
IGAS, RAPPORT N°2013-069R 5
2. ETRE ATTENTIF A L’EVOLUTION TECHNIQUE ET ORGANISATIONNELLE
DU MONDE DU TRAVAIL
L’évolution des techniques de production
Le cas des nanoparticules offre un exemple d’articulations fortes à construire en termes d’analyse
et de maitrise des risques autour de diagnostics et de stratégies partagés et permet de comprendre
comment l’entreprise et les différents acteurs prennent en compte (ou pas) et traitent ces risques
émergents. Lors du séminaire de l’OMNT de février 2008, la question de l’évaluation de
l’exposition aux nanomatériaux a été abordée. Les chercheurs concluaient ainsi : « On peut
résumer l’état des connaissances actuelles en matière d’hygiène et de sécurité des nanoparticules
de la façon suivante : on ne sait pas grand-chose de leur toxicité, il n’est pas facile de les mesurer
dans les ambiances de travail, mais les moyens techniques existent pour s’en protéger
efficacement ». Par ailleurs, les chercheurs s’interrogeaient également sur la nécessité de prendre en
compte les modifications des nanoparticules tout au long de leur cycle de vie.
Le caractère spécifique des nanoparticules a conduit à des difficultés pour faire comprendre aux
entreprises qu’elles étaient concernées, qu’elles utilisaient des nanoparticules. La différence
d’approche entre les entreprises productrices, très fortement sensibilisées aux risques et les
entreprises utilisatrices demeure. S’ajoute à cela des notions d’image qui conduisent certaines
entreprises utilisatrices à une forte réticence sur la reconnaissance de cette utilisation. En outre la
taille et la nature des entreprises jouent aussi. Comme le rappelle l’INRS, aucune réglementation
spécifique ne régit actuellement la manipulation des nanomatériaux qui peut intervenir aux diverses
phases de la production. Ce sont des agents chimiques. A ce titre, la réglementation en matière de
prévention du risque chimique, prévue par le code du travail, s’applique à eux.
L’évolution des organisations du travail
Le suivi médical des salariés est rendu plus difficile avec le développement de formes d’emplois
qui s’écartent du contrat de travail à durée indéterminée. Le télétravail, le travail à domicile, le
fonctionnement en entreprise étendue et la mobilité accrue des salariés posent la problématique du
suivi longitudinal dans le cas d’éventuelles expositions à des risques à effets différés. C’est tout
cela qui renforce l’émiettement du tissu de PME/TPE et les difficultés du suivi de l’état de santé
des salariés. Par ailleurs, la problématique du suivi des personnes en recherche d’emploi dont l’état
de santé est le plus souvent précaire, n’est pas aujourd’hui prise en compte. Le rapport de l’OIT
précité insistait également sur la nature des maladies professionnelles qui changeaient rapidement,
soulignait que le nombre croissant de travailleurs occupant des emplois temporaires, occasionnels
ou à temps partiel ne faisait pas qu’inciter à accepter des conditions de travail plus dangereuses
mais s’opposait également à « des pratiques adaptées en matière de suivi médical, de surveillance
de l’environnement de travail, d’enregistrement et de déclaration des maladies professionnelles,
qui sont indispensables à la mise en œuvre effective d’une stratégie de prévention ». Il faut aussi
souligner que ces facteurs impactent la charge de travail des services de santé au travail avec
notamment une multiplication des visites d’embauches.
3. VEILLER A CE QUE L’ACTIVITE PROFESSIONNELLE N’AGGRAVE PAS DES
PATHOLOGIES PREEXISTANTES
Pour les acteurs de l’approche « santé publique », l’approche santé au travail peut apparaître d’une
certaine manière réductrice. Elle offre pourtant un caractère opérationnel qu’il serait dommageable
de négliger en diluant toute l’approche de la santé au travail dans une démarche où l’objectif de
prévention des risques professionnels passerait au second plan. Le repérage et la prévention des
risques liés aux situations de travail constituent une priorité, en liaison, selon les types de risque,
avec le développement de nouveaux modes d’organisation du travail. Cependant, le souci de prise
en charge globale de la personne atteinte de maladie chronique interroge sur les modalités les plus à
même de permettre un parcours cohérent, ce qui suppose une articulation entre les différents
acteurs, dans le respect des droits de la personne. Le thème de la polyarthrite rhumatoïde est avant
tout une illustration de l’intérêt d’une action précoce et pluridisciplinaire en matière de maintien