Le Crépuscule des petits dieux

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Natacha Belem Devesa
Le Crépuscule
des petits dieux
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Préface
« Immuno-déficience,
rétrovirus,
lymphocyte,
trithérapie, réverse-transcriptase, mutation… concepts
étranges que la science nous lègue en guise d’explication,
d’espoir et d’aveu d’impuissance, maladie mystérieuse et
maudite : le S.I.D.A.
Natacha Belem s’est emparée de ces mots, leur donne
un visage et une incarnation, ils deviennent les acteurs
d’un drame qui se joue dans ces univers intimement
connectés, le monde cellulaire et moléculaire, l’humain, la
société humaine. Loin de prétendre nous expliquer en
détail ce que la science elle-même a du mal à comprendre,
cette mise en scène basée sur le scénario réel de l’infection
par le VIH nous invite à une réflexion profonde, brossant
les portraits des acteurs et des étapes clés de la maladie.
Chacun des acteurs obéit à sa propre logique, suit son
destin ou son devoir pré-programmé : pas d’état d’âme,
juste assumer une fonction assignée par la biologie ou la
société humaine. L’action se déroule donc sur plusieurs
niveaux : le monde microscopique des molécules, virus,
cellules, le monde macroscopique des hommes, de la
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société, ses acteurs (corps social, compagnies
pharmaceutiques, gardiens de l’Ordre) et un monde
symbolique qui nous permet de prendre le recul,
nécessaire au delà de la réaction émotionnelle première. Y
a-t-il des bons, des méchants, des dupes, à qui profite le
crime, qui est responsable, quelle justice, quelles injustices,
quels alibis et quelles motivations animent chacun des
protagonistes ? »
philippe Clair,
Dr. Es Sciences, Université de Montpellier
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Quelques clés de compréhension.
Une humaine extraction à des fins socio-politiques.
Le défi de ce projet était de faire agir et parler les
cellules et les virus comme nous hommes et femmes qui
avons pour attributs une âme, une conscience, des envies
de pouvoir, de séduction, des faiblesses, des hontes, des
objectifs communs ou antagonistes.
Les systèmes imbriqués les uns dans les autres ont
indubitablement une correspondance vibratoire, électrique
et magnétique, une colle quantique, atomique, sémantique,
bref universelle. C’est la théorie des dominos qui prime
dans cette histoire : une enzyme déraille et c’est l’équilibre
énergétique global de la santé qui est mis à mal.
Dans cette pièce il est question de cellules appartenant
à un organisme humain, celui de l’homme masqué, pantin
de carton, directeur d’un trust pharmaceutique, qui tombe
le masque à la fin de la pièce. Sa représentation : Ken,
l’organisme sociétal contaminé par le VIH.
La rencontre impromptue entre deux êtres dans un
avion victime d’un attentat, nous permet de plonger dans
l’univers microscopique de cet organisme vivant, nous
permettant ainsi de voir en simultané le monde des
hommes (interprété par Ken et Barbie) et celui des cellules
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et des virus (interprété par des hommes et des femmes en
chair et en os). Une rencontre impromptue entre un virus
de l’immunodéficience humaine, le VIH, et un lymphocyte
T4 CD4, projetés l’un contre l’autre lors d’un « crash…
cellulaire ».
La fracture spatio-temporelle : Le Mal à dire.
Rentrer en empathie avec une cellule de sa genèse à la
fin de sa vie, et comprendre cette même cellule qui rentre à
la fois en contact avec un ennemi afin de l’éradiquer pour
finir par enfanter… ce même virus, cela semble paradoxal
et pourtant, c’est exactement ce qu’il se passe à l’intérieur
d’un corps « contaminé » par le virus du Sida.
On pourrait dire également que l’effondrement du
système immunitaire, le crash, est lié à la pensée, à une
ghettoïsation de la conscience, à un enfermement de soi
par soi. On lutte contre une idée forte et unique :
« Lorsqu’on t’annonçait soudainement ta contamination
par le VIH en 1980, c’était l’annonce d’une mort
“programmée” dont tu ne pouvais réchapper. Une bombe
qui explosait à l’intérieur de toi, tu étais anéanti ! ».
Le Crash aérien l’événement déclencheur dans cette
pièce, ouvre comme une « Stargate » cellulaire.
Les consciences s’ouvrent.
Le directeur de trust ou le T4 CD4 ainsi que le ViH
ont une capacité à évoluer et à changer, dans cette pièce,
rien n’est impossible, ils ont en main un véritable pouvoir
de transformation.
Tout comme les décisions des trusts pharmaceutiques,
les prises de positions des laboratoires et des hommes ont
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une incidence directe sur la santé des êtres qui peuplent
cette planète.
Mais au delà de cette problématique que la maladie
fait apparaître au delà du mensonge et du déni de ce nonsens global que les très grands exercent sur nous, ils se
trouvent que nous aussi petits bouts de chair sommes très
concernés.
Le véritable enjeu est de commencer à accepter ses
différences tout en restant ouvert à l’autre, avoir accès à
son individualité tout en acceptant l’autre.
Nous arrivons peut-être à un crépuscule des petits
égos, des petits Dieux.
Et des petits aux grands il n’y a peut-être juste qu’un
glissement de dimension. La passerelle des dimensions.
C’est peut-être en suscitant des émotions artistiques et
esthétiques que nous pourrons faire naître des perceptions
différentes sur ce « mal qui dit » et ordonne, en
expérimentant autre chose qu’une pensée cloisonnée sur
une horrible fin pré “programmée” !
Le challenge dans cette pièce est de transmettre et faire
reconnaître au grand public, qu’entre les interactions
macro-sociales et micro-énergétiques, entre les dimensions
géopolitiques et organiques, il existe des liants, des colles
bien plus profondes et indispensables à la vie qu’on ne le
dit.
Est-ce la protéine HLA-b indispensable à la
constitution d’une immunité face au VIH qui gagnera le
pompon ou une ouverture des yeux et du cœur ou les deux
qui auront raison de cette guerre interne et externe ? Le
“CDPD*” pencherait plutôt pour un temps suspendu entre
réflexion et espace, entre horloge interne et horloge
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externe où l’humour teinté d’un grain de biologie
moléculaire et science décapante tenteraient une
expérience artistique pour tout public, à partager avec les
jeunes, les vieux, les PVVIH et les non PVVIH*. Voilà la
vraie raison d’être à ce documentaire poético-scientifique.
Voir sous un autre angle l’expérience de la
contamination afin d’ouvrir un passage vers une autre
compréhension du concept même de la maladie, et
parvenir un jour à une vision différente du phénomène
VIH.
Le « mal dit », à nous d’œuvrer et d’expérimenter
maintenant autre chose qu’une pensée cloisonnée !
Natacha Belem Devesa.
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A ma fille Angelina.
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« LE CREPUSCULE DES PETITS DIEUX »
Pièce de théâtre et chorégraphique élaborée à partir
d’un scénario scientifique sur le processus de la
contamination par le virus du SIDA.
TEXTE ORIGINAL DE :
Natacha Belem
PREMIÈRE du SPECTACLE :
Le 15 juin 2012 au Théâtre G. Philippe de Montpellier.
INTERPRÉTATION :
Le Macrophage : Julien Gourdin
Le Globule Blanc : Pascal Muet
L’Enzyme Reverse Transcriptase : Johanne Bourret
Le Vih : Natacha Belem
METTEUR EN SCÈNE et SCÉNOGRAPHE :
Natacha Belem
PRODUCTION : La compagnie RIBOSOME
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Les personnages sont :
• Ken, Un homme, personnage en carton qui apparait
sous la forme de Ken, poupée mannequin, Directeur d’un
trust pharmaceutique
• Barbie, Une jolie jeune femme ressemblant
étonnamment à la poupée mannequin Barbie avec la
repartie de Marie Curie
• V, Vie : Le virus de l’Immunodéficience humaine,
naturellement intelligent.
• T, T4 : Le globule blanc, personnage arrogant et
xénophobe.
• M, Mac, Macro-accrophage : Le macrophage
• Une bande de Lymphos : Les lymphocytes dont Macro
fait partie, le récepteur, le Cytotoxique, l’Auxiliaire noninfecté et le Coordonnateur.
• Zymie : L’enzyme « Reverse transcriptase », timide et
atypique, elle est tout le temps sur « roller-blade ».
Et la Voix d’hôtesse de l’air : elle ponctue les scènes et
apparaît sur écran.
Noir.
Son diphonique.
Les spectateurs se placent…
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