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[Critique] "Agua", une reprise fluide de la pièce brésilienne
de Pina Bausch au Théâtre de la Ville
C'est désormais une tradition, le Tanztheater Wuppertal de Pina Bausch passe tous les mois de
mai à Paris. En 2016 du 7 au 14 mai, au Théâtre de la Ville, le public parisien peut se replonger
dans l'exotisme fluide des Agua, une pièce brésilienne de la chorégraphe allemande datant de
2001. Une création où paysages et couples se complètent pour former un hymne à la danse. A
revoir également ce mois-ci : Auf dem Gebirge hat man ein Geschrei gehört (Sur la Montagne
on a entendu un cri) qui sera donné au Châtelet du 20 au 26 mai...
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Tandis que la pièce ne parlera que d'exotisme et de paysages foisonnants, sa scénographie est
sobre est simple : un dénivelé blanc qui amène les danseurs vers la salles et un grand écran
circulaire où les paysages du Brésil s'impriment en matière vidéo. On attendra donc la fin de la
première partie pour que dans grands canapés blancs viennent meubler la salle pour lui donner
un côté "lounge" de pause languissante. Dans la première partie, beaucoup de vacances
également avec des palmiers omniprésents : sur écrans et parfois suggérés en plastique et en
3D dans les interstices de la salles. Le tout est très coloré avec de grandes pauses de
blancheur pure quand les projections s'arrêtent et qu'une lumière crue inonde le blanc de la
structure. On danse beaucoup dans ces eaux brésiliennes qui durent quasiment trois heures,
les corps ondulent et bougent dans des tableaux qui invitent en permanence à faire un long
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voyage dans les paysages de rêve du Brésil où même les visage humains semblent former une
forêt de songes doux.
Réflexion light sur un exotisme souriant qui passe de la douceur de la bossa nova à quelques
rythmes plus tribaux, les danseuses jouent de l'effet liane de robes en voiles colorées et leurs
compagnons semblent plus dociles à leurs charmes que d'habitude chez Pina Bausch. Il se
poussent un peu, mais sans violence et si Julie Shanahan reprend son irrésistible rôle de
coryphée un peu hystérique, le blocage du langage et la répétition des mots entrave peu la
danse. La première partie arrive au comble de son intensité avec une série de danse à deux qui
commence sur des chaises et finit presque sur une note sexy et rétro de danse de salon. Puis
le mouvement se calme, s'arrête, on met des maillots et l'image de villégiature se fige dans un
grand canapé blanc et rond où la dolce vita est synonyme de luxe lounge. La pause est dite.
La deuxième partie du spectacle semble abandonner la douceur lumineuse du voyage sensuel
au cœur du Brésil rural pour mettre en scène une violence à peine masquée des relations de
couple. Qui est sujet? Qui est objet?. Les femmes commencent avec la sculpturale Regina
Advento qui ausculte la chemise puis le torse de son partenaire, mais bientôt arrive le
bourdonnement de la jungle pour que les hommes se mettent à chasser les amazones et les
emportent de force avec eux sur un sol où la projection 3D très sauvage laisse suggérer des
couples qui se cherchent et se trouve. Le détour dans le monde rassurant et traditionnel des
pêcheurs ne calme pas cette discrète guerre des sexes qui grandit et c'est collés au sol par ses
filets que les couples se rejoignent. Certains morceaux entiers des chorégraphies de la
première partie sont reprises, les corps semblent se libérer de cette répétition et l'on réécoute
les notes un peu démodées d'une sensualité lounge, comme si l'on faisant encore et toujours la
grande roue des clichés pour les dépasser et connaître le brésil. La percée a lieu devant une
projection caressante des chutes d’Iguaçu : faisant tourner des tables blanches avec leurs
fesses, les danseurs crachent comme la nature leur eau sur la robe transparente de Regina
Advento et font une bataille d'eau géante où les corps en mouvements semblent renouer avec
les plaisirs les plus originels et les plus sauvages.
Légèrement surannée par sa musique, Aga est une réflexion légère sur l'exotisme et sensuelle
sur le couple quii dégage beaucoup de beauté. Alors que le spectacle est archi-comble, le
public de la première a ovationné debout et longuement les incroyables danseurs du
Tanztheater Wuppertal.
(c) Oliver Look
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