en collaboration avec A. N. Whitehead, les trois volumes des Principia Mathematica (1911-13).
À la suite de Frege, il aura été un des défenseurs du «!logicisme!», une des grandes philosophie
des mathématiques du vingtième siècle. En France, Russell débattra avec Poincaré dans les pages
de la Revue de métaphysique et de morale. Sur ces questions, il aura une profonde influence sur
Couturat, Ramsey et Carnap.
(5) Poursuivant ses travaux, en particulier au contact de son étudiant Wittgenstein, il renouvelle
l'empirisme anglais, entre autres dans Les problèmes de la philosophie (1912) et Théorie de la
connaissance (1913), par un programme basé sur l’analyse logique, l’atomisme logique, d’où
découlernt de nombreuses problèmatiques, tels que ceux de la nature des objets de la perception
ou encore de l’existence d'autrui (other minds), qui façonnèrent la philosophie analytique, chez
Carnap, Goodman, Ayer, Austin, etc.
Malgré l’ampleur de ces travaux d’épistémologie, Russell s’est aussi intéressé à l’éthique. Au
départ, il fut influencé par la critique du «!paralogisme naturaliste!» par son ami Moore dans
Principia Ethica. Mais il délaissa rapidement la réflexion philosophique, trop abstraite, pour faire
oeuvre de «!moraliste!», dans le but d’avoir une véritable influence sur l’opinion publique, hors
des salles de cours. Dans ses ouvrages, il critique la morale victorienne et chrétienne sur des
questions comme l'amour ou le mariage, ainsi que les croyances religieuses. Ses écrits sont
souvent dénigrés par les universitaires mais ils eurent une grande portée!; ses ouvrages tels que
Marriage and Morals (1929) lui valurent le Prix Nobel de littérature en 1950 et une audience
internationale, qui lui sera précieuse dans ses dernières luttes, pour le désarmement nucléaire et
contre la guerre du Vietnam.
Il proposa en outre une nouvelle philosophie de l'éducation et fonda une école expérimentale,
Beacon Hill School. Le professeur Normand Baillargeon, du département d’éducation et de
pédagogie de l’UQAM et auteur entre autres d’Éducation et liberté (Montréal, Lux, 2005) et d’un
Petit cours d’autodéfense intellectuelle (édition revue et corrigée, Montréal, Lux, 2005), viendra
présenter cette dimension de la pensée de Russell.
Russell prit part dans de nombreuses luttes politiques tout au long de sa vie, du vote pour les
femmes au pacifisme, qui lui valut la prison pendant la guerre de 14-18 et l’expulsion du Trinity
College à Cambridge, où il n’eut que peu d’étudiants!: Norbert Wiener, Ludwig Wittgenstein et le
Français Jean Nicod. Il sera plusieurs fois candidat défait aux élections nationales!; à la suite du
décès de son frère Frank, il héritera de son titre (et de ses dettes, qu’il remboursera à même sa
seule source de revenus!: les droits d’auteurs et les honoraires pour des conférences) et siègera à
la House of Lords. Il apporta son soutien à l'anarcho-syndicalisme et au socialisme de guilde dans
Roads to Freedom!: Socialism, Anarchism and Syndicalism (1918), tout en produisant une des
premières critiques du régime soviétique The Practice and Theory of Bolshevism (1920)!; Russell
fut un penseur «!libéral!», au sens où on entend le terme au siècle des Lumières, chez Locke ou
Constant. Il fut en outre un des fondateurs du premier mouvement pour le désarmement nucléaire
en 1958, le Committee for Nuclear Disarmament – il fera un dernier tour en prison à l’âge 91 ans
en 1961 pour une manifestation anti-nucléaire – et l'instigateur d'un tribunal contre les crimes de
guerre américains au Vietnam (1966), dont il finança les activités par la vente de sa propre
bibliothèque et de ses archives (désormais à l’université McMaster, en Ontario!; voir!:
http://russell.mcmaster.ca). Russell a aussi réfléchi sur son engagement politique dans de