
Prise en charge et stratégies
thérapeutiques de la dénutrition
Ann Nestlé [Fr] 2009;67:87–95
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fins médicales spéciales», comme ils sont définis dans la
législation européenne selon la directive de la Commis-
sion Européenne de 1999
[30] , indépendamment d’une
consommation orale ou d’une administration par sonde
[3] . Chez les enfants, plus que chez les adultes, l’adminis-
tration de différentes formules pourraient avoir un rôle
thérapeutique direct dans des situations telles que les al-
lergies alimentaires multiples
[31] , la maladie de Crohn
[32] et le syndrome de l’intestin court [33] , toutes ces pa-
thologies étant souvent accompagnées d’une dénutrition
sévère. En revanche, la NE est absolument contre-indi-
quée dans les situations cliniques suivantes: entérocolite
nécrosante, perforation intestinale, obstruction du trac-
tus gastro-intestinal, impossibilité d’accéder à l’intestin
(brûlures sévères, polytraumatismes, etc.), iléus paraly-
tique, atrésie intestinale et sepsis intra-abdominal grave.
Pour d’autres situations, la mise en place d’une NE sera à
discuter: troubles de la motricité intestinale, hémorragie
gastro-intestinale, fistule entérique haute, vomissements
ou diarrhées sévères non expliqués, pancréatite sévère, et
période postopératoire immédiatement après une chirur-
gie abdominale majeure.
Une description détaillée de la façon d’administrer la
NE dépasse le cadre de cette revue mais elle est disponible
ailleurs
[26, 34–39] . En général, si le mélange pour la NE
n’est pas consommé oralement, il peut être administré
par sonde ou par stomie dans l’estomac, le duodénum ou
le jéjunum. La stomie est préférable si la NE est prévue
pour durer plus de 4 à 8 semaines, avec une administra-
tion distal de l’estomac pour les patients sujets à l’inhala-
tion pulmonaire, présentant des troubles de la motilité
antroduodénale, ou avec un estomac inaccessible ou une
pancréatite aiguë. Les mélanges pour la NE diffèrent sen-
siblement dans leurs teneurs en nutriments et leurs pro-
priétés physiques. Le choix parmi la vaste gamme des
produits disponibles sur le marché doit prendre en consi-
dération les facteurs suivants: (1) besoins en nutriments
et énergie adaptés à l’âge et à la situation clinique du pa-
tient pédiatrique, (2) fonction intestinale digestive et ab-
sorptive, (3) site et voie d’administration, (4) caractéris-
tiques du produit telles que son osmolarité, sa viscosité,
son contenu en nutriments, (5) les préférences gustatives
du patient, et (6) les coûts. Pour une grande majorité des
patients pédiatriques, il est recommandé d’utiliser une
formule polymérique standard adaptée à l’âge, générale-
ment bien tolérée et présentant le meilleur rapport coûts-
bénéfices. Cependant, il existe beaucoup d’autres for-
mules spécifiques de certaines maladies. Elles sont con-
çues pour répondre aux besoins spécifiques des patients
présentant une diminution de la longueur intestinale et
des capacités d’absorption altérées, une insuffisance pan-
créatique, hépatique, rénale ou pulmonaire. En outre, il
existe également des formules spécifiques d’une tranche
d’âge pour des enfants intolérants au lait ou présentant
des allergies alimentaires multiples ou avec des troubles
métaboliques innés. Pour leur description détaillée,
d’autres documents devraient être consultés
[40–43] .
Nutrition parentérale
La NP est vitale seulement pour une toute petite mi-
norité de patients situés en haut de la pyramide de la nu-
trition clinique ( fig.2 ), qui ne peuvent pas être alimentés
par voie orale à cause d’un intestin inexistant, inacces-
sible ou dysfonctionnel. La majorité des enfants sous NP
souffre d’une insuffissance intestinale chronique, mais il
y a également une longue liste de cause non digestive né-
cessitant une NP au moins partielle, comme les bébés
grands prématurés
[26] . Dans les recommandations ré-
cemment publiées par les sociétés ESPEN/ESPGHAN
(Société Européenne de Gastro-Entérologie, d’Hépatolo-
gie et de Nutrition Pédiatriques) sur la NP pédiatrique,
également soutenu par l’ESPR (Société Européenne de
Recherche Pédiatrique)
[44] , il est clairement indiqué que
le moment où la NP doit être introduite dépend de l’âge,
de la taille, et de la situation clinique individuelle du
nourrisson ou de l’enfant. Par exemple, chez les grands
prématurés, une NP totale doit être débutée dans les pre-
miers jours de la vie, un jeûne prolongé ayant des consé-
quences délétères, tant immédiates qu’à long terme, sur
le futur développement physique et intellectuel
[45, 46] .
Chez les enfants plus grands et les adolescents, des pé-
riodes allant jusqu’à environ 7 jours d’une alimentation
inadéquate peuvent être tolérées, en fonction de l’âge, de
l’état nutritionnel, de la maladie sous-jacente, d’une
chirurgie ou d’autres interventions médicales nécessaires
[44] .
Les solutions d’acides aminés et les émulsions lipi-
diques pour administration intraveineuse sont dispo-
nibles depuis un demi-siècle
[47] . Cependant, c’est seule-
ment au cours des deux dernières décennies que sont
apparus des produits à usage parentéral formulés spécifi-
quement pour répondre aux besoins nutritionnels des
nourrissons et jeunes enfants. De plus, un développement
technique rapide a permis la construction de systèmes
d’administration, telles que les pompes, les cathéters cen-
traux, dans un souci d’une dispensation sûre de la NP,
même à domicile, avec une raisonnable qualité de vie
s’inscrivant bien sûr dans les limites de la pathologie
sous-jacente. Cela étant dit, la NP peut être à l’origine
d’une longue liste de complications ( tableau 1 ). Par consé-