Fichier pdf de l`article

publicité
Éléments pour
une « topographie »
du concept de santé
Article
original
André-Pierre Contandriopoulos
Université de Montréal
Résumé :
Alors qu'il existe un large accord sur le fait que les représentations de la santé et de ses déterminants
sont à la base de la conception de ce que devrait être le système de soins, des attentes
de la population à son égard et du rôle que devrait jouer l'État dans le domaine de la santé,
nous constatons que très peu de travaux s'intéressent à ce qu'est la santé. Partant de l'idée
que la santé et la maladie sont des concepts indissociables sans pour autant êtres les inverses
l'un de l'autre, nous proposons une « topographie » du concept de santé en explorant ses dimensions
ontologique, épistémologique, méthodologique et téléologique.
La santé, vérité de la vie, apparaît comme une qualité fondamentale de l'être humain qui s'exprime
dans chacune des quatre dimensions (biologique, sociale, psychique, rationalité) définissant
tout être humain. Les connaissances à mobiliser pour rendre compte dans sa complexité du concept
santé – maladie doivent provenir d'un dialogue à organiser entre les sciences de la vie, les sciences
sociales et les sciences du comportement. L'avancement des connaissances dans ce domaine repose
sur la mobilisation des méthodes scientifiques les plus pertinentes dans chacun des grands champs
disciplinaires (spécialisation méthodologique disciplinaire) et en même temps sur l'intégration
des résultats spécialisés dans un schéma interprétatif interdisciplinaire qui reste très largement
à construire. Plus les connaissances sur la santé et ce qui l'affecte s'affineront, plus il deviendra
possible de proposer des politiques de santé efficaces et légitimes.
Mots clés:Santé, maladie, déterminants de la santé, politiques de santé.
L
es représentations de la vie, de la mort,
de la douleur, autrement dit de la santé,
et la compréhension des déterminants
de la santé et de la maladie sont à la base
de la conception de ce que devrait être le système
de soins, des attentes de la population à
son égard, du rôle que devrait jouer l'État
dans le domaine de la santé et des responsabilités
des individus (Beck, 1986). Elles ont évolué
au cours du temps en fonction, entre autres,
du développement des connaissances (Canguilhem,
1966 ; Foucault, 1963 ; Evans et al., 1996 ; Evans,
2002 ; Glouberman, 2001 ; Goldberg et al., 2003),
des techniques et aussi d'une certaine manière
des besoins liés aux changements démographiques.
Pour trouver les pistes qui permettront aux sociétés
développées de surmonter la crise qui frappe
leur système de soins 1 (Contandriopoulos, 2000,
2003; Blais 2003; Beck 1986) et de faire de la santé
la véritable priorité du gouvernement, il devient
nécessaire de réfléchir sur les concepts de santé
et de maladie ainsi que sur leurs relations.
Les travaux scientifiques récents sur les
facteurs qui affectent la santé des populations montrent que les facteurs, les situations, les contextes
Ruptures, revue transdisciplinaire en santé, vol. 11, n° 1, 2006, pp. 86-99.
Éléments pour une « topographie » du concept de santé 87
qui sont porteurs de santé, c'est-à-dire qui accroissent « la possibilité pour le vivant de s'accomplir »
(Foucault, 1997), mobilisent des mécanismes
qui ne sont pas de même nature que ceux qui
sont à l'œuvre quand il s'agit de diagnostiquer,
de traiter, voire de prévenir des maladies spécifiques (Evans et al.,1996 ; Forum national sur
la santé, 1997 ; Drulhe, 1997). D'un côté, quand
on veut agir sur la santé en tant que capacité
à vivre bien et longtemps, les interventions
ciblent l'environnement dans lequel interagissent
les individus, aussi bien l'environnement physique
(milieu de travail, conditions de logement,
salubrité, pollution, etc.) que l'environnement
économique et social (pauvreté, chômage, isolement,
exclusion, etc.), ou encore l'environnement culturel
(droit de la personne, éducation, accès à l'information et aux connaissances, etc.). D'un autre
côté, quand on veut agir sur la santé en réduisant
l'incidence, la durée, l'intensité ou les conséquences
des maladies spécifiques dont souffrent les
individus, les interventions visent le fonctionnement
biologique et psychique des êtres humains
et leurs comportements. Il s'agit, dans ce cas,
de modifier le cours des différents processus
biologiques et psychiques affectés par la maladie.
l'autre. Les concepts de santé et maladie sont
indissociables, mais la maladie n'est pas pour
autant l'inverse de la santé (Canguilhem, 1966).
Si certaines populations vivent plus longtemps
que d'autres, cela ne signifie pas nécessairement
que les membres de ces populations sont moins
malades. Les Japonaises ne sont pas moins
malades que les Françaises ou les Québécoises,
les femmes des pays riches qui vivent en
moyenne plus longtemps que les hommes
ne sont pas, elles non plus, moins malades !
(Contandriopoulos, 1999). « Être en bonne santé,
c'est pouvoir tomber malade et s'en relever, c'est
un luxe biologique. » (Canguilhem, 1966 :132).
La santé ne peut être appréhendée par l'image
d'un continuum allant, sans interruption et sans
rupture, d'un état complet de bien-être jusqu'à
la mort, en passant par toutes les formes possibles
de maladie et d'incapacités. Et pourtant, cette
représentation paraît implicite dans la plupart
des discours sur la prévention (figure 1). La maladie
et la santé sont conçues comme des concepts à
ce point complémentaires que toute politique
qui réduit l'espace de la maladie semble augmenter
automatiquement celui de la santé. Cette idée,
séduisante par sa simplicité, est pourtant fausse 2.
On conçoit bien que si les phénomènes
de maladie et de santé ne sont pas indépendants,
ils ne sont pas pour autant réductibles l'un à
Toutes les observations disponibles montrent
qu'à l'échelle d'une population et sur un horizon
temporel assez long, plus la prévention au sens
Figure 1 : Maladies et santé sont complémentaires
88 André-Pierre Contandriopoulos
large réussit, c'est-à-dire plus l'espérance de vie
augmente, plus les chances d'être malade croissent
aussi. L'expérience des pays développés au cours
du XXe siècle apparaît à cet égard, éloquente.
On observe simultanément que l'espérance
de vie a augmenté comme jamais auparavant,
trente ans de gain depuis la fin du XIXe siècle,
(en moyenne, deux ans tous les dix ans depuis
la deuxième guerre mondiale) et que la morbidité
a, elle aussi, connu un essor extraordinaire
en même temps qu'un changement de nature.
Les maladies infectieuses sont progressivement
remplacées par les maladies systémiques
de la vieillesse (transition épidémiologique)
(Freis 1989 ; Légaré 2003 ; Meslé et Valin, 1992).
La question de ce « qu'est » la santé reste
donc entière. Pour Canguilhem (1990), on peut
se sentir bien, mais on ne peut jamais savoir
que l'on est bien portant. La santé n'est pas
un concept scientifique alors que la maladie l'est.
Les connaissances scientifiques sur la maladie
révèlent peu de choses sur l'essence de la santé.
«La santé, vérité du corps, ne relève pas d'une explication
par théorèmes» (Canguilhem 1990, p. 20). La santé
pose des questions d'ordre philosophique,
« des questions où celui qui questionne est lui-même
mis en cause par la question» (Canguilhem 1990, p. 36).
La santé est silencieuse, alors que la maladie
est bruyante, bavarde, mesurable, comptabilisable.
« La santé c'est la vie dans le silence des organes, c'est
aussi la vie dans la discrétion des rapports sociaux»
(Canguilhem 1990, p. 28), ou encore, comme
le dit un proverbe oriental : « La santé est une
couronne sur la tête des biens portants que seuls voient
les malades ».
Pour couper court à une discussion, il suffit
de répondre à la traditionnelle question :
« comment ça va ? », par « très bien, je me sens
en grande forme »... il n'y a rien à ajouter !
Au niveau collectif, la santé constitue
simultanément une ressource et un résultat.
Le «Haut Comité de la Santé Publique» de la France
écrit 3 : « La santé de la population est par nature
une ressource nécessaire – sinon suffisante – au
fonctionnement et au développement de toute société»
(p. 9) « Fondamentalement [la santé] est à la fois
un processus individuel qui s'enracine dans le secret
de nos gènes et de nos comportements les plus
intimes, une représentation sociale et un «obscur objet
de désir » dont l'appréhension [...] dépend en réalité
de l'angle sous lequel on l'examine, à tel point que la santé
d'une population ne semble faite que de paradoxes» (p. 10)
Dans les domaines de la santé publique,
de la promotion de la santé, des déterminants
de la santé, de l'épidémiologie et de la médecine
en général, il existe peu de travaux et de réflexions
sur la santé. Dans le livre Être ou ne pas être
en santé, R. Evans et ses collègues (1996) ne disent
presque rien sur le concept de santé, la question
étant réglée dès la première note de l'introduction:
« Les travaux présentés dans cet ouvrage se fondent
sur une idée particulière de la « santé » qu'il faut
préciser dès le départ. La plupart du temps, nous
prenons pour acquis que la santé c'est l'absence
d'incapacité ou de maladie. En d'autres termes,
quelqu'un qui ne se sent pas malade [...], qui n'est
atteint d'aucune pathologie médicalement définie
[...], et qui n'est pas blessé [...], est en «bonne santé».
Les individus réagissent tous très différemment
en termes de capacité fonctionnelle tant aux «maladies
ressenties » qu'aux maladies « diagnostiquées » ;
quand on parle de santé, c'est de cette capacité
de fonctionner combinée à l'absence de maladie
cliniquement définie dont il est implicitement question.
Il existe bien sûr, d'autres conceptions de la santé.
Aujourd'hui, il est à peu près admis que la définition
très large de l'OMS « un état de bien-être complet »
est d'une faible utilité opérationnelle. Selon cette
définition, la «santé» c'est tout, donc rien de particulier.
Mais on voit apparaître aujourd'hui dans divers milieux
des réflexions nouvelles intéressantes qui peuvent
conduire à des acceptations différentes de la santé »
(Evans, et al. 1996 : 14). Ces réflexions nouvelles
sur ce qu'est la santé, l'objet même des travaux
et des interventions des personnes qui travaillent
dans le grand domaine de la santé publique,
nous semblent essentielles pour participer
activement et de façon pertinente, aux débats
actuels sur le rôle de l'État dans le domaine
de la santé, sur l'élaboration des politiques de santé,
sur l'évaluation des interventions.
Nous pensons que, pour faciliter cette
réflexion, il est utile d'explorer les différentes
dimensions du concept de santé en décrivant
brièvement ses dimensions ontologique, épistémologique, méthodologique et téléologique. En
d'autres mots, il importe de tenter d'en dresser
« la topographie ».
Éléments pour une « topographie » du concept de santé 89
Dimension ontologique
Il est intéressant avec Canguilhem (1990,
1992) de remarquer que le mot santé est très peu
présent dans les dictionnaires médicaux ; quand
il y figure, il renvoie soit à la définition très
générale de l'OMS 4, soit à santé publique. Mais,
dans ce dernier cas, autrement dit « à partir
du moment où santé a été dit de l'homme en tant
que participant à une communauté sociale ou professionnelle, son sens existentiel a été occulté par
les exigences d'une comptabilité... Ce qui est public,
publié, c'est très souvent la maladie » (Canguilhem
1992 : 12-14).
Pour progresser dans la compréhension
de ce qu'est la santé, deux avenues sont souvent
prises. La première consiste à retracer dans l'histoire
comment le concept de santé a été utilisé et quelles
en sont les sources étymologiques (Bernadis, 1992,
Houtaud, 1999), et la deuxième est d'analyser
comment il est traité dans les différentes
disciplines universitaires 5 et par les philosophes
(Canguilhem, 1966, 1990, 1992)
Figure 2 : La santé : qualité fondamentale de l’être humain.
La santé, vérité de la vie (Canguilhem, 1992),
est une qualité fondamentale de l'être humain.
Si l'on admet que tout être humain est simultanément et de façon indissociable 6 (figure 2) :
• un être biologique, vivant, dynamique,
unique ;
• un être social en interaction permanente
avec d'autres êtres humains, situé dans le temps
et l'espace, dépendant de son environnement et
agissant sur lui ;
• un être d'émotions, de sensations, de désirs,
d'intentions, un être spirituel ;
• un être de connaissance, de rationalité,
de réflexions ;
alors, la santé s'exprimera dans chacune
de ces quatre dimensions.
Elle peut, de plus, s'appréhender à partir
de l'unicité de chaque personne ou encore
de la masse des individus d'une population.
Le passage de la santé des individus à la santé
de la population pose un problème fondamental.
90 André-Pierre Contandriopoulos
Le problème ne comporte pas seulement un aspect
technique – comment agréger des indicateurs
reflétant les différentes dimensions du concept
de santé ? – mais aussi une réflexion éthique, –
comment incorporer dans le concept de santé
de la population la question des disparités de santé
et celle de l'équité par rapport aux soins et à
la santé ? Cette question est discutée plus loin
lors de l'analyse de la dimension téléologique
du concept de santé.
être appelé le concept « santé-maladie »
(Kleinman, 1986, Almeida 2006). Ce concept
ne se limite pas à la dimension biologique
de l'être humain, il exprime aussi sa présence
dans ses autres dimensions.
La santé biologique est celle qui, selon
Leriche, se manifeste par « la vie dans le silence
des organes... La maladie, c'est ce qui gêne les hommes
dans l'exercice normal de leur vie... et surtout ce qui
les fait souffrir» 7. Pour Canguilhem (1966), la santé
correspond à la normativité positive de la vie,
« la physiologie est la « science des allures
stabilisées de la vie » ». Les maladies, conçues
comme des dérèglements des fonctions
biologiques, constituent les manifestations
négatives de la santé, elles déstabilisent la vie.
La vie et ses dérèglements peuvent s'exprimer
à travers différentes sphères de fonctionnement
de l'être vivant:les organes, les tissus, les cellules,
les molécules, les gènes, qu'explorent de façon
de plus en plus poussée et précise les sciences
de la vie. Mais l'être humain vivant forme un tout
qui ne peut se réduire au bon fonctionnement
de chacun de ses éléments. Tous ces niveaux
d'analyse restent interdépendants. « La santé,
vérité du corps, ne relève pas d'une explication
par théorèmes. Il n'y a pas de santé d'un mécanisme...
Pour une machine, l'état de marche n'est pas la santé,
le dérèglement n'est pas une maladie... il n'y a pas
de mort de la machine » Canguilhem (1992 : 11)
Elle s'exprime par la capacité pour le vivant
de s'épanouir, d'éviter de tomber malade. Tout
ce qui entraîne une «usure prématurée de la vie»
constitue une atteinte à la santé. La santé est
une ressource partiellement dépendante
de l'environnement et partiellement transmise
génétiquement (tout en admettant que le bagage
génétique demeure lui-même dépendant
de l'environnement). Cette ressource que constitue
la santé est mobilisée pour répondre aux exigences
du milieu. « La santé est un ensemble de sécurités
et d'assurances. [...] Sécurité dans le présent et assurance
dans l'avenir 9» «La mauvaise santé, c'est la restriction
des marges de sécurité organique, la limitation du pouvoir
de tolérance et de compensation des agressions
de l'environnement » (Canguilhem 1990, p. 20).
Le « silence des organes » ne suffit probablement plus aujourd'hui pour parler de santé,
il faudrait aussi parler du silence des tissus,
des cellules, des molécules, des gènes,... Autrement
dit, il faudrait pouvoir discerner le silence
que constitue la santé, derrière le bruissement
de la vie amplifié par les technologies de la
médecine moderne. Mais la connaissance
du bruit peut-elle aider à connaître le silence ?
La connaissance des maladies ne peut,
au mieux, que fournir un éclairage partiel sur
ce qu'est la santé. Mais la santé ne peut se concevoir sans référence à la maladie 8, les concepts
de maladie et de santé ne sont pas indépendants,
ils constituent dans leurs relations ce qui peut
La santé sociale est essentiellement associée
à l'adaptation de l'homme aux environnements
physiques, sociaux, symboliques dans lesquels
il est situé.
La santé en tant qu'adaptation de la vie
à son environnement s'exprime alors par la durée
et la qualité de la vie. Elle devient au niveau collectif
objet de calculs et d'interventions. Elle est l'enjeu
du biopouvoir, source de légitimité pour l'État
(Foucault, 1997).
La santé psychique se manifeste par
les sentiments de plénitude, de bonheur, de bienêtre. Elle se révèle constamment dynamique
dans le sens où ces sentiments se montrent
fuyants ou la quête de ces derniers n'est jamais
achevée. Ils représentent la raison d'être de la vie.
« Le désir est la condition même de l'être. Toutes
les informations qui entrent dans le cerveau par
les organes des sens (tact, vision, etc.) sont prises
en charge par ces systèmes désirants ou affectifs.
S'il n'y a pas de désir, l'animal n'est plus qu'une
statue de sel. C'est par ces systèmes désirants que
se créent l'attachement, l'amitié, voire la société »
(Vincent, 2002).
La santé repose sur la capacité réflexive
de l'être humain. L'objectivation, ou de façon plus
Éléments pour une « topographie » du concept de santé 91
générale, la connaissance des trois domaines
d'existence de la santé que nous venons
d'explorer, est elle même dépendante de la capacité
réflexive de l'être humain, autrement dit
de sa capacité à acquérir de la connaissance
sur lui-même et sur les formes d'organisation
sociale qui lui permettent d'exister en tant
qu'individu et en tant qu'espèce (Morin, 2004).
«Pour l'homme, vivre c'est aussi connaître. Je me porte
bien dans la mesure où je me sens capable de porter
la responsabilité de mes actes, de porter des choses
à l'existence et de créer entre les choses des rapports
qui ne leur viendraient pas sans moi, mais qui
ne seraient pas ce qu'ils sont sans elles. »
Canguilhem, (1992:15). Le sens que les différents
acteurs concernés (les patients, les professionnels,
la société) donnent à la vie, à la mort, à la douleur,
à la maladie... et le niveau d'analyse considéré
(l'individu, le groupe, la population...) constituent
le système symbolique qui permet de penser
la santé dans ses différentes dimensions et donc
d'agir sur elle. « Il n'y a pas de connaissance neutre
ni d'action neutre. Quand nos systèmes de représentation se construisent dans le cerveau, sous forme
de réseaux neuronaux, ils se bâtissent sur un fond
d'affects » (Vincent, 2002).
Figure 3 : Le concept de santé
Les représentations de la santé et
de la maladie dépendent de la position occupée
dans la société et en particulier de la relation
qu'une personne a avec le champ médical.
On distingue de façon classique, dans la dimension
biologique du concept santé–maladie, la maladie
diagnostiquée ou « diagnosticable 10 » (disease)
qui correspond à la représentation professionnelle,
la maladie ressentie (illness) qui est la représentation profane, et la maladie en tant que
phénomène social (sickness) qui est celle
de ceux qui sont préoccupés par la prise en charge
socioculturelle de la maladie (Kleinman, 1980 ;
Benoist, 1995).
Les quatre dimensions de la santé
représentées sur la figure 3 sont interdépendantes,
mais il n'existe pas de commun dénominateur
entre elles. Elles interagissent en permanence
et restent constamment en tension. Le concept
santé-maladie apparaît ainsi comme un concept
multidimensionnel. Il aide à comprendre que
la maladie professionnelle qui soustrait un travailleur à un environnement de travail stressant
contribue positivement à sa santé ou encore
que le bonheur constitue simultanément le but
92 André-Pierre Contandriopoulos
recherché et un facteur de résistance à l'apparition
de la maladie. Elle met en relief que la perception
de ce qui constitue une maladie est dépendante
des représentations et de la culture 11 (E. Corin,1996)
et que les représentations intimes que chacun
se fait de la santé et de la maladie sont à l'origine
des conduites sociales adoptées pour prévenir
la maladie à un moment donné dans un contexte
donné.
La santé apparaît, dès lors, comme un concept
paradoxal, complexe, contextuel. La santé est
toujours fuyante, indissociable de la vie de l'être
humain et de l'espèce humaine. La santé est un
« résultat » tout aussi bien qu'une « ressource ».
La santé ne peut être circonscrite par une
seule de ses dimensions, elle désigne une exigence
incontournable de tout être humain et de tout
groupe humain. Elle est simultanément une quête
sans fin, et le baromètre de nos succès et de nos
échecs individuels et collectifs. Le concept de santé
est à la fois normatif (Canguilhem, 1966 ;
Arweiler, 2002), en ce sens qu'il établit le but
à atteindre, et en même temps descriptif, dans
Figure 4 : Perspectives disciplinaires et santé
la mesure où il permet d'apprécier et de comparer
différentes situations 12.
Dimension épistémologique
Pour comprendre ce que sont les déterminants de la santé-maladie des individus et
des populations, il faut explorer les dimensions
biologiques, sociales et psychiques de l'être
humain. Chacune de ces dimensions constitue
un point de vue sur la santé-maladie et sur
les facteurs qui l'affectent. Aucune de ces dimensions n'est indépendante des deux autres et,
en même temps, aucune n'est suffisante
pour résumer ce qu'est la santé et quels en sont
les déterminants.
La figure 4 illustre cette idée. Chaque
dimension de l'être humain est placée sur un axe
et les champs de connaissance pertinents à
l'analyse de chaque dimension sont indiqués.
Éléments pour une « topographie » du concept de santé 93
Les sciences de la vie aident à comprendre
la dimension biologique de l'être humain. Elles
constituent les fondements sur lesquels s'appuie
la médecine pour diagnostiquer, prévenir,
traiter, pallier les conséquences néfastes des
maladies. La clinique, c'est-à-dire la médecine
en action « sans être elle-même une science ... utilise
le résultat de toutes les sciences au service des normes
de la vie. Cependant, si elle ne peut exister que parce
que les hommes se sentent malades, c'est aussi grâce
à son existence que ces mêmes hommes peuvent
savoir en quoi et de quoi ils sont malades »
(Roudinesco, 1998 : 35).
Les sciences sociales ont comme objet l'étude
de l'homme en société. Elles visent à comprendre
comment les individus interagissent dans un espace
social structuré. Quatre grandes perspectives
peuvent être adoptées pour analyser et comprendre
les phénomènes sociaux qui découlent des interactions des acteurs dans un contexte donné :
La perspective économique englobe la production, la distribution et la consommation des
biens et services. La régulation par les marchés
et les prix est au cœur de la perspective
économique.
La perspective sociologique porte sur les interactions entre les hommes dans leurs milieux
sociaux et étudie comment les cadres sociaux
de la vie humaine s'organisent et se structurent
(G. Rocher, 1992), les interactions entre les agents
sociaux étant simultanément structurées par
les cadres sociaux et structurantes.
La perspective politique concerne l'organisation
et l'exercice du pouvoir dans la société.
La perspective culturelle reconnaît que la culture (les représentations, les valeurs, le langage)
constitue la base de l'organisation sociale et des
relations entre les individus.
Les sciences du domaine psychique s'intéressent aux phénomènes de la pensée, de l'esprit,
de la vie mentale consciente et inconsciente. Trois
grandes perspectives s'y distinguent : la psychologie, la linguistique et la psychanalyse.
S'il est aujourd'hui très largement reconnu que
les dimensions biologiques, sociales et psychiques
de l'être humain interagissent au sein de la
même personne, on ne comprend pas encore
complètement comment le contexte social dans
son sens le plus large et dans toute sa complexité
agit sur les individus pour améliorer leur santé,
c'est-à-dire pour leur permettre de vivre mieux
et plus longtemps. On ne sait pas de façon
spécifique et précise quelles modifications
il faudrait apporter dans l'environnement social
pour limiter « l'usure provoquée par les divers
aspects des conditions de vie » (Drulhe 1997 : 356).
Il revient aux sciences humaines d'apporter
des réponses à ces questions en identifiant
ce qui, dans l'environnement social, atteint
l'individu dans son corps et dans son esprit.
Mais, d'une part, ce travail ne peut être confié
à une seule des disciplines des sciences
humaines ou des sciences cognitives et, d'autre
part, il doit être mené en interaction étroite avec
des chercheurs des disciplines des sciences
de la vie. La capacité à réaliser ce travail interdisciplinaire constitue l'enjeu central de la santé
publique en tant que domaine de connaissance.
Dimension méthodologique
Reconnaître que l'être humain est simultanément et de façon indissociable – biologique,
social et psychique – oblige à faire interagir
des champs disciplinaires dont les traditions
scientifiques et les objets d'études se situent
traditionnellement très loin les uns des autres.
Leur rapprochement représente un défi fondamental pour l'étude de la santé des populations.
L'avancement des connaissances dans ce domaine
repose en effet sur la mobilisation des méthodes
scientifiques les plus pertinentes dans chacun
des grands champs disciplinaires (spécialisation
méthodologique disciplinaire) et en même
temps sur l'intégration des résultats spécialisés
dans un schéma interprétatif interdisciplinaire
qui reste très largement à explorer et à construire.
La première étape consiste évidemment à reconnaître que l'activité scientifique se montre
diversifiée et que des connaissances nouvelles
peuvent être obtenues par un vaste éventail
de méthodes dont la validité repose sur des
fondements épistémologiques différents.
94 André-Pierre Contandriopoulos
Dimension téléologique
La santé, comme l'a montré Canguilhem,
est fondamentalement normative. Il s'agit d'un
concept qui donne un sens à l'action. La finalité
dictée par la santé diffère cependant fondamentalement selon qu'elle est considérée sous
le prisme de l'individu ou de la population.
Pour l'individu, la finalité de l'intervention
en santé vise à corriger les dérèglements
physiologiques pour retrouver un état normal.
Les débats portent sur les meilleurs moyens
pour y arriver et non sur la finalité. (Les gens veulent
être vite et bien soignés quand ils souffrent).
Pour la collectivité, c'est l'inverse. Un fort
consensus existe sur la nature des problèmes,
mais des débats perdurent sur l'état social optimal
que les politiques devraient promouvoir. La question
de l'équité demeure au cœur de ces débats.
La protection ou la promotion de la santé
de la population dans son sens le plus large ne
peut constituer une responsabilité que la société
délègue à une institution particulière : ministère
de la Santé ; ou à un groupe particulier :
médecins, travailleurs sociaux, groupes communautaires, etc. La santé comporte une responsabilité qui doit être assumée par toute la société.
Elle dépend de la capacité de l'État de garantir
à tous, de façon équitable, l'accès à l'éducation,
aux soins de santé, à la sécurité et à un environnement sain. En ce sens, la santé concerne
chacun des citoyens, elle est la raison d'être
de l'État moderne. Elle inclut la création et
le maintien d'un système de soins efficient
qui garantisse un accès équitable à des soins
de qualité à toutes les personnes qui souffrent.
Bien soigner les gens malades revient à l'État
qui doit assumer cette tâche. Sa légitimité, dans
ce domaine, repose sur l'importance accordée
dans nos sociétés aux droits de la personne
humaine et, en particulier, à la protection
de l'intégrité de la personne 13, intégrité qui est
mise en cause par la maladie et que les services
de santé, fondés sur les connaissances biomédicales et le professionnalisme, peuvent restaurer.
Mais la responsabilité de l'État à l'égard de la santé
ne peut se limiter à la création et au maintien
d'un système de soins, aussi performant soit-il.
La nature complexe de la santé permet de comprendre que l'État doit simultanément assumer
sa responsabilité à l'endroit de la santé
de la population en favorisant tout ce qui permet
à la vie de se déployer le plus pleinement possible
et en même temps veiller à ce que toutes
les personnes malades soient bien traitées.
Ces deux grandes responsabilités se complètent
en ce sens qu'elles agissent sur des dimensions
différentes du concept de santé, mais elles
ne peuvent se substituer l'une à l'autre.
L'articulation de ces deux grandes responsabilités
repose sur le bon fonctionnement des institutions
démocratiques. La santé publique pourrait jouer
un rôle central à cet égard en assumant de façon
explicite une responsabilité de surveillance
et d'évaluation des conséquences sur la santé
des populations, de l'ensemble des politiques
économiques, sociales et environnementales
de la société. En assumant cette nouvelle fonction,
elle obligerait la société à tenir explicitement compte
des conséquences sanitaires de ses décisions.
La compréhension dans toute sa complexité
de la santé des individus et des populations
ainsi que des facteurs qui l'affectent devient
essentiel à une meilleure orientation des pratiques
des acteurs et ce, dans quatre directions :
1. définir et mettre en œuvre une véritable
politique de santé et de bien-être, qui soit
cohérente avec le fait que le droit à la santé (dans
toutes ses dimensions) constitue l'un des droits
fondamentaux de la personne ;
2. concevoir des programmes interdisciplinaires de formation qui soient à la hauteur
des défis que soulève le concept de santé des
populations ;
3. proposer des stratégies d'évaluation des
conséquences sanitaires découlant des décisions
économiques, sociales, environnementales prises
en vue d'améliorer les choix collectifs par des
débats reposant sur des informations suffisantes;
4. comprendre que la santé représente
aussi une ressource permettant aux politiques
économiques, sociales, environnementales
de mieux atteindre leurs buts.
Éléments pour une « topographie » du concept de santé 95
Plus les connaissances sur la santé et
ce qui l'affecte s'affineront, plus il deviendra
possible de proposer des politiques efficaces
et légitimes. Les politiques fondées sur des connaissances tronquées ne peuvent, au mieux,
qu'être imparfaites mais, plus vraisemblablement,
elles seront dangereuses parce qu'incapables
de discerner leurs limites. ❏
96 André-Pierre Contandriopoulos
Notes
1 – Le vieil adage : « il vaut mieux prévenir que guérir »,
malgré sa sagesse apparente, n'est pas d'une grande
utilité pour les décideurs.
2 –L'affirmation H.L. Mencken « À chaque problème
complexe correspond une réponse simple, claire, plausible
et fausse » citée par Barer, Evans, Hertzman et Jorhi
(1998), s'applique parfaitement à l'idée qu'il suffit
de prévenir la maladie pour améliorer la santé.
3 –Haut Comité de la Santé Publique (1994). La santé
en France, rapport général. Paris, La Documentation
française.
4 –La définition classique de la santé adoptée par
les 191 pays membres de l'OMS à la suite de la conférence d'Alma Ata en 1978, est : La santé qui est
un état de complet bien-être physique, mental et social, et
ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou
d'infirmité est un droit humain fondamental.
5 –Cette approche a fait l'objet d'une recherche sur
la conception de la santé dans les différentes sciences
sociales qui a permis de sélectionner les textes
fondateurs des réflexions sur cette question. Ils seront
publiés dans le livre : Arweiler, D, Contandriopoulos,
AP, Bibeau, G, Gomez, M., Le concept de santé :
la contribution des sciences sociales. Québec : Presses de
l'Université Laval (en préparation).
6 – Pour E Morin (2004), les trois instances qui
caractérisent l'être humain « « individu-société-espèce »
sont inséparablement liés en trinité. L'individu humain,
dans son autonomie même, est en même temps à 100 %
biologique et à 100 % culturel. Il est le point d'hologramme
qui contient le tout (de l'espèce, de la société) tout en étant
irréductiblement singulier. Il porte en lui un héritage
génétique et en même temps l'imprinting et la norme
d'une culture. Nous ne pouvons isoler les unes des autres,
la source biologique, la source individuelle et la source
sociale, mais nous pouvons les distinguer » (pp. 13-14).
La même idée est présente chez Parson (1978)
« Man–though very obviously an organism in the biological
sense – is more than an organism. He is a behaving system,
a personality, a member of structured social systems, and
a participant in cultural systems and patterns of meaning
of what is sometimes called «the human condition» (p. 67).
7 –Cité par Roudinesco (1998).
8 –« Bien entendu, la santé est le seul idéal admissible,
le seul auquel ce que j'appelle un homme ait le droit d'aspirer;
mais quand elle est donnée d'emblée dans un être, elle
lui cache la moitié du monde » écrivait Jacques Rivière
très peu de temps avant son suicide, à Antonin Artaud
(Artaud 1984 : 46).
9 –Canguilhem, G. (1966). Le normal et le pathologique.
P.U.F., Paris. (p. 131)
10 –Néologisme utilisé pour indiquer tout ce que
la science médicale pourrait diagnostiquer comme
maladie en tant que disfonctionnements biologiques
et psychiques, si l'ensemble des membres d'une
population était soumis à tous les tests diagnostiques
disponibles à un moment donné, compte tenu
du développement de la science médicale. La maladie
diagnostiquée étant forcement un sous-ensemble
de la maladie « diagnosticable ».
11 –À titre d'exemple on peut noter qu'il n'y a pas
de mots au Japon pour désigner la ménopause
(M. Lock, 2002).
12 –C'est à cette dernière définition que fait référence
le mandat du Commissaire à la santé et au bien-être
du Québec.
13–Idée qui est formellement reprise dans les Chartes
des droits et libertés de la personne du Québec.
Éléments pour une « topographie » du concept de santé 97
Références
Almeida, F.N. (2006). Modèles de la santé et
de la maladie : remarques préliminaires pour une
théorie générale de la santé. Ruptures, 11 (1).
Artaud, A. (1984). Œuvres complètes I. Paris :
Gallimard.
Arweiler, D, Contandriopoulos, A.P., Bibeau,
G, & Gomez, M. Le concept de santé : la contribution
des sciences sociales. Québec : Presses de l'Université
Laval (en préparation).
Arweiller, D. (2002). L'économique face à la santé.
Thèse de PhD, Université de Montréal.
Barer, M.L., Evans, R.G., Hertzman, C.,&Johri, M. (1998).
Lies, damned lies, and health care zombies : Discredited idea
that will not die. University of Texas-Houston, Health
Policy Institute, HPI Discussion paper #10.
Beck, U. (1986). Culture politique et évolution technique:
la fin du consensus sur le progrès et subpolitique
de la médecine – étude d'un cas limite. In La société
du risque : sur la voie d'une autre modernité (p. 428-451).
Paris : Alto-Aubier.
Benoist J. (1995). Illness, disease, sickness : Visages
et masques de la maladie. La recherche Supplément
au no 281, novembre 1995 : 7-9.
Blais, F. (2003). Choix et limites de l'allocation
des ressources en santé. Pourquoi est-ce nécessaire ?
Pourquoi est-ce si difficile?. Éthique publique, 5 (1), 9-14.
Canguilhem, G. (1966). Le normal et le pathologique.
Paris : Quadrige, PUF.
Canguilhem, G. (1990). La santé, concept vulgaire &
question philosophique (p. 9-36). Toulouse : Sables.
Canguilhem, G. (1992). La santé, vérité du corps.
In M.A. Bernadis M-A (Éd), L'homme et la santé.
Paris : Seuil.
Contandriopoulos, A.P. (1999) : « Pourquoi certaines
populations vivent-elles plus longtemps que d'autres?
De l'avantage d'être riche, cultivé et japonais ».
La recherche (Spécial) ; (juillet-août) ; no 322, 102-105.
Contandriopoulos, A.-P. (2003). Inertie et changement.
Ruptures, 9 (2), 4-31.
Contandriopoulos, A.-P., de Pouvourville, G.,
Poullier, J.-P., Contandriopoulos, D., (2000). À la
recherche d'une troisième voie : les systèmes de santé
au XXIe siècle. In Pomey, M.-P., Poullier, J.-P., Lejeune,
B., Santé publique – État des lieux, enjeux et perspectives
(p. 637-667). Paris : Édition Ellipses.
Corin, E. (1996). La matrice sociale et culturelle
de la santé et de la maladie. In Evans, R.G., Barer, M.,&
Marmor, T. Être ou ne pas être en bonne santé : Biologie
et déterminants sociaux de la maladie. Paris et Montréal :
John Libbey Eurotexte et Les Presses de l'Université
de Montréal, (p. 103-141).
Drulhe, M. (1997). Santé et société : le façonnement social
de la santé. Paris : PUF.
Evans, R.G (2002). Interpreting and addressing inequalities
in health : from Black to Acheson to Blair to... ? 7th Annual
Lecture, Office of Health Economics. London.
Evans, R.G. (2002). Getting to the roots : Health Care
Financing and the Inegalitarian Agenda in Canada.
Senate Standing Committee on Social Affairs, Science
and Technology. Ottawa, June 3.
Evans, R.G., Barer, M., & Marmor, T. (1996). Être ou
ne pas être en bonne santé:Biologie et déterminants sociaux
de la maladie. Paris et Montréal : John Libbey Eurotexte
et Les Presses de l'Université de Montréal.
Forum National sur la Santé (1997). La santé au Canada:
un héritage à faire fructifier. Gouvernement du Canada,
Ottawa.
Foucault, M. (1963). Naissance de la clinique. Paris:P.U.F.
CESSSS (2000). Les solutions émergentes : rapport et
recommandations. Commission d'étude sur les services
de santé et les services sociaux. Québec : MSSS.
Foucault, M. (1997). Il faut défendre la société. Cours
au Collège de France. Paris : Gallimard, Seuil.
98 André-Pierre Contandriopoulos
Fries, J.F. (1989). The Compression of Morbidity : Near
or Far ? The Milbank Quarterly, 67 (2), 208-232.
Glouberman, S. (2001). Towards a New Perspective on
Health Policy. Rapport CPRN, Study No. H/03,
Renouf Publishing Co. Ltd.
Goldberg, M., Melchior, M., Leclerc, A., & Lert F.
(2003) Épidémiologie et déterminants sociaux
des inégalités sociales en santé. Revue d'épidémiologie
et santé publique 51 (4), 381-401.
Houtaud, A. (1999) La santé à travers les sciences
humaines et sociales:approches linguistique et sociologique.
Paris : Masson
Kleinman, A. (1980). Patients and healers in the context
of culture Berkley : University of California Press.
Kleinman, A. (1986). Concepts and a model for
the comparison of medical systems as cultural systems.
In C.Currer, M. Stacey (Eds.), Concepts of health, illness
and disease. A comparative perspective (p. 29-47). Oxford,
Berg Publishers.
Légaré, J. (2003). Le choc démographique. In M.
Venne & al., Justice, démocratie et prospérité. L'avenir
du modèle québécois (chap. VI, p. 93-99). Québec
Amérique.
Lock, M. (2002). « Symptom reporting at menopause :
a review of cross-cultural findings». Journal of the British
Menopause Society, December 2002, 8 : 132-136.
Meslé, F., & Vallin, J. (1992). Santé et démographie :
les conséquences du progrès de la médecine.
In L'homme et la santé (p. 237-243). Ouvrage cité
à l'exposition « L'homme et la santé » présentée à la Cité
des sciences et de l'industrie de la Villette. Paris:Seuil.
Morin, E. (2004). La méthode 6 : Éthique. Paris : Seuil.
Parsons, T. (1978). Action Theory and the Human
Condition, Chapter 3 (p. 66-81). In Health and Disease:
A Sociological and Action Perspective ». London, The Free
Press.
Roudinesco, E. (1998). Georges Canguilhem,
de la médecine à la résistance : destin du concept
de normalité. In Actualité de Georges Canguilhem :
le normal et le pathologique. Synthélabo, Leplessis.
Vincent, Jean-Didier (2002). La biologie des passions.
Le Devoir, 28 décembre 2001.
Éléments pour une « topographie » du concept de santé 99
Abstract
Although there is a large consensus regarding the principles and determinants of health which
underlie accepted notions of what our health care system should be, what public expectations
are for it and the role of the state in providing it, few studies focus attention on the essence
of health itself. Considering the indivisibility and complementarity of health and disease, we propose
a topography for the concept of health based upon an exploration of the following dimensions ;
ontological, epistemological, methodological and teleological.
Health is a fundamental quality of human existence that can be expressed through each
of the following four dimensions : biologic, social, psychic and rational. To draw an accurate picture
of the complexity of the health-disease concept, interconnected knowledge from biomedical science,
social science and behavioral sciences are required. To build up knowledge in this area, we need
to combine the scientific methods best suited to each of the related disciplinary fields (specialization
of disciplinary methodology) and integrate specialized results in an interdisciplinary and
interpretative framework. As knowledge on health and its modifying factors increases, it will become
easier to formulate efficient and legitimate healthcare policies.
Biographie
André-Pierre Contandriopoulos est professeur titulaire au département d'administration de la santé de la faculté
de médecine de l'Université de Montréal et chercheur du Groupe de Recherche Interdisciplinaire en Santé (GRIS).
Il a un Ph.D. en économie de l'Université de Montréal et il travaille dans le domaine de la santé depuis plus
de 30 ans. Au cours de sa carrière, il a assumé à l'université de Montréal de nombreuses tâches administratives
(Directeur du département d'administration de la santé, directeur du GRIS, directeur du programme de PhD
en Santé Publique...), il a été membre de plusieurs groupes de travail gouvernementaux (le groupe de travail
sur la rémunération des professionnels de la santé, le groupe de travail sur le financement du système de soins
pour la Commission Rochon, le Forum National sur la Santé, le groupe de travail sur la santé des populations
de l'Institut Canadien de Recherche Avancé (ICRA)...), il est membre de la Société Royale du Canada depuis 1996.
Ses domaines d'enseignement, de recherche et ses publications portent sur l'organisation et le financement
des systèmes de santé, la planification de la main-d'œuvre médicale, l'évaluation des interventions, les déterminants
de la santé des populations et les politiques de santé. Il a une longue expérience d'enseignement et de consultant
non seulement au Québec et au Canada mais aussi en Europe, en Afrique et en Amérique Latine. Il est l'auteur
de plusieurs livres et de nombreux articles scientifiques.
Téléchargement