OBSERVATION DIALOGUÉE
La Lettre de L’Hépato-Gastroentérologue - n° 5 - octobre 1998232
L’examen histologique confirmait le diagnostic d’hémangiome
caverneux hépatique.
Cette histoire clinique met en évidence le mode de révélation
d’une tumeur hépatique, avec une cascade d’examens complé-
mentaires, afin d’obtenir une approche très précise du dia-
gnostic, précédant un éventuel traitement spécifique qui sera
le plus souvent chirurgical. Le but du bilan réalisé pour une
tumeur hépatique est d’abord d’écarter une tumeur maligne
primitive du foie ou une métastase. Les progrès récents des
moyens diagnostiques, en particulier de l’imagerie médicale,
la meilleure maîtrise de la chirurgie hépatique nous permettent
d’offrir au patient le traitement le mieux adapté à chaque dia-
gnostic.
La stratégie à adopter, devant la découverte d’une lésion présu-
mée bénigne, dépend du contexte clinique et de la description
échographique. Si l’incertitude persiste, des examens morpho-
logiques, tels que la tomodensitométrie et plus particulièrement
l’imagerie par résonance magnétique nucléaire, nous offrent
une approche diagnostique avec une spécificité et une sensibi-
lité proches de 100 %.
LES PRINCIPALES TUMEURS BÉNIGNES DU FOIE
Angiome du foie ou hémangiome caverneux
C’est la tumeur bénigne la plus fréquemment retrouvée, sa fré-
quence est estimée à 2 % de la population générale dans les
séries échographiques. Elle est plus souvent retrouvée chez
l’adulte entre 30 et 50 ans avec une faible prédominance fémini-
ne. L’angiome est souvent unique, mais il peut être multiple dans
près de 30 % des cas. À l’échographie, il est décrit sous la forme
d’une masse de moins de 3 cm de diamètre, homogène et hyper-
échogène, avec un renforcement postérieur typique. Dans cette
forme caractéristique, d’autres examens radiologiques ne sont
pas nécessaires. Si l’aspect est atypique, si la lésion est volumi-
neuse ou s’il existe des remaniements secondaires à des throm-
boses intratumorales, il semble prudent de mettre en place
d’autres investigations. La tomodensitométrie et en particulier
l’angioscanner, avec des coupes rapides et précoces après injec-
tion de produit de contraste, suivies de clichés tardifs aux alen-
tours de la 30eminute, permet de mettre en évidence la stase san-
guine. Les critères indispensables pour le diagnostic sont une
hypodensité avant l’injection du bolus, une prise de contraste
immédiate en périphérie puis centripète ou diffuse avec renfor-
cement périphérique durant la première minute, suivi d’un ren-
forcement de la zone centrale qui s’efface lentement en 30 à 60
min. Lorsque le scanner ne permet pas de porter un diagnostic
précis, nous avons recours à l’IRM qui est actuellement l’exa-
men de référence pour les angiomes hépatiques et qui offre les
taux de spécificité et de sensibilité les plus élevés. Les angiomes
ont généralement un allongement du T2 supérieur à celui des
autres tumeurs bénignes, entraînant un hypersignal persistant sur
les coupes tardives et mettant en évidence la stase sanguine,
notamment dans les tumeurs de plus de 3 cm de diamètre.
Concernant la biopsie hépatique à but diagnostique, elle ne doit
être proposée qu’en cas de persistance de doute diagnostique.
Elle doit être faite sous contrôle échographique en traversant
une importante épaisseur de parenchyme hépatique sain afin de
réduire au maximum le risque hémorragique.
Globalement, l’angiome reste stable avec de rares cas d’aug-
mentation progressive du volume tumoral. Les complications
sont exceptionnelles, intéressent uniquement les lésions de
grande taille à type de rupture spontanée ou post-traumatique.
Le syndrome de Kasabach-Merrit est marqué par une thrombo-
pénie et une fibrinopénie secondaires à une consommation des
plaquettes et du fibrinogène à l’intérieur de la tumeur.
En l’absence de complications et de symptomatologie doulou-
reuse secondaire à la taille tumorale, l’angiome ne nécessite ni
traitement ni surveillance. Le seul traitement proposé reste une
exérèse chirurgicale à froid avec des autotransfusions étant
donne le risque de CIVD intratumorale.
Hyperplasie nodulaire focale (HNF)
C’est une tumeur fréquemment retrouvée chez la femme
jeune, mais elle s’observe à tous les âges. La relation entre
HNF et contraceptifs oraux n’est pas clairement démontrée.
Dans la majorité des cas, elle se manifeste sous la forme d’une
tumeur unique, arrondie et bien limitée. L’architecture hépa-
tique est globalement conservée et les nodules hépatocytaires
se disposent autour d’un pédicule vasculaire unique, qui forme
la “cicatrice fibreuse centrale” bien visible en imagerie et en
histologie. L’HNF se complique rarement. À l’échographie,
l’HNF dont la différentiation du reste du parenchyme hépa-
tique est parfois difficile, peut être hyper- ou isoéchogène. La
mise en évidence d’une formation centrale hyperéchogène et
étoilée peut être un élément assez spécifique. L’examen tomo-
densitométrique avec injection de produit de contraste met en
évidence une hypervascularisation centrale artérielle, rapide et
fugace, suivie d’une hypodensité centrale. En cas d’incertitu-
de diagnostique, l’IRM est actuellement le meilleur examen
pour caractériser l’HNF. Cette tumeur se caractérise par une
iso- ou une hypointensité par rapport au reste du foie en T1, et
elle devient hyperintense en T2. Le caractère homogène de la
tumeur, l’absence de capsule et la présence de l’élément cen-
tral hyperintense en T2 sont des éléments radiologiques très
spécifiques d’HNF.
Étant donné l’évolution bénigne de cette tumeur, l’abstention
thérapeutique est recommandée en cas de certitude diagnostique
et en l’absence de toute symptomatologie notamment doulou-
reuse. Le traitement doit être chirurgical en cas de doute dia-
gnostique ou de symptomatologie douloureuse.
L’adénome hépatocytaire
C’est une tumeur bénigne favorisée par les œstroprogestatifs. Sa
fréquence semble en régression actuellement grâce à l’utilisa-
tion de contraceptifs mini- ou microdosés en œstrogènes.
L’adénome est constitué d’une masse arrondie, plus dense que
le reste du parenchyme hépatique, et très vascularisée. Dans un