Temps de crise(s)
La conjoncture mondiale est marquée par
une juxtaposition de crises qui, se cumu-
lant pour affecter l’activité, créent une
situation quasiment sans précédent histori-
que. La crise financière qui a éclaté à l’été
2007 est loin d’être résorbée. Si les autori-
tés ont jusqu’ici évité le pire (des faillites
en cascade d’établissements bancaires et
financiers), le système financier paraît
devoir être durablement perturbé. En parti-
culier, les conditions de crédit vont conti-
nuer à se durcir. Deuxième choc en cours,
les prix du pétrole ont doublé entre l’été
2007 et l’été 2008, sans que les fondamen-
taux du marché (l’évolution de la demande
et de l’offre physiques) ne permettent d’ex-
pliquer totalement cet accès de fièvre,
comme le montre l’article d’Olivier
Reymondon et Mourad Ayouz. Certes, les
prix du pétrole sont orientés à la hausse
depuis le début de l’année 2002. Mais cette
nouvelle vague haussière arrive dans un
environnement bien différent en termes de
perspectives économiques, d’où l’impres-
sion de commencer « seulement » à vivre le
troisième choc pétrolier. La hausse des prix
de l’énergie a généré une poussée inflation-
niste, qui a également été nourrie depuis
un peu plus d’un an par la hausse des prix
des produits alimentaires. Dans son article,
Lucien Bourgeois se veut plutôt optimiste à
moyen terme sur la capacité des différents
pays à nourrir la population mondiale.
Mais, à cout terme, la demande de biocar-
burants, utilisés comme substitut du
pétrole, pourrait encore créer certaines ten-
sions sur quelques produits, notamment le
maïs. Quatrième élément affectant l’acti-
vité, le retournement du marché immobi-
lier qui est intervenu dans un grand nom-
bre de pays. Les Etats-Unis ont été les pre-
miers touchés, mais la correction est bru-
tale dans certains pays européens
(Espagne, Irlande, Royaume-Uni). Enfin,
sur le marché des changes, le dollar reste
faible alors qu’au contraire l’euro a conti-
nué à s’apprécier.
Si chacune de ces crises a ses fondements
propres, elles sont en partie liées. Une lon-
gue période de politiques monétaires
expansionnistes a généré une montée de
l’endettement, qui a nourri une bulle
immobilière. L’éclatement de cette dernière
pèse maintenant sur le système financier,
qui croyait avoir dilué les risques de
défauts hypothécaires dans des produits
financiers sophistiqués. Le contexte a éga-
lement été favorable au creusement de
déséquilibres commerciaux entre pays
développés et pays émergents. Ces derniers
ont profité de la demande de biens générée
Éditorial
Alain HENRIOT
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