombreuses,
mais actuellement, elles se concentrent vers la mise en place
de bandelettes sous-urétrales, compte tenu du caractère
mini-invasif de la méthode et de sa simplicité. Les résultats
sont à court et moyen termes comparables aux techniques
plus anciennes de référence, notamment de la colpopexie
de type Burch [1,2] avec un taux de succès de 80 à 90 %
selon les séries [3]. Les échecs et complications fonctionnelles de la technique peuvent se résumer aux situations
suivantes [4] :
– hyperactivité vésicale de novo ou s’aggravant en cas
d’incontinence mixte ;
– dysurie, voire rétention urinaire chronique surtout
si la vessie était hypoactive auparavant ;
– incontinence urinaire d’effort récidivée soit due à
une correction insuffisante, soit en rapport avec une
insuffisance sphinctérienne.
L’indication de la mise en place d’une bandelette sousurétrale doit être parfaitement posée en essayant d’évaluer
le risque d’échec et surtout de dépister une situation à
risque. Ces situations peuvent se résumer ainsi :
– incontinence urinaire mixte avec le risque de
majorer l’hyperactivité vésicale par l’intervention ;
– dysurie ou hypotonie vésicale dépistée en préopératoire : miction polyphasique par poussées abdominales
à la débitmétrie et sur la cystomanométrie. Le risque est
celui d’une rétention chronique postopératoire imposant
la pratique d’autosondages ;
– incontinence urinaire récidivée par insuffisance
sphinctérienne. L’insuffisance sphinctérienne est diagnostiquée par une pression de fuite basse (VLPP), ou surtout
une pression de clôture uréthrale (PCmax) faible sur la
profilométrie urétrale, ou la persistance de fuites d’effort à
l’examen clinique avec absence de mobilité cervicouréthrale. Cette situation relève de la mise en place d’un
sphincter artificiel avec un taux de succès de 90 % lorsque
le sphincter est en place [5]. Cependant, il s’agit d’une
intervention plus lourde, d’acceptation plus difficile pour la
patiente, et qui peut difficilement être proposée chez les
personnes très âgées ou à l’état général médiocre ;
Correspondance : E-mail : [email protected] ; Tél. : +33 2 40 08 39 10
199
– situations difficiles complexes avec de nombreux
échecs chirurgicaux, des délabrements urétraux rendant
hasardeux la mise en place d’une bandelette sousurétrale ou la pose d’un sphincter artificiel.
Pour toutes ces situations cliniques, une solution
chirurgicale mini-invasive, facilement réversible et efficace serait d’un grand apport. La mise en place de
prothèses ajustables de type ACT® peut être une réponse
dans ces situations.
Description de la prothèse et de son mode
d’action présumé
La prothèse est constituée d’un ballon en silicone
pouvant contenir jusqu’à 8 ml de liquide isotonique,
liée à une fine tubulure s’abouchant dans un port
d’injection recouvert de titane. Dans cette tubulure, il
existe un deuxième conduit dans lequel est glissé un
mandrin permettant de rigidifier la prothèse afin d’en
faciliter sa pose (Fig. 1).
Deux prothèses sont placées de part et d’autre de
l’urètre au niveau du col vésical, dans un plan se situant
au-dessous de l’aponévrose pelvienne (Fig. 2). Elles
assurent une compression de l’urètre, comme pourrait
le faire une injection périurétrale, mais l’originalité de la
technique réside en la possibilité d’ajuster en plus ou en
moins le volume de la prothèse, par une simple injection
Fig. 1. Schéma de la prothèse
Fig. 2. Représentation schématique de la position des prothèses. Les
ballonnets sont placés de part et d’autre de l’urètre, sous le col de la
vessie, entre la paroi vaginale et l’aponévrose pelvienne
Fig. 3. Principe opératoire. L’introduction de l’ancillaire de pose se fait
sous contrôle digital et avec l’amplificateur de brillance
transcutanée. La prothèse n’est pas positionnée en sousmuqueux contrairement aux ballons Urovive® [6] mais
en latéro-urétral. Enfin, la technique est facilement
réversible puisque les prothèses peuvent être facilement
retirées sous anesthésie locale.
Technique de pose (Fig. 3)
L’intervention peut se faire sous anesthésie générale ou
locale selon le souhait de la patiente et en fonction des
éventuelles contre-indications anesthésiques. La préparation de la patiente doit être identique à celle de la pose
d’un sphincter artificiel : vérification de l’absence
d’infection urinaire, préparation cutanée rigoureuse,
tonte des grandes lèvres.
La patiente est positionnée en décubitus dorsal,
jambes écartées et cuisses fléchies à 45 . La pose se fait
sous contrôle de l’amplificateur de brillance et du palper
digital par toucher vaginal.
Une endoscopie préalable doit vérifier l’absence de
lésion urétrale ou vésicale.
Une sonde de Foley de 16 F est mise en place avec
opacification du ballonnet à l’aide de produit de
contraste. La vessie peut être également opacifiée avec
une solution de contraste diluée.
Une courte incision d’un centimètre du bord cutané
latéral de la partie postérieure de chaque grande lèvre
permet d’introduire l’ancillaire de pose (Fig. 4). Celui-ci
doit passer au contact de la branche ischio-pubienne
pour éviter une brèche vaginale, puis il franchit le culde-sac vaginal antérieur en direction du col vésical, sous
contrôle digital et avec l’amplificateur de brillance. Il faut
apprécier la mobilité de la paroi vaginale antérieure qui peut
faire croire à un bon placement de l’ancillaire alors que la
paroi vaginale et l’ancillaire avancent ensemble, ce qui
provoque un placement trop distal de la prothèse. Il faut
veiller également à ne pas franchir l’aponévrose pelvienne
ni à pénétrer dans la vessie. Le bon positionnement de
l’ancillaire peut être difficile et il est vivement conseillé d’être
formé à la technique. L’extrémité doit se situer au contact de
200
souvent, une sonde de Foley est laissée en place jusqu’au
lendemain de l’intervention.
Soins postopératoires
Fig. 4. Aspect des prothèses de l’ancillaire et la seringue munie de son
aiguille spécifique
la paroi latérale de l’urètre, au niveau du col vésical. La partie
interne de l’ancillaire est retirée et la prothèse peut être
insérée à l’intérieur.
La longueur de la prothèse est choisie en fonction de
la profondeur du trajet de l’ancillaire, mais il est
préférable de mettre une prothèse longue, qui dépasse
d’au moins trois centimètres de la peau. En pratique, les
prothèses de neuf centimètres sont le plus souvent les
mieux adaptées. La prothèse est purgée avec un liquide
radio-opaque isotonique (identique à celui utilisé pour
les sphincters artificiels, par exemple un mélange de
47 % d’eau et 53 % de Telebrix12®). C’est ce liquide qui
servira à gonfler la prothèse. L’aiguille fournie avec le
dispositif doit être la seule à être utilisée pour ne pas
détériorer le port d’injection. La prothèse doit être
totalement vidée, de manière à obtenir une forme de
ballonnet en étoile à trois branches. La prothèse, après
avoir été enduite de gel de Xylocaı̈ne®, est insérée dans
l’ancillaire sous contrôle de l’amplificateur de brillance.
Son extrémité est radio-opaque, ce qui permet de vérifier
qu’elle arrive bien à l’extrémité de l’ancillaire. L’ancillaire
est légèrement retiré en maintenant la prothèse. La
prothèse est alors gonflée avec 1,5 à 2 ml de liquide de
contraste isotonique. Le même geste est fait de l’autre
côté. Le contrôle sous amplificateur de brillance doit
montrer un aspect symétrique des ballons.
Une endoscopie urétro-vésicale vérifie l’absence de
brèche. Une brèche urétrale ou vésicale peut conduire en
un repositionnement dans un trajet différent ou à
abandonner la technique en fonction de l’importance
des lésions.
Une logette sous-cutanée, faite vers l’avant des grandes
lèvres avec des ciseaux fins, permet de placer les ports
d’injection. La fermeture cutanée doit être effectuée en
deux plans afin d’éloigner la tubulure de l’incision. Le plus
La sonde vésicale est retirée le lendemain. Avant la sortie
de la patiente, il faut vérifier l’absence de résidu postmictionnel significatif. En cas de dysurie ou de rétention, il
ne faut pas diminuer le volume des ballonnets car
l’inflammation et un possible petit hématome postopératoire peuvent être à l’origine de cette rétention passagère. Il
est préférable de réaliser un apprentissage d’autosondages
ou le cas échéant d’hétérosondages si la patiente ne peut
les réaliser plutôt que de laisser une sonde à demeure. Les
plaies opératoires doivent être maintenues propres et
sèches. La patiente sera revue six semaines plus tard, le
temps que la prothèse soit encapsulée et que les grandes
lèvres soient parfaitement cicatrisées pour un éventuel
ajustement.
Suivi et ajustements
Le premier ajustement peut avoir lieu six semaines plus tard
si la cicatrisation est obtenue et les grandes lèvres non
douloureuses. Il n’est utile bien sûr que si une incontinence
persiste et en l’absence de dysurie. Il faut, par l’examen
clinique, vérifier que les prothèses sont restées en bonne
position. En cas de doute, un contrôle radiographique peut
être effectué et comparé avec les images peropératoires.
L’ajustement se fait avec des aiguilles spécifiques ne lésant
pas le port d’injection (les aiguilles microlance® 23 G,
réf. 300700, sont validées par le constructeur) en utilisant le
même mélange isotonique que pour la pose. L’injection se
fait en immobilisant le port au niveau de la grande lèvre
pour que l’aiguille soit introduite en son centre. Le volume
d’ajustement ne doit pas dépasser 1 ml de chaque côté
(en règle générale, 0,5 à 1 ml). Il faut vérifier l’absence de
résidu postmictionnel une fois l’ajustement effectué.
Le rythme des autres ajustements sera fonction de
l’importance de l’incontinence résiduelle, mais il est
préférable d’attendre au moins un mois entre deux
ajustements, le temps que la coque périprothétique se
reconstitue au besoin. Le volume des ballonnets peut
atteindre 8 ml. Une fois la continence obtenue, un contrôle
au moins annuel est souhaitable.
Les complications et leur gestion
Absence d’amé lioration
Si aucune amélioration n’est constatée malgré plusieurs
ajustements, il est souhaitable de vérifier la position des
ballons cliniquement et radiologiquement. Il faut également vérifier l’absence d’érosion urétrale ou vésicale par
une endoscopie (une fibroscopie permet en général de
mieux visualiser l’urètre). Si un changement du ballon
201
est nécessaire, il est préférable de le dégonfler totalement
quelques semaines avant l’intervention afin que la loge
du ballonnet s’efface totalement, ce qui évitera que le
nouveau ballonnet reprenne la même place. La mise en
place d’un sphincter artificiel est possible après la mise
en place de ballonnets. Dans ce cas, il ne faut pas
dégonfler les ballonnets car ils serviront de repère pour
la dissection péricervicale et ils seront retirés en même
temps que la pose du sphincter. Il faut bien sûr vérifier
que la persistance d’une incontinence ne soit pas due à
une instabilité vésicale qui doit faire rechercher une
obstruction et conduire éventuellement à un dégonflage
des ballons parallèlement au traitement de l’hyperactivité
vésicale.
E´rosion et infection
L’érosion de la prothèse peut se faire au niveau de la grande
lèvre, au niveau vaginal, vésical ou urétral. Cliniquement, la
lèvre est inflammatoire, douloureuse et peut laisser
échapper un peu de pus. La prothèse peut parfois
s’extérioriser par l’urètre. L’érosion ou l’infection d’une
prothèse impose son ablation. Cette ablation se fait
simplement sous anesthésie locale en incisant la peau en
regard du port d’injection puis en dégonflant totalement la
prothèse qui peut alors être extraite. En cas d’érosion
urétrale ou vésicale, il est préférable de laisser une sonde de
Foley pendant une huitaine de jours. La cicatrisation est le
plus souvent rapidement obtenue à l’aide de quelques soins
locaux au niveau de la grande lèvre. Il est possible de
remettre la prothèse, mais il faut attendre au moins trois
mois pour faire ce geste.
publiées sur l’évaluation des résultats chez la femme car
le procédé est récent et ne s’adresse qu’à une population
spécifique d’incontinence urinaire. Une étude prospective multicentrique française, présentée au congrès de
l’Association française d’urologie en 2004 [8], sera
prochainement publiée [9]. Soixante-huit patientes présentant une incontinence urinaire d’effort avec insuffisance sphinctérienne (PCmax = 23 ± 11 cm d’eau) ont été
traitées par ce dispositif. Dix-huit patientes ont été
explantées pour des érosions, déplacements, infections,
mais 6 ont pu être réimplantées par la suite. À deux ans,
39 patientes sont évaluables : 6 (21 %) étaient sèches et 19
(66 %) étant très améliorées.
Les résultats de notre série sont présentés lors du
congrès de la SIFUD-PP en juin 2007 [10]. Entre octobre
2001 et octobre 2005, nous avons traité 40 patientes âgées
en moyenne de 71 ans, présentant une incontinence d’effort
avec insuffisance sphinctérienne. Quarante-cinq pour cent
d’entre elles avaient déjà eu une cure chirurgicale
d’incontinence et 15 % avaient une pathologie neurologique
ayant un retentissement sur l’équilibre vésicosphinctérien.
Vingt-deux et demi pour cent avaient une incontinence
mixte et 40 % avaient une acontractilité vésicale. La PCmax
était en moyenne de 24 cm d’eau. Sept patientes ont été
explantées en raison d’une complication et 6 ont été
réimplantées. Trois patientes ont eu une explantation dans
le même temps que la pose d’un sphincter artificiel du fait
d’une inefficacité. Le nombre d’ajustements était en
moyenne de 1,9 (± 1,1). Avec un recul moyen de 15,3 mois,
15 % sont sèches, 30 % ont des fuites minimes, 40 % ont
des fuites modérées et se considèrent améliorées, et 15 %
conservent des fuites sévères. Une patiente présente une
instabilité vésicale de novo.
Migration de la prothè se
Même à distance, on peut constater une migration de la
prothèse, le plus souvent distale, le ballonnet étant palpé
sur la face latérale de la partie basse du vagin. Il est
possible de le changer pour le mettre en bonne position.
Il faut alors le dégonfler totalement quelques semaines
avant la réintervention.
Rétention persistante
C’est une situation rare (que je n’ai personnellement jamais
eu à traiter). Les ballonnets peuvent être dégonflés, mais
il est préférable d’attendre six semaines avant d’effectuer
ce geste.
Résultats
Les études sur ce type de prothèse concernent essentiellement l’homme [2,7] et l’HAS a récemment émis un
avis favorable, estimant un service rendu important avec
nécessité d’un suivi prospectif pour le traitement de
l’incontinence urinaire masculine. Peu d’études ont été
Discussion
Ces résultats peuvent être considérés comme nettement
inférieurs aux autres thérapeutiques, mais ils concernent
une population dont le traitement s’avère difficile et ne
relèvent en général pas de traitements standards. L’intervention est assez courte (en moyenne 30 minutes) mais
la mise en place des ballonnets n’est pas toujours aisée et
il est possible qu’une partie des échecs soit due à une
mauvaise position des ballonnets. Une imagerie en 3D
(scanner par exemple) pourrait fournir des données
intéressantes, mais on devrait alors comparer la population
des échecs avec celle des succès. Un défaut de compliance
urétrale peut être également un élément péjoratif dans cette
population déjà opérée (pour certaines plusieurs fois),
mais ce paramètre est difficile à évaluer.
Il s’agit d’une technique encore très récente, peu
répandue, qui doit faire l’objet d’autres évaluations et
d’un suivi à plus long terme, mais il offre l’avantage de
répondre à un vide thérapeutique pour les incontinences
urinaires par insuffisance sphinctérienne lorsque les
autres thérapeutiques ne peuvent pas être utilisées. En
202
outre, son caractère mini-invasif, la possibilité d’ajuster
le volume des ballons et de retirer facilement la prothèse
en cas de nécessité en font une thérapeutique originale
pouvant avoir un grand intérêt dans les situations
d’incontinence urinaire d’effort complexes ou à risques.
Il existe en effet peu d’alternatives thérapeutiques : le
sphincter artificiel donne d’excellents résultats dans les
incontinences par insuffisance sphinctérienne [5], mais
il s’agit d’une technique plus lourde ; les injections périurétrales donnent des résultats peu satisfaisants dans
cette population [11], les bandelettes ajustables de type
Remeex® [12] n’ont pas l’avantage de la réversibilité
qu’offrent les prothèses ACT®.
Aucune patiente n’a manifesté à distance de douleur
ou d’inconfort en rapport avec la prothèse. Le retentissement sur la fonction sexuelle était difficile à analyser
dans cette population âgée.
3.
4.
5.
6.
7.
8.
Conclusion
Par ses caractères mini-invasif, ajustable et réversible, le
traitement de l’incontinence urinaire d’effort par la mise
en place de ballonnets ACT® semble être une technique
prometteuse dans les situations complexes ou à risques.
Il complète l’arsenal thérapeutique dans cette population
pour laquelle il existe peu d’alternatives.
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DOI 10.1007/s11608-007-0136-y
CONGRÈS / CONGRESS
L’essentiel du 100e Congrès de l’Association française d’urologie
29 novembre-2 décembre 2006 (Paris)
J.-F. Hermieu
Service d’urologie, CHU Bichat, 46, rue Henri-Huchard, F-75018 Paris, France
Le 100e Congrès de l’Association française d’urologie s’est
déroulé à Paris au Palais des Congrès, du 29 novembre au
2 décembre 2006, sous la présidence de François Richard.
Cent ans après la création de cette réunion nationale par
Félix Guyon, ce congrès a montré le dynamisme de
l’urologie française. Invité d’honneur en 2006 : l’American Association of Urology, représentée par son
président, le Dr Lawrence S. Ross. Ce dernier a insisté
sur la place historique de l’urologie française, sur les liens
unissant les deux associations, sur les récentes innovations françaises, en particulier en matière de laparoscopie
et de robotique, sur l’intérêt d’établir des recommandations internationales opposables aux pouvoirs publics.
L’urologue de demain doit maı̂triser toute la spécialité
avant, éventuellement, de se « surspécialiser ».
Ce 100e congrès a été dense sur le plan scientifique,
dans une ambiance toujours très conviviale. Le rapport,
présenté par Emmanuel Chartier-Kastler et Alain Ruffion, a porté sur la prise en charge urologique des vessies
neurogènes.
De nombreuses communications, tables rondes,
forum, états de l’art ont porté sur des sujets touchant
la pelvi-périnéologie.
Incontinence urinaire : travaux fondamentaux
Injection de cellules musculaires
L’injection de cellules précurseurs musculaires (CPM) est
peut-être une des voies du traitement futur de l’incontinence urinaire. La préparation des CPM n’est cependant
pas standardisée et demeure complexe. Yiou (O9),
comparant l’injection de cellules satellites versus cellules
non cultivées versus cellules non extraites de leurs fibres
musculaires (FM) parentales, estime que l’expansion
cellulaire in vitro ou la séparation des CPM de leur FM ne
semblent pas avoir d’intérêt par rapport à l’utilisation
decellules non préparées. L’injection péri-urétrale de
FM et de CPM conduit à la dégénérescence des FM et à
l’activation des CPM qui prolifèrent et fusionnent pour
Correspondance : E-mail : [email protected]
remplacer les FM en respectant l’organisation initiale
(O10).
Mé canismes de la continence urinaire : une é tude
expé rimentale
Julia Guilloteau (O12) a étudié les mécanismes de la
continence urinaire chez la chatte anesthésiée lors d’un
éternuement provoqué. Elle conclut que l’augmentation
de la pression abdominale lors d’un éternuement
s’accompagne d’une augmentation de pression en regard
du sphincter strié de l’urètre et d’une contraction
mesurable de ce dernier. La lésion de l’innervation
somatique et parasympathique pelvienne diminue cette
réponse et conduit, lorsqu’elle est bilatérale, à une
incontinence urinaire.
Bandelettes sous-urétrales et incontinence
urinaire féminine
Ré sultats de la bandelette Aris®
Saussine (O13) rapporte les résultats du registre multicentrique européen concernant la bandelette sous-urétrale transobturatrice Aris® (bandelette de polypropylène
implantée de dehors en dedans). Sur 342 bandelettes
implantées dans 13 centres, 26 complications (7,6 %)
opératoires (saignements mineurs, plaies vaginale, vésicale, urétrale) et 55 complications (16 %) postopératoires
(rétention urinaire, dysurie, retard de cicatrisation et
érosion vaginale, urgenturie de novo) ont été observées.
Cette morbidité per- et postopératoire n’a pas eu de
conséquence grave ni d’influence sur les résultats à court
et moyen terme (à trois mois : patientes guéries : 87,5 %,
patientes améliorées : 9,2 %).
Morbidité de la voie transobturatrice de dedans en dehors
Collinet (O14) évalue la morbidité de la voie transobturatrice de dedans en dehors. Sur 984 bandelettes implantées
204
par 89 opérateurs (gynécologues ou urologues), les
complications suivantes ont été notées :
– plaie vésicale 0 % ;
– plaie vaginale latérale 1,3 % ;
– plaie urétrale 0,1 % ;
– hématome paravésical nécessitant un drainage
0,1 % ;
– rétentions vésicales nécessitant une réintervention
0,8 % ;
– douleurs résiduelles 2,7 % ;
– dysurie 17,3 % ;
– impériosités de novo 5,3 % ;
Six patientes (0,6 %) ont été réopérées à distance :
– pour érosion vaginale (2) ;
– section de bandelette pour rétention urinaire (2) ;
– récidive de l’incontinence urinaire (2).
À court terme (4 à 12 semaines), 90 % des patientes
étaient guéries de leur incontinence, 8,7 % améliorées.
Collinet conclut sur la supériorité, en termes de morbidité
peropératoire de cette voie, d’abord par rapport à la voie
rétropubienne.
Ré tention urinaire aprè s pose de bandelette
sous-uré trale : inté rê t de la reprise pré coce
Landreat (O15) s’intéresse à la prise en charge chirurgicale précoce des rétentions aiguës d’urines après pose de
bandelette sous-urétrale. Dans une étude rétrospective
portant sur 951 bandelettes posées dans quatre centres, il
rapporte 42 rétentions d’urines persistantes. Le relâchement chirurgical précoce de la bandelette avec un
délai médian de cinq jours a permis la reprise immédiate
des mictions sans récidive de l’incontinence urinaire
alors que la section plus tardive de la bandelette
(médiane 86 jours) a permis la reprise des mictions,
mais avec récidive de l’incontinence urinaire pour près
d’une patiente sur deux. Il conclut sur l’intérêt du
relâchement chirurgical précoce dans cette situation.
Cette étude est, cependant, malheureusement rétrospective et sans justification statistique.
Incontinence urinaire après prostatectomie
radicale
L’incontinence urinaire après prostatectomie radicale est
un handicap particulièrement gênant alors que cette
chirurgie est pratiquée chez des hommes jeunes actifs et
que le nombre d’interventions est en constante augmentation du fait d’un dépistage du cancer de prostate de
plus en plus minutieux. La recherche d’éléments
prédictifs de l’incontinence, d’artifices techniques ayant
pour objectif de diminuer ce risque, et de solutions
thérapeutiques si possibles mini-invasives – pour remédier à cette complication – a fait l’objet de nombreuses
communications.
Existe-t-il des facteurs urodynamiques pré dictifs de la
continence urinaire aprè s prostatectomie radicale ?
Hétet (O60) recherche des facteurs urodynamiques prédictifs de la continence postopératoire. Dans une étude
prospective portant sur 602 patients opérés par 4 chirurgiens
pratiquant la même technique de prostatectomie, il a mesuré
la longueur urétrale fonctionnelle (LUF), la pression de
clôture urétrale maximale (PCMU) et la PCMU lors d’un
effort de contraction volontaire. Ces mesures sont effectuées
avant l’intervention, à six mois, éventuellement à neuf et
douze mois, et sont comparées à l’état de continence. Les
taux de continence évoluaient de 15,1 % à un mois
postopératoire, à 96,3 % à douze mois, le retour à la
continence se faisant à 3,8 ± 2,2 mois. Il existait une
différence statistiquement significative de ces trois paramètres urodynamiques entre patients continents et incontinents, avant ou après prostatectomie radicale, quelle que
soit la période de réalisation du bilan urodynamique. La LUF
est le seul paramètre restant toujours constant quelles que
soient la durée et l’intensité de la rééducation postopératoire. La limite de 9 ± 0,8 mm est avancée comme valeur
observée chez les patients récupérant tardivement leur
continence ou ne la récupérant pas. L’auteur conclut sur
l’intérêt de réaliser un bilan urodynamique avant une
prostatectomie radicale. Une discussion s’ouvre sur la
difficulté de mesurer la pression urétrale, sur les nombreux
paramètres susceptibles de la faire varier, sur sa reproductibilité pas toujours bonne. Haute pression dans l’urètre n’est
pas synonyme de structure contractile efficace, mais peut
témoigner d’un trouble de la compliance urétrale. En ces
temps de restrictions de budget de santé, le bilan
urodynamique systématique avant prostatectomie radicale
peut-il être préconisé ?
Dispositif de suture automatique pour anastomose
vé sico-uré trale !
Gaillet (O61) propose l’utilisation d’un dispositif de
suture automatique (Capio®) pour faciliter l’anastomose
vésico-urétrale après prostatectomie radicale. Sur une
courte série de 15 patients, elle conclut à la simplicité
d’utilisation de ce dispositif pour des résultats fonctionnels équivalents à une anastomose manuelle. La discussion de la communication porte sur le rapport coût/
efficacité de ce dispositif qui n’apparaı̂t pas évident, en
tout cas pour une chirurgie à ciel ouvert. L’adaptation de
ce dernier pour la prostatectomie laparoscopique sera
peut-être intéressante.
Quelques artifices chirurgicaux pour amé liorer la
continence urinaire postopé ratoire : suspendre le né ocol
vé sical ou utiliser le robot ?
Hervé (O62) évalue l’intérêt, en terme de continence
urinaire, de fixer à l’aide de fils résorbables, le néocol
205
vésical à la portion pubo-périnéale des muscles releveurs
de l’anus, de part et d’autre de l’urètre, lors de la
prostatectomie radicale laparoscopique. Sur une courte
série de 18 patients, 33 % des patients « fixés » étaient
totalement continents à j + 8 et M + 1 versus aucun dans le
groupe « non fixé ». Ces résultats nécessitent confirmation à trois et six mois et sur une série plus importante.
Bruyère (O63) rapporte les résultats fonctionnels à un
an de la prostatectomie radicale robotisée. Sur une série
prospective de 139 patients évaluables, il signale un taux
de continence postopératoire de 94,3 % et d’érection de
34 %. Ces résultats sont proches de la prostatectomie
radicale non robotisée.
Utilisation d’une bandelette sous-uré trale pour traiter
l’incontinence urinaire aprè s une prostatectomie
radicale est-elle un choix judicieux ?
Fassi-Fehri (O66) évalue le dispositif Invance® sur une
des séries publiées les plus importantes, tant sur le
nombre de bandelettes implantées que sur le recul du
suivi. Cinquante-sept bandelettes ont été posées chez des
patients incontinents après chirurgie prostatique, sans
antécédent de radiothérapie pelvienne. Le recul moyen
était de treize mois (3-32 mois). La morbidité comportait
deux hématomes périnéaux, huit rétentions urinaires
transitoires, deux infections cutanées, un abcès périnéal,
trois infections de bandelette, 8 douleurs postopératoires
régressives. 37,5 % des patients étaient totalement
continents en postopératoire, 34 % améliorés, 28,5 %
inchangés. Le taux de succès était proportionnel à la
sévérité de l’incontinence (90 % en cas d’incontinence
faible, 70,5 % en cas d’incontinence modérée, 50 % en
cas d’incontinence sévère). Ces résultats sont comparables à ceux publiés par Chauveau (O65) en termes de
morbidité et de résultats à court terme. Chauveau insiste
cependant sur la dégradation des résultats avec le temps,
le taux de patients totalement continents passant de 93 %
à un mois, à 62 % à six mois. Une des explications de
cette altération des résultats pourrait être la désinsertion
des vis d’ancrage osseux. Ces difficultés de mise en place
sont signalées par Saussine (O64) qui, sur une série de
20 patients, montre que 60 % des patients opérés ont une
ou plusieurs vis d’ancrage, non au contact de l’os, soit
par mauvaise fixation initiale, soit par désinsertion. Les
explications avancées sont une mauvaise technique de
pose en début d’expérience, mais aussi un matériel peutêtre mal adapté (vis conique de trop petite taille) ou un
os de qualité insuffisante au niveau ischio-pubien.
Ces séries ne permettent certainement pas d’avancer
aujourd’hui que cette technique est la technique de
référence du traitement de l’incontinence urinaire
modérée après chirurgie prostatique. La morbidité est
loin d’être négligeable, le recul encore insuffisant. Sur le
plan physiopathologique, l’échec des techniques de
compression décrites il y a plusieurs dizaines d’années,
les complications de l’ancrage osseux proposé il y a
quelques années dans le traitement de l’incontinence
urinaire féminine (Vesica®), amènent à modérer pour le
moment l’enthousiasme des firmes commercialisant ce
type de produit.
Incontinence aprè s prostatectomie radicale : les
recommandations du Comité des troubles mictionnels
Animé par Alexandre de la Taille, le Comité des troubles
mictionnels émet en 2006 des recommandations pour la
prise en charge de l’incontinence urinaire après prostatectomie radicale :
– à la phase de prévention.
En préopératoire : amélioration de la connaissance
de la topographie des lésions par imagerie pour guider
l’indication et la technique opératoire, kinésithérapie
systématique.
En peropératoire : préservation, de principe, de
l’anatomie périprostatique, mais avec comme premier
objectif la sécurité carcinologique (avoir une marge
négative). Adaptation du geste à la topographie des
lésions. Importance de l’expérience du chirurgien.
– à la phase de diagnostic : interrogatoire par des
questionnaires validés (SF36, ICIQ), pad test, fibroscopie
en cas de doute de sténose, bilan urodynamique ;
– à la phase de traitement : la rééducation par un
kinésithérapeute est essentielle et doit débuter dans les
semaines qui suivent l’intervention.
Le traitement par anticholinergique ou oxybutinine
n’a pas prouvé son efficacité.
Le traitement par injection de macroplastique semble
n’avoir qu’un effet limité dans le temps.
De nouvelles approches chirurgicales semblent prometteuses et sont en cours d’évaluation : ballons périurétraux et bandelettes sous-urétrales.
Le sphincter artificiel est le traitement ayant prouvé
son efficacité, mais aussi sa nécessité de réintervention
sur le moyen et long terme.
La thérapie cellulaire est peut-être la solution de demain.
Dysfonction érectile et traitement du cancer
localisé de la prostate
Ré sultats de l’é tude REPAIR
Plusieurs communications (O67, O68, O163) donnent les
résultats de l’étude REPAIR conduite par l’AFU et le
laboratoire Schwartz-Pharma portant sur les troubles
fonctionnels après prostatectomie radicale. Quarantedeux pour cent (535) des urologues français ont participé
à cette étude analysant 2644 patients. Les fuites urinaires
sont considérées comme les plus gênantes dans les trois
premiers mois postopératoires. Au-delà de trois mois, les
206
difficultés d’érection passent au premier plan. Cet aspect
est volontiers sous-estimé par les urologues qui ne
proposent une prise en charge active qu’à moins
d’1 patient sur 2 alors que 3 patients sur 4 souhaiteraient
un traitement efficace (O68).
Néanmoins, 80 % des urologues évaluent en préopératoire la vie sexuelle de leurs patients. La prise en charge
de la dysfonction érectile (DE), quand elle a été effectuée,
l’a été à quelques jours après l’intervention (9 % des
patients), à un à trois mois (70 %), à trois à six mois
(15 %). Les protocoles thérapeutiques utilisés en première
intention sont assez hétérogènes et comportaient : des
injections intracaverneuses (IIC) régulières et répétées
avec l’objectif d’une « rééducation » (39 %), des IIC à la
demande (30 %), des inhibiteurs de la phosphodiestérase 5
(IPDE5) de manière régulière et répétée (16 %), des IPDE5 à
la demande (8 %), l’association IIC et IPDE5 (7 %). La durée
de prise en charge préconisée par les urologues était de six
mois pour 20 % d’entre eux, un an pour 38 %, deux ans pour
33 %, plus de deux ans pour 5 %.
Ré cupé ration de la fonction é rectile aprè s prostatectomie
radicale avec pré servation nerveuse
Dans une population de 146 patients ayant subi une
prostatectomie radicale rétropubienne avec préservation
nerveuse (bilatérale 128, unilatérale 18) pour cancer
localisé de la prostate, Thoulouzan (O164) s’intéresse à
la récupération de la fonction érectile. Tous les patients ont
réalisé un protocole d’injections intracaverneuses de prostaglandine précoce et rempli des questionnaires IIEF-5
avant l’intervention et à trois, six, neuf, douze mois. La
reprise des rapports sexuels sans aide pharmacologique a eu
lieu à trois mois (13,5 %), six mois (42,8 %), un an (70 %). À
un an, 70,6 % des patients n’ont plus de DE ou ont une DE
légère.
Cathala (O165) s’intéresse à la même problématique
dans une série prospective de 1078 patients ayant subi
une prostatectomie radicale avec conservation uni- ou
bilatérale des bandelettes vasculo-nerveuses. Un traitement par Tadalafil un jour sur deux dès j + 5 postopératoire et IIC à trois ou six mois postopératoire a été
proposé. Des questionnaires IIEF5 ont été remplis. Sous
réserve de 609 patients évaluables, l’auteur conclut à une
dégradation considérable de la fonction érectile après
prostatectomie radicale, malgré une prise en charge
pharmacologique, et à une amélioration de l’érection à
deux ans, sous réserve d’une préservation bilatérale et
d’un traitement médical prolongé.
AblathermTM et fonction é rectile
L’utilisation d’ultrasons focalisés de haute intensité
(HIFU) [AblathermTM] fait partie des alternatives thérapeutiques possibles du cancer localisé de la prostate. Dans
une étude prospective monocentrique, Chevallier (O165b)
évalue 45 patients porteurs d’un cancer prostatique à
faible risque d’évolutivité, ayant un statut érectile
préopératoire normal, sans facteur de comorbidité et
ayant une partenaire stable depuis plus d’un an, soumis à
un HIFU avec préservation bilatérale d’une marge
capsulaire de sécurité. Cette évaluation réalisée avant
l’intervention puis pendant un an comportait une
évaluation de la fonction érectile (IIEF5, pharmacoécho-doppler, pléthysmographie nocturne) et une évaluation carcinologique (PSA, biopsies prostatiques). Aucune
différence significative de la fonction érectile n’était
constatée pour 70 % des patients qui conservaient des
érections et une sexualité satisfaisante sans aide pharmacologique avant le sixième mois. Trente pour cent des
patients présentaient une dégradation de la fonction
érectile à trois mois, récupérant totalement à sept mois et
demi avec un protocole de « relance pharmacologique »
de l’érection (inhibiteur de la phosphodiestérase 5
quotidien pendant un mois puis à la demande). Sous
réserve d’un court délai de suivi (un an), la maladie était
considérée comme contrôlée pour tous les patients
(PSA moyen 1,2 ng/ml, biopsies prostatiques négatives).
L’auteur conclut à l’intérêt thérapeutique de la technique
HIFU, tout en permettant de conserver une fonction érectile
normale.
Influence de la diffé rence d’âge entre le patient
et sa partenaire sur la fonction é rectile
aprè s prostatectomie radicale
De nombreux paramètres souvent mal identifiés influencent la qualité des érections. Parmi ceux-ci, le rôle de la
partenaire, pourtant essentielle à la qualité de la relation
sexuelle, est rarement signalé dans les études portant sur
la DE. Descazeaud (O166) s’intéresse à l’influence de la
différence d’âge entre le patient soumis à une prostatectomie radicale et sa partenaire sur sa fonction érectile.
Dans une cohorte de 240 patients opérés, 189 étaient
sexuellement actifs en préopératoire. Le taux d’érection
postopératoire avec un recul minimum d’un an était de
59 %. En analyse multivariée, la différence d’âge était un
facteur prédictif d’érection postopératoire, indépendamment de l’âge du patient. L’auteur suggère que ce
paramètre soit précisé dans les séries publiées de
prostatectomie radicale et pourrait utiliser ce paramètre
pour conseiller les patients en préopératoire...
Place de l’implant pé nien dans la dysfonction
é rectile aprè s prostatectomie radicale
Alors que la mise en place d’implants péniens est
relativement peu pratiquée pour traiter la DE après
prostatectomie radicale, Menard (O167) se propose
d’étudier les résultats de cette intervention dans cette
indication. Quarante-neuf prothèses péniennes sont
implantées pour traiter une DE avec un délai moyen de
207
28,7 mois après prostatectomie radicale et un suivi moyen
de 28,8 mois. Les résultats sont évalués sur la satisfaction
subjective, les scores IIEF, la morbidité et ils sont
comparés à une série non contemporaine de 233 implantations de prothèses péniennes pour d’autres étiologies. Quatre-vingt-quinze pour cent des prothèses
implantées sont gonflables. Le risque de sepsis (2 %), de
dysfonction mécanique (4,1 %), de révision chirurgicale
(8,2 %) n’est pas significativement augmenté dans le
groupe « prostatectomie radicale ». Malgré une satisfaction subjective de 95,3 %, les scores IIEF moyens pré- et
postopératoires sont significativement plus bas dans le
groupe prostatectomie, ce que l’auteur tente d’expliquer
par la brutalité de la perte de la fonction érectile après
prostatectomie.
Dysfonction érectile
Quel bilan biologique devant une dysfonction é rectile ?
La deuxième consultation sur les DE recommande, face à
une DE, d’évaluer la glycémie et le profil lipidique, si cela
n’a pas été effectué depuis un an, ainsi que la testostéronémie bio, disponible en cas de risque ou de suspicion
d’hypogonadisme. Delavierre (O89) a évalué la pertinence
de cette recommandation pendant un an. Face à une DE,
ce dépistage a permis de déceler une dyslipidémie pour
36,4 % des patients, un hypogonadisme pour 20,5 %
(principalement après 50 ans, ou avant 50 ans alors
qu’avait été constatée une altération du désir sexuel et/ou
une hypotrophie testiculaire). En revanche, un diabète n’a
été détecté que pour 0,9 % des patients.
Dysfonction é rectile : un marqueur
de la cardiopathie isché mique ?
L’association DE et cardiopathie ischémique (CI) est
soutenue par une physiopathologie commune (atteinte
des voies neuromusculaires dépendantes de la sécrétion
de NO et dysfonction endothéliale). La DE pourrait ainsi
être considérée comme un marqueur de CI silencieuse.
Afin de démontrer cette hypothèse, Dubosq (O90) a
sélectionné dans une étude prospective 31 patients âgés de
45 à 70 ans, consultant pour DE non psychogène, non
organique pure, évoluant depuis plus de six mois, ayant
au maximum deux facteurs de risque cardio-vasculaires et
n’ayant pas de CI symptomatique. Cette population a été
explorée sur le plan urologique, andrologique et cardiologique (examen cardio-vasculaire, ECG, scintigraphie
myocardique avec épreuve d’effort). Neuf patients (29 %)
présentaient une hypofixation scintigraphique témoignant d’une ischémie myocardique silencieuse. La DE
pourrait donc être un facteur révélateur de coronaropathie justifiant un bilan cardiologique systématique.
La dysfonction é rectile est-elle correctement prise
en charge chez le diabé tique ?
Alors que la DE est fréquente chez le diabétique sévère, il
semble que cette pathologie soit rarement systématiquement recherchée par les médecins traitants ou les
diabétologues. À l’aide de questionnaires, Godeau (O91)
a interrogé 164 patients consultant en diabétologie pour
connaı̂tre la prise en charge de la DE et les souhaits du
patient. La DE existait pour 74,5 % des patients et était
considérée comme un moyen ou gros problème pour
42 % d’entre eux, justifiant un traitement pour près de
neuf patients sur dix. Pourtant ce problème n’avait été
spontanément abordé que par 29 % des médecins
traitants hommes et 13 % des médecins femmes, le patient
abordant le plus souvent lui-même ce sujet. En cas de DE,
une prescription a été effectuée par 48 % des médecins
traitants et seulement 18 % des endocrinologues. Le
recours à un médecin spécialiste de la DE a concerné
12 % des médecins traitants et 28 % des endocrinologues.
Il reste encore de l’information et de la formation à faire...
Dysfonction é rectile, blessé mé dullaire et inhibiteur
de la phosphodiesté rase 5
La DE est fréquente chez le blessé médullaire. Giuliano
(O97), dans une étude internationale, multicentrique,
randomisée en double insu, contrôlée versus placebo, a
étudié l’efficacité et la tolérance du tadalafil administré
dans une population de blessés médullaires souffrant
de DE. Cette étude était financée par le laboratoire Lilly.
L’efficacité était évaluée par le score IIEF et le carnet
journalier des rapports sexuels. Le Tadalafil a amélioré
significativement, par rapport au placebo, tous les
paramètres de l’érection. Il améliorait significativement
l’éjaculation et l’orgasme. Les événements indésirables les
plus fréquents étaient les céphalées (8,5 versus 4,5 %) et
les infections urinaires (7,7 versus 6,8 %).
Quelle influence entre le dé lai de prise d’un inhibiteur
de la phosphodiesté rase 5 et le rapport sexuel ?
Si les trois inhibiteurs de la IPDE5 ont le même mécanisme
d’action, ils ont des propriétés pharmacocinétiques
différentes justifiant des modalités de prise différentes.
Dans une étude observationnelle, prospective, réalisée en
médecine générale, Giuliano (O98) a recruté 1402 patients
souffrant de DE et traités par IPDE5. Pour les 5842
rapports sexuels documentés, le délai médian entre la
prise médicamenteuse et le rapport sexuel était d’une
heure pour le Sildénafil et le Vardénafil et de 1,5 heure pour
le Tadalafil. Il conclut que malgré les recommandations de
prise du traitement, le délai entre la prise du médicament
et le rapport sexuel a peu d’influence dans la vie réelle.
208
Existe-t-il encore une place pour l’implant pé nien
dans la dysfonction é rectile ?
Table ronde entre François Giuliano (FG), Antoine Faix
(AF) et Thierry Lebret pour répondre à cette question un
peu polémique.
Un patient de 66 ans présentant une DE sévère avec
libido conservée, ayant des antécédents cardio-vasculaires
bien traités et pour lequel traitement oral et injections
intracaverneuses ont été des échecs, doit-il se voir
proposer un implant pénien ?
Non pour FG, qui préfère augmenter par palier les IIC
jusqu’à 60 mg par injection – comme cela est bien documenté
dans la littérature –, mais cette dose est au-delà de la dose
autorisée dans l’AMM, ou associer IPDE5 et IIC pour agir
sur deux systèmes enzymatiques de relaxation musculaire.
Pourquoi détruire définitivement les corps caverneux de ce
patient alors que les nombreuses molécules en développement pourront peut-être demain lui proposer la solution
pharmacologique idéale ?
Oui pour AF, pour lequel cette situation clinique est
idéale pour l’implantation de prothèse (contexte cardiologique, bon contexte psychologique et conjugal, libido
conservée). La DE est réfractaire aux doses maximales
autorisées par les AMM. Il ne reste donc que ce choix
avec 75 % de chance de succès et un taux de complications faible avec les améliorations du matériel et des
techniques de pose. Une récente étude française rapporte
un taux de 86 % de satisfaction postopératoire après
pose d’implant pénien !
Prothè se pé nienne aprè s 65 ans : une option
raisonnable ?
Staerman (O145) compare les résultats de 79 implantations de prothèses péniennes chez des hommes de plus
de 65 ans aux données issues d’une banque de données
nationales concernant des hommes de moins de 65 ans.
Les prothèses implantées étaient : gonflables deux pièces
(46 %) ou gonflables trois pièces (46 %). La morbidité
(sepsis 3,8 %, dysfonction mécanique 5,1 %, migrationérosion-auto insufflation-hématomes-douleurs 6,3 %) et
les scores IIEF n’étaient pas significativement différents
dans les deux groupes. L’auteur estime ainsi que l’âge
n’est pas un critère restrictif à la pose d’une prothèse.
E´valuation multicentrique des implantations
de prothè ses pé niennes
La banque de données du Club des implanteurs de
prothèses péniennes permet une évaluation multicentrique des pratiques d’implantation (O146). Deux cent
quatre-vingt-deux prothèses péniennes ont été implantées dans trois centres entre 1996 et 2005, en moyenne
après 39,2 mois de DE, chez des patients d’un âge moyen
de 58,6 ans. Les étiologies principales de la DE étaient
artérielles (35,3 %), le diabète (22,8 %), la prostatectomie
radicale (16,5 %). Les prothèses implantées étaient semirigides (2,1 %), gonflables une pièce (5,7 %), deux pièces
(33,7 %), ou trois pièces (58,5 %). Le taux de sepsis était
de 2,2 % (1re pose), 3,8 % (poses itératives), de dysfonctions mécaniques de 7,5 % (1 r e pose), 9,4 %
(poses itératives). Le risque septique est augmenté
significativement en cas de diabète (7,6 %). La satisfaction globale postopératoire était de 86,7 % et le score
IIEF évoluait de 20,5 ± 11,8 en préopératoire à 68,9 ± 5,4
en postopératoire. Ces résultats sont conformes aux
grandes séries internationales et montrent les bons
résultats de cette technique.
Andrologie-sexologie (dysfonction érectile exclue)
Coude de verge : le mieux est l’ennemi du bien
Camerlo compare les résultats de la plicature d’albuginée
à la résection d’albuginée-greffe pour corriger une
courbure de verge. Si la plicature d’albuginée satisfait
88,6 % des patients au prix d’un raccourcissement
significatif de verge pour 52 % d’entre eux, le taux de
satisfaction est seulement de 29 % après résection-greffe,
avec 57 % de courbure résiduelle et 15 % de dysérection
postopératoire. Même si ces résultats descriptifs n’ont
pas de valeur statistique, l’auteur préfère la plicature
d’albuginée pour sa simplicité et sa faible morbidité.
E´pidé miologie des troubles de l’é jaculation
chez le jeune sportif
Cent quatre-vingt-onze questionnaires évaluant les
habitudes sexuelles, l’éjaculation ou la qualité de vie
ont été remplis par une population d’hommes jeunes en
bonne santé (O139). L’âge moyen était de 36 ans. Près
d’un tiers de ces hommes décrivaient un trouble de
l’éjaculation, mais seulement 10 % d’entre eux souhaitaient une prise en charge médicale. La DE n’est ainsi pas
le seul trouble de la sexualité. L’auteur estime qu’une
meilleure information sur les différents troubles de la
sexualité et leurs possibilités thérapeutiques est nécessaire.
Chirurgie du prépuce : le point de vue de l’UNCAM
Soixante-seize mille interventions dont 56 000 posthectomies ont été réalisées en 2006 sur le prépuce. Cette
chirurgie représenterait un coût de l’ordre de neuf
millions d’euros et serait réalisée chez l’enfant de
moins de 7 ans pour 65 % des cas ; dans la région Îlede-France 4 fois sur 10, plus de 9 fois sur 10 sous
anesthésie générale et 7 fois sur 10 par un chirurgien
urologue.
209
Le remboursement de cette intervention est normalement lié à l’existence d’une cause médicale, la
circoncision de convenance n’étant pas prise en charge
par les organismes sociaux qui s’interrogent cependant
sur l’intérêt prophylactique de la circoncision et les
risques de sa réalisation en milieu non médicalisé.
Affaire à suivre...
La pratique de circoncision pour raison non médicale
peut donner lieu à des risques médico-légaux particuliers.
Mieux vaut obtenir l’accord des deux parents et de l’enfant,
s’il est en âge de le faire, et de son assureur...
Hyperactivité détrusorienne réfractaire
Ré sultats de la neuromodulation sacré e
La neuromodulation est une des modalités de prise en
charge thérapeutique des troubles urinaires réfractaires.
Dans une étude rétrospective, Gignoux (O100) rapporte les
résultats de l’équipe de Nantes. Sur 79 patients testés, 41
(52 %) [88 % de femmes, âge moyen : 54,6 ans, moyenne
de l’ancienneté des troubles : 12,3 ans] ont été implantés. À
six mois, 63 % des patients ont une amélioration clinique et
subjective de plus de 50 %, ce taux diminuant à 53 % à 24
mois. Sept patients sur 10 ont présenté des complications : douleurs 61 %, infections 9,8 % (nécessitant une
explantation pour un patient), problèmes techniques 24
dont 17 % de révision (repositionnements d’électrodes
pour inefficacité, déplacement du boı̂tier). Ces résultats,
moins bons que ceux publiés dans la littérature, amènent à
proposer de comparer la neuromodulation sacrée à
d’autres modalités thérapeutiques (injection de toxine
botulique, neuromodulation pudendale).
Cystectomie avec dé rivation urinaire pour troubles
mictionnels ré fractaires : laparotomie ou laparoscopie ?
La cystectomie avec dérivation urinaire est parfois
nécessaire dans la prise en charge de troubles mictionnels chez le patient neurologique. Le développement de
la laparoscopie amène à proposer cette nouvelle voie
d’abord dans cette indication. Guillotreau (O103) a pour
objectif de comparer la morbidité de la cystectomie par
laparotomie versus laparoscopie.
Quarante-cinq patients (24 femmes, 21 hommes)
présentant des troubles vésicosphinctériens d’origine
neurologique ont subi une cystectomie par laparoscopie
(30) ou par laparotomie (15). Une dérivation de type
Bricker a été réalisée pour 36 cas et une néovessie iléale
pour huit cas. La voie laparoscopique a conduit à un
saignement significativement moins important, une
morbidité majeure et mineure plus faible, une reprise
plus rapide du transit intestinal, une réduction de la durée
de l’hospitalisation et des complications tardives. Cette
étude est très discutable sur le plan méthodologique. Par
ailleurs, si les chiffres de morbidité cités pour la voie
laparoscopique sont conformes à ceux décrits à ce jour dans
la littérature, on est frappé par la morbidité tout à fait
inhabituelle de la voie laparotomique (complications
majeures : 86,7 %, complications mineures : 73,3 %, durée
d’hospitalisation en soins intensifs : 22,1 ± 36,4 jours,
complications tardives : 66,7 %).
Injections dé trusoriennes de toxine botulique A
et ré duction de l’incidence des infections
urinaires symptomatiques dans les hyperactivité s
dé trusoriennes neurologiques
Game (O105) réalise des injections intra-détrusoriennes
de 300 UI de toxine botulique A chez 30 patients
(18 hommes, 12 femmes) présentant une hyperactivité
détrusorienne d’origine neurologique (sclérose en plaques : 15 cas, traumatisme médullaire : 14 cas, myélite :
1 cas). Vingt-deux patients présentaient une incontinence
urinaire. Des explorations urodynamiques étaient réalisées avant et six semaines après l’injection. Le nombre
d’infections urinaires symptomatiques était noté dans les
six mois précédant et suivant l’injection. L’auteur
constate une réduction significative du nombre moyen
d’infections urinaires symptomatiques 0,2 ± 0,41 contre
1,75 ± 1,87. Il attribue cette réduction à l’amélioration
des paramètres urodynamiques témoignant d’une amélioration des capacités vésicales de réplétion à basse
pression.
Inté rê t des injections trigonales de toxine botulique A
dans l’hyperactivité vé sicale idiopathique
Il est classique de ne pas réaliser d’injections intradétrusoriennes de toxine botulique dans le trigone, région
pourtant souvent impliquée dans la survenue d’impériosités mictionnelles. Afin d’étudier la morbidité et
l’efficacité de ces injections, Karsenty (O107) réalise des
injections trigonales de 200 UI de toxine botulique A chez
11 patientes présentant une hyperactivité vésicale idiopathique réfractaire, y compris à la neuromodulation. Il n’y
a eu aucun reflux vésico-rénal induit. Il a été constaté une
amélioration significative des scores symptomatiques,
une diminution significative du nombre de mictions
quotidiennes, une augmentation significative de la
capacité vésicale cystomanométrique. L’auteur conclut à
l’intérêt de ces injections trigonales, résultats à confirmer
dans de plus importantes séries, si possibles comparatives
à des protocoles classiques excluant le trigone.
Effets des injections intradé trusoriennes de toxine
botulique A sur la sensibilité vé sicale et la
stimulation é lectrique endové sicale
Afin de mieux comprendre les mécanismes possibles
d’action de la toxine botulique A dans l’hyperactivité
210
vésicale, Karsenty (O106) compare les volumes, sur neuf
patients présentant une hyperactivité vésicale réfractaire
(neurogène pour six patients), aux différentes sensations
de besoin, ainsi que les seuils de perception pour quatre
protocoles de stimulation électrique endovésicale. Il
constate une augmentation significative des volumes et
des seuils de perception de stimulation électrique. Il
suggère en effet des injections de toxine botulique sur les
voies afférentes d’origine vésicale.
Risque de ré tention urinaire aprè s injection
intradé trusorienne de toxine botulique A
dans l’hyperactivité vé sicale non neurologique ré fractaire
Boillot (O108) rapporte une série rétrospective de
30 patients, présentant une hyperactivité détrusorienne
non neurologique rebelle, traités par 30 UI de toxine
botulique A intradétrusorienne. L’évaluation était clinique et par scores symptomatiques ou de qualité de vie.
À trois mois, 90 % des patients ont une amélioration de
leur score MHU (4 contre 18-21 en préopératoire), cette
amélioration persistant à six mois. Un trouble de
l’évacuation vésicale a concerné 17 % des patients, 10 %
des patients étant toujours aux autosondages à six mois !
L’auteur conclut à l’efficacité du traitement, mais aussi à
sa morbidité, en particulier lorsqu’il existe une dysurie
préopératoire, un antécédent de chirurgie d’incontinence
à l’effort, un âge supérieur à 70 ans. Les raisons du choix
d’une dose de 300 UI, habituellement utilisée chez le
neurologique pour lequel le risque de rétention est
accessoire en raison de la pratique habituelle de l’autosondage, ne sont pas précisées.
Urologue et la grossesse
Le forum du Comité d’urologie et de pelvi-périnéologie
de la femme, animé par Jean-François Hermieu, a porté
cette année sur les particularités de la prise en charge
urologique au cours de la grossesse.
Imagerie au cours de la grossesse
Grenier et Lapray ont fait le point sur l’imagerie
urologique au cours de la grossesse. Pendant la grossesse,
les techniques irradiantes ciblées sur l’abdomen et surtout
sur le pelvis doivent être évitées, en particulier au cours
du premier trimestre. Les techniques ultrasonores et IRM
doivent toujours être privilégiées, mais cette dernière
reste contre-indiquée au premier trimestre, par principe
de précaution plus que du fait d’une nocivité démontrée.
De même, l’injection de gadolinium est contre-indiquée
en cas de grossesse, par principe de précaution.
Néanmoins, si un examen radiologique s’avère nécessaire sur le plan médical, le risque encouru par la mère
peut être plus grand que celui du préjudice potentiel pour
le fœtus. Il faut savoir que le risque de mort fœtale, de
malformation ou de retard mental est faible, même si le
fœtus se trouve dans le faisceau direct. Dans ce cas,
l’estimation de la dose fœtale sera nécessaire. Dans la
mesure où cette dose est presque toujours inférieure à
100 mGy (seuil minimum pour les malformations radioinduites), l’interruption de grossesse n’est quasiment
jamais justifiée.
En cas d’évaluation d’une hydronéphrose douloureuse,
qui intéresse presque toujours les deuxième et troisième
trimestres, l’échographie-doppler et l’uro-IRM (sans
injection) peuvent régler pratiquement tous les problèmes
en faisant la part entre une obstruction « physiologique »
et un obstacle surajouté, de type lithiasique le plus
souvent. Le recours à un examen TDM spiralé, en basses
doses et sans injection, peut même être envisagé au
troisième trimestre.
En cas de pyélonéphrite, aucun examen n’est nécessaire en dehors de l’échographie, le diagnostic reposant
sur la clinique et la bactériologie. L’analyse d’un obstacle
éventuel, comme dans le cas précédent, ou d’une
complication de type abcédation, pourra justifier un
recours à l’IRM.
En ce qui concerne la pathologie vésicale, les ultrasons
et la cystoscopie permettent en général de se passer
d’exploration à risque.
Complications urologiques au cours de la grossesse
Hermieu a insisté sur les complications urologiques de la
grossesse. En raison de modifications anatomiques,
physiologiques et fonctionnelles des voies urinaires, la
grossesse peut être responsable de nombreuses pathologies urologiques s’exprimant parfois dans un contexte
d’urgence et dont certaines peuvent menacer le pronostic
vital materno-fœtal. L’état de grossesse rend le diagnostic
souvent plus difficile car de nombreuses investigations,
dont certaines radiologiques, sont déconseillées chez la
femme enceinte. Les possibilités thérapeutiques sont
limitées, de nombreuses molécules ou certaines procédures chirurgicales étant contre-indiquées, ou présentant le risque de déclencher le travail ou d’être délétères
pour le fœtus. Entre le confort de la patiente et le
développement normal du fœtus, des compromis sont
parfois nécessaires. Le rapport bénéfice/risque doit être
particulièrement bien analysé, ce qui nécessite une
parfaite connaissance des particularités des pathologies
urologiques chez la femme enceinte.
L’incidence de la lithiase urinaire au cours de la
grossesse est de l’ordre de 1/1500. Elle survient préférentiellement au deuxième et troisième trimestre se manifestant surtout par une lombalgie et/ou une hématurie,
mais la symptomatologie est parfois trompeuse. Si sept à
huit calculs s’éliminent spontanément, un geste urologique est parfois nécessaire, l’attitude classique étant
d’assurer le libre écoulement des urines, le traitement
211
définitif du calcul étant réalisé après l’accouchement. Les
indications, avantages et inconvénients des différents
modes de drainage urinaire et traitements, seront
développés durant le forum.
La rupture rénale spontanée est une complication
rare au cours de la grossesse. Elle peut survenir dans
trois circonstances : rupture spontanée sans cause,
rupture de la voie excrétrice liée à une obstruction ou
enfin, rupture secondaire à une tumeur (angiomyolipome). L’échographie est essentielle au diagnostic. La
prise en charge va de la simple surveillance au drainage
des urines et/ou de la collection périrénale. Le recours à
une néphrectomie en urgence est exceptionnel.
Le placenta percreta envahissant la vessie est une
variante exceptionnelle du placenta accreta. Il est
favorisé par l’existence de cicatrices utérines favorisant
la pénétration de villosités placentaires dans le myomètre
et le détrusor. Une hématurie n’est notée pendant la
grossesse qu’une fois sur trois. La cystoscopie est
souvent peu contributive. Lorsque ce diagnostic est
évoqué, la biopsie endoscopique de la lésion doit être
absolument évitée en raison du risque hémorragique. Le
diagnostic est malheureusement fait deux fois sur trois
tardivement, en salle d’opération, devant une hémorragie
préoccupante pour laquelle le seul objectif chirurgical est
de contrôler le saignement, ce qui nécessite parfois une
hystérectomie d’hémostase avec cystectomie partielle.
Infections urinaires et grossesse
Une mise au point a été réalisée par Leport et
Laurichesse. Les infections urinaires sont fréquentes au
cours de la grossesse, pouvant atteindre jusqu’à 8 % des
femmes. La prévalence augmente avec l’âge, la parité, le
diabète et les conditions sociales défavorables. Les
raisons associées à ce risque majoré d’infection urinaire
sont plurielles, anatomiques et physiologiques : dilatation urétérale physiologique, tonus urétéral diminué
favorisant la stase urinaire et le reflux vésico-urétéral,
modifications hormonales favorisant la colonisation
bactérienne. L’infection peut prendre diverses formes,
dont l’expression clinique est à peu près la même que
chez la femme non enceinte : une bactériurie asymptomatique en est une des formes les plus fréquentes, tandis
que dans d’autres cas, elle se traduit par une cystite aiguë
ou une pyélonéphrite aiguë. Compte tenu du risque de
retentissement sur la grossesse et du risque d’évolution
vers une forme symptomatique, la bactériurie doit être
systématiquement dépistée par bandelettes urinaires, en
début de grossesse, et à chaque consultation. La
bactériurie peut se compliquer de septicémie, avec
parfois des localisations secondaires à distance, et de
choc septique, pouvant mettre en jeu le pronostic vital de
la mère et de l’enfant. Les bactéries les plus fréquemment
en cause sont les bacilles à Gram négatif : Escherichia
coli, dans 80 à 90 % des infections, Proteus mirabilis et
Klebsiella pneumoniae. Les autres micro-organismes
sont plus rares : entérocoques, Gardnerella vaginalis,
Ureaplasma urealyticum, Staphylococcus saprophyticus et
streptocoques du groupe B. La base du traitement est
l’antibiothérapie, adaptée, autant que possible, à la
bactérie responsable de l’infection. Ce traitement est
impératif, car toute infection urinaire, même bactériurie
asymptomatique, peut évoluer vers une morbidité
obstétricale importante, menace d’accouchement, prématurité, petit poids à la naissance. Il doit être débuté
après avoir réalisé un examen cytobactériologique des
urines (ECBU), avec numération des bactéries urinaires
(NBU). Le choix des antibiotiques doit prendre en
compte plusieurs facteurs : outre la bactérie responsable,
le profil de résistance aux antibiotiques et autres facteurs
de choix habituels, il faut, dans cette circonstance,
prendre en compte la nécessité d’éviter, autant que
possible, tout effet secondaire pour le fœtus. Il est utile
de rappeler que 70 % des E. coli, en ville, sont résistants à
l’amoxicilline, et que les fluoroquinolones, les aminosides sont à éviter durant la grossesse. Cela restreint le
nombre de familles d’antibiotiques utilisables : amoxicilline, triméthoprime-sulfaméthoxazole (à réserver, si
besoin), nitrofurantoı̈ne, per os en cas de bactériurie
asymptomatique ou de cystite aiguë pour une durée de
sept à dix jours, et céphalosporine de troisième génération en cas de pyélonéphrite aiguë, par voie veineuse au
début et pour une durée de quatorze jours. Il est
nécessaire de contrôler l’ECBU, quarante-huit heures
après la mise en route du traitement pour vérifier la
stérilisation des urines, critère d’efficacité du traitement
prescrit, puis une semaine après l’arrêt des antibiotiques, et
mensuellement jusqu’au terme. Les explorations morphologiques se résument à l’échographie rénale, les autres
imageries étant contre-indiquées au cours de la grossesse,
sauf nécessité absolue. L’évolution est le plus souvent
favorable. La persistance de la fièvre et/ou des douleurs
après quarante-huit heures d’antibiothérapie, invite à
rechercher un autre facteur favorisant : local, type lithiase,
ou général, tel un diabète ou une infection par le VIH.
Ces spécificités des infections urinaires au cours de la
grossesse soulignent l’intérêt des recommandations
visant à prévenir leur survenue : boissons abondantes,
hygiène périnéale, traitement d’une constipation.
Traumatisme obsté trical et incontinence urinaire
Sergent rapporte les données récentes sur traumatisme
obstétrical et incontinence urinaire. Les données de la
littérature concernant les conséquences de la grossesse
sur la statique pelvienne, en particulier sur l’incontinence
urinaire sont nombreuses et parfois contradictoires.
Certaines données font référence à des études non
exemptes de critiques méthodologiques par la faiblesse
des effectifs ou la sélection des populations. Même s’il
existe des points incontestables entre grossesse et statique
212
pelvienne, le bon sens doit prévaloir dans l’intérêt de la
mère comme dans celui de son enfant.
La grossesse, passée vingt semaines d’aménorrhée
(SA), est un facteur de risque établi d’incontinence chez
les femmes jeunes. Sont surtout concernées l’incontinence urinaire d’effort et l’incontinence urinaire mixte,
moins l’incontinence par hyperactivité vésicale. Ainsi, la
césarienne augmente le risque d’incontinence comparée
à l’état d’une nullipare avec un odds ratio (OR) de 2,5 [1].
L’accouchement par voie naturelle augmente ce risque
(OR : 3,4) et l’extraction instrumentale plus encore
(OR : 4,3), sans connaı̂tre précisément à l’heure actuelle
l’instrument le moins délétère (forceps ou ventouse).
Tout se joue en fait lors de la première grossesse, le
degré de parité ne semblant pas aggraver la situation.
D’autres facteurs de risque obstétricaux sont incriminés. Ce sont le terme de l’accouchement, le type de
présentation (défléchie, postérieure, pelvienne), la durée
de la seconde phase du travail, le poids et le périmètre
céphalique du nouveau-né. Leur implication réelle reste
controversée.
Les mesures préventives vis-à-vis de la survenue
d’une incontinence ne peuvent certainement pas reposer
sur la césarienne programmée. Plusieurs arguments
plaident en défaveur d’une telle attitude. Il faudrait
pratiquer en moyenne sept césariennes pour prévenir
une seule incontinence. La césarienne est un acte
chirurgical avec une morbidité et une mortalité propre.
Les risques anesthésiques (syndrome de Mendelson),
peropératoires (plaies vésicale, digestive, vasculaire,
urétérale) et postopératoires (accident thromboembolique, embolie amniotique, syndrome occlusif ou
d’Ogilvie, abcès ou hématome pariétal) ne sont jamais
nuls. Les risques à distance d’un utérus cicatriciel, pour
les grossesses ultérieures, sont de mieux en mieux
connus. Plus que la rupture utérine, ce sont les anomalies
d’insertion placentaire qu’il faudra redouter (placenta
praevia et placenta accreta). Le risque d’être confronté à
un accreta en cas de placenta antérieur sur un utérus
bicicatriciel est évalué à 40 %. Pour limiter les possibilités de césarienne en cours de travail, puisque dans ce
cas le risque d’incontinence serait identique à celui d’un
accouchement par voie naturelle, il faudrait programmer
la césarienne à 38 (SA). À ce terme, il n’est pas exclu
d’avoir un syndrome de détresse respiratoire pour le
nouveau-né.
Enfin, il faut intégrer le fait que dans la population la
plus handicapée par l’incontinence, c’est-à-dire la
population des femmes ménopausées, le poids des
facteurs de risques obstétricaux est très nettement
diminué, au profit d’autres facteurs de risque comme
l’âge de la patiente, l’obésité ou la présence d’une toux
chronique. Dès lors, le bénéfice de la césarienne réalisée
plusieurs années auparavant n’apparaı̂t plus nécessairement intéressant.
Lors d’un accouchement par voie naturelle, l’épisiotomie, qu’elle soit médiane ou médiolatérale, n’a pas fait
la preuve de son efficacité en terme de prévention de
l’incontinence urinaire. En revanche, la kinésithérapie des
muscles releveurs pendant et après la grossesse semble
bénéfique.
Bandelettes sous-uré trales et grossesse
Avec plus d’un million de bandelettes posées dans le
monde, parfois chez des femmes en période d’activité
génitale, la question de la grossesse et de l’accouchement
après mise en place de bandelette sous-urétrale (BSU) se
pose de plus en plus régulièrement. Quelques publications rapportent quelques cas de grossesse sans morbidité particulière. De Tayrac, sous l’égide de la Société de
chirurgie gynécologique et pelvienne, rapporte les
résultats d’une enquête auprès des gynécologues-obstétriciens français. Trois mille quatre cents gynécologues
ont été contactés. Quinze praticiens ont rapporté 17 cas
de grossesse après BSU. Le taux de récidive de l’IUE était
de 11,8 % pendant la grossesse et 13,3 % dans le postpartum. Sur les 15 femmes ayant accouché, sept ont subi
une césarienne pour différentes raisons (antécédent de
cure de l’IUE, antécédent d’accouchement dystocique,
gémellité) et huit ont accouché par voie basse. Aucune
patiente ayant accouché par césarienne n’a récidivé une
IUE contre deux sur les huit patientes ayant accouché par
voie basse. Même si cette petite série ne permet pas
d’apporter de données statistiquement significatives, elle
est la première à tenter d’apporter une réponse au mode
d’accouchement à privilégier.
Prolapsus génito-urinaires
Si la cure de prolapsus génital par voie haute est
relativement bien standardisée, il n’en est pas de même
pour la voie basse, tant pour la technique proprement
dite que pour l’utilisation et le choix de l’implant de
renfort idéal.
Ré sultats à court terme du Prolift®
Fatton (O194) rapporte les résultats à court terme du
traitement du prolapsus génital par voie basse par le dispositif
Prolift®. Cent dix patientes, d’âge moyen 62,3 ans,
opérées dans trois centres et présentant au moins un
élément de prolapsus de degré 3, ont été suivies de manière
rétrospective. L’implant utilisé était total (antérieur et
postérieur) dans 53,6 % des cas, antérieur dans 20 %, et
postérieur dans 26,3 % des cas restants. La durée
opératoire moyenne était de 89,8 minutes. Lorsque l’utérus
était encore en place, celui-ci était conservé pour 81 %
des patientes. La morbidité opératoire a comporté une
plaie de vessie ne modifiant pas la stratégie opératoire.
À trois mois, 106 patientes sont contrôlées. Le taux
213
d’exposition de plaque est de 4,7 % et de rétraction de 17 %.
L’exposition de plaque a été traitée trois fois sur cinq par
un traitement local en consultation et une estrogénothérapie locale, deux fois sur cinq par une exérèse partielle de la
prothèse au bloc opératoire. À trois mois, le taux d’échec
défini par la récidive d’un prolapsus symptomatique et/ou
de degré supérieur ou égal à 3 est de 4,7 %. L’analyse des
récidives de prolapsus fait apparaı̂tre des hystérocèles
extériorisées entre un soutien antérieur et postérieur, une
cystocèle après réparation postérieure isolée, des cystocèles
atypiques sous-trigonales après rétraction d’un Prolift®
antérieur. L’auteur conclut à la faisabilité et à la faible
morbidité immédiate de cette technique avec des chiffres
d’exposition prothétique proches de la promontofixation.
Il faut noter, néanmoins le faible recul (trois mois) de cette
série.
Pelvicol® et cure de cystocè le
Plutôt que d’employer un implant de renfort synthétique,
Rouache (O195) préfère utiliser un implant de collagène
fixé par voie transobturatrice. Quarante-six patientes,
porteuses d’une cystocèle de degré 1 à 4, ont subi une
dissection de la cystocèle par voie vaginale avec mise en
place d’une prothèse de collagène (Pelvicol®) fixée en
avant par voie transobturatrice et en arrière à l’isthme
utérin ou aux ligaments utérosacrés. La durée opératoire
spécifique moyenne de mise en place de la plaque était de
vingt-cinq minutes, la durée moyenne d’hospitalisation
de quatre jours, le recul moyen de vingt-cinq mois
(12-36). Un cas d’expulsion de plaque a été observé à
quinze jours. La cystocèle a été complètement corrigée
pour 93,5 % des patientes. Les récidives ont eu lieu à
trois, six et douze mois. Un cas d’impériosités de novo
persistant a été observé. L’auteur conclut à la simplicité
de la technique et à ses bons résultats à moyen terme.
Chirurgie des prolapsus gé nito-urinaires en 2006
Richard Villet réalise un état de l’art sur la chirurgie
actuelle des prolapsus génito-urinaires. Les prolapsus
génito-urinaires doivent être opérés lorsqu’ils entraı̂nent
des troubles fonctionnels. Leur prise en charge nécessite
une analyse sémiologique soigneuse des dégradations
anatomiques au niveau des trois compartiments du
périnée (antérieur urologique, moyen gynécologique,
postérieur digestif) que celles-ci intéressent les niveaux
haut, moyen ou bas du vagin.
Les dégradations basses concernent :
– en avant, la région sous-urétrale, et sont traitées
lorsqu’il existe une incontinence urinaire d’effort, par un
soutènement sous-urétral mis en place par voie rétropubienne ou transobturatrice ;
– en arrière, le noyau fibreux central qui doit être
réparé avec une colpopérinéorraphie associée à une
myorraphie basse des élévateurs, surtout lorsqu’il existe
une diastasis de ces derniers. Cette myorraphie des
élévateurs ne doit pas être « remontée » car elle ne peut
ni traiter ni prévenir les colpocèles postérieures secondaires.
Les dégradations moyennes ou hautes doivent être
réparées par une voie vaginale ou abdominale. Au vu
de l’analyse de la littérature, la voie abdominale, avec
mise en place d’une et/ou deux prothèses pré- et/ou
rétrovaginales, donne de meilleurs résultats que la voie
vaginale. Cette intervention par voie abdominale peut
être réalisée par laparotomie ou laparoscopie. Cette
dernière doit permettre d’effectuer la même technique
que par laparotomie et nécessite un apprentissage
sérieux. Il est admis qu’une hystérectomie est logique
lors de la voie abdominale. Celle-ci sera non conservatrice, à plus forte raison après la ménopause, et subtotale,
car la conservation du col utérin diminue par quatre ou
cinq le risque d’exposition prothétique (2 à 3 versus 12 à
15 %). En cas de laparoscopie, l’extraction de l’utérus
pose problème si on ne possède pas un morcellateur, car
bien évidemment l’ouverture vaginale n’est pas logique
pour extraire l’utérus. Les techniques par voie abdominale sont parfaitement réglées. Par voie vaginale, les
techniques sont beaucoup moins standardisées. La
dissection des éléments prolabés est sans doute aussi
importante que la réparation, car cette dernière ne peut
se faire correctement que si la dissection a été parfaite.
Classiquement, cette dissection large comprend une
hystérectomie. Les différents ligaments utérins conservés
servent à la réparation. En avant, les ligaments ronds et
les pédicules annexiels, associés à une plicature au fil non
résorbable du fascia sous-vésical, assureront le maintien
de la vessie. En arrière, le fond vaginal sera maintenu par
les utéro-sacrés et la face antérieure du rectum par une
plicature du fascia prérecti, là encore au fil non
résorbable. En l’absence d’utéro-sacrés corrects, une
fixation du fond vaginal pourra être faite aux ligaments
sacro-épineux. Cette technique bien réalisée donne, à
moyen terme, d’excellents résultats, mais il est clair que
dans la littérature les résultats par voie vaginale sont très
disparates et semblent moins fiables à long terme,
d’autant plus que le succès sur un compartiment dépend
largement des gestes effectués sur les compartiments
adjacents. C’est pourquoi, au vu de la bonne tolérance
des bandelettes sous-urétrales de polypropylène, de
nombreuses techniques de mise en place de prothèses
par voie vaginale ont été décrites. Une étude prospective
randomisée conclut qu’à six mois, les résultats sont
meilleurs avec l’utilisation de prothèses. Mais, la mise en
place de prothèses n’est pas exempte de complications :
érosion, infection, rétraction source de douleurs avec
dysurie, dyspareunie, dyschésie. Pour standardiser la
mise en place des prothèses par voie vaginale, trois kits
sont proposés sur le marché : Prolift® (Ethicon Women
Health Urology), Apogée et Périgée (AMS) et Avaulta
(Bard). Des premières publications faites avec le Prolift®,
214
il ressort que la conservation utérine diminue le risque
d’érosion. Cela pose donc à nouveau le problème de la
conservation utérine par voie vaginale. Dans la littérature, il n’existe aucun argument pour ou contre la
conservation utérine sur le plan fonctionnel urinaire,
sexuel, digestif ou en termes de statique pelvienne. Il
existe en revanche quelques indications incontournables
d’hystérectomie. En cas de conservation, un bilan
préopératoire correct est indispensable.
En conclusion, l’intervention de référence dans la
chirurgie du prolapsus est la promontofixation avec
prothèses par laparotomie ou laparoscopie. Cette intervention devrait constituer un bras de référence dans
toutes les études randomisées. Les techniques de mise en
place de prothèses par voie vaginale sont parfaitement
standardisées grâce aux kits commercialisés, mais la
prothèse idéale reste sans doute encore à découvrir...
Divers
Comparaison de la dé bitmé trie de l’instantané mictionnel
et de la dé bitmé trie libre chez la femme
Peu d’études portent sur l’influence de la présence d’un
cathéter urétral lors de la débitmétrie de l’instantané
mictionnel. Valentini (O198), chez 217 femmes consultant
pour troubles du bas appareil urinaire (vessie neurologique, diabète et prolapsus de grade au moins deux
exclus), réalise en position assise, des débitmétries libres
et des débitmétries lors d’instantanés mictionnels en
présence d’un cathéter urétral CH 10. Le volume uriné
devait être d’au moins 100 ml et la miction continue. Elle
constate une diminution significative du débit maximum, une augmentation significative du temps de
miction et du pourcentage de volume résiduel. Ces
modifications lui semblent imputables à la présence du
cathéter urétral. Les grandes différences observées entre
débitmétrie libre et débitmétrie lors de l’instantané
mictionnel doivent être prises en compte lors de
l’interprétation des données des examens.
Existe-t-il encore une place pour l’UIV dans le bilan
des infections urinaires ré cidivantes de la femme ?
Nohra (O199) analyse une série de 613 femmes prises en
charge au centre thermal de La Preste de 1974 à 1997 pour
infections urinaires récidivantes. Les patientes avaient
eu, en moyenne, 5,6 crises. L’UIV était considérée
comme normale ou révélait des anomalies anatomiques
mineures pour 90,1 % des patientes. Les anomalies
potentiellement en relation avec les infections urinaires
récidivantes, qui ont été visualisées chez les 9,9 % de
femmes restantes, auraient pu être diagnostiquées sur
une échographie. L’auteur conclut à l’inutilité de l’UIV
dans le bilan d’infections urinaires récidivantes de la
femme.
Référence
1. Résumés du 100e Congrès français d’urologie. Prog Urol
16, 6 (Suppl 1), 1A-58A
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