Non classifié CCNM/GF/COMP/WD(2002)12
Organisation de Coopération et de Développement Economiques
Organisation for Economic Co-operation and Development 30-Jan-2002
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Français - Or. Français
CENTRE POUR LA COOPERATION AVEC LES NON-MEMBRES
DIRECTION DES AFFAIRES FINANCIERES, FISCALES ET DES ENTREPRISES
Forum mondial de lOCDE sur la concurrence
CONTRIBUTION DE LA TUNISIE
Cette note est soumise par la Tunisie comme document de référence au second Forum Mondial sur la
Concurrence, qui doit se tenir les 14 et 15 février 2002.
JT00120139
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I. - LE RAPPORT ENTRE LA CONCURRENCE
ET LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
1. Rappel historique
Le développement économique de la Tunisie a linstar de celui des autres pays en développement
et des pays à économie dirigée, a été marque jusquen 1986 par lomniprésence de lEtat dans la
réglementation, le contrôle et la direction de la quasi totalité de lactivité économique.
Cette omniprésence se matérialise à travers les aspects suivants :
1. La prise en charge directe de la majeure partie des activités économiques et industrielles
notamment dans les secteurs stratégiques (ou industrie industrialisante) tels que les
hydrocarbures, les cimenteries, la sidérurgie, le transport, l’énergie, etc.).
2. Le contrôle direct de la commercialisation des produits de base à travers les offices crées à
cet effet : céréales et dérivés, huiles, sucre, café, épices
3. Le contrôle des investissements privés tant au niveau des secteurs quau niveau de
limplantation géographique des projets et ce à travers les autorisations préalables
dinvestissement.
4. La protection de lindustrie locale naissante par le biais de linstauration des autorisations
dimportation et de droits de douane élevés.
5. Le contrôle du niveau des prix sur le marché local à travers la fixation par ladministration
des prix des produits de base et la délimitation du niveau des marges bénéficiaires pour les
autres produits.
6. La réglementation des activités de commerce et de distribution au niveau du gros et du détail,
ces activités étant soumises à laccord et lautorisation préalable de ladministration.
7. La protection du consommateur tunisien contre les aléas des cours mondiaux relatifs aux
produits de base importés et ce à travers linstitution de la caisse générale de compensation
appelée à prendre en charge la différence entre les prix à limportation et ceux appliqués sur
le marché local (céréales, huiles, lait, sucre, engrais, papier).
2. Les reformes législatives, réglementaires et institutionnelles introduites depuis 1986
Ladoption par la Tunisie de laccord dajustement structurel (P-A-S) en 1986 en accord avec la
Banque mondiale et le fonds monétaire international, et son adhésion en 1994 à lorganisation mondiale du
commerce ainsi que la signature en 1995 de laccord de libre échange avec lUnion Européenne ont
progressivement conduit l’économie Tunisienne à une nécessaire et inévitable mutation dans le sens de son
adaptation à la concurrence internationale et de son « attelage » à l’économie mondiale marquée par la
libéralisation des échanges et par la mondialisation.
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Ce passage dune économie protégée à une économie de marché régie par les règles de la
concurrence et de la compétitivité sest opéré par le biais dun éventail de reformes législatives,
réglementaires et institutionnelles.
Lobjectif recherché à travers ces reformes est dinstaurer les fondements dune économie
ouverte à la concurrence au niveau national et international par le biais dun démantèlement tarifaire
progressif, dune déréglementation des principales activités économiques et par un désengagement graduel
de l’état de la majeure partie des secteur économiques (de production et de service).
Les réformes sus-visées touchent principalement les volets suivants :
1. La libéralisation de linvestissement dans le cadre du code des investissements de 1993,
lagrément préalable a en effet été remplacé par un système dincitation fiscale en faveur de
certains secteurs prioritaires et des régions économiques défavorisées.
2. La libéralisation progressive à partir de 1994 denviron 80 % des importations des produits
étrangers.
3. Le démantèlement tarifaire graduel par la baisse du niveau des droits de douane de la
majorité des produits importés.
Cette baisse devant épargner à titre transitoire et pour une période limitée les produits fabriqués
localement et ce en accord avec les organismes étrangers partenaires de la Tunisie (union européenne,
OMC, banque mondiale, fonds monétaire international).
4. La libéralisation du commerce de distribution en 1991 et le remplacement de laccord de
ladministration par le respect dun cahier des charges pour certains secteurs ou produits.
5. Linstauration du principe de la liberté des prix en 1991. Lexception de la fixation des prix
par ladministration a été maintenue pour une liste de produits de base et pour des situations
où certains secteurs économiques connaissent des disfonctionnements et des perturbations
conjoncturelles graves.
6. Le recentrage des activités de la caisse générale de compensation pour limiter son
intervention aux produits de première nécessite consommés par les catégories sociales les
plus démunies. Ainsi plusieurs produits ne bénéficient plus des interventions de la caisse tels
que les engrais, les pommes de terre de semences, les viandes bovines, le sucre en morceaux,
les aliments de bétail
7. L’élimination progressive de la préférence accordée aux entreprises tunisiennes lors de
loctroi des marchés publics.
8. La privatisation de 158 entreprises publiques jusquau 31 octobre 2001.
9. La création en 1991 du conseil de la concurrence :
Louverture du marché local aux produits étrangers, la libéralisation des initiatives privées dans
les secteurs de production et de services, lintroduction de la compétitivité et de la concurrence en tant que
vecteurs devant régir la vie économique et le désengagement de l’état de la gestion directe de l’économie
impliquent nécessairement la création dun organisme chargé de veiller au respect des règles de la
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concurrence et de sopposer à toutes les pratiques anti-concurrentielles. Doù la création par le législateur
tunisien du conseil de la concurrence à linstar de plusieurs autres pays.
La création de ce conseil sest accompagnée de la mise en place du premier noyau du droit
tunisien de la concurrence. Ce droit fortement inspiré du droit français, y a néanmoins dérogé sur plusieurs
points importants.
Il a ainsi interdit systématiquement certaines pratiques anti-concurrentielles tout en accordant une
dérogation à certains comportements qui bien quanti-concurrentiels génèrent un progrès technique ou
économique et engendrent des avantages pour les consommateurs.
A travers ces dispositions, le législateur affirme le principe selon lequel la concurrence nest pas
une fin en soi et quelle trouve ses limites dans les impératifs du progrès technique et économique et dans
lintérêt du consommateur qui reste la finalité de toute politique économique.
Ainsi la loi de 1991 telle que modifiée ultérieurement a interdit systématiquement les abus de
position dominante et les abus de dépendance économique.
Elle a par ailleurs interdit :
les contrats de distribution exclusive.
Les ententes lorsquelles tendent à atteindre un objectif anti-concurrentiel (limitation de
laccès au marché, limitation et contrôle de la commercialisation, de linvestissement, partage
des marchés etc.).
Toutefois la loi a autorisé le ministre du commerce à accorder des dérogations pour des situations
spécifiques.
Par ailleurs le législateur tunisien a soumis à laccord préalable du Ministre du Commerce toute
opération de concentration qui risque de créer ou de renforcer une position dominante en faveur dune
entreprise.
3. Les limites du droit de la concurrence en tant que vecteur de développement économique
Certes, il est unanimement admis, à la lumière de la faillite des systèmes économiques des pays
dits socialistes ou à économies dirigées, que la compétitivité de lentreprise reste la base de toute réussite et
de tout développement économique, toutefois le respect total et inconditionnel des règles de la concurrence
en tant condition nécessaire du développement économique et linterdiction par les pays dits à économie
libérale de toute forme de pratiques et de comportements anticoncurrentiels sont plus discutables.
En effet, leffacement de lEtat en matière économique dans les pays en développement nest pas
relayé par des forces économiques nationales capables de prendre en charge les activités économiques
délaissées par lEtat et den créer de nouvelles. Dans ces conditions louverture du marché local aux
produits étrangers représente un véritable danger pour des économies encore fragiles et risque den
provoquer leffondrement.
Par ailleurs, linstitution de la concurrence comme seule règle devant régir la vie économique
risque, à la lumière du désengagement de lEtat, dentraîner des conséquences sociales graves en termes
demplois dautant plus que lEtat était le principal employeur.
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La Tunisie qui a opté irréversiblement pour l’économie de marché basée sur la libre concurrence
et ce en vertu de ses engagements internationaux, a subi à linstar des autres pays émergeants un coût
social élevé se traduisant notamment par la liquidation de 37 entreprises publiques irrécupérables et par la
compression de milliers de postes demploi soit dans le cadre de la privatisation de certaines entreprises
publiques soit dans le cadre de la restructuration des entreprises publiques en difficultés.
Par ailleurs, les pays en développement comme la Tunisie sont-ils protégés et ont-ils les moyens
de se protéger de la concurrence déloyale de certains produits des pays développés, et des comportements
anticoncurrentiels exercés par certaines des entreprises de ces mêmes pays sur les marchés des pays en
développement?
Et même dans les cas où cette concurrence déloyale comme le dumping et où ces comportements
anti-concurrentiels comme la distribution sélective et même exclusive sur les marchés des pays en
développement sont constatés et vérifiés, ces derniers ont-ils les moyens de sanctionner les entreprises
mères ou les holdings dautant que ces dernières sont installées dans les pays développés et quelles
imposent filiales ou à leurs partenaires installés dans les pays en développement ?
De plus les pays dits développés et à économies libérales et qui ont imposé au reste du monde
linstauration et le respect des règles de la libre concurrence et de louverture des marchés, respectent-ils
eux-mêmes ces règles de la libre concurrence ? Ouvrent-ils totalement leurs marchés aux produits
dimportation comme ils lexigent des pays en développement?
Le contingentement des produits en provenance des pays en développement notamment
agricoles, la mise en place par les pays développés dobstacles non tarifaires divers, la fixation de périodes
limites pendant lesquelles limportation est autorisée (agrumes, légumes, fruits...) pour ne pas gêner leur
production locale ne sont-ils des comportements anticoncurrentiels destinés à entraver laccès au marché ?
Dans ces conditions naurait-il pas été préférable, avant dimposer aux pays en développement
louverture de leurs marchés aux produits étrangers, d’élaborer au préalable un code ou une charte
internationale du droit de la concurrence définissant dune façon précise le contenu des règles de la
concurrence ainsi que les pratiques anticoncurrentielles et mettant en place un mécanisme efficace pour
lutter contre ces pratiques et sanctionner toute entrave à la concurrence.
De plus et en vue de permettre aux pays en développement de se protéger contre les abus des
holdings, qui occupent incontestablement une situation de position dominante sur les secteurs ou les parts
de marché relevant de leurs activités et qui abusent de cette position en imposant à leurs distributeurs dans
le pays en développement des conditions draconiennes anticoncurrentielles, naurait t-il pas été opportun
de mettre en place un accord international dentraide judiciaire en matière de concurrence ?
Cet accord naurait-il pas aidé les pays en développement de sanctionner les comportements
anticoncurrentiels commis par des sociétés étrangères dans leurs pays en les aider à mener des enquêtes
dans les pays où ces sociétés mères ont leur siège social et à exécuter les sanctions qui seraient
prononcées contre elles ?
Il apparaît donc à travers ce qui a précédé, que la libre concurrence même dans les pays
développés nest pas une fin en soi et quelle trouve ses limites dans la nécessité de protéger lintérêt
économique et social du pays concerné en fonction de ses propres spécificités et de ses contraintes.
Cest dans ce contexte que le législateur tunisien, préalablement à louverture totale du marché
tunisien à limportation, a mis en place une série de mesures daccompagnement et a introduit dans le texte
de la loi sur la concurrence des exceptions au principe de la libre concurrence.
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