SUD RADIO LE 6/10 – Le 17/04/2012 – 08 :20 :12 PASCAL

SUD RADIO
LE 6/10 – Le 17/04/2012 – 08 :20 :12
P ASCAL BATAILLE
A douze ans, Kevin pèse 103 kilos pour 1,70 mètre. Sa maman écrit,
elle, qu’elle est désespérée, qu’elle ne sait plus comment faire et qu’elle se sent
coupable de voir son enfant se détruire. Des lettres comme celle-ci, les
pédiatres, les nutritionnistes, comme le docteur Pierre AZAM, fondateur de
l’Observatoire de l’obésité en France, en reçoivent quasi quotidiennement. Ils
estiment, ces spécialistes, à quasiment 20 % le pourcentage d’enfants français
en surpoids ou obèses. Un enfant donc sur cinq, vous l’avez compris, et il se
pourrait que ce chiffre, cette proportion augmente encore puisque certains qui,
peut-être, dramatisent un peu la situation mais, en tout cas, nous annoncent
30 % d’enfants en surpoids, c'est-à-dire le taux que connaissent, aujourd’hui,
les Etats-Unis, par exemple, dans dix ans. Alors, est-ce que c’est la preuve que
notre pays de la gastronomie, du bien-manger, du terroir est en passe
d’engendrer une génération de gros ? Est-ce qu’il faut paniquer ? Est-ce qu’il
faut imposer la diète dans toutes les cours de récré ? Est-ce qu’il faut aller plus
loin que cette campagne du « manger-bouger », pourtant assez efficace ? Est-
ce qu’il faut, par exemple, interdire toute publicité pour les aliments gras et
sucrés ? On en parle, ce matin, dans le « 6/10 ». C’est l’un de nos dossiers
dans cette matinale. Vous pouvez vous exprimer sur le sujet sur le site
« sudradio.fr », voter tout simplement sur cette question « Etes-vous favorable,
ou non, à l’interdiction totale de la publicité pour les aliments, concernant les
aliments gras, les aliments sucrés, voilà tout ce qui peut conduire, évidemment,
à ce que la population…
G ILLES TESSIER
Tout ce qui est bon.
P ASCAL BATAILLE
…Tout ce qui est bon, dit Gilles TESSIER (phon)…
G ILLES TESSIER
C’est ça, le problème.
P ASCAL BATAILLE
Ce qui peut conduire, évidemment, à ce que les enfants, notamment, qui
sont plus influencés que les autres par ce marketing, par ces pubs, eh bien en
soient à consommer de plus en plus ces aliments-là. Alors, on en parle, ce
matin, notamment avec Christine KELLY qui nous fait le plaisir d’être avec nous.
Bonjour, Christine KELLY.
C HRISTINE KELLY
Bonjour, Pascal.
P ASCAL BATAILLE
Membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel, pour ceux qui l’ignorent
encore, et puis très motivée, très mobilisée toujours sur cette question de
l’obésité et du surpoids, notamment, évidemment, pour ce qui concerne les
enfants et les adolescents. Christine KELLY, est-ce que le dispositif actuel vous
semble montrer ses limites ? Est-ce qu’il faudrait aller plus loin que ces
campagnes « Manger-bouger », ces avertissements qui sont mis sur les pubs,
qui sont mis sur certains programmes ? Est-ce qu’il faut aller plus loin que ça ?
Est-ce qu’il faut être plus coercitif ? Est-ce qu’il faut aller jusqu’à l’interdiction
totale de la pub ?

C HRISTINE KELLY
A supposer qu’on supprime totalement la publicité à la télévision, qu’est-
ce qui va se passer ? Imaginons. Les enfants, ils vont à l’école, ils mangent ce
qu’ils veulent, ils vont dans les supermarchés, ils font la queue avec leurs
mamans. Ils sont à la hauteur des bonbons, des gâteaux et des chewing-gums.
Ils se baladent dans la ville, ils ont des affiches 4 x 3 aussi avec de la publicité.
Donc, est-ce que supprimer la publicité à la télévision serait la bonne solution ?
Si c’est la bonne solution, pourquoi pas mais rien n’a prouvé que, en supprimant
la publicité à la télévision, ça enlève l’obésité…
P ASCAL BATAILLE
Vous êtes pour, plus…
C HRISTINE KELLY
Plusieurs pays ont essayé ça…
P ASCAL BATAILLE
Oui, vous êtes plus favorable à la prévention, à ces mises en garde, à
ces avertissements que à une interdiction ?
C HRISTINE KELLY
Dans le sens où, par exemple, le Québec a essayé, depuis trente ans, a
supprimé la publicité pour les enfants et ont complètement isolé les enfants de
la publicité. Qu’est-ce qu’on constate ? L’obésité augmente. La Grande-
Bretagne avait commencé depuis deux-trois ans à limiter progressivement la
publicité, l’obésité augmente. La Suède, la Norvège, plusieurs pays ont essayé
et l’obésité augmente. Alors, si, par exemple, vous êtes malade et on vous dit
« Voilà, vous avez une maladie, on va vous couper la jambe mais rien n’a
prouvé que, en vous coupant la jambe, ça stoppe la maladie ». Est-ce que vous
allez vous laisser vous couper la jambe ? Non. Donc, est-ce que, en supprimant
la publicité, c’est la bonne solution ? A priori, non. Ce n’est pas à moi d’en
décider. Il n’empêche que, moi, je suis le porte-parole, si vous voulez, des
chaînes qui ont décidé, ensemble, depuis 2009, de signer une charte, une
charte qui s’appelle « la charte alimentaire » et les chaînes se sont engagées à
produire des émissions pour aider l’enfant à manger équilibré. Donc, au-delà du
« manger-bouger.fr » qui relève de l’INPES et du Ministère de la Santé, les
chaînes se sont engagées à faire des programmes, créer des programmes pour
pouvoir apprendre à l’enfant à manger équilibré, faire du sport, avoir des
activités physiques, etc…
P ASCAL BATAILLE
Alors, vous avez beaucoup œuvré, vous avez beaucoup œuvré dans ce
sens-là, Christine KELLY. Justement, est-ce que, alors ces programmes, ils
peuvent être d’ordres, de types très différents. Ca peut être des dessins animés,
ça peut être des programmes très éducatifs, ça peut être des programmes de
divertissement dans lesquels ces messages sont véhiculés. Est-ce que les
chaînes jouent vraiment le jeu ou est-ce que, comme parfois pour répondre aux
obligations et aux quotas, elles diffusent ces programmes-là en milieu de nuit,
là où personne ne les voit ?
C HRISTINE KELLY
Alors, c’est une bonne question. On n’a jamais vu les chaînes aussi
mobilisées sur ce sujet que sur aucun autre sujet où elles sont obligées.
Premièrement, elles le font volontairement et elles sont très mobilisées et elles
font ce genre d’émission en reportage, en documentaire, en dessin animé, en
grand jeu télévisé, à des moments de première partie de soirée, vraiment quand
l’enfant regarde. On voit que les chaînes ont vraiment joué le jeu et font de plus
en plus de programmes. On vient de faire un sondage, le CSA, qui n’est pas
encore rendu public et je le dis en avant-première, un sondage avec, on a notre
partenaire, qu’on a cherché, TNS SOFRES, qui a fait vraiment, avec des milliers

d’enfants, des interviews pour savoir est-ce que les messages, justement, au-
delà du « manger-bouger.fr », mais des émissions que font les chaînes, que
créent les chaînes spécialement pour les enfants, aident vraiment l’enfant à
mieux s’alimenter et la réponse est « oui ». La réponse est que la télé est le
premier vecteur pour apprendre à l’enfant à manger équilibré…
P ASCAL BATAILLE
Ce n’est pour rien, Christine, puisque les enfants de six-douze ans
passent quasiment deux heures par jour devant cette télé. Donc, évidemment,
on peut les toucher très facilement via la télévision.
C HRISTINE KELLY
Tout-à-fait. Donc, on voit, en tout cas, que les chaînes font un geste fort.
Les émissions de Cyril LIGNAC, etc. M6 sort, par exemple, comme étant l’une
des premières chaînes a jouer ce rôle-là et c’est vraiment très intéressant de
voir à quel point les enfants sont sensibilisés par ces émissions mais les enfants
en redemandent, en réclament plus. D’ailleurs, je fais bientôt une réunion avec
toutes les chaînes pour leur demander d’aller encore plus loin pour que ces
émissions puissent être encore plus identifiées et qu’on puisse les repérer. Par
exemple, lorsqu’on dit « Supprimer la publicité » ou bien lorsqu’on dit, c’est
comme si on dit « On va supprimer les « Kinder Bueno » ou bien « On va
supprimer « les Twix » ou bien « On va supprimer toutes les barres
chocolatées ». Même si on supprime, ce n’est pas ça, en fait, le problème,
parce que il y a des gens qui mangent des barres chocolatées et qui ne sont
pas obèses. Ce n’est pas le produit qui est un problème, c’est le comportement
alimentaire qui est un problème. Et, comme disait le monsieur qui est à côté de
vous, on peut manger et se faire plaisir et j’ai rencontré beaucoup
d’associations d’obèses et la fédération des obèses, le CNAO, qui expliquent
comment, nous, même si on est des obèses, on ne veut pas qu’on nous
supprime les bonnes choses…
P ASCAL BATAILLE
Oui.
C HRISTINE KELLY
On veut avoir un bon comportement alimentaire. Voilà. C'est-à-dire que
ce n’est pas en supprimant quelque chose qu’on va régler le problème mais en
éduquant, en ayant un comportement alimentaire, etc. Après, il y a des
problèmes aussi médicaux qui sont encore d’un autre ordre mais il faut aussi,
apprendre aussi à ne, vous parliez, par exemple, de l’enfant qui faisait 120 kilos,
il faut aussi apprendre à ne pas stigmatiser…
P ASCAL BATAILLE
Tout-à-fait, tout-à-fait.
C HRISTINE KELLY
…On encourage les chaînes aussi à ne pas le faire dans les films, dans
les, dans les publicités, dans les, dans les documentaires qu’ils font à ne pas
stigmatiser les personnes obèses.
P ASCAL BATAILLE
Christine KELLY, merci pour tous ces éclaircissements. On a bien
entendu que vous alliez demander aux chaînes d’en faire encore plus dans ce
sens de la charte alimentaire et du manger-bouger. Eh bien écoutez, on ne peut
que s’en réjouir parce que ces chiffres sont quand même relativement
inquiétants, de l’augmentation du surpoids, en tout cas, et de l’obésité chez les
jeunes gens. Merci, Christine KELLY, membre…
C
HRISTINE KELLY
Merci.
P ASCAL BATAILLE

Du CSA. A très bientôt sur « Sud Radio ». Evidemment, on est toujours
ravi de vous accueillir… Cyril…, un petit point sur le sondage, justement. Est-ce
que les Français sont favorables à l’interdiction de la publicité dont Christine
KELLY nous disait assez justement que ça ne résoudrait sans doute pas grand-
chose.
C YRIL Eh bien, pour le moment, nos auditeurs internautes sont partagés :
50/50.
P ASCAL BATAILLE
Parfaite égalité.
C YRIL Figurez-vous. Absolument. Pas mal de votes, pourtant, sur ce sondage
mais, pour le moment, rien ne bouge, égalité.
P ASCAL BATAILLE
Eh bien, on vous redonnera la tendance dans un petit moment,
évidemment. 08 :28 :42. FIN’