le Bulletin scientique de l’arapi - numéro 32 - automne 2013 47
12e Université d'automne de l'arapi
D’autres recherches dans
ce domaine ont souligné
combien le rythme de la
communication et les émotions
produites lors des échanges
contribuent à percevoir plus
nement dans une perspective
dimensionnelle les difcultés
des personnes avec autisme.
Une partie d’entre-elles se sont plus particulièrement
intéressées à la précocité des troubles interactifs dans
l’autisme. Saint Georges et al. (2011) ont ainsi montré à
partir de l’analyse de lms familiaux que les nourrissons
qui développeront par la suite un autisme présentent, dès
le deuxième semestre de vie, une différence signica-
tive dans la dynamique interactive par rapport aux bébés
ayant un développement normal ou retardé. En outre,
cette différence s’accentue lors du troisième semestre.
A l’inverse, les auteurs n’ont observé aucune différence
dans la réponse donnée par les parents. Ainsi, alors que
les comportements intersubjectifs des bébés avec autis-
me sont diminués, les réponses des parents d’enfants
avec autisme diffèrent peu de celles des autres parents.
Par contre, des différences apparaissent aux niveaux des
stimulations données par les parents : dès les six premiers
mois de vie de leur enfant, les parents qui ont un bébé qui
sera par la suite diagnostiqué avec autisme ont beaucoup
plus de comportements pour soutenir l’interaction (« re-
gulation up ») et ce résultat perdure jusqu’au troisième
semestre de vie du nourrisson.
De façon complémentaire à cette étude, Cohen & al.,
(2013) ont rapporté que comparativement aux bébés
ayant un développement normal, ceux qui seront par la
suite diagnostiqués autistes présentent moins de compor-
tements intersubjectifs et d’orientation vers les person-
nes. Par ailleurs, les parents de ces bébés présentent plus
de comportements tactiles et de stimulations pour sou-
tenir l’interaction (« regulation up ») comparativement
aux autres parents et notamment, ils utilisent davantage
le mamanais. Dans tous les groupes, le mamanais facilite
l’interaction sociale. Au troisième semestre, on observe
une sorte de réorganisation de l’interaction entre les
pères des bébés qui vont être diagnostiqués par la suite
avec autisme et leur bébé : les pères de ces enfants sont
beaucoup plus présents dans la relation (parlent plus à
leur enfant) que dans les dyades typiques. Par ailleurs, les
vocalisations des pères sont signicativement associées
aux réponses intersubjectives et aux comportements des
bébés avec autisme.
S’intéressant également aux interactions précoces, des
études se sont plus spéciquement interrogées sur l’im-
pact de l’ocytocine et les routes de sa transmission. Des
pères ont été répartis en deux groupes selon qu’ils aient
reçu de l’ocytocine par voie nasale ou un placébo. Puis,
leurs interactions avec leur nourrisson de 4-5 mois, et en
particulier, les tours de parole et la quantité de mouve-
ment, ont été évaluées dans un protocole de still-face.
Les pères qui ont reçu l’ocytocine présentent plus d’in-
teractions avec leur bébé, en particulier au niveau de la
réciprocité sociale et des regards sociaux. En outre, on
observe une augmentation de l’ocytocine chez les bébés
des pères appartenant au groupe ocytocine (Weisman &
al., 2012). A partir des enregistrements des 3 dernières
minutes de ces passations (correspondant à la phase jeu
libre du still-face), les paramètres de proxémie du père
(par exemple, le touché, la distance) ont été analysés en
fonction des conditions (données non encore publiées).
Lorsque le père a reçu de l’ocytocine, tous les paramètres
indices et signaux sociaux sont augmentés, et on observe
une augmentation de l’ocytocine produite par le bébé.
D’autres recherches dans ce domaine ont souligné com-
bien le rythme de la communication et les émotions pro-
duites lors des échanges contribuent à percevoir plus
nement dans une perspective dimensionnelle les dif-
cultés des personnes avec autisme. Ringeval & al. (2011)
ont, par exemple, évalué et comparé les compétences
prosodiques d’enfants
ayant des troubles du
langage : soit consé-
cutifs à de l’autisme,
à un trouble envahis-
sant du développe-
ment non spécié, ou
bien à un décit spé-
cique du langage.
Ils ont demandé à ces
enfants, ainsi qu’à un
groupe contrôle d’en-
fants avec un déve-
loppement typique, d’imiter des phrases ayant différentes
intonations. Un système automatique a été utilisé pour
évaluer leur prosodie et calculer des scores de reconnais-
sance d’intonation. Les résultats montrent que tous les
enfants avec des troubles du langage sont en difcultés
pour reproduire les contours de l’intonation : leurs sco-
res de reconnaissance sont signicativement inférieurs
à ceux des enfants avec un développement typique. Par
ailleurs, un trouble pragmatique plus important a été
trouvé dans les groupes autisme et trouble envahissant
du développement.
Ringeval & al. (non publié) ont extrait la prosodie de
70 enfants typiques lors de la lecture de « Frog where
are you ? » (Mayer, 1969). Elle a ensuite été classée en
fonction de sa variation en événements positifs, négatifs
et neutres. La même procédure a été réalisée avec des
enfants présentant une dysphasie, un autisme et un sous-
groupe d’enfants avec autisme associé à un désordre de
développement multiplexe (ou surexpression émotion-
nelle, MCDD). Ce dernier groupe permet d’appréhender
le caractère dimensionnel des troubles autistiques. Dans
le groupe avec autisme une grande variabilité interin-
dividuelle était observée et surtout, il était très difcile
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