SEPT.IOCT.
2016
PARIS/NEW YORK
KYLE ABRAHAM
Pavement
© DR
ÉDITORIAL 3
SEPTEMBRE/OCTOBRE 2016
Deux mois encore place du Châtelet, avant de prendre nos quartiers dans un Espace Pierre Cardin
rénové par la Ville de Paris. Deux mois, avant que ne démarrent les travaux de rénovation et de
réinvention du Théâtre de la Ville, de ses espaces publics à la salle de répétitions en passant par une
accessibilité conforme à cet outil magnifique, une modernisation technique du grand plateau…
Nous ne devenons pas un théâtre ambulant pour autant, puisque outre l’Espace Pierre Cardin, le
Théâtre des Abbesses confortera sa vitalité et que vingt « théâtres-frères » nous ouvriront leurs
portes pendant ce relatif exil.
Aussi, sans céder à la morosité de beaucoup de nos contemporains, ni consentir au « déclinisme »
ambiant, sommes-nous résolus à nous servir de ce « déplacement » du Théâtre de la Ville comme
d’une aventure, afin que passé et futur se conjoignent constamment, séclairent et s’inspirent, et que
s’inventent de nouvelles configurations, des projets autres dans des lieux partenaires ou atypiques.
Un théâtre plus que jamais dans la Ville, qui inviterait artistes et spectateurs au voyage, à la cir-
culation, aux découvertes de formes nouvelles et de lieux inédits, une exploration du territoire
Parisien, voire Francilien.
FÊTER LES  ARTISTESCOMPAGNONS  DU MONDE ENTIER
Avant cela, deux mois encore dans notre vaisseau. Deux mois pendant lesquels nous avons désiré
fêter les « artistes-compagnons » venus du monde entier avec lesquels des liens réguliers et fra-
ternels se sont tissés ou fortifiés ces dernières années: le Berliner Ensemble, avec l’incroyable
Faust, par Robert Wilson, au Théâtre du Châtelet et la reprise de L’Opéra de quat’sous au Théâtre
des Champs-Élysées; le Tanztheater Wuppertal-Pina Bausch et Viktor, en ouverture de saison,
également au Théâtre du Châtelet; mais aussi un double programme Lucinda Childs, dans le
cadre de son « portrait » imaginé par le Festival dAutomne à Paris.
Avec la troupe qui ma accompagné fidèlement tout au long de ces années, nous dirons au revoir
– et à bientôt – au Théâtre de la Ville en reprenant Alice et autres merveilles, de Fabrice Melquiot
d’après Lewis Carroll, qui lors de sa création en décembre avait réuni avec tant de bonheur et
pour la première fois petits et grands dans cette vaste salle. C’est vrai, elle ne cesse de grandir
dans notre imaginaire, cette petite Alice qui rapetisse dans la fiction!
NEW YORK, LA BROOKLYN ACADEMY OF MUSIC
Cet automne, nous célébrerons New York. À la présence déjà évoquée de Lucinda Childs, s’ajou-
teront celles d’autres chorégraphes, metteurs en scène, auteurs, réalisateurs ou encore poètes
(notamment Frederick Seidel lu par Charlotte Rampling). C’est dans ce temps également que se
concrétisera le partenariat inédit que nous avons mis en place avec Joseph V. Melillo et la BAM
dont il est directeur et qui verra quatre artistes choisis ensemble, deux Français (Yoann Bourgeois
et Sébastien Ramirez) et deux New-Yorkais (Nora Chipaumire et The Civilians), être présentés
successivement à New York et à Paris, comme un pont au-dessus de l’Atlantique.
NOUVELLES ÉTAPES
Bien d’autres artistes, nombre de créations et de nouveaux venus seront également présentés en
ce début de saison. Ils répondent, chacun à leur manière, aux différents axes et projets que nous
aurons mis en place ces dernières années au Théâtre de la Ville, parmi lesquels:
Notre intérêt pour les jeunes artistes et compagnies de tous horizons, qui se cristallise autant durant
la saison qu’à l’occasion des « temps forts » que nous avons imaginé à cet effet et qui trouvent
chaque année un écho de plus en plus déterminant pour la trajectoire de ces « artistes en herbe » :
Danse élargie et Chantiers d’Europe qui ont connu respectivement leurs 4eet 5eéditions et dont
on peut mesurer aujourd’hui, avec la distance et l’expérience, combien ils ont été bénéfiques pour
nombre d’artistes révélés dans ce cadre.
Le retour du théâtre en langues étrangères, qui aura vu le Berliner Ensemble, Thomas Ostermeier,
Romeo Castellucci, Simon McBurney, Krystian Lupa, Robert Wilson et bien d’autres à venir pour
la toute première fois jouer au Théâtre de la Ville.
Un engagement déterminé pour lenfance et la jeunesse qui est une sorte de colonne vertébrale de
toute notre entreprise et suppose un dialogue constant avec les artistes et les théâtres partenaires
ainsi que des relations régulières et avec les enseignants, les centres de loisirs et les établisse-
ments scolaires, notamment dans le cadre du projet imaginé en réponse à la réforme des
rythmes éducatifs et comportant 32 ateliers hebdomadaires dans les écoles, ainsi que la création
de 3 spectacles par saison destinés à y être joué. Ainsi, nous sommes certains de travailler pour
demain et non pas seulement pour les succès du jour.
Ces mois de septembre et doctobre écoulés, nous nous retrouverons donc à l’Espace Pierre Cardin,
au Théâtre des Abbesses, mais aussi ailleurs, à Paris comme en dehors, au gré des étapes de notre
belle saison voyageuse. Naviguer est nécessaire, vivre ne l’est pas, écrivait en substance Fernando
Pessoa dans son Livre de l’intranquillité.
Pour un théâtre, justement, vivre, c’est naviguer!
Emmanuel Demarcy-Mota
UNE
VIE
NOU
VELLE
4TANZTHEATER WUPPERTAL/PINA BAUSCH Théâtre de la Ville PARIS
SEPTEMBRE/OCTOBRE 2016
PINA LA ROMAINE. EN 1986, PINA BAUSCH S’ÉVADAIT POUR
LA PREMIÈRE FOIS DE WUPPERTAL: CRÉÉ À ROME, VIKTOR PLONGE
SES RACINES DANS L’ATMOSPHÈRE DE LA CAPITALE ITALIENNE.
C’était en 1986, à Rome. Pina Bausch venait de tourner dans le film E la nave va
de Federico Fellini. Elle y interprétait une cantatrice aveugle. Accueillie par le
Teatro di Roma pour une résidence de trois semaines, elle se risquait pour la
première fois depuis son installation en 1973 à l’Opéra de Wuppertal à une
coproduction à l’étranger. Séjour d’apprivoisement, bain de sensations romaines,
effluves de culture italienne pour une création imprégnée de l’atmosphère de la
ville. Pina Bausch se détachait de ses bases allemandes pour jeter ses antennes
ailleurs et s’imaginer, peut-être, autrement. Et c’est ce qui s’est passé avec Viktor.
Ce premier chapitre d’un nouveau cycle ouvert sur le monde va dégager un hori-
zon artistique plus coloré, plus optimiste parfois aussi, au gré d’un swing cha-
loupé de séquences dansées et théâtrales qui vont devenir emblématique de son
tour du monde. Après Rome, Pina Bausch ira, selon la même charte artistique
de trois semaines d’imprégnation, à Palerme, Honk Kong, Budapest, Tokyo.
Avec Viktor, dont personne ne sait qui il est, sauf Pina Bausch, la chorégraphe
maintient un taux extrême de tensions tout au long de trois heures et demie de
spectacle. Lors de la création, des images irradiantes transpercent les specta-
teurs. Dominique Mercy – qui continue d’interpréter son rôle – protège d’un
manteau Julie Shanahan, femme sans bras; Jan Minarik balance des pelletées de
terre du haut d’une paroi sombre. Les tempéraments individuels explosent tout
en conservant le contact rapproché avec le groupe de vingt-trois danseurs dans
des tableaux dont Pina a le secret, guirlandes de mouvements de bras et de
hanches accordés dans une sublime mécanique collective. Une fois encore, le
décor de terre, noire, massive, souvent présente dans son œuvre, happe la danse
des interprètes qui doivent lutter pour y dresser leur spirale urgente, leur course
vive. Lors des répétitions, avec la complicité du scénographe Peter Pabst, beau-
coup d’objets sont présents sur le plateau pour les répétitions. Les interprètes en
apportent parfois eux-mêmes quelques-uns dans le cadre des improvisations
qu’ils proposent en réponse à la fameuse méthode des questions de Pina
Bausch. Elle leur demande ainsi d’inventer une danse ou une saynète à propos
«d’une petite chose que vous avez vue aujourd’hui à Rome ». Mais encore « d’une
chose qu’on fait et qui ne marche pas ». Ou bien « de quelque chose qui s’arrête parce
qu’on na plus la force ». Elle aimerait que les filles volent et les scènes décollent
sous son regard doux et perçant. Sur des musiques populaires toscanes, lom-
bardes, sardes, mais aussi des compositions de Tchaïkovski et des airs des années
1930, Viktor, maillon majeur du parcours de Pina Bausch, ouvre une enclave de
beauté et de gravité, une bulle d’empathie, qui accueille tous les spectateurs
dans son cercle. Jeanne Liger
UNE PIÈCE DE Pina Bausch MISE EN SCÈNE & CHORÉGRAPHIE Pina Bausch DÉCOR Peter Pabst COSTUMES Marion Cito
COLLABORATION MUSICALE Matthias Burkert DRAMATURGIE Raimund Hoghe AVEC Emma Barrowman,Andrey Berezin,
Michael Carter,Çağdaş Ermis,Jonathan Fredrickson,Silvia Farias Heredia,Ditta Miranda Jasj/Nayoung
Kim,Scott Jennings,Barbara Kaufmann,Eddie Martinez,Dominique Mercy,Cristiana Morganti,Blanca
Noguerol Ramírez,Breanna O’Mara,Nazareth Panadero,Jean-Laurent Sasportes,Franko Schmidt,
Julie Shanahan/Clémentine Deluy,Julie Anne Stanzak,Julian Stierle,Michael Strecker,Fernando Suels
Mendoza,Tsai-Wei Tien,Aida Vainieri,Paul White,Ophelia Young,Tsai-Chin Yu MUSIQUE musiques populaires
de Lombardie,Toscane,Italie du Sud,Sardaigne,Bolivie ENREGISTRÉES & COLLECTIONNÉES PAR Luigi Cinque
MUSIQUE DE Tchaïkovski,Buxtehude,Dvořák,Khatchatourian,musique de danse du Moyen Âge,valses russes,
musique de la «Nouvelle-Orléans»,musique de danse des années trente…
Création le 14 mai 1986, Schauspielhaus Wuppertal. COPRODUCTION Teatro Argentina-Rome. DROITS DE REPRÉSENTATION Verlag der Autoren,
Frankfurt a.M. représentant Pina Bausch Foundation-Wuppertal. INTENDANTE &DIRECTRICE ARTISTIQUE TANZTHEATER WUPPERTAL PINA BAUSCH À PARTIR
DE MAI 2017 : Adolphe Binder DIRECTEUR GÉNÉRAL Dirk Hesse DIRECTEURS DES RÉPÉTITIONS &COLLABORATION Bénédicte Billiet, Daphnis Kokkinos,
Helena Pikon, Robert Sturm CORÉALISATION Théâtre de la Ville-Paris – Théâtre du Châtelet.
TANZTHEATER WUPPERTAL/PINA BAUSCH
Viktor
AU THÉÂTRE DU CHÂTELET
DU 3 AU 12 SEPTEMBRE
10 € À 70 €
© UWE SCHINKEL
81 AVENUE VICTOR HUGO/ALY KEÏTA 5
SEPTEMBRE/OCTOBRE 2016
Lorsqu’on consulte le site internet Wikipédia, on découvre que
pas moins de seize villes françaises, de Strasbourg à Rodez, de
Montpellier à Saint-Nazaire, comptent sur leur plan une rue
nommée « Victor-Hugo ». Étonnamment, pas la moindre trace
de ladite voie sise à Aubervilliers… C’est pourtant le 81 de lave-
nue Victor-Hugo de cette ville que désigne le spectacle conçu
par le metteur en scène Olivier Coulon-Jablonka et ses collaborateurs artistiques Barbara Métais-
Chastanier et Camille Plagnet. Née en mai 2015 dans le cadre des Pièces d’actualité portées par le
Théâtre de la Commune/centre dramatique national d’Aubervilliers, la création donne la parole
à huit hommes initialement sans-papiers. Membres du collectif d’immigrés installé dans l’an-
cienne agence Pôle emploi désaffectée située au 81, ces interprètes racontent leur parcours. Dans
un récit choral fragmentaire, les voix se succèdent, s’entremêlent, se répondent. C’est un théâtre
direct, modeste, sans fard ni spectaculaire, qui donne à entendre les difficultés inouïes surmon-
tées pour atteindre la France. Mais également pour y rester, car à ces embûches en succèdent de
nouvelles, administratives cette fois. Pertinemment soulignées par La Parabole de la loi de Franz
Kafka, la force épique de ces itinéraires tout comme leur dimension kafkaïenne – les comédiens
travaillant pour des sociétés françaises qui ne les déclarent pas – se clôturent sur un épilogue
ambigu. Car si la moitié du collectif a obtenu des papiers, une partie demeure encore dans lattente
d’une régularisation. Caroline Châtelet
TEXTE Olivier Coulon-Jablonka,Barbara Métais-Chastanier,Camille Plagnet MISE EN SCÈNE Olivier Coulon-Jablonka
LUMIÈRES David Pasquier SON Géraldine Dudouet DÉCOR Lukas Frankias,Christophe Bernard AVEC Adama Bamba,Moustapha Cissé,
Ibrahim Diallo,Mamadou Diomandé,Inza Koné,Souleyman S.,Méité Soualiho,Mohammed Zia
PRODUCTION La Commune, centre dramatique national d’Aubervilliers. COPRODUCTION Moukden Théâtre avec le soutien de la fondation Agnès B.
CORÉALISATION Théâtre de la Ville-Paris – Festival d’Automne à Paris.
OLIVIER COULONJABLONKA/BARBARA MÉTAISCHASTANIER/
CAMILLE PLAGNET
81 avenue Victor Hugo
PIÈCE D’ACTUALITÉ N°3
AU THÉÂTRE DES ABBESSES
DU 3 AU 17 SEPTEMBRE
10 € À 26 €
ALY KEÏTA BALAFON
Mali
VIRTUOSE DU BALAFON, ALY KEÏTA EST UN MUSICIEN
ÉRUDIT QUI MANIE, AVEC ÉCLAT, LA TRADITION
MANDINGUE COMME LA GRAMMAIRE DU JAZZ.
Bien des légendes entourent l’origine du balafon. La plus tenace
veut que cet ancêtre du xylophone soit né de l’intervention d’un
esprit et lié au griot de Soundiata Keïta, fondateur de l’empire
mandingue.
Les Keïta sont des nobles et les ancêtres dAly ont adopté la fonc-
tion de musicien griot, par nécessité, en quittant leur Mali natal
pour se réfugier en Côte d’Ivoire. Moussa Keïta, son père, lui a
enseigné la fabrication et le jeu du balafon. Auprès de sa famille
restée au Mali, Aly a perfectionné sa connaissance du répertoire
traditionnel.
Un jour qu’il joue dans la rue, il rencontre le musicien George
Makinto, qui lui propose une collaboration piano-balafon et
l’initie au jazz. Après un premier concert à Abidjan, le duo gagne
l’Europe. Devenu maître de son instrument, Aly séduit de nom-
breux jazzmen désireux de renouer avec l’essence africaine de
leur art, tels Joe Zawinul, Paolo Fresu ou Trilok Gurtu. Pour
s’adapter à leur pratique, il transforme son balafon. L’instru-
ment qu’il conçoit est unique, couvre 4 octaves et contient 30
lames en bois de palissandre et autant de calebasses soigneuse-
ment sélectionnées.
Aujourd’hui, en parallèle de ses projets réguliers, son ensemble
d’afro fusion Aly Keita & the Magic Balafon, le trio jazz Ivoire
ou son nouveau duo avec le joueur de vièle chinoise erhu, Guo
Gan, il multiplie les expériences. En mai dernier au Maroc, il
rejoint le pianiste cubain Omar Sosa et des musiciens gnawas
et, pendant l’été, l’équipe d’Africa Express pour laventure Terry
Riley’s In C Mali.
Aly Keïta s’adapte à toutes les situations, mais lorsqu’il joue
seul, derrière son balafon extraordinaire, il s’imprègne de l’âme
du lieu et laisse sa débordante imagination le guider.
Benjamin Minimum
AU THÉÂTRE DES ABBESSES
SAMEDI 17 SEPTEMBRE
9 € À 19 €
RENCONTRE
LUNDI 12 SEPT. I18H ICAFÉ DES ŒILLETS
 L’ÉCRITURE DOCUMENTAIRE
DANS LE THÉÂTRE CONTEMPORAIN 
En présence d’Olivier Coulon-Jablonka
et de Mohamed El Khatib.
BRÛLANTE ACTUALITÉ.
UNE PIÈCE OÙ
DES SANSPAPIERS
SE RACONTENT.
© WILLY VAINQUEUR
© MICHEL DE BOCK
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