Synthèse
La personne démente à domicile
THIERRY MÉRET
MARIE FLOCCIA
Clinique médicale de la Porte
Verte, Versailles
Résumé. Peu d’études ont été consacrées aux patients atteints de démence sévère et vivant
à domicile et l’hétérogénéité des situations ne permet pas d’avoir une conduite à tenir
codifiée. Chez ces patients qui présentent des déficits cognitifs majeurs et des troubles du
comportement, la prise en charge doit privilégier l’approche non médicamenteuse. Des
pathologies intercurrentes peuvent émailler l’évolution, mais le maintien à domicile est
souvent préféré, par le patient et sa famille. Lorsqu’une hospitalisation s’avère nécessaire, il
est souhaitable qu’elle se fasse en unité gériatrique. L’environnement doit être adapté afin
d’assurer la sécurité du patient, de maintenir des soutiens sensoriels et de favoriser
l’orientation temporospatiale. Dans ce contexte, l’aidant principal joue un rôle capital de
soutien psychologique et physique, mais il est nécessaire de préserver cet aidant en
l’informant sur la maladie, les aides matérielles et financières disponibles et en l’écoutant.
Le généraliste est ainsi impliqué de façon majeure tant au niveau médical que dans le
soutien à toute la famille. Malheureusement, il est souvent seul face à des situations
difficiles dont la gestion demande beaucoup de temps. La mise en place des réseaux
gérontologiques devrait pouvoir lui apporter des solutions et lui permettre de participer à
l’élaboration d’un projet de soins pour son patient. De nombreux facteurs peuvent néan-
moins entraîner une institutionnalisation, en particulier l’épuisement des aidants, des
troubles majeurs du comportement et la fin de vie dans laquelle la prise en charge de la
douleur est primordiale.
Mots clés : démence sévère, vie à domicile, maladie d’Alzheimer, généraliste
Abstract. Few studies have been devoted to patients with severe dementia living at home.
Therefore their rate is difficult to evaluate, and their conditions too heterogeneous to allow
a standard management. In these patients, suffering from severe cognitive deficits and
psychobehavioral disturbances, interfering pathologies may alter the course of the disease.
Environment must be adapted to ensure security, sustain perceptual and physical activity
and back up space and time orientation. The role of the main caregiver is crucial for the
psychological and physical support of the patient. Thus, he/she must be sustained by giving
information about the disease and available practical and financial support, and by listening
to his/her suffering. Consequently, the general practitioner is involved not only in medical
decisions but also in family support. Too often, the general practitioner is alone to face
complex and time-consuming situations. However, the setting of geriatric networks should
allow him/her to be included in the elaboration of a global care project with nurses and
physiotherapists. Nevertheless, various factors, such as caregivers’ exhaustion, major be-
havioral disoders, or the end of life when coping with pain becomes a priority, can even-
tually make necessary the patient’s transfer into a geriatric facility.
Key words:severe dementia, home setting, Alzheimer’s disease, general practitioner
La forte augmentation des personnes très âgées
attendue dans les années à venir fait de la prise
en charge de la dépendance un enjeu majeur
pour le futur proche. Parmi les affections causales, la
maladie d’Alzheimer tient une place particulière. Son
évolution vers le stade sévère a un retentissement dif-
férent selon que le patient vit à domicile ou en institu-
tion. Il est difficile d’évaluer le nombre de patients at-
teints de démence sévère qui vivent à domicile. Une
étude PHRC estime que 17 % des patients à un stade
sévère de la maladie vivent à domicile [1]. Dans l’étude
Paquid, près de 25 % des patients atteints de démence
sévère sont encore à domicile, en sachant que, tous
stades confondus, le rapport domicile/institution est
environ de 3/2 [2, 3]. Le maintien à domicile au stade
sévère est une situation difficile à gérer qui demande
une implication importante de l’ensemble des interve-
nants tant professionnels que familiaux.
Les situations rencontrées sont diverses. L’hétéro-
généité des tableaux cliniques est habituelle. Toutefois
à ce stade, le diagnostic est en règle générale porté et
le traitement institué. L’organisation médicosociale est
bien souvent différente d’un secteur à l’autre. Enfin la
disponibilité et l’implication de l’entourage familial sont
variables selon les cas.
* Avec la participation de L. Benattar, D . Cornuejols, A.-M. Eraso, D.
Foucault, G. Goyard, M. Thibault ( médecins généralistes des Yvelines).
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Le quotidien à domicile
et les difficultés rencontrées
Il est habituellement fait référence à une politique
du maintien à domicile. Mais le mot maintien est-il le
mieux adapté, en particulier dans le cas de patients
atteints de démence sévère ? En effet, ne laisse-t-il pas
sous-entendre une notion de contrainte ? Le mot sou-
tien semble plus pertinent pour traduire un projet thé-
rapeutique défini et choisi par la personne elle-même,
si elle a pu donner son avis antérieurement, la famille
et le médecin traitant. De même, il est habituellement
fait référence à la prise en charge. Ne conviendrait-il
pas de remplacer cette expression par prise en soins
qui apporte d’emblée une dimension thérapeutique ?
Plusieurs objectifs sont recherchés lorsque le projet
d’organiser la vie à domicile est retenu. Bien sûr, l’ap-
proche individuelle concernant la personne est priori-
taire, mais elle ne peut être dissociée de l’approche du
couple aidé-aidant, comme entité de la prise en soins.
Ainsi, l’objectif final est-il bien la qualité de la vie de la
personne malade, mais aussi de son entourage fami-
lial. De plus, tout doit être fait pour éviter le confine-
ment à domicile aboutissant à une authentique exclu-
sion et parfois même à une maltraitance. Ainsi, la
prévention de l’épuisement de l’aidant, de l’exclusion
sociale et de la maltraitance viennent compléter la liste
des missions qui incombent, de fait, au médecin trai-
tant.
Au stade de démence sévère, la gestion quoti-
dienne porte sur une organisation adaptée pour com-
penser les incapacités fonctionnelles et atténuer les
troubles psychocomportementaux.
Le pourcentage de patients confinés au lit varie se-
lon les études de 20 à 40 % [4]. De plus, 16 % de ces
patients souffriraient de rétractions et contractures. La
réalisation des actes de la vie quotidienne demande
une évaluation régulière afin de compenser les incapa-
cités : lever, toilette, habillage, prise des repas, coucher.
Les aides à mettre en place sont coordonnées afin
d’assurer la compensation la mieux adaptée.
Les troubles du comportement sont représentés
principalement par l’agitation motrice, l’agressivité
physique ou plus souvent verbale. L’instabilité psycho-
motrice se caractérise par une déambulation à domicile
alors que l’architecture du domicile n’est pas toujours
adaptée à ce type de situation. Les fugues, la tasikiné-
sie (incapacité à rester en place) et le syndrome de
Godot (le patient suit l’aidant dans ses déplacements)
en sont une autre expression. On doit prendre en
compte également les hallucinations, les idées de pré-
judice et les troubles du sommeil avec parfois inver-
sion du nycthémère qui, à domicile, prennent un relief
particulier. Du succès du traitement des troubles du
comportement dépend souvent la poursuite du soutien
à domicile.
L’incontinence sphinctérienne est fréquemment
rencontrée. D’abord urinaire, elle survient la nuit, puis
le jour. L’incontinence anale est surtout le fait des pa-
tients grabataires.
S’y ajoutent des troubles des conduites alimen-
taires (dyspraxie, comportement sélectif, apraxie buc-
cale, boulimie...).
Les troubles de la marche et les chutes sont corrélés
à la sévérité de la démence et s’observent dans environ
40 % des cas.
Des crises d’épilepsie de type généralisé ou de type
myoclonique peuvent être observées et sont l’apanage
des formes sévères.
Mais un problème essentiel rend le quotidien diffi-
cile pour les aidants. Comment comprendre ce que
tente d’exprimer le malade ? Quels sont ses souhaits ?
La communication demande un apprentissage long et
difficile.
La surveillance des traitements
spécifiques et non spécifiques
Le diagnostic a donc été posé antérieurement et
une thérapeutique engagée. Les traitements actuelle-
ment disponibles permettent seulement de diminuer
les symptômes de la maladie et d’améliorer notable-
ment la qualité de vie des patients atteints, en agissant
sur les symptômes cognitifs et comportementaux de la
maladie. Deux classes de médicaments sont utilisées,
les anticholinestérasiques disponibles avec l’indica-
tion : « Traitement symptomatique des maladies
d’Alzheimer au stade léger à modérément sévère » et
un médicament de la classe des antagonistes des ré-
cepteurs NMDA, la mémantine, dont l’AMM concerne
les stades modérément sévères à sévères.
Plusieurs études ont montré qu’à long terme le bé-
néfice des anticholinestérasiques se maintient [5]. Une
interruption de traitement objective que la pente de
dégradation alors constatée rejoint celle des patients
sous placebo. Il paraît donc licite de poursuivre ces
traitements s’ils sont bien tolérés, même à un stade
sévère bien qu’il s’agisse alors d’une prescription hors
AMM.
Les effets indésirables rencontrés sont surtout di-
gestifs (nausées, vomissements, diarrhées, douleurs
abdominales, perte de poids et d’appétit). Ils disparais-
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sent le plus souvent avec la poursuite du traitement et
l’adjonction d’un traitement symptomatique transi-
toire. Ces effets secondaires sont généralement de
courte durée et se produisent habituellement à l’instau-
ration du traitement lorsqu’on augmente la dose. Tou-
tefois, ils peuvent nécessiter le maintien à de faibles
doses voire exceptionnellement l’arrêt du traitement.
Les autres effets secondaires observés sont des cram-
pes musculaires nocturnes, des cauchemars et une agi-
tation nocturne que la prise matinale du médicament
peut faire disparaître mais qui impose parfois, là en-
core, une diminution des doses ou l’arrêt du traitement.
On peut également noter un écoulement nasal, des
sueurs, des vertiges, des syncopes, des bradycardies
nécessitant une surveillance particulière lors de l’asso-
ciation à d’autres médicaments bradycardisants. Il n’y
a pas d’effets biologiques décrits.
La prescription initiale des anticholinestérasiques et
de la mémantine ne peut être faite que par des méde-
cins spécialisés en neurologie ou psychiatrie, ou par
des médecins possédant un diplôme de gériatrie. Le
renouvellement peut être fait par le médecin traitant.
Une consultation spécialisée de suivi paraît nécessaire
tous les ans. Bien des patients au stade sévère échap-
pent souvent à cette filière.
La mémantine (Ebixa
®
) a démontré son efficacité et
sa bonne tolérance dans plusieurs essais aux stades
modérément sévères à sévères. La bithérapie a montré
son intérêt dans l’étude de Tariot et al. aux stades
modérément sévères à sévères (donézépil et méman-
tine) et cette étude pourrait s’appliquer aux autres inhi-
biteurs de la cholinestérase [5]. Les autres médica-
ments, dit non spécifiques, sont utilisés pour le
traitement des troubles psychocomportementaux.
L’éventail des produits prescrits est large (IRS, neuro-
leptiques, hypnotiques, anxiolytiques, thymorégula-
teurs) et non sans risque, notamment au long cours. Le
suivi des prescriptions et la surveillance des effets se-
condaires reposent sur la contribution des aidants fami-
liaux et/ou professionnels.
La prise en charge des pathologies
intercurrentes et associées
Les pathologies associées, aiguës ou chroniques,
sont susceptibles d’aggraver encore la situation ou de
provoquer un état confusionnel surajouté. L’idéal est
certainement de tenter, selon la gravité de la pathologie
aiguë, de traiter le patient à son domicile. Ce choix
implique une disponibilité du médecin traitant et l’ac-
cès à un réseau de soins rapidement réactif à une
situation qui va demander un plus grand nombre d’in-
tervenants. Dans certains secteurs, il existe des équi-
pes mobiles gériatriques qui apportent leur concours
en se rendant à domicile. Si toutefois une hospitalisa-
tion s’avère nécessaire, il est préférable qu’elle se fasse
dans des services habitués à ce type de situations ou
mieux en services spécialisés : services de gériatrie
aiguë, unités spécialisées dans la prise en charge de la
maladie d’Alzheimer. Celles-ci sont encore insuffisan-
tes en nombre face à des besoins croissants. La déci-
sion d’hospitalisation est parfois délicate et doit se faire
en accord avec l’entourage familial, après avoir mis en
balance les avantages attendus d’une hospitalisation et
les conséquences négatives au plan cognitif et au plan
de l’autonomie.
Les comorbidités associées sont fréquentes. Elles
ont un impact sur le fonctionnement cognitif et la qua-
lité de vie des patients. Ainsi une attention particulière
doit être portée aux maladies cardiovasculaires et à ses
facteurs de risque : HTA, diabète, cardiopathie ischémi-
que... Une hypothyroïdie, une carence vitaminique, une
anémie, une dépression sont des facteurs aggravants
qu’il faut savoir rechercher. Dans ce contexte souvent
polypathologique, il est important de savoir hiérarchi-
ser les priorités de soins en fonction du stade de la
maladie et de l’âge du patient. De même il faut éviter,
chaque fois que possible, toute polymédication, source
potentielle d’accidents médicamenteux aggravant de
fait l’état du patient. Il faut penser à l’impact des pro-
duits spécifiques sur les cytochromes hépatiques P450
(donépézil, galantamine) en raison des interactions mé-
dicamenteuses qui en découlent. La prescription de
médicaments ayant un effet anticholinergique, nom-
breux dans la pharmacopée, doit être évitée, ainsi que
les molécules dont l’efficacité n’a pas été reconnue.
Enfin, une réévaluation de l’ordonnance doit être systé-
matique afin de ne pas poursuivre la prise de médica-
ments devenus inutiles.
Points clés
Adapter l’environnement tout en maintenant des
repères.
Valoriser la communication entre tous les interve-
nants, y compris dans les périodes de crises.
Soutenir l’aidant familial par des aides matérielles
et humaines.
Le médecin traitant est au centre de la coordina-
tion.
Penser à la possibilité d’une institutionnalisation
avant le point de rupture.
T. Méret, M. Floccia
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Les troubles du comportement
Principale cause de découragement des aidants et
donc premier motif de demande d’entrée en institution,
les troubles du comportement demandent une gestion
adaptée qui conditionne la réussite du projet de vie à
domicile. Ces symptômes ne sont pas uniquement le
reflet de l’atteinte cérébrale organique. Ils peuvent être
en effet le mode d’expression psychoaffectif du sujet à
ses déficits, à son environnement matériel et familial.
Ces troubles doivent donc être bien analysés en es-
sayant le plus souvent possible de privilégier l’appro-
che non médicamenteuse. Cela implique une bonne
connaissance du patient et de son entourage et une
évaluation de la situation que le médecin traitant, dis-
posant de nombreuses informations, est à même de
mener le plus facilement. L’examen doit rechercher
une cause organique. En effet, ces troubles peuvent
être l’expression d’une rétention d’urine, d’une dou-
leur, d’une infection débutante, d’un trouble hydroélec-
trolytique ou de toute autre pathologie somatique dé-
butante. Le recours à un ECG ou à des examens
biologiques simples s’avère souvent fort utile. De
même, une analyse rigoureuse des médicaments pris
quotidiennement ou ponctuellement peut faire décou-
vrir une cause iatrogène (syndrome confusionnel lié à
la prise de sédatifs, de psychotropes, de neurolepti-
ques, ou à une hyponatrémie sous diurétiques). Il ne
faut ainsi pas hésiter à supprimer les médicaments qui
ne paraissent pas indispensables. Enfin les change-
ments d’attitude de l’entourage (abandon, sur-
stimulation), des conflits familiaux, des conjugopa-
thies, des modifications dans l’environnement du
patient peuvent être des circonstances favorisantes. Un
aidant en difficulté peut aller jusqu’à commettre des
actes de maltraitance qu’il faut savoir dépister. Des
situations de maintien à domicile forcé pour des rai-
sons financières, de promesse faite au conjoint ou de
déni sont des situations à haut risque qu’il convient de
gérer du mieux possible.
Toute prescription de psychotropes devra donc être
précédée d’une démarche d’analyse du trouble et ne
doit pas être systématique. Celle-ci doit être raisonnée
et constamment réévaluée du fait des fréquents effets
indésirables de ce type de médicaments. On est amené
à constater des prescriptions de cette nature pour sou-
lager la famille, pour compenser l’entourage défaillant
ou le manque de personne : mais est-ce toujours judi-
cieux (Encadré 1)?
Une attitude préventive incluant un environnement
adéquat, un aidant bien informé sur la maladie et son
évolution, des intervenants extérieurs formés, peuvent
éviter ou atténuer ces troubles du comportement. Cer-
taines techniques de psychothérapie centrées sur les
émotions, la production d’affects et d’événements
agréables, la réminiscence de souvenirs sont encore
applicables à des stades sévères. Les stimulations artis-
tiques, la musicothérapie, des activités corporelles dou-
ces peuvent avoir un effet préventif. Mais ce complé-
ment thérapeutique n’est réalisable que si le malade
peut fréquenter un accueil de jour [6-8].
Le suivi nutritionnel
La perte de poids est un phénomène fréquemment
observé chez les patients déments. Elle évolue vers une
dénutrition qui va entraîner toute une cascade d’événe-
ments dont il sera difficile d’arrêter la progression.
La dénutrition peut être engendrée par des troubles
praxiques et des troubles du comportement (opposi-
tion, apraxie, dyspraxie, refus alimentaire, dépression)
qui altèrent la régularité de la prise alimentaire, ou être
d’origine iatrogène (nausées, anorexie dont le patient
ne se plaint pas). Mais elle peut être inhérente à la
maladie. La menace d’une dénutrition nécessite une
prise en charge et une surveillance particulière pour
éviter de nombreuses complications et alourdir le far-
deau supporté par les familles. La surveillance régu-
lière du poids au moins une fois par mois, l’apprécia-
tion des apports alimentaires par l’interrogatoire de
l’aidant, ainsi que le dosage de certains paramètres
biologiques (albumine et CRP en cas de cause inflam-
matoire) sont de réalisation aisée à domicile. Certains
conseils donnés à l’aidant comme la correction des
apports nutrionnels, le fractionnement des prises ali-
mentaires, la modification de la texture, le choix des
aliments pour lesquels la personne manifeste une ap-
pétence, peuvent aider à résoudre certaines situations.
De même, la prescription de compléments alimentaires
qui existent sous diverses formes ou d’un régime hy-
Encadré 1
En cas d’apparition ou d’aggravation
des troubles du comportement
Adopter une attitude calme, communiquer avec le
patient.
Rechercher une modification du cadre de vie, un
traumatisme familial récent.
Dépister une pathologie organique, une douleur.
Réévaluer l’ordonnance en vérifiant les interactions
médicamenteuses et les effets indésirables.
Ne prescrire un psychotrope qu’en dernier recours.
La personne démente à domicile
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percalorique et/ou hyperprotidique peut permettre
d’enrayer une inquiétante perte de poids. Le concours
d’une diététicienne peut faciliter la concrétisation de
conseils pratiques. Enfin, il faut toujours penser aux
effets iatrogènes des médicaments et aux affections
mycosiques. Au cours de l’évolution de la maladie,
l’apparition de troubles de la déglutition impose de
modifier la texture des aliments, d’utiliser de l’eau géli-
fiée, d’avoir recours à une hydratation par perfusion
sous-cutanée. Ces troubles de la déglutition exposent à
des pneumopathies d’inhalation qui sont de très mau-
vais pronostic lorsqu’elles se répètent. L’utilisation
d’une sonde d’alimentation gastrique au stade sévère
pose un problème éthique [9]. Beaucoup d’équipes y
renoncent, d’autant que ce type de pratique n’entraîne
pas de bénéfice démontré, bien qu’il aide parfois ce-
pendant à passer un cap. Devant un refus alimentaire
ou un amaigrissement s’accentuant rapidement, il faut
aussi évoquer un syndrome dépressif dont l’expres-
sion est souvent atypique et ne pas hésiter à prescrire
un antidépresseur.
L’organisation
du soutien à domicile
Le domicile est un lieu familier, riche en repères
dont le maintien est souhaitable. L’aménagement du
domicile doit aller dans le sens d’une préservation de
l’autonomie, compatible avec une déambulation possi-
ble. Un logement trop étroit et vétuste ou un immeuble
sans ascenseur empêchant les déplacements à l’exté-
rieur menacent la vie sociale [6, 10] (Encadré 2).
La sécurité
Afin que la sécurité soit assurée, un organisme na-
tional, le PACT (protection, amélioration, conservation
et transformation de l’habitat), aide à l’aménagement
du domicile. Il établit le devis des travaux nécessaires
et aide à en trouver le financement, notamment auprès
des caisses de retraite. La mise en œuvre de ces trans-
formations doit se faire en collaboration avec une
équipe d’évaluation. Cette équipe comporte un ergo-
thérapeute et un technicien appréciant la faisabilité des
modifications de l’habitat. Les travaux les plus souvent
proposés concernent le remplacement du gaz par un
appareillage électrique, la pose de barres d’appui,
l’adaptation des toilettes par un rehausseur, le rempla-
cement de la baignoire par une douche permettant de
faire la toilette en position assise.
Par ailleurs, il existe chez les malades déments un
risque accru d’accidents domestiques. Il faut retirer de
leur environnement quotidien les objets tranchants, les
armes à feu, les allumettes et limiter leur accès aux
produits d’entretien, au gaz, aux médicaments et aux
autres produits toxiques ou potentiellement dange-
reux. Il est également judicieux d’installer des systè-
mes de protection d’ouverture des fenêtres. Le risque
élevé de chutes doit être prévenu par un aménagement
du domicile : retrait des obstacles (ce qui favorisera
également la déambulation), bon éclairage, veilleuse
entre le lit et les toilettes, suppression des tapis de sol
et des revêtements glissants, mise en place de barres
d’appui dans les couloirs, dans les toilettes et la dou-
che, avec un tapis antidérapant dans le bassin de dou-
che.
L’orientation temporospatiale est facilitée par l’ins-
tallation d’horloges, de calendriers, et de pancartes
d’identification des lieux.
La mise en place d’une téléalarme est un élément
de sécurité supplémentaire, fort utile pour le conjoint
aidant.
Au niveau de l’habillage, il est conseillé d’utiliser
des vêtements amples, faciles à enlever pour des mo-
tifs d’hygiène facilitant ainsi les conduites d’élimina-
tion, des chaussures à semelles semi-rigides bien adap-
tées assurant le pas et la stabilité [6, 10, 11].
Les soutiens sensoriels
Du fait de sa détérioration cognitive et de l’altéra-
tion de ses capacités d’adaptation, le patient dément
est particulièrement sensible à son environnement sen-
soriel. Des stimulations trop intenses et trop fréquentes
pourraient induire une agitation. À l’inverse, l’absence
totale de stimulations accentuerait le repli. L’environ-
nement veille à limiter les nuisances sonores, à per-
mettre une lumière suffisamment claire en journée et à
respecter le passage jour/nuit. Au crépuscule, il peut
être utile de maintenir un bon éclairage en cas de trou-
bles du comportement. Il existe des éclairages dont le
déclenchement automatique, la nuit, peut s’avérer utile
dans des situations de lever nocturne fréquent [8].
Les aides sensorielles contribuent à réduire les acci-
dents. Ainsi il convient de vérifier l’adaptation des lu-
nettes, dont les verres à la transparence parfois aléa-
toire doivent être minutieusement entretenus. Les
appareils dentaires doivent également être bien adap-
tés et surtout portés pour éviter la résorption alvéolaire
qui les rend rapidement inutilisables avec les consé-
quences alimentaires et esthétiques que l’on connaît. Il
en sera de même pour les audioprothèses. On peut
déplorer la prise en charge limitée de ces dispositifs
par l’assurance maladie.
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