Lipoprotéines et rôle biologique I/ Généralités Le rôle principal des lipides est énergétique. 2 phénomènes de dégradation des acides gras : - principalement la B oxydation secondairement la production des corps cétoniques (cétogenèse). Les AG utilisés proviennent de 3 sources : - graisses de l’alimentation graisses stockées dans les cellules sous forme de gouttelettes lipidiques graisses nouvellement synthétisées par l’organisme Les lipides bougent beaucoup dans l’organisme. Comment transporter dans les milieux aqueux de l’organisme (sang ou lymphe) les lipides qui sont en majorité hydrophobes ? L’organisme va créer des structures moléculaires particulières qui associent des protéines aux lipides. Cet ensemble structurel porte le nom de lipoprotéine. Structure des lipoprotéines A la périphérie, on trouve les molécules amphiphiles comme les phospholipides (lécithine) mais aussi le cholestérol libre et les protéines. Les protéines constituantes des lipoprotéines portent le nom de apoprotéines. Au centre des particules des lipoprotéines, on trouve les lipides hydrophobes : les triglycérides et le cholestérol estérifié. En fonction du type de lipoprotéine, cette structure peut varier notamment au sujet des apoprotéines constituantes. D’une manière générale, les lipoprotéines sont classifiées en fonction de leur densité. De la plus légère à la plus lourde, on a : - les chylomicrons les VLDL (lipoprotéines de très faible densité) les LDL (lipoprotéines de basse densité) les HDL (lipoprotéines de haute densité) Plus la particule est dense, plus elle est petite. Les HDL sont les plus petites et les plus denses. Les chylomicrons ont un diamètre de 10 à 20 fois plus grand que celui des HDL. La composition en lipides de ces lipoprotéines varie : on l’explique par le rapport entre la surface de la sphère et leur contenu. Plus les lipoprotéines sont grandes, plus il y a de lipides à l’intérieur. II/ Digestion intestinale des lipides Notre alimentation quotidienne apporte des lipides essentiellement sous forme de : - triglycérides (80%) cholestérol libre ou estérifié (10%) lipides divers y compris les lécithines (10%) Au niveau de l’intestin, les lipides vont être dégradés par une enzyme, la lipase pancréatique. Au niveau des triglycérides : La lipase pancréatique hydrolyse les liaisons esters des triglycérides au niveau des carbones . Cela aboutit à la formation des 2 molécules d’acides gras libre et d’un monoglycéride. triglycéride lipase pancréatique 2 AG + 1 monoglycéride Au pH intestinal, environ 30% des monoglycérides s’isomérisent spontanément ou sous l’action d’un isomérase en monoglycéride. 30% des monoglycérides isomérase monoglycérides Le changement de la liaison ester en du glycérol fait que cette nouvelle liaison ester peut être hydrolysée par la lipase pancréatique pour donner du glycérol et un acide gras. monoglycérides lipase pancréatique glycérol + acide gras Si on tient compte de ces modifications, le bilan général de digestion donne : 100 TG 230 AG + 30 glycérol + 70 MG. Les triglycérides ne sont pas la seule cible de la lipase pancréatique. Au niveau du cholestérol : Le cholestérol estérifié est aussi hydrolysé sur sa liaison ester pour donner du cholestérol libre et un acide gras libre. cholestérol estérifié lipase pancréatique cholestérol libre + 1 AG libre Ensuite, environ 30% de ce cholestérol libre est réabsorbé par la muqueuse intestinale grâce à un transporteur spécifique. Les dérivés de stanol qui est un stérol d’origine végétale peuvent se lier et saturer les transporteurs du cholestérol. Par ce mécanisme, les dérivés du stanol empêchent la réabsorption intestinale du cholestérol s’ils sont additionnés à notre alimentation. En théorie, le stanol se lie aux transporteurs mais ils ne sont pas absorbés. Une faible proportion de ces stanols va passer en réalité dans la circulation générale. Notre organisme n’a pas de mécanisme biochimique pour dégrader et éliminer ces stanols. On ne connaît pas actuellement le risque encouru par une consommation constante de ces stanols sur le long terme. III/ Absorption intestinale Pour les produits de la digestion intestinale des triglycérides c’est plus difficile : les acides gras libres et les monoglycérides sont peu solubles dans l’eau. Ils ont besoin pour être solubilisés et absorbés d’une solution micellaire formée par les sels biliaires apportés par la bile. 2 étapes : les monoglycérides forment des micelles avec les sels biliaires qui à leur tour vont solubiliser les acides gras et la nouvelle micelle mixte ainsi formée est absorbée en bloc au niveau du 2ème segment de l’intestin grèle càd au niveau du jéjunum. Dans l’entérocyte, il y a un métabolisme actif et on assiste à une vraie synthèse des triglycérides à partir de ces constituants de la digestion. - 2 voies sont utilisées par l’entérocyte : une voie majeure à partir des monoglycérides une voie dite mineure IV/ Métabolisme entérocytaire La voie majeure : 1 MG + 2 AG 1 TG Pour la voie majeure des monoglycérides, il faut réaliser une estérification des 2 fonctions alcool en du glycérol par 2 acides gras. C’est en fait plus compliqué que cela. Cette réaction nécessite au préalable l’activation des acides gras. Cette activation se passe dans une réaction catalysée par l’acyl CoA synthétase et qui nécessite de l’énergie fournit par une molécule d’ATP pour chaque AG et une molécule de Coenzyme A. On obtient ainsi les acides gras activés sous forme d’acide coA. La réaction des acides CoA avec les monoglycérides est irréversible. L’enzyme entérocytaire qui catalyse cette réaction est la triglycéride synthase. Ce n’est pas une réaction réversible. Par la voie des monoglycérides on a reconstitué environ 70% des TG. La voie mineure est nécessaire : Le glycérol créé est hydrosoluble et rapidement absorbé. Il passe dans la circulation générale et arrive au foie où il est métabolisé très rapidement. Le temps que la micelle mixte se forme pour amener les acides gras et les monoglycérides, le glycérol est parti. On se retrouve donc avec un excès d’acides gras dans l’entérocyte qui ne peut pas être utilisé pour la synthèse des TG faute de glycérol. La voie mineure nécessite donc dans un premier temps, la synthèse entérocytaire de glycérol. Ce glycérol provient majoritairement de catabolisme du glucose en utilisant la voie de la glycolyse via le glucose-6- phosphate. Cette voie de la glycolyse va aboutir à la formation du glycérol-3-phosphate. Ce glycérol-3-phosphate sera utilisé pour la synthèse des TG. On a besoin de 3 acides gras activés combinés à 3 molécules de CoA et 3 ATP. La digestion des lipides nécessite beaucoup d’énergie et c’est un processus lent. Cela explique que l’on dit que les lipides sont difficiles à digérer. V/ Catabolisme du chylomicron A partir de l’entérocyte, les différentes structures lipidiques reconstituées vont passer dans la circulation générale. Cette fois-ci leur solubilisation ne fait pas appel à des micelles mais à des lipoprotéines qui sont les chylomicrons. Ils ont une densité inférieure à 1. La structure du chylomicron comme celle des autres lipoprotéines présente à la périphérie : - des phospholipides - du cholestérol libre d’origine alimentaire - des apoprotéines. Les apoprotéines constituantes des chylomicrons au départ de l’intestin sont : - des apo B48 - des apo E - des faibles quantités d’apo A1. Au centre des chylomicrons, on va retrouver essentiellement les triglycérides reconstitués et une petite quantité de cholestérol estérifié. Fonction du chylomicron : Elle est de transporter au niveau des tissus périphériques et au foie les acides gras d’origine alimentaire (acide gras exogènes) absorbés dans la période post prandiale. Le catabolisme du chylomicron dans la circulation sanguine est rapide. En effet la demi-vie des chylomicrons est d’environ 1 heure. Ils vont subir un processus de perte de lipides par une hydrolyse progressive des triglycérides sous l’action d’une enzyme, la lipoprotéine lipase extra hépatique. Cette lipoprotéine lipase est une enzyme membranaire située à la surface des vaisseaux sanguins. L’activité de la lipoprotéine lipase est augmentée par l’insuline. L’insuline est une hormone impliquée notamment dans la régulation du métabolisme glucidique. L’insuline a une concentration élevée justement dans les périodes post prandiales. L’activation de la lipoprotéine lipase par l’insuline explique la demi-vie courte des chylomicrons. L’action de la lipoprotéine lipase fournit du matériel énergétique sous forme d’acides gras libres au tissu en période post prandiale notamment aux muscles et au tissu adipeux. Pour que la lipoprotéine lipase puisse réagir, il faut que les chylomicrons se fixent à cette enzyme : ceci est réalisé grâce à la présence de l’apo C2. Les chylomicrons au départ de l’intestin n’ont pas d’Apo C2. Elle se fixe en surface des chylomicrons dans la circulation sanguine suite à un échange avec d’autres lipoprotéines circulantes, les HDL. C’est un échange équilibré car en même temps les chylomicrons vont enrichir les HDL en Apo A1. Les chylomicrons vont hydrolyser de façon progressive le TG ce qui fait qu’ils vont diminuer de taille et vont devenir ce que l’on appelle un résidu ou un remnant de chylomicron. Ces résidus de chylomicrons seront captés par des récepteurs hépatiques qui reconnaissent l’apo E. Ils sont rapidement endocytés. Les TG qui restent seront ensuite hydrolysés en AG sous l’action d’une autre lipase, la lipase hépatique. Les acides gras qui résultent sont utilisés par l’hépatocyte : - pour la production d’énergie. Ils sont stockés sous forme de TG de réserve Ils vont servir à la production des corps cétoniques qui sont ensuite distribués dans l’organisme et utilisés comme matériel énergétique par certains tissus. VI/ Métabolisme des VLDL En dehors de la période post prandiale, d’autres lipoprotéines synthétisées par le foie vont synthétiser des acides gras libres pour les tissus périphériques. Ces lipoprotéines sont les VLDL. Ils proviennent d’une synthèse hépatique à partir des TG de réserve (endogène), du cholestérol estérifié et des apoprotéines. A leur surface, on trouve essentiellement des apoprotéines de type : - apo B100 - des faibles quantités d’apo E - un peu d’apo C2. Le fait qu’ils aient déjà de l’apo C2 permet aux VLDL d’être d’emblée délipidés par l’hydrolyse de leur TG sous l’action de la lipoprotéine lipase extra hépatique. Comme pour les chylomicrons, il existe une possibilité d’enrichissement en apo C2 par échange avec les HDL circulants. Le rôle des VLDL est double : - les TG hydrolysés par la lipoprotéine lipase en acide gras libres seront distribués aux tissus périphériques qui consomment beaucoup d’énergie (muscles squelettiques et cardiaque) en dehors de la période post prandiale - ils vont fournir du cholestérol synthétisé par le foie aux cellules périphériques. Ce deuxième rôle n’est pas réalisé de façon directe par les VLDL. En ce qui concerne l’hydrolyse des lipides VLDL, elle est plus lente que celle des chylomicrons car la lipoprotéine lipase est moins active. On est loin du repas et la sécrétion d’insuline est plus faible. Ceci explique le fait que les VLDL ont une demi-vie plus longue dans la circulation sanguine comparé aux chylomicrons. Durant cette durée de vie accrue, les VLDL seront soumis à un autre phénomène : un enrichissement en cholestérol estérifié sous l’action d’un autre enzyme, la LCAT (lécithine cholestérol acyl transférase). Comme son nom l’indique, cette enzyme est capable d’hydrolyser des AG des lécithines présentes à la surface des VLDL et ensuite d’utiliser ces AG pour estérifier le cholestérol libre de surface ce qui donne du cholestérol estérifié apolaire qui va gagner l’intérieur de la particule. Au total dans le catabolisme des VLDL il y a 2 phénomènes : - appauvrissement en TG - enrichissement en cholestérol estérifié - ce qui aboutit à une particule lipoprotéine d’une densité plus élevée que les VLDL qui porte le nom de IDL. Ces lipoprotéines intermédiaires continuent à perdre leur contenu en TG sous l’action de la lipoprotéine lipase et continuent à s’enrichir en cholestérol estérifié sous l’action de la LCAT ce qui aboutit à la formation des LDL. Des faibles quantités de IDL peuvent être recaptées et dégradées par le foie car les IDL expriment toujours de l’apo E qui est reconnue par le récepteur hépatique. VII/ Catabolisme des LDL L’action de la lipoprotéine lipase est finie. Il n’y a presque plus de TG dans la composition des LDL. Ce qui reste à l’intérieur est du cholestérol estérifié. Le rôle des LDL est d’amener le cholestérol aux cellules périphériques. Au niveau des cellules des tissus périphériques, on a un récepteur aux LDL qui reconnaît l’apo B100. Au niveau des cellules, on assiste à un processus classique d’endocytose avec recyclage des récepteurs. Le complexe LDL-récepteur endocyté sera découplé au niveau des endosomes lors d’un processus d’acidification progressive. Le découplage permet aux récepteurs d’être recyclés ; quant aux LDL, elles restent dans les endosomes qui poursuivent leur acidification, se transformant ainsi en lysosomes. Dans le milieu acide des lysosomes, les composantes des LDL seront dégradées, l’apoprotéine majoritaire apo B100 est dégradée en acides aminés alors que le cholestérol estérifié est hydrolysé en cholestérol libre qui sera utilisé par la cellule notamment dans la construction des membranes. La quantité totale de cholestérol intracellulaire est strictement régulée et dès que cette concentration augmente, on a l’activation de 3 mécanismes de régulation : 1er mécanisme : répression de la synthèse endogène de cholestérol par l’inhibition de l’HMG CoA réductase. 2ème mécanisme : inhibition de la synthèse et du recyclage des récepteurs aux LDL Comme il y a moins de récepteurs à la membrane, il y a moins de LDL captés par la cellule. Si toutes les cellules ont assez de cholestérol, on aura une augmentation du cholestérol dans la circulation sous forme de LDL. 3ème mécanisme : activation d’une enzyme appelée ACAT (acyl coA cholestérol acyl transférase) Cette enzyme ACAT intracellulaire va estérifier le cholestérol libre en différents esters de cholestérol libre (oléates, stéarates, palmitates de cholestérol). Ces molécules de cholestérol estérifié seront stockées à l’intérieur de la cellule sous la forme de petits globules graisseux (cholestérol de réserve). L’ACAT est une enzyme intracellulaire. Il ne faut pas la confondre avec la LCAT qui est une enzyme extracellulaire. VIII/ Catabolisme des HDL Les HDL sont formées en permanence au niveau du foie er de l’intestin. Ce sont des lipoprotéines riches en protéines de type : - apo C2 - apo A1. Au départ, elles contiennent relativement peu de lipides et surtout des lécithines. Le fait qu’il y ait peu de lipides à l’intérieur de la particule fait que les HDL naissantes ont une forme de disque. Rôle des HDL : débarrasser les tissus périphériques de leur excès de cholestérol. Pour se mettre en contact des membranes cellulaires des cellules périphériques, les HDL vont fixer du cholestérol libre qui sera rapidement estérifié par la LCAT ce qui va donner des esters de cholestérol qui vont gagner le centre de la particule et qui vont leur faire perdre progressivement une forme sphérique. L’action de la LCAT est favorisée par le fait que ces HDL sont riches en lécithines. Mais la composition des HDL est aussi modifiée par l’échange avec les autres lipoprotéines. L’échange avec les autres lipoprotéines concerne les apoprotéines. On a déjà vu que les HDL fournissent de l’apo C2 aux chylomicrons et aux VLDL et par ailleurs, s’enrichissent en apo A1 provenant des chylomicrons. Il y a également un échange de lipides : En effet les HDL en circulation peuvent céder une partie de leurs esters de cholestérol aux VLDL ou aux LDL sous l’action de la CETP (protéine de transfert des esters de cholestérol). Cela fait un court circuit : du cholestérol qui était sur la voie d’élimination des HDL retourne sur la voie de transfert vers les cellules. Néanmoins la plupart du cholestérol des HDL va arriver avec les HDL matures au niveau hépatique. Au niveau hépatique, ces HDL matures sont reconnus par les récepteurs SRB1 (récepteur éboueur). Ces récepteurs vont extraire des HDL le cholestérol estérifié. Le reste (les apo A1 et les lécithines qui restent) va former à nouveau des HDL petites en forme de disque. Ce mécanisme utilisant le récepteur SRB1 est trouvé chez les rongeurs. D’autres protéines comme une ATPase extracellulaire semblent être le récepteur spécifique de l’apo A1 et sont donc impliquées dans ce processus de fixation des HDL au niveau hépatique. Ces esters de cholestérol sont transformés en acides biliaires qui seront ensuite transformés en sels biliaires et éliminés par la bile. Les sels biliaires vont permettre la solubilisation des monoglycérides et des acides gras exogènes en formant la micelle mixte ce qui permet l’absorption des lipides au niveau intestinal. IX/ Lipoprotéines et athérosclérose Il y a 2 particules de lipoprotéines riches en cholestérol estérifié : les LDL les HDL Ces 2 lipoprotéines ont des voies métaboliques totalement opposées. Pour les LDL : Leur capture périphérique dépend du nombre de récepteurs aux LDL à la surface des cellules. Ce nombre est limité par la concentration intracellulaire en cholestérol. Si cette concentration atteint un certain seuil, les récepteurs ne sont plus synthétisés et le résultat est que les LDL s’accumulent dans le sang. Le sang est un très mauvais tissu de réserve pour ces LDL : les LDL qui restent trop longtemps en circulation s’oxydent surtout au niveau de leurs lipides et ne seront plus reconnus à terme par les récepteurs aux LDL. Ces LDL oxydés seront captés et enlevés de la circulation par des cellules des parois sanguines qui sont les macrophages. Les macrophages vont capter les LDL oxydés par des récepteurs éboueurs. Les macrophages vont se surcharger progressivement en lipides. Ils vont se transformer en des cellules spumeuses. Ces cellules spumeuses sont à l’origine des plaques d’athérome sur les artères, plaques qui favorisent la formation des caillots sanguins à l’origine des accidents cardiovasculaires. L’accident le plus connu est l’infarctus de myocarde ou l’accident vasculaire cérébral. Pour les HDL : Ils assurent la voie de retour du cholestérol. Le catabolisme des HDL est un mécanisme d’élimination du cholestérol car les sels biliaires formés sont éliminés par la bile et les sels. On a la notion du bon et du mauvais cholestérol. Le bon cholestérol est le cholestérol des HDL en voie d’élimination. Le mauvais cholestérol dangereux pour la santé est le cholestérol des LDL. Si on dose le cholestérol, et que on a du cholestérol élevé, cela ne veut rien dire car il faut préciser le type de cholestérol.