Dossier
La prescription
des psychotropes
en pédopsychiatrie :
mythes et réalités
Jean Chambry
Fondation Vallée, 7, rue Bensérade, 94257 Gentilly Cedex
RÉSUMÉ
La prescription des psychotropes s’est profondément modifiée en pédopsychia-
trie ces dix dernières années. Parmi les raisons de ce changement interviennent
l’amélioration de l’arsenal thérapeutique, l’influence des données neurobiolo-
giques et des classifications anglo-saxonnes. Cet article précise la place actuelle
de la prescription des psychotropes en pédopsychiatrie, et définit la demande
qui émane soit des parents, soit de l’équipe soignante et rarement de l’enfant.
Une conduite à tenir est proposée ainsi qu’un rappel des principales classes de
psychotropes et de leurs indications. Une vignette clinique concernant le cas
d’une jeune fille souffrant de TOC montre comment la prescription d’un
traitement psychotrope peut être organisée.
Mots clés : adolescent, pédopsychiatrie, prescription, psychotropes
La prescription des psychotropes
s’est profondément modifiée en
pédopsychiatrie ces dix dernières an-
nées. Parmi les raisons de ce change-
ment interviennent l’amélioration de
l’arsenal thérapeutique, l’influence
des données neurobiologiques et des
classifications anglo-saxonnes. Ce-
pendant, il existe de grandes varia-
tions dans l’utilisation de ces médica-
ments et deux écueils doivent être
évités, à savoir une position idéologi-
que qui rejetterait systématiquement
l’utilisation de psychotropes, à l’in-
verse un soin qui se résumerait à la
prise d’un traitement médicamenteux.
Place de la prescription
de psychotropes
La place de la prescription varie
énormément en fonction du prescrip-
teur (pédiatre, médecin généraliste,
pédopsychiatre hospitalier ou de sec-
teur) et de ses options théoriques. S’il
semble indispensable de garder pré-
sent à l’esprit que la prescription d’un
psychotrope à un enfant ou un adoles-
cent, ou même à un nourrisson, est
loin d’être un acte anodin et dénué de
conséquences, il reste important de
bien délimiter les champs d’action bé-
néfiques des psychotropes afin d’envi-
sager leur prescription à bon escient.
Concrètement, certains médica-
ments sont employés malgré l’ab-
sence d’information encore disponi-
ble sur leur sûreté et leur efficacité
chez l’enfant, et les règles de prescrip-
tion et de surveillance ne sont pas
toujours respectées dans leurs aspects
spécifiques au jeune âge, exposant à
la fois le patient et le prescripteur.
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Tirésàpart:J.Chambry
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D’après Vantalon et al. [1], diverses raisons objectives
rendent compte, « de façon conjuguée », de l’emploi
« anarchique » des psychotropes chez l’enfant et l’adoles-
cent :
le manque de données sur la pharmacocinétique et
la pharmacodynamique des substances psychoactives
dans le jeune âge ;
les difficultés méthodologiques posées par le dia-
gnostic et l’évaluation en pédopsychiatrie avec nécessité
d’homogénéiser les groupes de patients étudiés et de
disposer d’instruments valides et fiables de mesure du
changement apporté par le traitement ;
la particularité de l’enfant, qui est un être en déve-
loppement, en changement et en constante interaction
avec son environnement, notamment son milieu familial ;
le problème de l’effet placebo, rarement mesuré avec
précision chez l’enfant, variable selon les études et les
pathologies ;
l’originalité de l’enfant en tant que patient, rarement
demandeur de la prescription, à l’inverse de l’adulte, et
pour lequel (de même que pour sa famille) se posent les
questions de l’observance et de l’information « éclairée »
sur la conduite pratique du traitement, ses objectifs, ses
effets secondaires habituels ou exceptionnels, ses risques,
mis en balance avec les risques d’abstention thérapeuti-
que pour la pathologie considérée.
La conséquence de ces particularités, inhérentes à la
pédopsychiatrie, est l’absence (ou la rareté) des essais
contrôlés pour nombre de produits. Le psychiatre pres-
cripteur ne dispose ainsi que de résultats d’études condui-
tes chez l’adulte, sans autorisation de mise sur le marché
(AMM) pour l’enfant. Il se trouve placé dans une situation
de « vide juridique », contraint à renoncer à une prescrip-
tion qui pourrait être bénéfique à l’enfant, ou à la réaliser
sous sa propre responsabilité.
Comme nous le rappelle C. Epelbaum [2], en pédo-
psychiatrie plus encore qu’en psychiatrie adulte, l’abord
thérapeutique ne peut être conçu que comme multidi-
mensionnel, mettant en parallèle des méthodes psycho-
thérapiques individuelles ou de groupe, éducatives, réé-
ducatives, que ce soit de façon ambulatoire ou
institutionnalisée. Ces différentes approches, accompa-
gnées d’un travail avec la famille de l’enfant, vont agir de
façon véritablement synergique lorsqu’elles font partie
d’une démarche réfléchie et cohérente. La thérapeutique
médicamenteuse doit alors trouver sa place, à la fois sur
un plan « spatial » et chronologique, au sein d’un dispo-
sitif pertinent. Trop souvent, le médicament est encore
conçu par de nombreux pédopsychiatres comme antino-
mique de leur démarche thérapeutique multidimension-
nelle, surtout lorsque celle-ci est sous-tendue par une
référence psychanalytique. Le médicament est censé
jouer sur les systèmes biochimiques supposés être les
supports des affections psychiques. La psychothérapie est
censée avoir, elle, une action différente : elle vise à obtenir
une modification des systèmes psychiques dont l’altéra-
tion entraîne la maladie mentale. Si ces modes d’action
sont, certes, hétérogènes, ils peuvent tout à fait être com-
plémentaires, à condition qu’ils soient pensés et utilisés de
façon appropriée et coordonnée. En effet, la mise sous
traitement médicamenteux peut permettre l’atténuation
d’une symptomatologie bloquant la mise en mots de la
souffrance psychique, nécessaire au démarrage d’un
abord psychothérapique. Elle peut rassurer l’enfant et sa
famille pour leur permettre d’adhérer à un processus thé-
rapeutique plus global impossible autrement. Le risque
reste que la diminution, voire la disparition des symptô-
mes, provoque une sorte de guérison de surface, liquidant
les enjeux économiques défensifs et communicatifs du
symptôme, et rendant apparemment caduque la nécessité
d’une aide thérapeutique située à un autre niveau, psy-
chothérapique notamment.
C’est pourquoi, la proposition de traitement doit s’ins-
crire dans une appréhension plus globale des troubles de
l’enfant et des modes relationnels familiaux, et non se
situer en réponse immédiate à une demande émanant de
l’un ou l’autre des protagonistes.
Définir la demande
Selon les situations, la demande de prescription peut
émaner de différentes personnes.
Parents
Ils peuvent demander une prescription de « confort »
sans que de véritables troubles n’existent. Dans d’autres
cas, il s’agit pour eux d’éviter une confrontation avec leurs
propres doutes, leurs propres angoisses, leur propre souf-
france psychique, en masquant en quelque sorte le symp-
tôme produit par leur enfant. Certains parents dont les
enfants présentent de réels troubles psychiatriques peu-
vent aussi refuser de s’engager dans un processus théra-
peutique plus global dont ils pressentent qu’il nécessitera
une remise en cause minimale des relations intrafamiliales
et de leur attitude par rapport à l’enfant.
Dans d’autres cas, les parents demandeurs d’un traite-
ment médicamenteux se sentiront très culpabilisés par
leur demande, se vivant d’un côté comme incapables de
supporter les symptômes de l’enfant et d’un autre comme
incapables de l’aider efficacement, quand ils ne se sentent
pas plus ou moins consciemment responsables des trou-
bles. Cette culpabilité peut être verbalisée directement,
mais elle peut aussi empêcher l’expression d’une de-
mande de traitement, voire être retournée en agressivité
vis-à-vis du prescripteur (le traitement est considéré
comme néfaste ; les parents ne mettent en avant que ses
effets secondaires désagréables, etc.).
Équipe soignante (en pédopsychiatrie)
En cas d’hospitalisation « en urgence » dans un service
hospitalier de psychiatrie, la prescription de psychotropes
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est souvent rapide du fait même des motifs d’hospitalisa-
tion (dépression sévère, bouffée délirante aiguë, agitation
clastique, etc.) et pose finalement peu de problèmes lors-
que l’indication d’hospitalisation a été bien établie. Dans
les états d’excitation et d’agitation aigus, avec ou non
symptomatologie psychotique, il s’agit avant tout de ré-
duire l’excitation, de réintroduire des limites. On a sou-
vent employé le terme imagé de « camisole chimique »,
qui correspond en fait au rétablissement d’un système de
pare-excitation qui puisse de nouveau laisser les proces-
sus de pensée fonctionner d’une façon non anarchique et
angoissante. La prescription représente ici une première
étape pour pouvoir de nouveau entrer en communication
et utiliser d’autres moyens thérapeutiques.
Dans certains cas, la prescription est au contraire
différée afin de préserver, en sécurité, une période d’obser-
vation des troubles qui permettent de poser un diagnostic
plus précis et fiable. Dans certains cas enfin, la prescrip-
tion s’avère inutile. La séparation du milieu familial per-
met la disparition très rapide des symptômes. Ceux-ci
semblent avant tout réactionnels à un conflit intrafamilial
dans lequel l’enfant était pris sans possibilité d’aménage-
ments défensifs efficaces autres que des symptômes psy-
chiatriques plus ou moins bruyants.
Toute autre est la situation d’hospitalisation au long
cours en institution pédopsychiatrique. Dans ce cadre, la
demande, par l’équipe soignante, d’une prescription mé-
dicamenteuse pour un enfant, doit toujours faire envisager
plusieurs paramètres. Cette demande vient souvent s’ins-
crire dans des systèmes de contre-attitudes des équipes
soignantes. Elle intervient souvent dans des moments de
découragement qui doivent être analysés au cours de
réunions institutionnelles avant qu’une réponse médica-
menteuse ne soit envisagée.
Équipe soignante (en pédiatrie)
Lors d’une hospitalisation en pédiatrie pour une patho-
logie somatique, l’équipe peut demander une prescription
de psychotropes pour un enfant pour différentes raisons
(éléments dépressifs, agitation, anxiété, etc.). Là aussi, il
faudra, grâce à l’intervention d’un tiers appartenant à une
équipe de psychiatrie de liaison ou à un « psy » apparte-
nant à l’équipe pédiatrique, mettre en lumière les diffé-
rents enjeux de cette demande. La tentation inconsciente
est d’accepter les réactions agressives ou douloureuses de
l’enfant (pleurs, agitation avec colère, refus de participa-
tion aux soins, etc.) et de le positionner comme malade
psychiatrique en demandant un traitement souvent séda-
tif. La demande est alors une demande de double répara-
tion : il faut enlever à l’enfant sa souffrance par un traite-
ment, et soulager par la même occasion l’équipe de cette
souffrance qu’elle ne peut métaboliser. Il faut bien sûr
analyser les différents facteurs avant de répondre directe-
ment à la demande de prescription. Parler avec les équi-
pes soignantes de leur vécu, en les écoutant et en les
soutenant n’est pas toujours chose simple, tant il est vrai
qu’il est difficile pour elles de dire (et ceci particulièrement
aux médecins responsables du service), et même de pen-
ser consciemment qu’un enfant leur devient insupporta-
ble, non pas en fonction d’une pathologie psychiatrique
nouvellement éclose, mais d’un ensemble de ressentis qui
les renvoient à leurs propres angoisses de mort.
Le jeune
Le jeune n’exprime que rarement une demande théra-
peutique de lui-même. Le traitement lui est le plus souvent
imposé par l’un ou l’autre des intervenants. Si la mise en
place du traitement n’est pas discutée assez longuement
avec lui et qu’une certaine collaboration de sa part n’est
pas acquise, il risque de vivre le médicament comme
attaquant un corps qu’il sent déjà comme défaillant.
Le recours à un traitement médicamenteux réactualise
la blessure narcissique que la maladie mentale inflige : il
se sent impuissant à lutter seul contre elle, doit faire le
deuil d’une certaine toute-puissance et doit se plier aux
désavantages qui lui sont imposés (effets secondaires),
même s’il se sent soulagé de certains symptômes qui le
gênaient. Les réactions de l’enfant ou de l’adolescent à la
mise en place d’un traitement peuvent être différentes
selon son âge et dépendent également de son niveau
intellectuel de compréhension des enjeux du traitement,
de la nature de ses troubles.
Conduite à tenir
En pratique, il semble avant tout essentiel d’analyser la
place du symptôme (troubles réactionnels, maturatifs, ou
troubles inscrits dans la structure de l’enfant) et de la
demande de traitement médicamenteux, avant de pouvoir
répondre de façon adaptée. Il faut que le praticien soit
particulièrement vigilant dans ses prescriptions même
transitoires (pour passer un cap, un moment de crise), pour
ne pas qu’elles deviennent des prescriptions de confort
pour les parents, et, par ailleurs, figent l’enfant dans un
fonctionnement désormais reconnu comme pathologique
mais non explicité dans sa dimension symbolique. La
place du traitement psychotrope doit, dans tous les cas,
être resituée comme complémentaire aux autres moyens
thérapeutiques.
Quand une prescription s’avère nécessaire, il sera
fondamental :
d’adapter les doses au cas par cas, les doses efficaces
et non toxiques étant très différentes d’un enfant à l’autre ;
de toujours penser que prescrire doit rester un acte
de parole ; il s’agit donc de parler du traitement à l’enfant
et à ses parents ou à l’équipe qui l’a en charge, d’en
expliciter les buts propres, le déroulement, les effets se-
condaires et en le démystifiant (ce n’est pas un acte de
magie que de prescrire) ;
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de toujours garder à l’esprit qu’en prescrivant un
psychotrope, on ne s’adresse qu’à la partie émergée des
conflits internes (les symptômes), et qu’il s’agit de com-
prendre parallèlement les enjeux de ces conflits.
Action des psychotropes
L’action des psychotropes se situe à différents niveaux
complémentaires et intriqués.
Action pharmacologique
Avec ses bases neurobiologiques, elle est certaine,
bien qu’elle ne soit pas toujours, loin de là, modélisable.
Sur un plan psychodynamique
Le médicament s’adresse au compromis que repré-
sente le symptôme dans les différents conflits en cause
dans les troubles du patient. Il agit, en dehors de son action
pharmacologique propre, par effet placebo et ceci quels
que soient les troubles en cause et leur gravité. C’est dire
l’importance de l’attitude de l’entourage, parental ou ins-
titutionnel de l’enfant, quant à la prescription de médica-
ment et la conduite du traitement.
D’après C. Epelbaum [2], le médicament peut revêtir
différents statuts :
il a la valeur d’un objet transitionnel particulier qui
représente le thérapeute, appartient au corps propre de
l’individu qui le fait sien en l’ingérant, mais appartient
aussi à la réalité externe, chimique ; il est aussi contenant,
limitant, rassurant, notamment par la ritualisation de sa
prise ;
c’est également un objet magique que ce soit pour
les demandeurs (comme nous l’avons vu) ou pour le
patient lui-même, ce qui peut parfois devenir inquiétant
quand l’enfant a l’impression que son corps et son esprit
lui échappent ;
il peut devenir un objet de jouissance orale ou plus
perverse (manipulation de l’entourage par exemple) ;
il peut représenter aussi un objet contraphobique
pour le médecin, le malade et sa famille ;
enfin, c’est un objet de langage nouveau dans le
discours du malade, de sa famille et du médecin, qui
caractérise en quelque sorte le malade par sa maladie.
Différentes classes des principaux
psychotropes et indications [3,4]
Neuroleptiques
On distingue les antipsychotiques atypiques (rispéri-
done, olanzapine, amisulpride) des neuroleptiques classi-
ques. Ces nouvelles molécules se caractérisent par la
diminution des effets secondaires en particulier sur les
fonctions cognitives, ce qui en fait une indication de choix
en pédopsychiatrie. Cependant, il n’existe que très peu de
données sur leur utilisation chez les jeunes.
Rispéridone (Risperdal
®
)
Antagoniste dopaminergique D2, elle se distingue des
neuroleptiques classiques par une puissante activité anta-
goniste 5-HT2 qui participerait à l’effet antipsychotique,
en particulier sur les symptômes négatifs. Elle induirait des
effets extrapyramidaux moins marqués.
Peu de données sont disponibles chez l’enfant de
moins de 15 ans. Sa principale indication repose sur le
traitement des psychoses, en particulier des psychoses
schizophréniques aiguës et chroniques. Elle est très utili-
sée chez l’adolescent dans cette indication. Les princi-
paux effets secondaires reposent sur l’existence de syndro-
mes extrapyramidaux (doses dépendantes), de prise de
poids (2 kg en 10 semaines de traitement), d’un risque de
syndrome malin. Une forme retard (Risperdal consta
®
) est
désormais commercialisée.
Cette molécule a obtenu une extension d’AMM pour
l’enfant de5à11ansprésentant un retard mental accom-
pagné de troubles du comportement. Elle est utilisée par-
fois dans l’autisme pour limiter les comportements d’auto-
mutilation, d’agitation et d’agressivité ; elle a fait
récemment l’objet d’études contre placebo dans cette
indication qui ont confirmé son efficacité ; elle est aussi
utilisée dans les conduites agressives de l’enfant et de
l’adolescent. Elle pourrait être efficace dans les phases
maniaques de l’enfant et de l’adolescent présentant un
trouble bipolaire (une étude en 1999) et son efficacité est
estimée à 50 % dans les tics chroniques et la maladie de
Gilles de la Tourette dans des études ouvertes aux doses de
0,5-4 mg/j.
Olanzapine (Zyprexa
®
)
Il s’agit d’un neuroleptique atypique, voisin de la clo-
zapine, n’entraînant que peu d’effets extrapyramidaux ou
d’hyperprolactinémie. Il possède une affinité pour les ré-
cepteurs dopaminergiques D1et D2, sérotoninergiques
5HT2 et muscariniques. Ses indications chez l’adulte ne
cessent de croître : traitement de la schizophrénie, traite-
ment des épisodes maniaques modérés à sévères, préven-
tion des récidives des troubles thymiques des patients
présentant un trouble bipolaire. Bien qu’utilisée chez les
adolescents en raison du respect des fonctions cognitives
et de sa bonne tolérance sur le plan extrapyramidal, il
n’existe aucune étude publiée chez les moins de 18 ans.
Son principal effet secondaire repose sur la prise de poids
(en moyenne 11 kg sur 10 mois de traitement).
Amisulpride (Solian
®
)
De la famille des benzamides, antagoniste des récep-
teurs dopaminergiques D2, elle exerce à faible dose un
effet désinhibiteur et un effet antiproductif à forte dose.
Bien que plus ancienne, cette molécule a été reclassée
dans les neuroleptiques atypiques. Ses indications sont le
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traitement de la bouffée délirante, de la schizophrénie. Il
n’existe pas de données chez les moins de 15 ans. Ses
effets secondaires sont la baisse du seuil épileptogène, la
prise de poids, l’hyperprolactinémie avec aménorrhée et
galactorrhée, des manifestations extrapyramidales. Elle a
parfois été utilisée dans les tics chroniques et la maladie de
Gilles de la Tourette
Les neuroleptiques classiques
Ils agissent par inhibition postsynaptique de la trans-
mission dopaminergique, ce qui leur confère des proprié-
tés antipsychotiques et extrapyramidales. Ils ont aussi une
activité : sur les récepteurs adrénergiques, d’où leurs effets
de sédation et d’hypotension orthostatique ; sur les récep-
teurs muscariniques, avec des effets atropiniques corres-
pondants ; sur les récepteurs histaminiques, avec activité
antihistaminique et sédative correspondante. On peut les
classer en trois grands groupes qui s’opposent selon leurs
types d’action, en dehors même de leur classe pharmaco-
logique propre :
les neuroleptiques sédatifs sont avant tout anxiolyti-
ques et sédatifs par rapport à l’excitation, l’agitation, les
conduites violentes, mais sont aussi antidélirants (lévopro-
mazine Nozinan
®
; chlorpromazine, Largactil
®
);
les neuroleptiques désinhibiteurs sont au contraire
actifs sur le retrait, l’inhibition psychotique, l’inertie émo-
tionnelle (carpipramine, Prazinil
®
);
les neuroleptiques polyvalents sont à la fois sédatifs,
antidélirants et désinhibiteurs, mais chaque fonction s’ex-
tériorise en fonction de la dose et de la durée du traitement
(halopéridol, Haldol
®
; loxapine, Loxapac
®
).
Leurs indications concernent :
Pour les neuroleptiques sédatifs et/ou polyvalents
Les psychoses aiguës de l’adolescence.
Les troubles graves du comportement, avec agita-
tion, auto- et/ou hétéro-agressivité. La prescription est
basée sur des règles simples : début du traitement à des
doses faibles, augmentation progressive sans dépasser
deux fois par semaine, établissement d’une posologie
optimale en fonction d’un équilibre entre efficacité théra-
peutique et effets indésirables. La prescription de neuro-
leptiques dans le trouble des conduites est donc limitée
par leur action sédative, leur manque de spécificité et le
risque de survenue de dyskinésies tardives après 3 mois de
traitement cumulatif. Elle est donc à éviter au long cours.
Les neuroleptiques doivent être réservés aux situations
aiguës et transitoires où l’agressivité est invalidante, gê-
nent les interactions sociales et les apprentissages, et ils
passent au second plan par rapport à d’autres familles
chimiques.
Les troubles anxieux paroxystiques.
Pour les neuroleptiques polyvalents
La maladie de Gilles de La Tourette. L’efficacité des
neuroleptiques a été prouvée par plusieurs études contrô-
lées en double aveugle contre placebo. L’halopéridol
(Haidol
®
) fut le premier traitement médicamenteux pro-
posé dans cette indication, avec une amélioration dans 70
à 80 % des cas. Mais la limite de ce traitement est liée à la
survenue d’effets secondaires gênants obligeant à l’inter-
ruption du traitement. Il existe également un risque de
dyskinésies tardives inhérent aux traitements neurolepti-
ques au long cours. La posologie initiale est faible (0,25-
0,5 mg/j) en une prise vespérale, avec augmentation très
progressive des doses de 0,25-0,5 mg par semaine, jusqu’à
obtention d’une réduction tolérable des symptômes.
Pour l’autisme, la prescription de neuroleptiques est
discutée, souvent décevante en ce qui concerne le proces-
sus autistique lui-même dont l’évolution semble davan-
tage dépendante d’une cure plus globale. Cependant cer-
tains neuroleptiques désinhibiteurs (Dogmatil
®
à faibles
doses) peuvent réduire les stéréotypies et le Nozinan
®
,le
Melleril
®
, la Clozapine
®
agir sur les conduites automuti-
latoires, voire les conduites agressives ou l’agitation. En
fait, tous ces traitements sont avant tout symptomatiques et
non étiologiques. De nos jours, ces produits (surtout l’Hal-
dol
®
aux doses de 0,05 à 1 mg/kg/j), dont l’efficacité sur les
symptômes comportementaux, la labilité affective, les sté-
réotypies, le retrait et certaines tâches cognitives a été
argumentée par plusieurs études contrôlées dans
l’autisme, restent prescrits au long cours, malgré leur
risque de dyskinésies tardives ou de dyskinésies de retrait.
L’hyperactivité avec déficit de l’attention reste une
indication de neuroleptiques polyvalents à faible dose
(Haldol
®
) ou sédatifs (Melleril
®
) mais leurs nombreux
effets secondaires doivent limiter leur prescrition à des cas
exceptionnels pour des durées brèves.
Les effets secondaires restent fréquents : somnolences,
ralentissement psychique, indifférence psychomotrice et
affective, baisse de la libido, avec possibilité d’impuis-
sance particulièrement difficile à vivre pour les adoles-
cents ; prise de poids, effets végétatifs dus au blocage
noradrénergique, surtout avec les phénothiazines (hypo-
tension orthostatique, tachycardie) ; effets atropiniques
(troubles de l’accommodation, constipation, rétention
d’urine, sécheresse de la bouche) ; photosensibilité avec
les phénothiazines, phénomènes extrapyramidaux.
Antidépresseurs
Inhibiteurs sélectifs de la capture de la sérotonine ISRS
Véritable révolution dans le traitement des troubles
anxiodépressifs de l’adulte, il existe un flou quant aux
possibilités de prescription dans la période de 15 à 18 ans.
Certains produits, comme la fluoxétine (Prozac
®
), sont
accompagnés d’une note contre-indiquant leur emploi
avant l’âge de 15 ans. Paradoxalement, dans la littérature
récente les molécules tricycliques ne constituent plus le
traitement médicamenteux de première intention dans la
dépression de l’enfant et l’adolescent, du fait de leur
potentialité cardiotoxique et de l’absence de démonstra-
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