ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT Année 2014 ÉTUDE RÉTROSPECTIVE ÉPIDÉMIOLOGIQUE, CLINIQUE, ÉCHOCARDIOGRAPHIQUE ET DOPPLER DE 31 CAS DE TÉTRALOGIE DE FALLOT CHEZ DES CARNIVORES DOMESTIQUES DIAGNOSTIQUÉS ENTRE 2003 ET 2014 THÈSE Pour le DOCTORAT VÉTÉRINAIRE Présentée et soutenue publiquement devant LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL le…………… par Isabelle, Marguerite PITSCH Née le 8 septembre 1989 à Saint-Mandé (Val-de-Marne) JURY Président : Pr. Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL Membres Directeur : Mme Valérie CHETBOUL Professeur de Cardiologie à l’ENVA Assesseur : M. Renaud TISSIER Professeur en Pharmacie et en Toxicologie à l’ENVA Invité : M. Eric Bomassi Docteur vétérinaire au CHV des Cordeliers (Meaux) Janvier 2014 LISTE DES MEMBRES DU CORPS ENSEIGNANT Directeur : M. le Professeur GOGNY Marc Directeurs honoraires : MM. les Professeurs : COTARD Jean-Pierre, MIALOT Jean-Paul, MORAILLON Robert, PARODI André-Laurent, PILET Charles, TOMA Bernard. Professeurs honoraires : Mme et MM. : BENET Jean-Jacques, BRUGERE Henri, BRUGERE-PICOUX Jeanne, BUSSIERAS Jean, CERF Olivier, CLERC Bernard, CRESPEAU François, DEPUTTE Bertrand, MOUTHON Gilbert, MILHAUD Guy, POUCHELON Jean-Louis, ROZIER Jacques. DEPARTEMENT D’ELEVAGE ET DE PATHOLOGIE DES EQUIDES ET DES CARNIVORES (DEPEC) Chef du département par intérim : M. GRANDJEAN Dominique, Professeur - Adjoint : M. BLOT Stéphane, Professeur UNITE DE CARDIOLOGIE - Mme CHETBOUL Valérie, Professeur * - Mme GKOUNI Vassiliki, Praticien hospitalier - Mme SECHI-TREHIOU, Praticien hospitalier DISCIPLINE : NUTRITION-ALIMENTATION - M. PARAGON Bernard, Professeur DISCIPLINE : OPHTALMOLOGIE - Mme CHAHORY Sabine, Maître de conférences UNITE DE CLINIQUE EQUINE - M. AUDIGIE Fabrice, Professeur - M. DENOIX Jean-Marie, Professeur - Mme BERTONI Lélia, Maître de conférences contractuel - Mme GIRAUDET Aude, Praticien hospitalier * - M. LECHARTIER Antoine, Maître de conférences contractuel - Mme MESPOULHES-RIVIERE Céline, Praticien hospitalier - Mme TRACHSEL Dagmar, Maître de conférences contractuel UNITE DE PARASITOLOGIE ET MALADIES PARASITAIRES - M. BLAGA Radu Gheorghe, Maître de conférences (rattaché au DPASP) - M. CHERMETTE René, Professeur (rattaché au DSBP) - Mme FAIVRE Noëlle, Praticien hospitalier - M. GUILLOT Jacques, Professeur * - Mme MARIGNAC Geneviève, Maître de conférences - M. POLACK Bruno, Maître de conférences UNITE DE PATHOLOGIE CHIRURGICALE - M. FAYOLLE Pascal, Professeur - M. MAILHAC Jean-Marie, Maître de conférences - M. MANASSERO Mathieu, Maître de conférences contractuel - M. MOISSONNIER Pierre, Professeur* - Mme RAVARY-PLUMIOEN Bérangère, Maître de conférences (rattachée au DPASP) - Mme VIATEAU-DUVAL Véronique, Professeur - M. ZILBERSTEIN Luca, Maître de conférences UNITE D’IMAGERIE MEDICALE - Mme PEY Pascaline, Maître de conférences contractuel - Mme STAMBOULI Fouzia, Praticien hospitalier UNITE DE MEDECINE - Mme BENCHEKROUN Ghita, Maître de conférences contractuel - M. BLOT Stéphane, Professeur* - Mme FREICHE-LEGROS Valérie, Praticien hospitalier - Mme MAUREY-GUENEC Christelle, Maître de conférences DISCIPLINE : URGENCE SOINS INTENSIFS - Mme STEBLAJ Barbara, Praticien Hospitalier UNITE DE MEDECINE DE L’ELEVAGE ET DU SPORT - Mme CLERO Delphine, Maître de conférences contractuel - M. GRANDJEAN Dominique, Professeur * - Mme YAGUIYAN-COLLIARD Laurence, Maître de conférences contractuel DISCIPLINE : NOUVEAUX ANIMAUX DE COMPAGNIE - M. PIGNON Charly, Praticien hospitalier DEPARTEMENT DES PRODUCTIONS ANIMALES ET DE LA SANTE PUBLIQUE (DPASP) Chef du département : M. MILLEMANN Yves, Professeur - Adjoint : Mme DUFOUR Barbara, Professeur UNITE D’HYGIENE ET INDUSTRIE DES ALIMENTS D’ORIGINE ANIMALE - M. AUGUSTIN Jean-Christophe, Maître de conférences - M. BOLNOT François, Maître de conférences * - M. CARLIER Vincent, Professeur UNITE DE REPRODUCTION ANIMALE - Mme CONSTANT Fabienne, Maître de conférences - M. DESBOIS Christophe, Maître de conférences (rattaché au DEPEC) - M. FONTBONNE Alain, Maître de conférences (rattaché au DEPEC) - Mme MAENHOUDT Cindy, Praticien hospitalier - Mme MASSE-MOREL Gaëlle, Maître de conférences contractuel - M. MAUFFRE Vincent, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel - M. NUDELMANN Nicolas, Maître de conférences (rattaché au DEPEC) - M. REMY Dominique, Maître de conférences* UNITE DES MALADIES CONTAGIEUSES - Mme DUFOUR Barbara, Professeur* - Mme HADDAD/HOANG-XUAN Nadia, Professeur - Mme PRAUD Anne, Maître de conférences - Mme RIVIERE Julie, Maître de conférences contractuel UNITE DE PATHOLOGIE DES ANIMAUX DE PRODUCTION - M. ADJOU Karim, Maître de conférences * - M. BELBIS Guillaume, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel - M. HESKIA Bernard, Professeur contractuel - M. MILLEMANN Yves, Professeur UNITE DE ZOOTECHNIE, ECONOMIE RURALE - M. ARNE Pascal, Maître de conférences - M. BOSSE Philippe, Professeur* - M. COURREAU Jean-François, Professeur - Mme GRIMARD-BALLIF Bénédicte, Professeur - Mme LEROY-BARASSIN Isabelle, Maître de conférences - M. PONTER Andrew, Professeur DEPARTEMENT DES SCIENCES BIOLOGIQUES ET PHARMACEUTIQUES (DSBP) Chef du département : Mme COMBRISSON Hélène, Professeur - Adjoint : Mme LE PODER Sophie, Maître de conférences UNITE D’ANATOMIE DES ANIMAUX DOMESTIQUES - M. CHATEAU Henry, Maître de conférences* - Mme CREVIER-DENOIX Nathalie, Professeur - M. DEGUEURCE Christophe, Professeur - Mme ROBERT Céline, Maître de conférences UNITE D’HISTOLOGIE, ANATOMIE PATHOLOGIQUE - Mme CORDONNIER-LEFORT Nathalie, Maître de conférences* - M. FONTAINE Jean-Jacques, Professeur - Mme LALOY Eve, Maître de conférences contractuel - M. REYES GOMEZ Edouard, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel DISCIPLINE : ANGLAIS - Mme CONAN Muriel, Professeur certifié UNITE DE PATHOLOGIE GENERALE MICROBIOLOGIE, IMMUNOLOGIE - M. BOULOUIS Henri-Jean, Professeur - Mme LE ROUX Delphine, Maître de conférences - Mme QUINTIN-COLONNA Françoise, Professeur* UNITE DE BIOCHIMIE - M. BELLIER Sylvain, Maître de conférences* - Mme LAGRANGE Isabelle, Praticien hospitalier - M. MICHAUX Jean-Michel, Maître de conférences DISCIPLINE : BIOSTATISTIQUES - M. DESQUILBET Loïc, Maître de conférences DISCIPLINE : EDUCATION PHYSIQUE ET SPORTIVE - M. PHILIPS Pascal, Professeur certifié DISCIPLINE : ETHOLOGIE - Mme GILBERT Caroline, Maître de conférences UNITE DE GENETIQUE MEDICALE ET MOLECULAIRE - Mme ABITBOL Marie, Maître de conférences - M. PANTHIER Jean-Jacques, Professeur* UNITE DE PHARMACIE ET TOXICOLOGIE - Mme ENRIQUEZ Brigitte, Professeur - M. PERROT Sébastien, Maître de conférences - M. TISSIER Renaud, Professeur* UNITE DE PHYSIOLOGIE ET THERAPEUTIQUE - Mme COMBRISSON Hélène, Professeur - Mme PILOT-STORCK Fanny, Maître de conférences - M. TIRET Laurent, Maître de conférences* UNITE DE VIROLOGIE - M. ELOIT Marc, Professeur - Mme LE PODER Sophie, Maître de conférences * * responsable d’unité REMERCIEMENTS Au Professeur de la Faculté de Médecine de Créteil, Qui nous a fait l’honneur d’accepter la présidence de notre jury de thèse, Hommage respectueux. A Madame Valérie Chetboul, Chef de l’Unité de Cardiologie d’Alfort et Professeur à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort, Pour m’avoir fait l’honneur de m’encadrer tout au long de ce travail, pour sa gentillesse, son enthousiasme, sa rigueur dans ses corrections et sa passion de la cardiologie, Mes sincères remerciements et ma profonde admiration. A Monsieur Renaud Tissier, Professeur en Pharmacie et Toxicologie à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort, Pour sa collaboration dans ce travail, sa sympathie et son efficacité, Sincères remerciements. A Monsieur Eric Bomassi, Docteur au CHV des Cordeliers (Meaux), Pour son aide dans la réalisation de cette thèse, pour sa disponibilité, sa réactivité et ses précieux conseils, Mes sincères remerciements. A Madame Marie Abitbol, Maître de conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort, Pour sa gentillesse, sa pédagogie et sa rapidité de correction, Sincères remerciements. A Madame Pascaline Pey, Maître de conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort, Pour avoir accepté de participer à ce travail, pour sa réactivité et la précision de ses interprétations des radiographies, Mes sincères remerciements. A Monsieur Luca Zilberstein, Maître de conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort, Pour l’intérêt qu’il a porté à ce travail et pour ses conseils avisés, Sincères remerciements. A toute l’équipe de l’Unité de Cardiologie d’Alfort, Pour sa gentillesse, son enthousiasme et son aide dans la réalisation de cette thèse. A tous les propriétaires des carnivores domestiques inclus dans l’étude, Pour leur collaboration et le profond intérêt qu’ils ont porté à ce travail. A mes parents, Pour leur soutien en toutes circonstances, pour avoir toujours cru en moi, pour m’avoir permis d’arriver jusqu’ici dans les meilleures conditions. Toute ma reconnaissance et mon amour. A ma sœur, Pour sa présence à mes côtés en toutes circonstances, pour son calme et pour m’avoir toujours soutenue. A mes grands-parents, Pour tous les bons souvenirs d’enfance, pour leur amour inconditionnel. Parce que j’aurais aimé partager ce moment avec eux… A Tom, Pour son soutien sans faille et pour tout le bonheur que l’on partage au quotidien… A Marie-Christine, Pour la belle-mère que tout le monde voudrait avoir, pour sa passion des compagnons à quatre pattes et pour l’intérêt qu’elle porte à mon métier-passion. A mes beaux-frères, à ma belle sœur, Pour tous les repas et les soirées remplis de bonne humeur et de bons vins ! A Béa, Robert et Laura, Pour être toujours là pour nous, pour leur gentillesse et leur bonne humeur. A Racine, Pour son humour à toute épreuve, pour être le collègue que tout le monde rêve d’avoir, Ravie de continuer l’aventure un an de plus ! A Cindy et Goujette, Pour leurs préchauffes inégalables, pour ces cinq belles années à leurs côtés et tous ces souvenirs inoubliables… Au groupe 9, Pour tous les bons moments que l’on a partagés, les soirées bien arrosées, les photos dossiers, les fous rires… Pour que tous les kilomètres qui vont nous séparer ne soient qu’un prétexte pour organiser des WE groupe 9 aux 4 coins de la France. A Flo, Sergueï, Seb, Nico, Adeline, Popo, Mika, Pour leur joie de vivre et pour tous les bons moments passés ensemble. Aux poulots, Pour avoir joué le jeu, pour égayer nos soirées et tout particulièrement à Brutinel, Laugier, Gombert, Depré, Marginier, Porsmoguer, Wuillemin, Rivals, des poulots pas comme les autres (mais mieux !). A tous les alforiens que j’ai côtoyés et qui ont rendu ces cinq années inoubliables… A toute l’équipe de la clinique vétérinaire du Docteur Cordier, pour tout ce qu’ils m’ont appris, pour les bons moments que l’on a passés et un merci tout particulier aux 3 meilleures ASV du monde. A toute l’équipe du CHV des Cordeliers, pour m’avoir fait confiance et m’accueillir dans leur structure. TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION…………………………………………………………………………………………..7 PREMIERE PARTIE : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE ................................................... 9 1. La tétralogie de Fallot chez l'Homme……………………...……………………………………..9 1.1. Définitions anatomique et embryologique……………………………………………………..9 1.1.1. Définition anatomique……………….……………….….…………………………….…………9 1.1.1.1. La sténose pulmonaire : localisation et gravité variables….………….……………………11 1.1.1.2. La CIV…………….……………...…..……………………………………………………11 1.1.1.3. La dextroposition de l’aorte………………………………………………..……………...11 1.1.1.4. Les anomalies anatomiques cardiaques associées…….………….…………………..……12 1.1.2. Définition embryologique……………………………………………...……………………….13 1.1.2.1. Rappels sur le développement embryonnaire du cœur humain…….……………………..13 1.1.2.1.1. Développement cardiaque embryonnaire global………….…………………………13 1.1.2.1.2. Développement du septum interventriculaire et de la voie d’émergence du cœur…..13 1.1.2.2. Anomalies embryologiques induisant l’apparition d’une TOF………………………….…...14 1.1.2.2.1. Caractéristiques embryologiques des anomalies observées……………….….……...14 1.1.2.2.2. Localisation des cellules précurseurs de la région conotroncale………….……….....15 1.2. Epidémiologie……………………………………………………………………………………...19 1.3. Physiopathologie…………………………………………………………………………………..19 1.4. Etiologie………………………………………………………………………………………….…19 1.4.1. Association de la TOF avec d’autres syndromes………...……………...…...…….……….…...20 1.4.1.1. Le syndrome de DiGeorge ou syndrome vélo-cardio-facial…….……………...…….…....20 1.4.1.2. Le syndrome de Down (trisomie 21)…………………………………….…….…..……....21 1.4.1.3. Le syndrome d’Alagille…………..…………………………………………….…….……21 1.4.1.4. Le syndrome de Holt-Oram………………………………………….……………...……..21 1.4.2. Gènes qui pourraient être impliqués dans l’apparition d’une TOF isolée………………....…..21 1.4.2.1. Le gène ZFPM2…………………………………………………………………..………...21 1.4.2.2. Le gène NKX2.5 (CSX)……………………….……………………………………….…..22 1.4.2.3. Le complexe transcriptionnel formé par GATA4 et FOG2……….………………………22 1.4.2.4. Le gène VEGF…………………………………………………………….…….…………22 1.4.2.5. Autres gènes et locus……………………………………………………………..………...23 1.5. Signes cliniques………………………………………………………………….………………...23 1.5.1. Chez le nouveau-né….…………………………..……………...…………………….………...23 1.5.2. Chez l'enfant ……...………………………………..……………….…………………………..24 1.6. Examens complémentaires………………………………………….…………………………...25 1.6.1. Radiographie thoracique....……………………………………...……….………………....….25 1.6.2. Echocardiographie-Doppler……………………………………………………………………26 1.6.3. Examen électrocardiographique………………………………………………………….……..27 1.6.4. Examens sanguins………………………………………………………………………….…...27 1.6.5. Cathétérisme cardiaque et angiographie……………...…………………………….…………..27 1.6.6. IRM………………………………………………………………………………….………….27 1.7. Diagnostic anténatal…...……….……………….…..……….………...………………………….28 1 1.8. Traitement médical.........................................................................................................................28 1.9. Traitement chirurgical palliatif et correction chirurgicale totale………………………....29 1.9.1. Traitement chirurgical palliatif…….……………………………………………….…..….……29 1.9.1.1. Indications………………………..…………………….………………………………….29 1.9.1.2. Techniques de Blalock-Taussig classique et modifiée…………………………….….…...30 1.9.1.3. Cas particulier des formes extrêmes……………………………………………….…...…32 1.9.2. Correction chirurgicale totale…………………….…………………………………………….33 1.9.2.1. Indications et contre-indications…………..……………….……………………………...34 1.9.2.2. Techniques de correction chirurgicale totale……..…………..………….………………..34 1.10. Evolution et complications…………………………………………………………….……….38 1.10.1. Evolution et complications en l'absence de correction chirurgicale…………...…..….….…...38 1.10.2. Evolution et complications suite à une chirurgie palliative seule………………….…….……38 1.10.3. Evolution et complications suite une correction chirurgicale totale………….……...….…….38 1.10.3.1. Quelques chiffres concernant la survie des patients……………………….…………….38 1.10.3.2. De nombreuses complications post-opératoires...……….…………….………………...39 1.10.3.2.1. Sténose pulmonaire résiduelle……………………….……………….…………….39 1.10.3.2.2. Insuffisance valvulaire pulmonaire……………………………….………….……..40 1.10.3.2.3. Troubles de la conduction et du rythme cardiaques...………………….……...…...40 1.10.3.2.4. Dilatation de la racine de l'aorte………………………………….…………………41 1.10.3.2.5. Régurgitation tricuspidienne…...…………………………………………………...41 1.10.3.2.6. CIV résiduelle(s)……………………………….……………………………….…..41 1.10.3.3. Conséquence de certaines complications : un risque de mort subite accru……….….…..41 1.10.4. Principales complications post-opératoires visibles à l'IRM………...…………………….….42 1.10.5. Cas particulier de la grossesse des femmes atteintes de TOF…………...……………..….…..44 2. Données actuelles sur la TOF chez les carnivores domestiques……………………….…45 2.1. Définitions anatomique et embryologique……………………………………………………45 2.1.1. Définition anatomique……………………………………………….…………………..……..45 2.1.2. Définition embryologique……………………………………………….……………………..46 2.2. Epidémiologie………………………………………………………………..…………………....46 2.2.1. Quelques chiffres………………………………………………………………………….……46 2.2.2. Prédispositions raciale et sexuelle……………………………………………………….……..47 2.3. Physiopathologie………………………………………………………………………………….47 2.4. Etiologie……………………………………………………………………………………………47 2.4.1. Mode de transmission……………………………………………………………………….….47 2.4.2. Etude concernant l'implication du gène ZFPM2………………………………………………48 2.4.3. Pistes de recherches actuelles………………………………………………………………….49 2.4.3.1. Etudier les facteurs de transcription impliqués dans la morphogénèse cardiaque…….…..49 2.4.3.2. S'intéresser à l'étiologie génétique des anomalies associées à la TOF chez le chien….…..49 2.5. Signes cliniques…………………………………………………………………………………...50 2.6. Examens complémentaires……………………………………………………………………...52 2.6.1. Radiographie thoracique………………………………………………………………………...52 2.6.2. Echocardiographie-Doppler……………………………………………………………….…....54 2.6.3. Examen électrocardiographique ................................................................................................. 56 2.6.4. Examens sanguins ....................................................................................................................... 56 2.6.5. Cathétérisme cardiaque et angiographie……...………………………………………………...56 2.7. Traitement médical………………………………………………………………………….……57 2.7.1. Intérêts des béta-bloquants….…..…....………………………………………………………57 2.7.2. Correction de l’hyperviscosité sanguine……………………………………………..………....58 2 2.7.3. Cas particulier de la gestion de la crise hypoxique…………………………………..……….....58 2.8. Traitement chirurgical……………………………………………………………………….…..59 2.8.1. Traitement chirurgical palliatif…………………………………………………………….........59 2.8.1.1. Etude de Brockman et al. : technique de Blalock-Taussig modifiée faisant appel à une prothèse expansive en téflon ou à un segment d’artère carotide (Brockman et al., 2007)……........60 2.8.1.2. Etude de Pelosi et al. : technique de Blalock-Taussig modifiée faisant appel à un segment de veine jugulaire (Pelosi et al., 2006)………...……………..……………………..........62 2.8.2. Correction chirurgicale totale……………………………………..……………………...…......66 2.8.2.1. Description de deux cas d’Orton et al. : technique de correction chirurgicale totale standard utilisée chez l'Homme (Orton et al., 2001)…………………...……..…………...….…....66 2.8.2.2. Une contrainte majeure : la CEC…………………...…………………………..……........67 2.9. Evolution et complications………………………………………..………………..…………...69 DEUXIÈME PARTIE : ÉTUDE RÉTROSPECTIVE DE 31 CAS DEaa TÉTRALOGIE DE FALLOT CHEZ DES CARNIVORES DOMESTIQUES DIAGNOSTIQUÉS ENTRE 2003 ET 2014………………………………….……….......71 1. Objectifs de l’étude………………………………………………………………………….………71 2. Matériel et méthode……………………………………………………………………………….…71 2.1. Animaux…………………………………………………………………………………….……..71 2.2. Examen clinique………………………………………………..…………………...….………...72 2.3. Examen échocardiographique et Doppler…………………………………...……………....72 2.4. Suivi de la population d’étude……………………………………….……………….………....73 2.5. Analyses statistiques……………………………………………………………….…….……....74 3. Résultats………………………………………………………………………………………………...75 3.1. Caractéristiques épidémiologiques………………………………….…….…………………....75 3.2. Examen clinique au moment du diagnotic de TOF………………………..………………..78 3.3. Examens complémentaires……………………………………………..……………….……….80 3.3.1. Radiographie thoracique…………………………………………………………………….….80 3.3.2. Examen électrocardiographique ……………………..……...……………….………………….83 3.3.3. Examens échocardiographique et Doppler…………………………………….………………..83 3.4. Traitement……………………………………………………...……………………….…………91 3.5. Survie…………..………………………………………………………………………………........92 4. Discussion…………………………………………….………….………………………………..……95 4.1. Caractéristiques épidémiologiques, cliniques, échocardiographiques et Doppler….….95 4.2. Étude de survie……………………………………………………………………………………98 4.3. Limites de l'étude…………………………………………………………………………………99 CONCLUSION..........................................................................................................................................101 BIBLIOGRAPHIE………………………………….……………………………………………………103 LISTE DES FIGURES…………………………………………………………………………………..109 LISTE DES TABLEAUX……………………………………………………………………………….111 3 4 LISTE DES ABREVIATIONS APSO = Atrésie pulmonaire à septum ouvert CEC = Circulation extra-corporelle CIV = Communication interventriculaire ECG = Électrocardiogramme IRM = Imagerie par résonance magnétique O2 = Dioxygène TOF = Tétralogie de Fallot UCA = Unité de Cardiologie d’Alfort 5 6 INTRODUCTION L’anatomiste et géologue danois Niels Stensen fut le premier à décrire l’anatomie de la tétralogie de Fallot chez l’enfant en 1671 (Friedli, 2004). Nicolas Sténon en 1771 puis Eduard Sandifort en 1777 décrivirent une nouvelle fois cette cardiopathie congénitale, suivis de James Hope, Thomas Peacock et Sir Thomas Watson qui complétèrent la description anatomique dans le milieu des années 1800 (Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Baille, 2011). Cette cardiopathie était alors appelée la « maladie bleue » (Baille, 2011). Etienne-Louis Arthur Fallot, médecin anatomo-pathologiste français né à Sète le 29 septembre 1850, est à l’origine du terme « tétralogie ». Il fut également le premier à décrire avec précision cette cardiopathie en présentant une série anatomo-clinique (comprenant trois hommes de 19, 26 et 36 ans) avec explication anatomique, physiopathologique et clinique (Baille, 2011). Sa description, publiée en 1888 dans un article intitulé « Contribution to the Pathologic Anatomy of Morbus Caeruleus » (Friedli, 2004), comprend : une sténose pulmonaire, une large communication interventriculaire, un chevauchement de l’aorte sur le septum interventriculaire et une hypertrophie concentrique du ventricule droit consécutive à la sténose pulmonaire à l’origine d’une augmentation de pression au sein de ce ventricule (Dupuis et al., 1991 ; Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Veldtman et al., 2004 ; Di Felice et Zumo, 2009 ; Baille 2011 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). Embryologiquement, il s’agit de l’aboutissement d’une anomalie unique : la déviation antérieure et supérieure du septum infundibulaire séparant normalement les chambres de chasse ventriculaires droite et gauche (Becker et Anderson, 1981 ; Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Moller et Hoffman, 2012). Chez l’Homme, la tétralogie de Fallot représente 5 à 10 % des cardiopathies congénitales et est la plus fréquente des cardiopathies cyanogènes. Il s’agit d’une malformation cardiaque congénitale bien connue, faisant à l’heure actuelle l’objet de corrections chirurgicales systématiques et évoluées (Dupuis et al., 1991 ; Friedli, 2004 ; Veldtman et al., 2004 ; Pelosi et al., 2006 ; Di Felice et Zumo, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). Chez les carnivores domestiques en revanche, la tétralogie de Fallot reste peu décrite. Comme chez l’Homme, elle est la cardiopathie cyanogène la plus fréquente, représentant 1 à 6 % des cardiopathies congénitales (Buchanan, 1999 ; Orton et al., 2001 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Pelosi et al., 2006 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Oliveira et al., 2010). La première partie bibliographique présentera de façon comparative l’épidémiologie, la physiopathologie, l’étiologie, la clinique et la thérapeutique en cardiologie vétérinaire et humaine. La deuxième partie, expérimentale, sera consacrée à une étude rétrospective ayant porté sur 31 cas de tétralogie de Fallot diagnostiqués à l’Unité de Cardiologie d’Alfort (UCA) et au Centre Hospitalier Vétérinaire des Cordeliers (Meaux) entre avril 2003 et juin 2014. Les résultats obtenus seront comparés aux données actuelles de la bibliographie. Enfin, l’intérêt d’étendre certaines connaissances et techniques de médecine humaine à l’animal sera discuté. 7 8 PREMIERE PARTIE : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE 1. La tétralogie de Fallot chez l'Homme 1.1. Définitions anatomique et embryologique 1.1.1. Définition anatomique En 1888, Fallot a donné à cette cardiopathie congénitale complexe le nom de tétralogie de Fallot (TOF) et a décrit ses quatre composantes (Dupuis et al., 1991 ; Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Veldtman et al., 2004 ; Di Felice et Zumo, 2009 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012) (Figures 1, 2 et 3) : - communication interventriculaire (CIV), - sténose pulmonaire, - dextroposition de l’aorte, - hypertrophie du ventricule droit, secondaire à une surcharge de pression qui s’installe au sein de ce ventricule. Figure 1 - Représentation schématique d’un cœur sain (Bajolle, 2012) (Ao) : aorte (AG) : atrium gauche (VG) : ventricule gauche (TP) : tronc pulmonaire (AD) : atrium droit (VD) : ventricule droit 9 Figure 2 - Représentation schématique d’un cœur lors de tétralogie de Fallot (Bonow et al., 2012) (1) : sténose pulmonaire (2) : communication interventriculaire (3) : dextroposition de l’aorte (4) : hypertrophie du ventricule droit (Ao) : aorte (AG) : atrium gauche (VG) : ventricule gauche (TP) : tronc pulmonaire (AD) : atrium droit (VD) : ventricule droit Figure 3 - Photographie d’une coupe transversale d’un cœur d’enfant atteint de tétralogie de Fallot (Moller et Hoffman, 2012) (AO) : dextroposition de l’aorte (SI) : septum infundibulaire hypertrophié (TP) : tronc pulmonaire (TSP) : trabéculations septo-pariétales hypertrophiées (VT) : valve tricuspide (CIV) : communication interventriculaire ★ : bord musculaire (inférieur et postérieur) du septum interventriculaire séparant les valves tricuspide et aortique 10 1.1.1.1. La sténose pulmonaire : localisation et gravité variables Lors de TOF, la sténose pulmonaire est toujours infundibulaire (l’infundibulum correspondant à la partie du ventricule droit d’où naît le tronc pulmonaire) et essentiellement musculaire mais elle peut comprendre un anneau fibreux. Il en existe trois types : - sténose infundibulaire basse avec une chambre infundibulaire large en aval, la valve pulmonaire est alors normale, - sténose infundibulaire distale avec valve souvent sténosée, - sténose avec infundibulum long et hypoplasique se terminant par un anneau valvulaire pulmonaire hypoplasique. L’infundibulum est toujours concerné. Quant à l’orifice valvulaire, il est atteint dans 2/3 des cas. La valve est fréquemment bicuspide et le tronc pulmonaire souvent hypoplasique ou sténosé (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). La présence d’une atrésie pulmonaire complique la gestion de la maladie et l’évolution est souvent moins favorable (Bonow et al., 2012). Rarement, l’artère pulmonaire gauche peut être absente. Il est également possible d’observer une forme de TOF avec absence de valve pulmonaire (chez 2 à 10 % des patients atteints). Cette anomalie engendre une dilatation importante des artères pulmonaires et le pronostic est assez sombre (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). Dans les formes extrêmes, la TOF peut aussi être compliquée d’une atrésie pulmonaire à septum ouvert (APSO) caractérisée par l’absence de continuité directe entre le ventricule droit et le tronc pulmonaire. Il existe 3 formes d’APSO : - vascularisation pulmonaire assurée par le canal artériel qui irrigue deux artères pulmonaires bien développées et confluentes avec un tronc pulmonaire présent ou absent, - deux artères pulmonaires hypoplasiques et vascularisées par le canal artériel ainsi que par des artères systémiques de gros diamètre naissant de l’aorte descendante ou des artères sousclavières appelées artères collatérales aorto-pulmonaires majeures, - tronc pulmonaire absent et vascularisation pulmonaire assurée en totalité par des collatérales aorto-pulmonaires (Tchervenkov et Roy, 2000). 1.1.1.2. La CIV La CIV est le plus souvent large, haute, unique et de type péri-membraneuse à extension infundibulaire et sous-aortique. Elle est généralement unique mais il peut parfois exister une CIV secondaire (chez 3 à 15 % des patients) dans le septum trabéculé. Dans de rares cas, il est également possible de trouver des CIV multiples (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Moller et Hoffman, 2012). 1.1.1.3. La dextroposition de l’aorte Le chevauchement de l’aorte est la conséquence du malalignement entre le septum infundibulaire et le septum trabéculé. Il existe une rotation de la racine de l’aorte qui amène le sinus de Valsalva non coronarien plus en avant et le sinus de Valsalva coronarien droit vers la gauche. La dextroposition de l’aorte peut-être plus ou moins marquée selon les patients (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). Lors de TOF, la continuité mitro-aortique est néanmoins conservée (Friedli, 2004). 11 1.1.1.4. Les anomalies anatomiques cardiaques associées Chez 25 % des patients, la TOF est associée à un arc aortique droit. De plus, des anomalies des artères coronaires sont retrouvées chez un tiers des patients (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012) et sont très importantes à objectiver avant d’envisager une chirurgie. L’anomalie la plus fréquente, retrouvée chez 4 % des patients atteints de TOF, est la suivante : la branche descendante antérieure de l’artère coronaire gauche provient du segment proximal de l’artère coronaire droite et emprunte un trajet inadapté en traversant la chambre de chasse du ventricule droit (Figures 4 et 5) (Karl, 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). Figure 4 - Schéma présentant l’anatomie de la vascularisation cardiaque chez un individu sain (Dyce et al., 2002) (1) : tronc pulmonaire (2) : artère coronaire gauche (2’) : branche interventriculaire paraconale de l’artère coronaire gauche (2’’) : branche circonflexe de l’artère coronaire gauche (3) : grande veine cardiaque (3’) : branche interventriculaire paraconale de la grande veine cardiaque 12 Figure 5 - Aortogramme (projection grand axe oblique/crâniale) présentant l’anomalie de distribution des artères coronaires la plus fréquente chez les patients atteints de tétralogie de Fallot (Moller et Hoffman, 2012) (ACC) : artère coronaire circonflexe (ACG) : artère coronaire gauche (ACD) : artère coronaire droite La branche descendante antérieure de l’artère coronaire gauche provient du segment proximal de l’artère coronaire droite et emprunte un trajet inadapté en traversant la chambre de chasse du ventricule droit. 1.1.2. Définition embryologique 1.1.2.1. Rappels sur le développement embryonnaire du cœur humain 1.1.2.1.1. Développement cardiaque embryonnaire global La région cardiogénique se trouve dans le mésoderme splanchnopleural, à l’extrêmité crâniale du disque embryonnaire. Elle comprend l’ébauche du cœur et a une forme de fer à cheval. L’endoderme sous-jacent émet des signaux qui vont induire la formation d’une paire de tubes endocardiques latéraux par fusion des cordons angioblastiques. Lors de la 4ème semaine, l’embryon subit des courbures céphalique et latérale et un déplacement vers la ligne médiane dans la région thoracique puis les tubes endocardiques s’unissent pour former un tube cardiaque primitif. Entre la 5ème et la 8ème semaine, le tube cardiaque primitif s’infléchit, est remanié et cloisonné en quatre cavités du cœur définitif avec mise en place de la séparation des circulations pulmonaire et fœtale qui se produira à la naissance (Lee et Hyun, 2009). 1.1.2.1.2. Développement du septum interventriculaire et de la voie d’émergence du cœur A la fin de la 4ème semaine, la partie inférieure du sillon interventriculaire commence à faire protrusion dans la lumière cardiaque et à délimiter deux cavités (Figure 6). La croissance de ce septum musculaire ventriculaire s’arrête au milieu de la 7ème semaine avant qu’il ne rencontre le septum intermedium. Les deux ventricules communiquent entre eux par le foramen interventriculaire et par la base élargie du cône du tronc. Un cloisonnement plus abouti des ventricules et de la voie d’émergence doit alors se faire avec une très grande coordination pour que le cœur ait un fonctionnement normal. La voie d’émergence du cœur est séparée en deux grâce à 13 deux bourrelets volumineux qui se forment à partir des parois opposées du cône du cœur et du tronc artériel pour se rejoindre. Ensuite, ces bourrelets s’amincissent avant de se rejoindre pour former un septum qui sépare totalement les voies d’émergence des ventricules droit et gauche. Enfin, le tronc artériel se sépare en aorte ascendante et en tronc pulmonaire grâce à une fente qui se développe dans le plan du septum. La séparation totale des courants aortique et pulmonaire a lieu lorsque, entre la 5ème et la 8ème semaine, les bourrelets du conotronc fusionnent avec le bourrelet endocardique inférieur et le septum musculaire interventriculaire. Les ventricules droit et gauche sont alors totalement isolés l’un de l’autre (Larsen, 2001). Figure 6 - Schéma présentant le cloisonnement des ventricules au 46ème jour du développement embryonnaire (Larsen, 2001) Mise en place progressive du septum musculaire interventriculaire dans la région du sillon interventriculaire au 46ème jour du développement embryonnaire. 1.1.2.2. Anomalies embryologiques induisant l’apparition d’une TOF 1.1.2.2.1. Caractéristiques embryologiques des anomalies observées La TOF est un exemple de cardiopathie pour laquelle une malformation cardiaque primaire engendre une cascade d’anomalies (Larsen, 2001). Embryologiquement, il s’agit de l’aboutissement d’une anomalie unique : la déviation antérieure et supérieure du septum infundibulaire (ou conal) séparant normalement les chambres de chasse ventriculaires droite et gauche. Le septum conal ne fusionne pas avec le septum interventriculaire (Becker et Anderson, 1981 ; Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Moller et Hoffman, 2012). Autrement dit, la TOF résulte d’un mauvais alignement entre le septum musculaire et les orifices de départ de l’aorte et du tronc pulmonaire. D’une part, il existe une absence de fusion des septa ventriculaires musculaire et membraneux ainsi qu’une dextroposition de l’aorte. D’autre part, les tissus musculaire et fibreux du septum anormal et les trabécules ventriculaires mal positionnés causent un rétrécissement de l’orifice sous-pulmonaire et donc une sténose pulmonaire. Suite à cela, les orifices de l’aorte et du tronc pulmonaire ne s’alignent pas convenablement avec les régions 14 d’émergence des deux ventricules (Larsen, 2001). 1.1.2.2.2. Localisation des cellules précurseurs de la région conotroncale Cette anomalie semble avoir pour origine une migration anormale des cellules de la crête neurale qui sont responsables de la différentiation du conotronc (Di Felice et Zumo, 2009). Le conotronc est l’extrêmité supérieure du bulbe du cœur qui donnera le cône du cœur et le tronc artériel (Larsen, 2001). Cette région embryonnaire est composée de deux segments myocardiques : le conus et le truncus. Dans un cœur normal, ces deux segments se différencient en valves semi-lunaires et en infundibulum sous-pulmonaire (appelé chambre de chasse ventriculaire droite). Le truncus est le segment antérieur qui se différencie pour former deux orifices distincts des valves semi-lunaires de l’aorte et du tronc pulmonaire. Le conus se différencie quant à lui en infundibulum sous-pulmonaire (Di Felice et Zumo, 2009). Depuis 2001, plusieurs équipes ont montré qu’il existe une seconde source de précurseurs cardiaques, nécessaire au développement du cœur des vertébrés. Cette population de cellules, localisée dans le mésoderme pharyngé ventral, contribue à la formation des pôles artériel et veineux du cœur, ainsi qu’au ventricule droit. Le territoire formé par ces précurseurs cardiaques est appelé « second champ cardiaque » (Figure 7). Il fournit les précurseurs des atria, du ventricule droit et de la région conotroncale. Le retrait de ce second champ cardiaque conduit à des malformations typiques de la TOF (Di Felice et Zumo, 2009). 15 Figure 7 - Localisation du second champ cardiaque au cours du développement embryonnaire (Di Felice et Zummo, 2009) La zone gris foncé représente la localisation au cours du développement embryonnaire des cellules précurseurs cardiaques provenant du second champ cardiaque. La TOF fait donc partie des anomalies conotroncales (Figures 8 et 9) (Clark, 1986 ; Larsen, 2001 ; Di Felice et Zumo, 2009). Le conotronc se forme donc grâce aux cellules de la crête neurale et du second champ cardiaque (Di Felice et Zumo, 2009). La découverte de cette seconde source de précurseurs cardiaques pourrait permettre d’identifier de nouveaux gènes impliqués dans l’apparition de la TOF (Clark, 1986 ; Di Felice et Zumo, 2009). 16 Figure 8 - Classification des cardiopathies congénitales (Clark, 1986) 1. ANOMALIES DE MIGRATION DES CELLULES DE LA CRETE NEURALE : CARDIOPATHIES CONOTRONCALES 1.1. Anomalies de la région conotroncale - Truncus arteriosus communis - Tétralogie de Fallot - Atrésie pulmonaire avec communication interventriculaire - Agénésie des valves pulmonaires - Communication interventriculaire avec malalignement du septum conal - Certaines formes de malposition vasculaire 1.2. Anomalies des arcs aortiques - Arc aortique droit - Interruption de la crosse sous-clavière rétro-oesophagienne - Double arc aortique 2. LES CARDIOPATHIES DE DEBIT 2.1. Cardiopathies de réduction du débit 2.1.1. Du cœur gauche - Syndrome d’hypoplasie du cœur gauche - Rétrécissement mitral congénital - Sténose sous-aortique - Sténose aortique sur valve mono- ou bicuspide - Coarctation isthmique de l’aorte 2.1.2. Du cœur droit - Atrésie pulmonaire à septum interventriculaire intact - Sténose valvulaire pulmonaire - Valve pulmonaire bicuspide 2.2. Cardiopathies d’excès de flux - Communication interatriale type ostium secundum 3. ANOMALIES DE LA MORT CELLULAIRE - Communication interventriculaire musculaire - Maladie d’Ebstein (valve tricuspide) 4. ANOMALIES DE LA MATRICE EXTRACARDIAQUE - Communication interatriale ostium primum - Valve pulmonaire ou aortique dysplasique - Canaux atrio-ventriculaires sous toutes leurs formes 5. ANOMALIES CIBLEES DU DEVELOPPEMENT - Retour veineux pulmonaire anormal 6. ANOMALIES DE LA BOUCLE CARDIAQUE PRIMITIVE - Anomalies du situs viscéro-atrial avec ou sans cardiopathie complexe - Isomérismes atriaux - Doubles discordances ou transpositions corrigées des gros vaisseaux 17 Figure 9 - Représentation schématique des caractéristiques des différentes anomalies conotroncales (Bajolle, 2012) CŒUR SANS ANOMALIE T4F APSO 18 AVP 1.2. Epidémiologie Chez l’Homme, les cardiopathies représentent 26 % des malformations congénitales (Levi et al., 2003) et sont responsables de plus de 20 % des morts périnatales liées à une affection congénitale (tous organes confondus) (Young et Clarke, 1987). Environ 8 nouveau-nés sur 1000 sont affectés par une cardiopathie congénitale (Montana et al., 1996). De plus, 25 à 30 % des cardiopathies congénitales sont associées à des anomalies extra-cardiaques pouvant affecter différents appareils : musculo-squelettique, nerveux, urogénital, digestif…(Copel et al., 1986). La TOF représente 5 à 10 % des cardiopathies congénitales (Dupuis et al., 1991 ; Friedli, 2004 ; Veldtman et al., 2004 ; Pelosi et al., 2006 ; Di Felice et Zumo, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). Elle est la plus fréquente des cardiopathies cyanogènes. Selon différents auteurs, elle toucherait 1 (Di Felice et Zumo, 2009 ; Bonow et al., 2012) à 3 (Larsen, 2001) nouveau-nés sur 3000 naissances. Les enfants nés d’une mère atteinte de TOF ont plus de risque d’être atteints d’une cardiopathie congénitale avec une incidence d’environ 3,1 % (Veldtman et al., 2004). La TOF semble affecter autant les filles que les garçons (Apitz et al., 2009). 1.3. Physiopathologie La direction du shunt et son intensité dépendent de la gravité de la sténose pulmonaire (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). Si cette dernière est modérée, la pression au sein du ventricule droit n’est que modérément augmentée et le shunt sera donc majoritairement « gauche-droit » alors que si la sténose est serrée, le shunt sera « droite-gauche » et s’accompagnera ainsi d’un débit pulmonaire diminué. La surcharge de pression au sein du ventricule droit engendre l’hypertrophie de celui-ci (Friedli, 2004). Le pronostic est établi en fonction de la gravité de la sténose pulmonaire. En absence de collatérales aorto-pulmonaires, l’intensité de la cyanose est le reflet de la gravité de la sténose pulmonaire et du niveau de résistance vasculaire systémique (Bonow et al., 2012). 1.4. Etiologie Dans les années 90, des études épidémiologiques au sein de familles touchées par des malformations cardiaques congénitales ont rapidement mis en évidence une agrégation familiale de celles-ci. Ces découvertes ont fait naître l’hypothèse d’une composante génétique dans le déterminisme des cardiopathies congénitales. Les modèles de transmission n’étaient pas compatibles avec une transmission monogénique à pénétrance complète. Suite à ces études, la plupart des malformations cardiaques congénitales ont été qualifiées de multifactorielles. Rapidement, la composante génétique a été dite polygénique ce qui signifie qu’elle est due à de nombreux gènes dont les effets individuels sont faibles mais cumulatifs. Cependant, plus récemment, le terme « multifactoriel » a été utilisé pour faire référence aux situations dans lesquelles l’anomalie est causée par une combinaison de facteurs génétiques, stochastiques et environnementaux. En effet, les maladies polygéniques sont des maladies multifactorielles, la composante génétique polygénique étant très généralement en interaction avec des facteurs environnementaux. Il a été estimé que 8 à 20 % des anomalies cardiaques congénitales sont dues à des anomalies chromosomiques ou à la mutation d’un ou plusieurs gènes, que 2 à 9 % sont dues à un facteur de risque environnemental et/ou maternel et que les 71 à 90 % restantes sont multifactorielles (Ferencz et al., 1989 ; Nora, 1993 ; Patterson et al., 1993). Lorsque les parents ne présentent aucune anomalie chromosomique et qu’il n’y pas de cas rapporté de cardiopathie 19 congénitale dans la famille, le risque pour un fœtus de présenter une cardiopathie congénitale est de 5 à 6 % (Bonow et al., 2012). L’étiologie de la TOF est donc qualifiée de multifactorielle comme pour la majorité des cardiopathies congénitales (Villafane et al., 2013). Toutefois, il existe parfois une accumulation de cas au sein d’une même famille pouvant évoquer une hérédité mendélienne. Cela a donc encouragé de nombreuses études visant à mieux comprendre le déterminisme génétique de la TOF (Friedli, 2004). Les principaux événements permettant la septation de la chambre de chasse sont en lien avec les cellules précardiaques du 2ème territoire cardiaque et les cellules de la crête neurale ainsi qu’avec leurs interactions. Par conséquent, les anomalies de la septation de la chambre de chasse pourraient être liées à des anomalies des gènes qui gouvernent la multiplication, la migration et la survie de ces deux populations cellulaires (Moller et Hoffman, 2012). 1.4.1. Association de la TOF avec d’autres syndromes La TOF peut survenir seule ou en association avec d’autres anomalies tels que les syndromes de DiGeorge (ou syndrome vélo-cardio-facial), de Down (ou trisomie 21), d’Alagille ou de Holt-Oram (Allan et al., 1994 ; Harris et al., 2003 ; Bonow et al., 2012 ; Villafane et al., 2013). Il a ainsi été estimé que 10 à 27 % des TOF sont associées à des anomalies chromosomiques (Allan et al., 1994 ; Harris et al., 2003 ; Villafane et al., 2013). 1.4.1.1. Le syndrome de DiGeorge ou syndrome vélo-cardio-facial Le syndrome de DiGeorge est associé à la TOF dans 15 % des cas. Il concerne une naissance sur 2000 à 4000 et son mode de transmission est autosomique dominant. Il se caractérise par des malformations de la chambre de chasse droite du cœur, une hypocalcémie secondaire à une hypoplasie des parathyroïdes, une hypoplasie thymique et fréquemment des anomalies neurologiques. Les manifestations cliniques sont variables et sont fonction de l’expressivité de la maladie. Le Syndrome de DiGeorge est dû à une microdélétion au niveau du locus 22q11. La microdélétion résulte de la recombinaison homologue entre des séquences qui encadrent le locus 22q11, avec excision d’environ trois millions de paires de bases qui délète une quarantaine de gènes dont TBX1 (T-box transcription factor 1), qui est impliqué dans la plupart des phénotypes associés au syndrome de DiGeorge. Les patients touchés par ce syndrome présentent une perturbation dans la migration des cellules de la crête neurale. Le gène TBX1 fonctionnel est en effet nécessaire à la migration des cellules de la crête neurale mais les gènes cibles régulés par ce facteur de transcription sont encore méconnus (Bonow et al., 2012). Un syndrome moins sévère que le syndrome de DiGeorge est également dû à une microdélétion 22q11. Il ne comporte pas d’anomalie immunologique, ni d’hypocalcémie, mais une TOF et se nomme le syndrome de Shprintzen (Villafane et al., 2013). Les anomalies conotroncales au sens large semblent souvent en relation avec cette microdélétion du chromosome 22 (locus 22q11.2) (Bonow et al., 2012). Le screening du chromosome 22 est maintenant réalisé en routine chez les fœtus et les nouveau-nés atteints d’une malformation conotroncale. Cependant, nous ne savons toujours pas pourquoi cette haplo-insuffisance présente une telle variabilité de pénétrance et d’expressivité (Di Felice et Zumo, 2009). 20 1.4.1.2. Le syndrome de Down (trisomie 21) Il a été montré que 7 % des cas de TOF sont associés à une trisomie 21. La trisomie 21 représente 1 naissance sur 600, il s’agit de l’anomalie chromosomique la plus fréquente chez l’Homme. Elle inclut des anomalies de la face, de l’audition, un retard mental et des malformations cardiaques congénitales majeures dans 40 à 50 % des cas, dont la TOF. Les patients atteints sont plus sujets aux leucémies, à la démence progressive et à la maladie d’Alzheimer, ces maladies pouvant apparaître précocement. La vascularisation peut également subir un vieillissement prématuré (Di Felice et Zumo, 2009). Des microdélétions isolées et fréquentes découvertes récemment et présentes chez des patients atteints de trisomie 21 semblent être responsables des malformations observées dans la TOF et font encore l’objet de recherche (Bonow et al., 2012). 1.4.1.3. Le syndrome d’Alagille La TOF peut également apparaître chez des patients touchés par le syndrome d’Alagille. Une étude a montré qu’1 à 2 % des patients atteints de TOF et d’un syndrome d’Alagille ont une mutation d’un gène codant un récepteur transmembranaire NOTCH2 (Notch homolog 2) ou du gène codant son ligand JAG1 (Jagged 1). Le gène JAG1 code une protéine hautement conservée qui permet un signalement intra-cellulaire déterminant le devenir des cellules. Or, l’ARNm de JAG1 s’exprime dans le développement cardiaque des mammifères et sa perturbation chez la souris engendre un développement cardiovasculaire anormal et de la mortalité embryonnaire (Di Felice et Zumo, 2009 ; Bonow et al., 2012). 1.4.1.4. Le syndrome de Holt-Oram La TOF peut parfois toucher des patients atteints du syndrome de Holt-Oram. Celui-ci concerne 1 cas pour 100000 naissances vivantes et se caractérise par des cardiopathies congénitales de gravité variable ainsi que par des anomalies du squelette des membres supérieurs (absence ou anomalie du radius, anomalies transversales du membre supérieur et diverses des pouces) (Bossert et al., 2003 ; Bonow et al., 2012). Ce syndrome se transmet suivant un mode autosomique dominant dont la pénétrance est complète. L’anomalie génétique en cause se situe sur le bras long du chromosome 12 (12q2) où se trouvent les gènes TBX3 (T-box transcription factor 3) et TBX5 (T-box transcription factor 5) dont les mutations donnent lieu à une importante variabilité phénotypique (Bossert et al., 2003). 1.4.2. Gènes qui pourraient être impliqués dans l’apparition d’une TOF isolée Plusieurs gènes, lorsqu’ils sont mutés, pourraient être impliqués dans l’apparition de cas de TOF isolée : ZFPM2 (Zinc finger protein FOG family member 2), NKX2.5 (NK2 transcription factor related, locus 5 aussi appelé CSX pour cardiac homeobox gene), le complexe transcriptionnel formé par GATA4 (GATA binding protein 4) et FOG2 (FOG family member 2) et le gène VGEF (Vascular endothelial growth factor) (Felice et Zumo, 2009, Lee et Hyun, 2009 ; Moller et Hoffman, 2012). 1.4.2.1. Le gène ZFPM2 Une étude récente a passé au crible le gène ZFPM2 qui est un régulateur du facteur de transcription GATA. Une mutation hétérozygote de ce gène a été mise en évidence et semble responsable de plusieurs cas isolés de TOF (Lee et Hyun, 2009). Dans une autre étude, le gène ZFPM2 a été séquencé chez quelques patients atteints de TOF et deux mutations dans l’exon codant du gène ont été identifiées : substitution A>G qui entraine un 21 changement de l’acide aminé 1968 dans la protéine et substitution A>G qui entraine une modification de l’acide aminé 88 (Lee et Hyun, 2009). D’autres mutations connues du gène ZFPM2 ont été localisées sur le motif en doigt de Zinc et touchent les 30ème (E30G) et 657ème (S657G) acides aminés. Or, une quelconque modification du domaine en doigt de Zinc qui se fixe à l’ADN impacte l’activation de nombreux gènes cardiaques régulés en aval par ZFPM2 (Lee et Hyun, 2009). 1.4.2.2. Le gène NKX2.5 (CSX) Il a été mis en évidence chez 4 % des patients atteints de TOF une mutation du gène NKX2.5 (également appelé CSX). Il code une protéine homéobox cardiaque qui est essentielle pour obtenir un développement cardiaque normal. Ce gène régule la formation cardiaque primitive et une fonction commune pourrait exister chez tous les mammifères. Il s’agit du marqueur le plus précoce identifié chez des cellules souches myocardiques. Chez les mammifères, son inactivation engendre une mortalité embryonnaire. Grâce à ces études, il est désormais clair que le gène NKX2.5 joue un rôle majeur dans la détermination du destin des cellules myocardiques. Différents types de mutation du gène NKX2.5 ont été identifiés chez des patients atteints de TOF mais la plus fréquente est la substitution Arg25Cys en position 25 dans la protéine. Des études concernant cette mutation ont révélé une localisation nucléaire et une fixation à l’ADN conservées de la protéine mutante. Par contre, pour un fonctionnement semblable de la protéine mutante, sa concentration doit être trois fois supérieure à celle de la protéine normale. Cela suggère une dimérisation affaiblie dans les cellules possédant une protéine NKX2.5 mutante. Cependant, une étude récente a fait l’hypothèse que la mutation Arg25Cys pourrait être en réalité un polymorphisme et pas une mutation conduisant à des anomalies cardiaques pour trois raisons : - la mutation Arg25Cys ne se trouve pas dans un domaine important pour la fonction de la protéine, ce qui signifie que la cystéine erronée ne serait pas directement en cause mais elle induirait une différence de potentiel hydrostatique, - des homologues de ce gène ont un acide aminé glutamine en position 25, suggérant une conservation relativement faible de l’acide aminé en position 25, - les protéines possédant cette substitution ont un site de liaison normal à l’ADN. D’autres auteurs pensent que cette substitution n’est présente que pour un petit pourcentage d’individus atteints de TOF, tandis que certains affirment qu’il n’y a pas de preuves formelles permettant de l’impliquer dans cette cardiopathie. D’autres investigations semblent donc nécessaires pour préciser l’implication du gène NKX2.5 dans l’étiologie de la TOF (Felice et Zumo, 2009). 1.4.2.3. Le complexe transcriptionnel formé par GATA4 et FOG2 Le complexe transcriptionnel formé par les protéines GATA4 et FOG2 est indispensable pour le développement et la morphogénèse cardiaque (Di Felice et Zumo, 2009 ; Lee et Hyun, 2009). Il agit en tant qu’inhibiteur et activateur de la transcription. Des recherches récentes ont confirmé que les mutations lésant le complexe GATA4/FOG2 pourraient jouer un rôle dans la migration et le comportement des cellules précardiaques lors du développement du cœur et dans l’apparition de la TOF (Di Felice et Zumo, 2009). 1.4.2.4. Le gène VEGF Une étude récente a mis en évidence une association entre un haplotype, composé de deux allèles pour deux SNP (single nucleotide polymorphism) situés dans le promoteur et dans la séquence codante de VEGF, avec un risque accru de TOF (Lee et Hyun, 2009 ; Moller et Hoffman, 2012). 22 1.4.2.5. Autres gènes et locus Plusieurs polymorphismes situés dans différents gènes ont également été mis en évidence comme associés au développement d’une TOF : dans GDF1 (Growth differentiation factor 1), CFC1 (Cryptic family 1), FOXH1 (Forkhead box H1), TDGF1 (Teratocarcinoma-derived growth factor 1), NODAL (Nodal growth differentiation factor), GATA6 (GATA binding protein 6) ou encore dans LPP (Lipoma preferred partner) (Villafane et al., 2013). De plus, des CNV (Copy number variant), ont été mis en évidence chez des patients atteints de TOF. Ils intéressaient des régions chromosomiques variées telles que les locus 1q21, 3p25, 7p21 et 22q11 (Villafane et al., 2013). Les mécanismes sous-jacents de la TOF ont pendant longtemps été négligés par les chercheurs. Ce n’est que récemment que différentes mutations ont été découvertes et nous ne sommes qu’au début de la compréhension de la composante génétique de cette cardiopathie. Les différentes mutations qui ont pu être mises en évidence chez les patients atteints de TOF ont permis de faire l’hypothèse suivante : la TOF pourrait être due à une altération de la multiplication, de la différenciation ou de la migration des cellules précardiaques du 2ème territoire cardiaque du mésoderme durant le développement embryonnaire du cœur. Il apparaît donc nécessaire de comprendre le comportement des cellules souches du cœur afin d’envisager un jour de corriger la TOF sans affecter le fonctionnement global du cœur. De nombreuses études sont en cours et seront nécessaires pour confirmer l’implication de certains gènes dans l’apparition de cette cardiopathie congénitale. 1.5. Signes cliniques 1.5.1. Chez le nouveau-né Les nouveau-nés atteints de TOF ne présentent souvent aucun symptôme à la naissance car la sténose pulmonaire est fréquemment très modérée et de ce fait, il n’existe pas encore de shunt droite-gauche. Cette sténose modérée peut empêcher l’établissement d’un shunt gauche-droite par la CIV protégeant ainsi la circulation pulmonaire d’un débit excessif. Il n’y a alors pas d’insuffisance cardiaque (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). A la palpation, un choc à droite et un signe de Harzer sont souvent rapportés (palpation d'un choc de pointe au niveau de l'épigastre) (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). A l’auscultation, le premier bruit est unique et peut être associé à un clic de dilatation aortique dans les formes graves (principalement lorsqu’une atrésie pulmonaire est présente). Le deuxième bruit est unique, claqué et aortique car le deuxième bruit pulmonaire est inaudible. Il existe un souffle éjectionnel, losangique et de haute fréquence lié à la sténose infundibulaire. Un souffle long pansystolique est en faveur d’une sténose modérée tandis qu’un souffle court témoigne d’une sténose très serrée avec un infundibulum qui se ferme en systole et qui bloque le flux sanguin (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). Lorsque la sténose pulmonaire est très peu marquée, elle ne prévient pas l’établissement d’un shunt gauche-droite à travers la CIV non restrictive, une insuffisance cardiaque peut donc survenir lors de la chute des résistances pulmonaires qui intervient à la naissance (Friedli, 2004). 23 A l’opposé, certains patients sont atteints de sténose pulmonaire très marquée d’emblée, voire d’atrésie du tronc pulmonaire. La cyanose demeure peu importante jusqu’à la fermeture du canal artériel (la plupart du temps dans les 72 heures suivant la naissance). Lors de sa fermeture, une hypoxémie associée à une cyanose grave apparaît brutalement (Friedli, 2004). Les nourrissons atteints de TOF présentent le plus souvent une prise de poids normale dans les premiers mois de vie (Friedli, 2004). 1.5.2. Chez l’enfant Les symptômes de TOF sont de moins en moins observés chez l’enfant en raison de la correction chirurgicale qui est réalisée de plus en plus précocement. Ils sont variés et souvent invalidants : - une cyanose centrale (touchant à la fois les muqueuses et les téguments) dont la gravité augmente au fil des années. Elle est exacerbée lors d’efforts, de pleurs et apparaît plus nette au froid. Lorsque la saturation en dioxygène (O2) diminue à 75-80 %, il s’agit d’une indication chirurgicale urgente (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009), - un hippocratisme digital (conséquence de la cyanose chronique) qui apparaît en plusieurs mois. Dans un premier temps, les ongles s’incurvent en verre de montre puis, dans un second temps, les phalangettes s’élargissent donnant un aspect singulier aux doigts qui ressemblent alors à des « baguettes de tambour » (Figure 10) (Laplane et al., 1977 ; Friedli, 2004), Figure 10 - Hippocratisme digital chez une fillette atteinte de tétralogie de Fallot (Laplane et al., 1977) Hypertrophie de la dernière phalange, bombement unguéal en verre de montre et cyanose des extrémités - un accroupissement souvent après l’effort ou une mise en position génupectorale qui représentent des moyens instinctifs de lutte contre l’hypoxie. Cela réduit le shunt droitegauche par augmentation de la résistance périphérique (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012), une intolérance à l’effort qui se caractérise par une dyspnée et une fatigue marquées (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012), - des crises hypoxiques (surtout après l’âge d’1 an) s’accompagnant d’une cyanose et d’une tachypnée. L’enfant devient gris, pâle et dans les formes graves, une perte de connaissance peut survenir. Les éléments déclencheurs sont une émotion, une angoisse, un cathétérisme cardiaque, une anesthésie… A l’auscultation, le souffle systolique disparaît durant une crise (car l’infundibulum se ferme) (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009). La mise en position genupectorale 24 est conseillée durant la crise pour augmenter la résistance périphérique (Jonas, 2009). Les crises sont suivies d’une période de cyanose où la saturation artérielle en O2 est inférieure à 20-30 %. Il peut exister des séquelles cérébrales (suite à des accidents vasculaires cérébraux par hypoxie) et quelques rares patients décèdent (surtout si les crises sont récurrentes) (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009), - un retard staturo-pondéral est fréquent mais généralement modéré (Friedli, 2004). 1.6. Examens complémentaires 1.6.1. Radiographie thoracique La radiographie peut mettre en évidence deux caractéristiques majeures : une hypoperfusion pulmonaire et un cœur « en sabot » (forme typique mais inconstante, Figure 11). Le cœur est de taille normale ou discrètement augmentée. Le ventricule droit est proéminent et il existe une concavité anormale au niveau de la chambre de chasse du ventricule droit et du tronc pulmonaire. Un arc aortique est présent dans 25 % des cas. L’aorte ascendante est souvent proéminente (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). Chez le nouveau-né, seule l’hypoperfusion pulmonaire et l’arc aortique droit peuvent orienter le diagnostic à la radiographie thoracique (Friedli, 2004). Figure 11 - Radiographie de thorax (vue de face) chez un patient atteint de tétralogie de Fallot (Shelton, 2007) Flux sanguin asymétrique avec augmentation du flux à droite. Hypertrophie du ventricule droit et segment artériel pulmonaire concave. 25 1.6.2. Echocardiographie-Doppler Un diagnostic complet peut être établi par les examens échocardiographique et Doppler seuls. Ils permettent d’examiner l’intensité et la direction des flux cardiaques. L’équation modifiée de Bernoulli permet de convertir la vitesse maximale du flux en unité de pression (mmHg). Gradient de pression entre deux chambres cardiaques (mmHg) = 4*(vitesse maximale du flux)2 La coupe « grand axe » permet de mettre en évidence une CIV, une dextroposition de l’aorte, une continuité mitro-aortique, une sténose pulmonaire (sous-valvulaire, valvulaire ou supra-valvulaire pouvant inclure une artère pulmonaire), une dilatation et une hypertrophie du ventricule droit (Figure 12) (Friedli, 2004 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012). La coupe « petit axe » parasternale met en évidence la chambre de chasse droite. Elle est facile à visualiser chez le nourrisson mais cela est plus difficile chez l’enfant. Il est alors possible de mesurer l’anneau valvulaire, le tronc pulmonaire et les branches proximales. Une évaluation du diamètre des artères pulmonaires peut aussi être obtenue en position suprasternale (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). En utilisant un abord parasternal, le Doppler pulsé ou continu permet d’estimer le gradient de pression maximal sur la chambre de chasse droite grâce à l’équation de Bernoulli (Friedli, 2004 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012). Il est possible de grader la sténose en fonction du gradient de pression transvalvulaire maximal. Si le gradient est inférieur à 25 mmHg, la sténose est discrète, s’il est compris entre 25 et 50 mmHg, elle est modérée et s’il est supérieur à 50 mmHg, elle est importante. Les modes Doppler couleur et continu permettent de mettre en évidence une éventuelle régurgitation pulmonaire concomitante, plus fréquente après une correction chirurgicale totale comme nous le verrons. La visualisation de la valve pulmonaire est très difficile que ce soit par abord transthoracique ou transœsophagien (Otto et al., 2011). Figure 12 - Caractéristiques échocardiographiques de la tétralogie de Fallot présentées en miroir avec les anomalies anatomo-pathologiques (Bonow et al., 2012) (AO) : aorte (SI) : septum infundibulaire (AG) : atrium gauche (VG) : ventricule gauche (TP) : tronc pulmonaire (AD) : atrium droit (VD) : ventricule droit 26 1.6.3. Examen électrocardiographique L’anomalie la plus souvent retrouvée est une déviation axiale droite de 120 à 150°. L’hypertrophie du ventricule droit engendre une onde R exclusive ou prédominante avec une petite onde S dans les dérivations précordiales droites V3R, V4R et V1. L’onde S prédomine déjà souvent en V2 et elle est profonde jusqu’en V6. Les signes de dilatation atriale droite sont inconstants (Friedli, 2004). La largeur du complexe QRS est le reflet de l’ampleur de la dilatation du ventricule droit et peut être un facteur de risque de tachycardie ventriculaire et de mort subite (Bonow et al., 2012). Les particularités retrouvées à l’examen électrocardiographique des patients opérés de TOF seront détaillées dans la partie évolution et complications (cf. paragraphe 1.10, page 38). 1.6.4. Examens sanguins L’hypoxie chronique induit une polyglobulie progressive qui permet dans un premier temps d’accroître la capacité de transport de l’O2 dans le sang. Néanmoins, lorsque l’hématocrite devient supérieur à 65 %, une hyperviscosité sanguine s’installe et va être à l’origine d’une diminution du débit cardiaque et donc du transport en O2 (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). Une carence martiale (déficit en fer) est fréquemment retrouvée chez le nourrisson et peut entraîner une anémie hypochrome microcytaire arégénérative (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). 1.6.5. Cathétérisme cardiaque et angiographie Le cathétérisme cardiaque a été l’examen pré-opératoire de choix mais il est aujourd’hui rarement nécessaire avant une correction chirurgicale totale grâce à l’évolution de l’examen écho-Doppler et de l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Le cathétérisme cardiaque doit en particulier être évité chez les patients dont les crises hypoxiques sont difficilement contrôlées (Friedli, 2004 ; Schultz et Wernovsky, 2005 ; Bonow et al., 2012). Il reste un examen pré-opératoire de choix en cas de doute sur l’arborisation des artères pulmonaires ou sur l’anatomie des artères coronaires (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). Quant à l’angiographie, elle permet une excellente visualisation de la chambre de chasse droite et des artères pulmonaires jusqu’en périphérie. Elle apporte au chirurgien un bilan anatomique complet et précis. L’examen se termine systématiquement par une aortographie qui permet de suspecter une anomalie des artères coronaires. En cas de doute, une coronarographie sélective est réalisée et précise l’existence d’éventuelles anomalies de l’origine et de la distribution des artères coronaires qui sont des informations capitales pour le chirurgien (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). 1.6.6. IRM L’IRM présente également un intêret considérable pour préciser les caractéristiques anatomiques de la TOF. En effet, elle permet l’évaluation quantitative du volume et de la fraction d’éjection des deux ventricules. De plus, la chambre de chasse droite, les artères pulmonaires, l’aorte et les collatérales aorto-pulmonaires peuvent être parfaitement visualisées. Enfin, les régurgitations pulmonaire, aortique et tricuspide peuvent être quantifiées avec précision (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012). 27 1.7. Diagnostic anténatal En France, le cœur fœtal est systématiquement évalué à l’échographie depuis 1985 car la majorité des cardiopathies congénitales surviennent chez des femmes qui ne présentent pas de facteurs de risque particuliers (Allan, 2000). La détection de la TOF s’est beaucoup améliorée entre les années 80 et 2000, en effet, elle serait passée de 20 % en 1983 à 69,7 % en 2000. Une étude publiée en 2002 a estimé que près de 83 % des cardiopathies congénitales sont détectables à l’examen échographique anténatal. Ce pourcentage est bien entendu très variable suivant la qualité du matériel utilisé et l’expérience de l’opérateur (Carvalho et al., 2002). Une étude réalisée dans un centre spécialisé avec des imageurs chevronnés et sur une population référée (donc à risque) donne un pourcentage de détection anténatale de la TOF de 81 %. Le cœur fœtal peut néanmoins être difficile à observer en raison d’une position fœtale inadaptée et/ou d’une mauvaise échogénicité du liquide amniotique (Kaguelidou, 2006). Lorsqu’une TOF est diagnostiquée pendant la grossesse, une recherche d’anomalies chromosomiques et/ou extra-cardiaques est systématiquement réalisée (Khoshnood et al., 2005). 1.8. Traitement médical Au fil des années, les indications du traitement médical dans la gestion de la TOF se sont considérablement réduites (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Bonow et al., 2012). Lors d’une crise hypoxique, il est préconisé d’administrer de l’O2 et de placer le patient en position génupectorale (vasoconstriction systémique), d’injecter 0,05 à 0,1 mg/kg de propranolol (bêtabloquant) en intra-veineuse lente pour contrer les catécholamines qui exacerbent la crise et 0,2 mg/kg de morphine en sous-cutanée pour calmer l’agitation de l’enfant (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Bonow et al., 2012). Dans les cas extrêmes, l’enfant peut être anesthésié, intubé, paralysé et ventilé (Jonas, 2009). Lorsque la crise hypoxique est associée à une hypotension ou à une hémorragie, l’administration de plasma ou de sang devient essentielle. Il faut également toujours penser à corriger une acidose éventuelle. Certains cas rebelles nécessitent une administration d’angiotensine ou de phényléphrine (alpha-agoniste) pour augmenter la résistance périphérique (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009). Suite à une crise hypoxique, un traitement visant à éviter les récidives peut être mis en place sur le court terme et consiste en l’administration de 2 à 5 mg/kg/jour de propranolol en 3 à 4 prises par jour. Néanmoins, la crise hypoxique constitue une indication chirurgicale urgente (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009). Dans les formes sévères ducto-dépendantes (avec atrésie pulmonaire) et en l’absence de collatérales aorto-pulmonaires, une perfusion de prostaglandines en intra-veineuse (Prostine®) est nécessaire dans l’attente d’une opération palliative ou d’une correction chirurgicale totale. Cela permet le maintien du canal artériel ouvert et donc d’assurer une perfusion pulmonaire correcte (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Jonas, 2009). 28 1.9. Traitement chirurgical palliatif et correction chirurgicale totale Ces dernières années, les techniques chirurgicales palliative et correctrice de la TOF se sont considérablement perfectionnées. Ces évolutions ont permis d’augmenter l’espérance de vie des patients atteints de cette malformation (Pelosi et al., 2006 ; Karl, 2012). La correction chirurgicale totale est toujours nécessaire pour permettre la survie du patient à moyen voire long terme (cf. paragraphe 1.10.1., page 38) (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Soler et al., 2007, Orton, 2008 ; Bonow et al., 2012). Bien qu’une correction chirurgicale totale en première intention soit la technique de choix pour certains, une approche en deux temps reste préconisée par d’autres (Pelosi et al., 2006 ; Jonas, 2009). Lorsque des crises hypoxiques apparaissent, l’intervention chirurgicale devient indispensable quel que soit l’âge du patient. Il faut alors choisir entre chirurgie palliative et correction chirurgicale totale. La décision est prise en fonction de l’âge du patient, de l’expérience de l’équipe chirurgicale et des caractéristiques anatomiques de la TOF (Friedli, 2004). La discussion thérapeutique actuelle se concentre autour de la question suivante : quel est le meilleur moment pour pratiquer une correction chirurgicale totale ? (Schultz et Wernovsky, 2005 ; Orton, 2008 ; Jonas, 2009 ; Karl, 2012). 1.9.1. Traitement chirurgical palliatif Le traitement chirurgical palliatif a été réalisé pour la première fois en 1945 (Schultz et Wernovsky, 2005 ; Moller et Hoffman, 2012). Les objectifs du traitement palliatif sont d’augmenter transitoirement le flux sanguin pulmonaire et ainsi d’induire une meilleure oxygénation et une croissance plus satisfaisante des artères pulmonaires (souvent hypoplasiques) en attendant la correction chirurgicale totale (Soler et al., 2007). Actuellement, certains centres mettent en avant une très faible mortalité (Karl, 2012) lors de la chirurgie palliative tandis que d’autres affirment le contraire. Il n’existe donc pas de consensus à ce sujet mais la tendance actuelle est de préférer une correction chirurgicale totale d’emblée lorsqu’elle est possible (Jonas, 2009). Le pourcentage de patients subissant une chirurgie palliative en première intention ne cesse de diminuer depuis les années 50 (Schultz et Wernovsky, 2005). 1.9.1.1. Indications Les premières corrections chirurgicales totales en première intention ont entraîné une morbidité et une mortalité importantes ; c’est la raison pour laquelle une approche en deux temps a d’abord été préférée (Jonas, 2009). Si les signes cliniques sont importants chez le nouveau-né et/ou si la présentation anatomique est peu favorable à une correction chirurgicale totale d’emblée (arbre pulmonaire très hypoplasique ou sténosé, anomalies des artères coronaires, CIV multiples, nombreuses collatérales aortopulmonaires, APSO, corps de trop petite taille et/ou enfant prématuré, maladies graves généralisées concomitantes), un geste palliatif est dans un premier temps réalisé (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Chanoit, 2008 ; Jonas, 2009 ; Karl, 2012 ; Barron, 2013). Cela permet au nouveau-né de grandir dans de bonnes conditions et de devenir apte à supporter la correction chirurgicale totale (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Chanoit, 2008). En ce qui concerne le cas particulier de TOF associée à une atrésie pulmonaire, une chirurgie en 2 voire 3 temps est toujours nécessaire (Kaguelidou, 2006). 29 1.9.1.2. Techniques de Blalock-Taussig classique et modifiée Lors d’une approche en deux temps, un shunt circulatoire permanent dérivant une partie du flux sanguin aortique vers la circulation pulmonaire est créé précocement pour diminuer l’hypoxémie. Puis dans une seconde phase, une correction chirurgicale totale sera réalisée et le shunt précédemment créé sera ligaturé. L’anastomose entre artère sous-clavière (du côté opposé à celui de la crosse aortique) et artère pulmonaire homolatérale est considérée comme la meilleure stratégie à adopter (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Pelosi et al., 2006 ; Soler et al., 2007 ; Jonas, 2009) : il s’agit de la technique de Blalock-Taussig qui est la plus ancienne méthode palliative utilisée chez les patients atteints de TOF (Figure 13) (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009). Initialement, l’anastomose était directement réalisée entre l’artère sous-clavière et l’artère pulmonaire homolatérale : il s’agit de la technique de Blalock-Taussig classique. L’efficacité de cette technique a été remise en cause car les obstructions de cette anastomose sont fréquentes et elle prive le bras de son principal affluent artériel, ce qui est bien toléré chez le nourrisson et le jeune enfant uniquement (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009). Dans les années 80, la technique de Blalock-Taussig modifiée a été mise en place et est à ce jour la technique de choix lors d’intervention palliative. Elle fait appel à une prothèse tubulaire en GoreTex (contenant notamment du polytétrafluoroéthylène) placée entre l’artère sous-clavière et l’artère pulmonaire homolatérale pour créer l’anastomose. Cette nouvelle technique a permis de diminuer la mortalité et la morbidité chez les nouveau-nés subissant une intervention palliative (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Kaguelidou, 2006 ; Pelosi et al., 2006). Elle a plusieurs avantages par rapport à la technique de Blalock-Taussig classique (Tableau 1). En effet, elle permet d’adapter le calibre de la prothèse suivant l’âge du patient, de ne pas modifier l’apport artériel au bras et de diminuer les risques d’obstruction retardée. Toutefois, elle présente aussi certains inconvénients car la prothèse peut induire des complications précoces telles que des infections et une thrombose. De plus, la prothèse ne s’adapte pas lors de la croissance du patient. Enfin, elle est constituée d’un matériau coûteux (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Pelosi et al., 2006). Quant aux anastomoses de Waterston-Cooley (entre la face postérieure de l’aorte ascendante et l’artère pulmonaire droite) et de Potts (entre l’aorte descendante et l’artère pulmonaire gauche), elles ont été abandonnées car elles déforment l’arbre vasculaire pulmonaire et deviennent rapidement une cause d’hypertension pulmonaire par excès de débit (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009). 30 Figure 13 - Représentation schématique de l’anastomose de Blalock-Taussig modifiée (Kaguelidou, 2006) 6 5 3 4 Réalisation d’une anastomose entre artère sous-clavière (du côté opposé à celui de la crosse aortique) et artère pulmonaire homolatérale grâce à une prothèse tubulaire en Gore-Tex. (1) : sténose pulmonaire (2) : communication interventriculaire (3) : dextroposition de l’aorte (4) : hypertrophie du ventricule droit (5) : artère pulmonaire (6) : artère sous-clavière (7) : prothèse tubulaire (AO) : aorte (AG) : atrium gauche (VG) : ventricule gauche (TP) : tronc pulmonaire (AD) : atrium droit (VD) : ventricule droit 31 Tableau 1 - Avantages et inconvénients des deux techniques de Blalock-Taussig Technique de Blalock-Taussig classique Avantages - Inconvénients - Aucune prothèse nécessaire (pas de « corps étranger ») Coût réduit Pas d’adaptation possible du calibre de la prothèse à la taille du patient Bras privé de son principal affluent artériel Risques d’obstruction retardée importants Morbidité et mortalité non négligeables Technique de Blalock-Taussig modifiée - Possibilité d’adapter le calibre de la prothèse à la taille du patient Apport artériel au bras conservé Diminution des risques d’obstruction retardée Moins de morbidité et de mortalité Pas de croissance de la greffe Risque de complications précoces : infections, thrombose principalement Coût important 1.9.1.3. Cas particulier des formes extrêmes En cas de sténose pulmonaire périphérique et/ou d’oblitération des collatérales systémiques, il est possible de dilater la chambre de chasse droite grâce à un ballonnet (avec ou sans stent) (Sluysmans et al., 1995 ; Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012 ; Barron, 2013). Cette intervention présente un risque non négligeable de crises hypoxiques mais permet d’améliorer les saturations artérielles ainsi que le développement de l’anneau et des artères pulmonaires. Cette technique, qui donne globalement de bons résultats, permet de réaliser par la suite une correction chirurgicale totale dans de meilleures conditions (Friedli, 2004 ; Karl, 2012 ; Barron, 2013). Il est aussi possible de poser un stent ductal qui permet au nouveau-né d’atteindre 5 à 7,5 kg et d’envisager ensuite une correction chirurgicale totale en première intention (Karl, 2012). En cas de forme extrême de la TOF avec APSO, une anastomose de Blalock-Taussig peut être indiquée. Toutefois, la plupart des chirurgiens optent pour le rétablissement d’une continuité entre l’infundibulum ventriculaire droit et le tronc pulmonaire par l’intermédiaire d’une pièce en Dacron® (téréphtalate de polyéthylène) si l’infundibulum est contigu au tronc pulmonaire. Si ce n’est pas le cas, ils utilisent un tube ou greffon de préférence valvé pour relier le ventricule droit au tronc pulmonaire (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). Cette intervention permet d’obtenir un flux antérograde plus proche du flux physiologique et d’accroître les chances de développement harmonieux de l’arbre vasculaire pulmonaire. Cela facilite l’accès ultérieur aux artères pulmonaires et il sera donc possible de placer un ballon pour lever d’éventuelles sténoses pulmonaires périphériques. Lors d’atrésie pulmonaire, certaines artères lobaires sont irriguées par des collatérales aorto-pulmonaires mais ne sont pas reliées aux artères pulmonaires centrales. Il faut alors tenter de les relier par anastomose directe ou par un greffon en supprimant les collatérales : c’est l’unifocalisation. Une correction chirurgicale totale sera envisagée lorsque l’arbre artériel sera complet et de bonne dimension. Les collatérales venant de l’aorte deviennent inutiles si elles n’ont pas été reliées à l’arbre artériel pulmonaire et sont à supprimer, soit chirurgicalement, soit par cathétérisme interventionnel à l’aide d’une spirale ou d’un coil (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Bonow et al., 2012). 32 1.9.2. Correction chirurgicale totale C’est en 1955 que Lillehei et son équipe ont réalisé la première correction chirurgicale totale chez un patient atteint de TOF ayant déjà subi une chirurgie palliative. La première correction chirurgicale totale en première intention date quant à elle de 1973. La correction chirurgicale totale a permis d’augmenter la durée de survie des patients atteints de TOF tout en améliorant considérablement leur qualité de vie (Veldtman et al., 2004 ; Di Felice et Zummo, 2009 ; Karl, 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). L’âge moyen lors de correction chirurgicale totale et la mortalité associée ne cessent de baisser depuis 1955 (Schultz et Wernovsky, 2005). En effet, à la fin des années 50, la mortalité précoce associée à la correction chirurgicale totale était d’environ 50 % (Karl, 2012), dans les années 70 elle est tombée à 5 à 10 % (Schultz et Wernovsky, 2005) et aujourd’hui, elle est estimée à 1,1 % selon la « Society of Thoracic Surgeons database » (Karl, 2012). Toutefois, il semblerait que chez le nouveau-né, la circulation extra-corporelle (CEC) et l’hypothermie nécessaires à la correction chirurgicale totale augmentent le risque de développement anormal du cerveau et d’anomalies généralisées du système nerveux central (Karl, 2012). Les syndromes évoqués dans la partie 1.4. (page 19) peuvent venir compliquer la prise en charge chirurgicale de la TOF et accroître les risques associés à l’intervention (Karl, 2012). Il existe de nombreux avantages à rétablir avant l’âge d’un an un fonctionnement cardiaque « normal ». En effet, chez les enfants atteints de TOF, la vascularisation pulmonaire en développement est exposée à une pression anormalement basse et à un flux sanguin diminué ce qui provoque une baisse des échanges gazeux au niveau des alvéoles pulmonaires. Une chirurgie tardive peut donc engendrer une réduction irréversible des zones d’échange. Le développement du cœur est également anormal car le ventricule droit peut être exposé à une pression systémique conduisant à une hypertrophie puis à une fibrose et donc à une diminution irréversible de sa compliance. La fonction du ventricule gauche est également altérée quand la correction est tardive et les arythmies sont plus fréquentes (Hirsch et al., 2000 ; Reddy et al., 2000 ; Jonas, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012). De plus, une correction chirurgicale totale d’emblée permet d’éviter les complications pouvant être associées à la chirurgie palliative (Karl, 2012). Il est également probable qu’une cyanose chronique au cours de la première année de vie ait des conséquences irréversibles sur le développement cérébral (Jonas, 2009 ; Karl, 2012). Enfin, une correction chirurgicale totale d’emblée a également des effets psycho-socioéconomiques bénéfiques sur le patient et sa famille qui n’ont pas à subir le stress de deux interventions consécutives (Jonas, 2009). Pour obtenir un résultat optimal, il est recommandé de réaliser la correction chirurgicale totale chez le nouveau-né âgé de 6 à 12 mois (Di Felice et Zummo, 2009, Jonas, 2009). Barron affirme que la correction chirurgicale totale est réalisable dès 3 mois d’âge si l’anatomie est favorable (Friedli, 2004, Bonow et al., 2012, Barron, 2013). Karl affirme quant à lui que si la chirurgie peut être reportée sans danger, alors il est préférable de ne pas intervenir avant l’âge de 6 mois (Karl, 2012). Il n’y a donc aucun consensus à ce sujet, hormis sur le fait que la correction chirurgicale totale doit avoir lieu dans la première année de vie quelle que soit la gravité de la TOF. 33 1.9.2.1. Indications et contre-indications Comme nous l’avons déjà évoqué, l’existence de crises hypoxiques est une indication urgente et majeure à la correction chirurgicale totale si l’âge et l’anatomie du patient sont compatibles avec cette intervention (cf. paragraphe 1.8., page 28) (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009). La question de la taille adéquate des artères pulmonaires pour qu’une correction chirurgicale totale puisse être pratiquée est actuellement au cœur du débat. Des artères pulmonaires de taille très réduite ne doivent que très rarement nous permettre de déclarer un enfant inopérable. Il faut toujours avoir à l’esprit qu’avant la correction chirurgicale, les artères pulmonaires sont moins remplies et que la pression qui y règne est très inférieure à la pression physiologique. De plus, aucune technique d’imagerie ne permet d’avoir accès à la taille potentielle des artères pulmonaires. Toutefois, si la saturation artérielle en O2 est supérieure à 70 %, les artères pulmonaires pourront aisément s’adapter à un flux pulmonaire complet (Jonas, 2009). La taille de la CIV et sa localisation sont remarquablement uniformes dans les TOF simples. La présence d’une ou plusieurs CIV additionnelles doit être bien définie avant intervention mais ne constitue pas une contre-indication à la correction chirurgicale totale (Jonas, 2009). Comme nous l’avons décrit précédemment, la sténose pulmonaire revêt un large spectre de sévérité (cf. paragraphe 1.1.1., page 9). La principale variable à considérer en pré-opératoire est la longueur du septum conal qui va déterminer la technique chirurgicale utilisée. Dans certaines formes extrêmes de TOF, le septum conal est totalement absent et il existe uniquement une petite bande fibreuse sous la valve pulmonaire. Dans ce cas précis, la CIV peut être facilement visualisée même à travers une petite incision ventriculaire. Il existe également des formes de TOF avec un long septum conal qui nécessite une grande incision infundibulaire pour exposer la CIV et pour permettre l’élargissement du patch sur toute la longueur de l’infundibulum sous-développé (Jonas, 2009). La dextroposition de l’aorte génère une augmentation de la distance à parcourir pour l’artère coronaire principale gauche ce qui engendre une distribution coronaire anormale chez près d’un tiers des patients (cf. paragraphe 1.1.1.4., page 12). Cette dernière doit être explorée avant intervention pour que la technique chirurgicale soit adaptée (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). Chez l’adulte, la correction chirurgicale totale est toujours recommandée car les résultats sont très satisfaisants et les risques opératoires ne sont pas plus élévés que chez l’enfant (Bonow et al., 2012). 1.9.2.2. Techniques de correction chirurgicale totale La correction chirurgicale totale est réalisée sous CEC et hypothermie modérée (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Karl, 2012). Elle repose sur la fermeture de la CIV et la levée de la sténose pulmonaire (Friedli, 2004, Di Felice et Zummo, 2009 ; Bonow et al., 2012). Trois voies d’abord peuvent être envisagées par le chirurgien, chacune présentant des avantages et des inconvénients (Tableau 2). Abord standard par ventriculotomie droite L’abord standard consiste en une ventriculotomie droite de taille limitée au niveau de l’infundibulum (Figure 14a) pour accéder à la fois à la sténose pulmonaire et à la CIV (Di Felice et Zummo, 2009 ; Karl, 2012). Il faut prendre garde de ne pas léser les artères coronaires lors de la ventriculotomie. L’objectif est d’élargir suffisamment l’infundibulum hypoplasique sans faire de 34 résection agressive du muscle qui conduirait à une cicatrice endocardique étendue et donc à des troubles de la conduction en post-opératoire (Jonas, 2009 ; Karl, 2012). Cette approche facilite la mise en place d’un patch transannulaire (détaillée ci-dessous) quand le degré d’hypoplasie est sévère (Jonas, 2009 ; Karl, 2012). Abord par l’atrium droit ou par le tronc pulmonaire Certains chirurgiens préfèrent un abord par l’atrium droit ou par le tronc pulmonaire (Friedli, 2004 ; Karl, 2012). Cette approche diminuerait significativement la dilatation du ventricule droit et préserverait davantage sa contractilité 10 ans après la chirurgie. Ces deux voies d’abord sont à privilégier lorsqu’une branche d’une artère coronaire traverse l’infundibulum (Karl, 2012). Plusieurs études rapportent d’excellents résultats en utilisant une approche transatriale. Toutefois, il faut retirer davantage de muscle pour atteindre l’infundibulum ce qui pourrait augmenter le degré de fibrose endocardique et les lésions cicatricielles (Jonas, 2009). Fermeture de la CIV et la levée de la sténose pulmonaire Quel que soit l’abord choisi, une pièce en Dacron® est suturée au niveau de la CIV en prenant garde de ne pas léser le faisceau de His situé au niveau de son bord inférieur (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). La CIV est fermée sans traction excessive de l’anneau tricuspidien pour éviter de léser les cordages de la valve (Jonas, 2009 ; Karl, 2012). Si la dextroposition de l’aorte est importante, la pièce doit être bombée en direction du ventricule droit (Friedli, 2004). Ensuite, le chirurgien procède à la résection de la sténose infundibulaire (retrait de la bande musculeuse et/ou fibreuse obstructive (Karl, 2012)) et inspecte la valve pulmonaire. Les tiges d’Hégar permettent d’évaluer le diamètre de l’anneau valvulaire et du tronc pulmonaire. Si les diamètres mesurés sont supérieurs aux valeurs limites fixées par rapport à la surface corporelle du patient, l’infundibulum est élargi par une pièce de péricarde autologue traité au glutaraldéhyde 0,2 % pendant 10 minutes (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012) (Figures 14b, 14c). Dans le cas contraire, le chirurgien, en plus d’élargir le tronc pulmonaire, fend l’anneau valvulaire pulmonaire, puis suture à l’endocarde un patch transannulaire constitué d’une pièce en Dacron® doublée de péricarde autologue en commençant par la zone la plus proche de l’apex (Figure 15) (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012). La taille de ce patch est déterminée par le diamètre indexé de l’anneau de la valve pulmonaire, il doit être de 2 à 3 cm plus grand que cette valeur. Dans la majorité des cas, la valve pulmonaire est bicuspide avec une position des commissures à 90 et 270°. Une incision est réalisée au milieu de la cuspide antérieure puis est étendue au bord libre du ventricule droit sur 10 à 15 cm. Cette méthode, employée chez 20 à 40 % des patients atteints de TOF, engendre systématiquement une insuffisance valvulaire pulmonaire mais elle semble préférable à la persistance d’un gradient trop élevé. La mise en place d’un greffon valvé peut se justifier en cas d’artères pulmonaires périphériques de faible calibre ou sténosées (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). 35 Figure 14 – Etapes (a, b, c) de la levée de la sténose pulmonaire lors de la correction chirurgicale totale de la tétralogie de Fallot sans incision de l’anneau valvulaire pulmonaire (Jonas, 2009) Elargissement de l’infundibulum par une pièce de péricarde autologue Figure 15 - Représentation schématique de la correction chirurgicale totale de la tétralogie de Fallot avec élargissement de l’anneau valvulaire pulmonaire (Bonow et al., 2012) (1) : patch fermant la communication interventriculaire (2) : patch transannulaire élargissant la chambre de chasse droite et la partie proximale du tronc pulmonaire (Ao) : aorte (AG) : atrium gauche (VG) : ventricule gauche (TP) : tronc pulmonaire (AD) : atrium droit (VD) : ventricule droit Suture d’une pièce en Dacron® au niveau de la CIV ainsi que d’une pièce en Dacron® doublée de péricarde autologue au niveau du départ du tronc pulmonaire, de la valve pulmonaire et de la chambre de chasse du VD après incision de l’anneau valvulaire pulmonaire. 36 Tableau 2 - Avantages et inconvénients des deux abords possibles pour la correction chirurgicale totale de la tétralogie de Fallot Abord par ventriculotomie Avantages - - Inconvénients - Accès facilité à la sténose pulmonaire et à la communication interventriculaire L’infundibulum hypoplasique peut être élargi sans faire une résection excessive du muscle (cicatrice endocardique peu étendue) La communication interventriculaire est fermée sans traction excessive de l’anneau tricuspidien (moins de risque de lésions de la valve et d’anomalie de la conduction) Mise en place d’un patch transannulaire facilitée Risque de diminution de la contractilité et de dilatation du ventricule droit Contre-indiquée en présence de certaines anomalies coronariennes Abord transatrial/transpulmonaire - - Diminution significative de la dilatation du ventricule droit Meilleure contractilité 10 ans après la chirurgie Technique adaptée à la pose d’un patch transannulaire Technique de choix lorsqu’une branche d’une artère coronaire traverse l’infundibulum Retrait de muscle plus important pour atteindre l’infundibulum (degré de fibrose endocardique augmenté et lésions cicatricielles plus étendues) Un contrôle échocardiographique post-opératoire immédiat doit être réalisé pour évaluer les anomalies qui persistent malgré la chirurgie. Ces dernières pouvent être plus ou moins marquées selon les patients (Figure 16) (Otto et al., 2011). Figure 16 - Coupe « grand axe » par voie parasternale chez un patient qui a subi une correction chirurgicale totale (Otto et al., 2011) (Ao) : aorte (VG) : ventricule gauche (VD) : ventricule droit Elargissement de la chambre de chasse droite, septum interventriculaire continu mais hyperéchogène au niveau du patch qui comble la communication interventriculaire (flèche) et aorte modérément élargie qui chevauche légèrement le septum. 37 1.10. Evolution et complications Ces dernières années, la mortalité per-opératoire et en post-opératoire immédiat a considérablement diminué et ce aussi bien pour la chirurgie palliative que la correction chirurgicale totale. Par conséquent, le principal objectif actuel est de minimiser les complications à moyen et long terme en s’attachant à leur compréhension (Karl, 2012). 1.10.1. Evolution et complications en l’absence de correction chirurgicale La TOF peut engendrer la mort du patient si elle n’est pas traitée (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012). Sans correction chirurgicale, les probabilités de survie approximatives sont les suivantes (Karl, 2012) : - 66 % de survie à 1 an, - 49 % de survie à 3 ans, - 24 % de survie à 10 ans. Certains rares patients atteints de TOF et non opérés peuvent néanmoins vivre jusqu’à 80-90 ans (Karl, 2012). Une hypoxémie progressive s’installe dans les premières années de vie (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012) et des degrés de cyanose variables existent (Bonow et al., 2012). L’évolution de la cyanose et de ses complications peut être retardée en présence de collatérales aorto-pulmonaires. Une cyanose très importante dans les deux premières années de vie peut engendrer des accidents vasculaires cérébraux (infarcti cérébraux par hypoxie ou par embolie) et plus rarement, un abcès cérébral peut se former vers l’âge de 2 ans. L’abcès se manifeste dans un premier temps par de la fièvre associée à des céphalées (il est possible de ne pas avoir de signes neurologiques en début d’évolution). Enfin, une endocardite d’Osler (qui est lente ou subaiguë) peut survenir en particulier chez les adolescents n’ayant pas subi de correction chirurgicale totale (Friedli, 2004). 1.10.2. Evolution et complications suite à une chirurgie palliative seule Tout au début de la gestion chirurgicale de la TOF (avant que la correction chirurgicale totale ne soit disponible), les shunts entre artère principale et artère pulmonaire étaient utilisés pour une palliation à long terme de la TOF. Une amélioration clinique était alors observée chez 85 % des patients dans les 20 années suivant la chirurgie palliative seule (Orton, 2008). Les complications pouvant être associées à la chirurgie palliative sont une obstruction ou une sténose de l’anastomose engendrant un déficit secondaire de perfusion pulmonaire (Soler et al., 2007 ; Bonow et al., 2012), un pseudoanévrisme, une hypertension pulmonaire et un dysfonctionnement du ventricule gauche secondaire à la surcharge volumique (Soler et al., 2007). 1.10.3. Evolution et complications suite à une correction chirurgicale totale 1.10.3.1. Quelques chiffres concernant la survie des patients La durée de survie des patients atteints de TOF ayant subi une correction chirurgicale totale n’a cessé de s’allonger depuis 1955 comme en témoignent les chiffres suivant : - 86 % de survie 32 ans après la chirurgie pour des patients opérés entre 1955 et 1960 (en excluant la mortalité per-opératoire) (Schultz et Wernovsky, 2005), - 89 % de survie 30 ans après l’intervention pour des patients opérés entre 1958 et 1977 ayant survécu à la première année suivant la chirurgie (Schultz et Wernovsky, 2005), - plus récemment, Jonas a publié une étude dans laquelle le taux de survie 20 ans après une correction chirurgicale totale précoce est de 85 % (Jonas, 2009) tandis que selon Bonow, le 38 taux de survie atteint 94 % 25 ans après la correction chirurgicale totale (Bonow et al., 2012). Seuls 7 % des patients sont réopérés dans les 5 ans suivant la correction chirurgicale totale (Jonas, 2009) et 10 (Bonow et al., 2012) à 21 % (Jonas, 2009) dans les 20 ans suivant l’intervention, toutes voies d’abord confondues. Les causes de réintervention sont les suivantes : sténose pulmonaire résiduelle importante, apparition d’une insuffisance valvulaire pulmonaire mal tolérée, remplacement du tube prothétique qui se détériore au fil du temps… (Kaguelidou, 2006). Un abord par l’atrium droit ou par le tronc pulmonaire a été réalisé sur 611 enfants au « Royal Children’s Hospital » de Melbourne dont 36 (5,9 %) présentaient des anomalies notables des artères coronaires. Seuls 3,5 % des patients ont dû être réopérés dans les 120 mois suivant la chirurgie (aucune différence significative entre patients présentant ou non des anomalies des artères coronaires) (Karl, 2012). Avec les techniques chirurgicales totales actuelles, la létalité précoce de la TOF est faible à la fois pour les formes classiques et pour les TOF avec APSO favorable à la chirurgie (artères pulmonaires confluentes et bien développées). En revanche, pour les autres formes, le pronostic est plus réservé (Kaguelidou, 2006 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012). La correction chirurgicale totale améliore donc considérablement le pronostic vital. De nombreux patients vivent normalement 20 à 30 ans après la correction chirurgicale totale, toutefois, de nombreuses complications post-opératoires touchent un pourcentage non négligeable d’opérés (Friedli, 2004 ; Di Felice et Zummo, 2009 ; Karl, 2012). Des contrôles médicaux complets tous les ans, voire 2 ans durant toute la vie de l’opéré sont indispensables pour détecter les complications à long terme (Kaguelidou, 2006 ; Bonow et al., 2012). 1.10.3.2. De nombreuses complications post-opératoires 1.10.3.2.1. Sténose pulmonaire résiduelle Une sténose pulmonaire peut subsister. Elle est à relier soit à une fibrose myocardique, soit à un élargissement chirurgical insuffisant (Soler et al., 2007 ; Di Felice et Zummo, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012). Selon Soler, la sténose pulmonaire est presque systématique chez les patients qui ont subi un rétablissement de la continuité entre l’infundibulum ventriculaire droit et le tronc pulmonaire (Soler et al., 2007). Une sténose pulmonaire résiduelle est la principale indication à une réopération tardive (Jonas, 2009). Certaines équipes considèrent qu’il faut réintervenir chirurgicalement lorsque le rapport pression systolique du ventricule droit sur pression systolique du ventricule gauche est supérieur à 0,75 (Karl, 2012). En effet, la surcharge de pression au sein du ventricule droit conduit au fil du temps à une diminution de sa contractilité (Karl, 2012). Dans certains cas, la sténose pulmonaire semble néanmoins avoir des effets bénéfiques en présence d’une insuffisance pulmonaire. En effet, en causant une hypertrophie du ventricule droit, elle limite la dilatation de ce dernier et améliore la contractilité du myocarde. Cela remet donc en cause la croyance qui affirme que même peu serrée, la sténose pulmonaire est toujours néfaste pour le fonctionnement du ventricule droit tandis que l’insuffisance pulmonaire est souvent bien tolérée (Karl, 2012). 39 1.10.3.2.2. Insuffisance valvulaire pulmonaire L’insuffisance valvulaire pulmonaire est la complication post-chirurgicale à long terme la plus fréquente (Hirji et al., 2010 ; Otto, 2011). Elle concerne 54 à 60 % des patients ayant subi une correction chirurgicale totale (Friedli, 2004 ; Schultz et Wernovsky, 2005 ; Di Felice et Zummo, 2009) et est souvent la conséquence de la mise en place du patch transannulaire lors de correction chirurgicale totale avec valvulotomie pulmonaire (Schultz et Wernovsky, 2005). De plus, la régurgitation pulmonaire est presque systématique chez les patients ayant subi un rétablissement de la continuité entre l’infundibulum ventriculaire droit et le tronc pulmonaire (Soler et al., 2007). Actuellement, la question du moment optimal pour pratiquer le remplacement de la valve pulmonaire reste au cœur du débat (Schultz et Wernovsky, 2005 ; Soler et al., 2007 ; Karl, 2012). Les indications de remplacement de la valve pulmonaire chez des patients ayant déjà subi une correction chirurgicale totale sont les suivantes : - gradient pulmonaire supérieur à 50 mmHg (Soler et al., 2007), - volume télédiastolique du ventricule droit supérieur à 150 mL par m2 (Geva, 2006 ; Bonow et al., 2012), - fraction de régurgitation pulmonaire supérieure à 25 % (Geva, 2006 ; Bonow et al., 2012), - fraction d’éjection du ventricule droit inférieure à 45 % (Geva, 2006 ; Bonow et al., 2012), - complexe QRS de durée augmentée et existence d’une arythmie (Karl, 2012). La régurgitation pulmonaire est le plus souvent modérée et bien tolérée pendant de nombreuses années. En s’aggravant, elle va induire une dilatation progressive du ventricule droit à l’origine d’une intolérance à l’effort avec prédisposition aux arythmies, voire d’une mort subite dans les cas les plus graves. La substitution valvulaire pulmonaire est donc préconisée avant qu’une insuffisance cardiaque droite s’installe. Si cela est réalisé suffisamment précocement, le ventricule droit semble pouvoir retrouver un fonctionnement normal (Friedli, 2004, Schultz et Wernovsky, 2005). Le taux de remplacement de la valve pulmonaire atteint 38 % (Schultz et Wernovsky, 2005) et le taux de mortalité associé à cette intervention est de 1 % (Bonow et al., 2012). 1.10.3.2.3. Troubles de la conduction et du rythme cardiaques Les troubles de la conduction sont fréquents suite à une correction chirurgicale totale (Friedli, 2004 ; Karl, 2012). Les lésions peuvent se situer à différents étages de l’axe His-Purkinje et sont à mettre en relation avec les cicatrices de la correction chirurgicale totale qui altèrent l’architecture du myocarde et engendre des anomalies électromécaniques (Friedli, 2004 ; Di Felice et Zummo, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012). La forme la plus grave de troubles de la conduction, retrouvée chez 1 % des patients, est une lésion du faisceau de His au niveau du bord inférieur de la CIV, à l’origine d’un bloc atrio-ventriculaire complet. Cette lésion se fait toutefois de plus en plus rare car les chirurgiens ont appris à mieux localiser le faisceau de His. L’existence d’un bloc atrio-ventriculaire complet nécessite la mise en place d’un stimulateur cardiaque (Friedli, 2004). Les troubles de la conduction intraventriculaire sont fréquents et se manifestent presque systématiquement par un bloc de branche droit atypique avec une durée de QRS pouvant être très variable sur l’ensemble des dérivations (Friedli, 2004, Combes et al., 2012). Le bloc bifasciculaire (déviation axiale gauche associée au bloc de branche droit) n’évolue que très rarement vers un bloc atrio-ventriculaire tardif (Friedli, 2004). 40 L’arythmie ventriculaire est considérée comme la première cause de mort subite chez les patients opérés (Schultz et Wernovsky, 2005 ; Di Felice et Zummo, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012) et peut être corrigée par cryoablation (Bonow et al., 2012). Sur une période de 24 heures, 40 à 50 % des patients qui ont subi une correction chirurgicale totale présentent une arythmie ventriculaire (Di Felice et Zummo, 2009). Les patients peuvent également présenter des extrasystoles, isolées, en doublets ou en courtes salves. Ces anomalies ne sont pas annonciatrices d’une mort subite. Le traitement médical de ces anomalies est indiqué en cas de : - symptômes associés à ces extrasystoles, - surpression au sein du ventricule droit en systole ou en diastole, - dysfonctionnement ventriculaire (Di Felice et Zummo, 2009). Chez 4 à 7 % des patients opérés, une tachycardie ventriculaire marquée est observée. Celle-ci est responsable de 0,5 à 6 % des arrêts cardiaques qui surviennent chez les patients opérés (Di Felice et Zummo, 2009, Combes et al., 2012). Dans ce cas, un traitement médical est mis en place dans un premier temps et s’il n’est pas suffisant, une intervention chirurgicale est réalisée (ablation par radiofréquences) (Friedli, 2004). Chez l’adulte, il peut également exister des arythmies supraventriculaires de type flutter et une fibrillation atriale qui nécessitent toutes deux un traitement symptomatique (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). 1.10.3.2.4. Dilatation de la racine de l’aorte La dilatation de la racine de l’aorte survient chez 14,8 % des patients ayant subi une correction chirurgicale totale (Schultz et Wernovsky, 2005). Le remplacement de la valve aortique ou de la racine de l’aorte est parfois nécessaire mais reste rare. Il est préconisé lorsque l’élargissement de la racine de l’aorte est supérieur ou égal à 55 mm et a pour objectif de corriger la dilatation progressive de la racine de l’aorte avec régurgitation aortique éventuelle (Friedli, 2004 ; Soler et al., 2007 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012). 1.10.3.2.5. Régurgitation tricuspidienne Il est possible d’observer une régurgitation tricuspidienne d’importance variable au niveau de la valve tricuspide nécessitant, dans les cas graves, une valvuloplastie (Di Felice et Zummo, 2009 ; Bonow et al., 2012). 1.10.3.2.6. CIV résiduelle(s) En post-opératoire immédiat, il n’est pas rare de mettre en évidence une ou plusieurs CIV résiduelle(s) masquée(s) jusque là par les autres anomalies anatomiques. La correction chirurgicale doit être envisagée lorsque le rapport flux pulmonaire sur flux systémique devient supérieur à 1,5 (Friedli, 2004 ; Soler et al., 2007 ; Bonow et al., 2012). 1.10.3.3. Conséquence de certaines complications : un risque mort subite accru Le risque de mort subite chez les patients qui ont subi une correction chirurgicale totale est connu depuis les années 70 et augmente significativement 20 ans après la chirurgie. En effet, il est de 1,2a% dans les 10 ans suivant la chirurgie, de 2,2 % dans les 20 ans, de 4 % dans les 25 ans et de 6a% dans les 30 ans suivant la correction chirurgicale totale (Schultz et Wernovsky, 2005). Un tiers 41 des dècès qui surviennent dans les 20 ans suivant la chirurgie (après exclusion des décès peropératoires) sont des morts subites (Bonow et al., 2012). Il semblerait que les patients ayant subi une correction chirurgicale à l’âge adulte soient davantage victime de mort subite dans les années qui suivent l’intervention (Schultz et Wernovsky, 2005). Certaines complications post-opératoires comme une durée de complexe QRS supérieure à 180 ms, la présence de potentiels ventriculaires tardifs, une dispersion de l’espace QT, une dilatation importante du ventricule droit, des syncopes et une tachycardie ventriculaire soutenue et durable pourraient être des indicateurs de risque de mort subite (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Combes et al., 2012 ; Karl, 2012). Les patients présentant un ou plusieurs de ces paramètres sont de bons candidats à l’implantation d’un défibrillateur automatique bien que les indications de cette mesure préventive soient encore controversées (Bonow et al., 2012). 1.10.4. Principales complications post-opératoires visibles à l’IRM L’IRM est également un moyen performant pour mettre en évidence certaines complications postopératoires (cf. paragraphe 1.6.6., page 27). Voici ci-dessous deux figures illustrant des complications que l’on peut observer à l’IRM suite à une chirurgie palliative d’une part (Figure 17) et à une correction chirurgicale totale d’autre part (Figure 18) (Soler et al., 2007). 42 Figure 17 - IRM thoracique d’un nouveau-né de 6 mois atteint de tétralogie de Fallot compliquée d’une atrésie pulmonaire et venant de subir une anastomose de Blalock-Taussig modifiée (Soler et al., 2007) Défaut de perfusion du poumon droit (étoile) et du lobe crânial du poumon gauche (flèche) secondaire à la sténose de l’anastomose établie entre l’artère sous-clavière gauche et l’artère pulmonaire homolatérale. Figure 18 - IRM thoracique d’un homme de 20 ans ayant subi une correction chirurgicale totale de sa tétralogie de Fallot et présentant une dyspnée à l’effort (Soler et al., 2007) Reflux sanguin dans le ventricule droit (flèche de gauche) dû à la régurgitation de la valve pulmonaire et sténose résiduelle du tronc pulmonaire (flèche de droite). 43 1.10.5. Cas particulier de la grossesse des femmes atteintes de TOF Les mères atteintes d’une malformation cardiaque congénitale cyanogène donnent naissance à 37 % de nouveau-nés prématurés (contre 10 % environ dans la population générale). Le risque d’avoir un enfant atteint d’une cardiopathie congénitale est plus élevé et les complications néonatales plus nombreuses (Veldtman et al., 2004 ; Schultz et Wernovsky, 2005). Récemment, une étude concernant des femmes atteintes de maladies cardiovasculaires a rapporté une incidence de 4 % d’enfants trop petits pour leur âge gestationnel contre seulement 2 % pour le groupe de patients contrôles (Veldtman et al., 2004). La grossesse induit une augmentation d’environ 50 % du débit cardiaque corrélée à une augmentation de la fréquence cardiaque et du volume d’éjection systolique (Veldtman et al., 2004). Chez les femmes atteintes de TOF, la chute de la résistance périphérique induite par la grossesse (Veldtman et al., 2004 ; Bonow et al., 2012) engendre une augmentation du shunt droite-gauche à travers la CIV, ce qui aggrave la cyanose et peut mettre en danger la vie du fœtus et de la mère (Bonow et al., 2012). Avant les années 50, très peu de femmes atteintes de TOF atteignaient l’âge de procréer, par conséquent, les grossesses menées à terme étaient rares. Des avortements spontanés, des morts-nés et des accouchements prématurés étaient souvent observés (Veldtman et al., 2004). Plus récemment, il a été montré chez quelques patientes non opérées ou ayant juste subi une correction palliative que les risques de complications pendant la grossesse étaient proportionnels au degré de cyanose. Il semblerait également que les patientes avec une saturation artérielle en O2 supérieure à 85 % et une concentration en hémoglobine inférieure ou égale à 18 g/dL présentent un risque de malformations et de mort fœtales significativement plus faible (Veldtman et al., 2004). Actuellement, la plupart des femmes atteintes de TOF et en âge de procréer ont déjà subi une correction chirurgicale totale et ne sont plus cyanosées. Chez ces femmes, il faut procéder à un bilan cardiaque complet avant la grossesse pour évaluer avec précision les séquelles post-chirurgicales et leurs conséquences afin de pouvoir quantifier les risques associés à une grossesse. Chez les femmes qui ont subi une correction chirurgiale totale, qui ont peu de séquelles, ont retrouvé une bonne tolérance à l’effort et n’ont pas d’autre pathologie, la grossesse sera menée à terme dans de bonnes conditions si elle est correctement suivie. Dans le cas contraire, les femmes atteintes de TOF auront beaucoup de mal à tolérer l’augmentation du volume de charge liée à la grossesse (Bonow et al., 2012). En effet, les conséquences hémodynamiques de la grossesse associées à des lésions cardiovasculaires résiduelles peuvent être responsables d’une progression du dysfonctionnement du ventricule droit, d’arythmies atriale et ventriculaire, de thromboembolies, de morts fœtales et/ou maternelles liées à une hypertension pulmonaire importante, d’une dilatation progressive de la racine de l’aorte, d’un retard de croissance intra-utérin ou encore d’une endocardite. Les femmes souffrant de perturbations hémodynamiques importantes avant la grossesse doivent donc être informées des risques encourus. Si une nouvelle intervention permet de diminuer ces perturbations qui persistent chez certaines patientes malgré la correction chirurgicale totale, elle doit être recommandée afin de pouvoir envisager une grossesse dans de meilleures conditions (Veldtman et al., 2004). 44 2. Données actuelles sur la TOF chez les carnivores domestiques 2.1. Définitions anatomique et embryologique 2.1.1. Définition anatomique La TOF est, comme chez l’Homme, la cardiopathie congénitale cyanogène la plus fréquente chez les carnivores domestiques. Ses caractéristiques anatomiques générales sont similaires à celles décrites précédemment (Figure 19) (Fox et al., 1999 ; Orton et al., 2001 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Pelosi et al., 2006 ; Chanoit, 2008 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Lee et Hyun, 2009 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Boon, 2011 ; Chetboul et al., 2012). La sténose pulmonaire peut être sous-valvulaire et/ou valvulaire. Dans la plupart des cas, il n’existe pas de dilatation post-sténotique. Une hypoplasie du tronc pulmonaire peut parfois être observée. La CIV est le plus souvent unique et de grande taille (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011) et le septum interventriculaire aligné avec le centre de l’aorte (Boon, 2011). Figure 19 - Coupes longitudinales transventriculaires du cœur gauche (A) et du cœur droit (B) d’un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010) (Ao) : aorte (VG) : ventricule gauche (TP) : tronc pulmonaire (VD) : ventricule droit A B (A) Mise en évidence d’une large communication interventriculaire située entre l’aorte et le ventricule gauche. La base de l’aorte et la communication interventriculaire sont très proches et il existe un prolapsus d’une partie de la valve aortique dans la communication interventriculaire. (B) Mise en évidence d’une communication interventriculaire de grande taille (flèche noire), d’une sténose pulmonaire (flèche blanche) et d’une hypertrophie du ventricule droit. 45 2.1.2. Définition embryologique A l’instar de la TOF chez l’Homme, l’anomalie initiale à l’origine de la TOF chez les carnivores domestiques concerne une phase précoce de la morphogénèse cardiaque (Lee et Hyun, 2009). En effet, au cours du développement embryonnaire, a lieu une déviation antérieure du septum conal (Fox et al., 1999 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Chetboul et al., 2012) ainsi qu’une septation anormale des portions conale et troncale de la voie d’éjection cardiaque. Il en résulte une large CIV par malalignement, associée à un anneau valvulaire pulmonaire et un tronc pulmonaire hypoplasiés, des feuillets valvulaires pulmonaires rudimentaires, une hypertrophie infundibulaire ainsi qu’un chevauchement de l’aorte sur le septum interventriculaire (Fox et al., 1999 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Chetboul et al., 2012). Le degré d’anomalie peut néanmoins être très variable (Patterson et al., 1974). Compte tenu de ses caractéristiques embryologiques, la TOF fait partie des anomalies conotroncales que Patterson et al. (1978), suite à des études réalisées chez des Spitz Loups apparentés, ont classées de la façon suivante : - Grade 1 : anomalies subcliniques du crista supraventricularis (légère hypoplasie des bourgeons du conus, retard de fusion du septum conotroncal en région proximale et anomalie du muscle papillaire du conus), - Grade 2 : anomalies du stade 1 associées à une CIV plus ou moins large (hypoplasie modérée à importante des bourgeons du conus avec un défaut de fusion en région proximale), Grade 3 : anomalies du stade 2 associées à une sténose ou une atrésie pulmonaire (dysplasie marquée des bourgeons du conus, septum conal incomplet, dysplasie marquée des bourgeons du truncus avec une obstruction du flux ventriculaire droit). La TOF est donc une anomalie conotroncale de grade 3, - Grade 4 : truncus arteriosus persistant (hypoplasie marquée des bourgeons du conus avec absence de septum conal, hypoplasie importante et défaut de fusion des bourgeons du truncus et septum aorticopulmonaire anormal) (Patterson et al., 1974). 2.2. Epidémiologie 2.2.1 Quelques chiffres En Amérique du nord, la prévalence des cardiopathies congénitales est comprise entre 0,46 et 0,85a% des hospitalisations (toutes causes confondues) chez le chien et entre 0,2 et 1 % chez le chat (Ettinger et Feldman, 2010). Les cardiopathies congénitales les plus fréquentes chez le chien sont la persistance du canal artériel, la sténose aortique sous-valvulaire et la sténose pulmonaire. Selon une étude récente de Buchanan incluant 1300 chiens atteints de cardiopathies congénitales, la persistance du canal artériel concerne 31,7 % des chiens, la sténose sous-aortique 22,1 % des chiens et 18,3% pour la sténose pulmonaire (Ettinger et Feldman, 2010). La TOF est également la cardiopathie congénitale cyanogène la plus fréquente chez les carnivores domestiques (Buchanan, 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al., 2008). Elle représente 1 à 6 % des cardiopathies congénitales des carnivores domestiques selon les auteurs (Orton et al., 2001 ; Pelosi et al., 2006 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Oliveira et al., 2010). Toutefois, la prévalence actuelle pourrait être supérieure à celle précédemment rapportée en raison du décès rapide des animaux atteints au jeune âge (Lee et Hyun, 2009) et de la difficulté du diagnostic pour les équipes non expérimentées. Elle pourrait donc en réalité être très proche de la prévalence décrite chez l’Homme. 46 2.2.2. Prédispositions raciale et sexuelle Le Spitz Loup (plus connu sous le terme anglais Keeshond), le Caniche, le Schnauzer miniature, le Beagle, le Bouledogue anglais, le Border Collie, le Berger des Shetlands et certains terriers dont le Fox terrier semblent prédisposés à la TOF (Fox et al., 1999 ; Orton et al., 2001 ; Nelson, 2003 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008). Toutes les races de chien peuvent néanmoins être concernées par cette cardiopathie avec une prévalence plus élevée chez les petites races. Toutefois, la popularité de certaines races peut influencer la prévalence régionale, voire globale, d’une anomalie congénitale (Ettinger et Feldman, 2010). La TOF a également été décrite chez le chat mais aucune prédisposition raciale n’est disponible dans la littérature (Fox et al., 1999 ; Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011). Contrairement à la TOF chez l’Homme, les carnivores domestiques mâles semblent presque deux fois plus touchés que les femelles (Ettinger et Feldman, 2010). 2.3. Physiopathologie La physiopathologie est similaire à celle détaillée précédemment chez l’Homme (cf. paragraphe 1.3., page 19) (Orton et al., 2001 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011 ; Chetboul et al., 2012). L’option chirurgicale n’est que très rarement choisie chez les carnivores domestiques atteints de TOF. Par conséquent, la plupart d’entre eux souffrent d’hypoxie chronique stimulant la fabrication d’érythropoïétine par les reins et favorisant ainsi l’apparition d’une polycythémie. Cette dernière est à l’origine d’une hyperviscosité sanguine qui exacerbe les risques d’accidents cérébro-vasculaires et diminue l’espérance de vie (Fox et al., 1999 ; Orton et al., 2001 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). 2.4. Etiologie 2.4.1. Mode de transmission Patterson est un pionnier de la recherche génétique concernant les cardiopathies canines. Il a commencé à réaliser des études épidémiologiques et familiales sur des cardiopathies congénitales canines à la fin des années 50 et au début des années 60, qui ont mis en évidence de nombreuses similitudes avec des cardiopathies déjà décrites chez l’Homme. Certaines d’entre elles ont été retrouvées plus fréquemment dans quelques races, ce qui a encouragé les chercheurs à en explorer l’étiologie génétique. Une cardiopathie congénitale très proche de la TOF de l’Homme a semblé particulièrement fréquente chez le Spitz loup comparé aux autres races de chien. Des études ultérieures réalisées chez des Spitz loups apparentés ont confirmé qu’une série de malformations cardiaques, toutes imputables à un degré variable d’anomalie du développement du septum conotroncal, était à déterminisme héréditaire dans une lignée de Spitz loups ne présentant par ailleurs pas d’anomalie extracardiaque. Les malformations cardiaques observées incluaient la plupart des anomalies considérées comme conotroncales chez l’Homme. Les analyses de ségrégation réalisées dans la colonie initiale de Spitz loups ont montré que les résultats n’étaient pas compatibles avec une transmission monogénique à pénétrance complète. Par conséquent, un modèle a été établi selon lequel de nombreux gènes auraient une action cumulative (modèle polygénique ou multifactoriel) (Patterson et al., 1974). 47 Par la suite, dans les années 90, des croisements entre chiens atteints basés sur une consanguinité sélective ont permis d’obtenir un degré d’homogénéité génétique accru dans un groupe de Spitz loups, de façon à affiner le modèle précédemment établi. De nouvelles études ont été réalisées sur ce groupe et ont permis d’aboutir à une nouvelle hypothèse : les anomalies conotroncales seraient la conséquence de la mutation d’un seul gène (locus unique). Des études embryologiques ont été réalisées en parallèle et ont permis de penser que la mutation causale interfèrerait avec la croissance myocardique de la région conotroncale durant la courte période du développement embryonnaire précoce où a lieu la septation conotroncale. Le modèle qui expliquait le mieux les résultats obtenus était une transmission monogénique et autosomique avec un allèle à pénétrance partielle chez les hétérozygotes et à pénétrance complète chez les homozygotes. En effet, les hétérozygotes de la première génération (appelés F1) ne présentaient pas de lésions significatives mais parfois quelques anomalies subcliniques et il existait un léger excédent de descendants affectés dans la génération F1 backcross (croisement en retour). Chez les homozygotes, la pénétrance de l’allèle délétère était complète, comme le prouvaient les proportions obtenues dans les différents mariages. Toutefois, il existait différents degrés d’anomalies chez les homozygotes. Patterson est donc arrivé à la conclusion suivante : chez le Spitz loup, la TOF semble être la conséquence de l’effet d’un gène majeur influant sur le développement conotroncal avec une variation mineure surajoutée (expliquant la gravité variable de la TOF chez les homozygotes) pouvant être due aux effets de gènes d’autres loci (gènes modificateurs) ou à l’environnement. Le fait d’utiliser des Spitz Loup avec un fort taux de consanguinité a totalement changé les résultats de l’étude probablement grâce à la diminution des effets des gènes mineurs qui masquaient la transmission mendélienne (Patterson et al., 1993). Cependant, en 2005, une analyse de liaison réalisée à l’aide d’un pedigree de chiens F1 backcross croisés Spitz Loup x Beagle et de marqueurs génétiques répartis sur tous les chromosomes du chien, a permis de contredire l’hypothèse d’un gène à effet majeur et de mettre en évidence trois loci impliqués dans la TOF, dans ce pedigree. Ces trois loci étaient situés sur trois chromosomes différents et agissaient en interaction pour gouverner le développement d’une TOF (Werner et al., 2005). Enfin, en 2009, une étude portant sur une famille de chiens Beagle atteinte d’anomalies conotroncales a suggéré un mode de transmission autosomique récessif dans ce cas particulier (DiezPrieto et al., 2009). 2.4.2. Etude concernant l’implication du gène ZFPM2 Compte-tenu de l’implication probable du gène ZFPM2 (Zinc finger protein FOG family member 2) dans l’apparition de la TOF chez l’Homme, un groupe de chercheurs a fait l’hypothèse que cela pourrait également être le cas chez le chien. Ce gène a été isolé, séquencé puis comparé aux séquences d’autres espèces et il a été mis en évidence que le gène ZFPM2 canin était très proche de celui de l’Homme. Les études n’ont pas permis de mettre en évidence des expressions géniques différentes entre chiens sains et chiens atteints de TOF. Aucune variation de séquence n’a pu être mise en évidence chez les animaux atteints de TOF, dans les régions codantes du gène. Le niveau d’expression de la protéine a aussi été étudié et comparé entre chiens sains et chiens atteints de TOF. Il n’y avait aucune différence d’expression significative entre les deux groupes. Le gène ZFPM2 ne semble donc pas impliqué dans l’apparition de la TOF dans les races considérées dans l’étude (Schnauzer nain et Shiba Inu) (Lee et Hyun, 2009). 48 2.4.3. Pistes de recherches actuelles 2.4.3.1. Etudier les facteurs de transcription impliqués dans la morphogénèse cardiaque Les facteurs régulateurs du niveau de transcription (facteurs de transcription) des gènes impliqués dans la morphogénèse cardiaque sont les principales cibles de recherche pour identifier l’étiologie génétique de la TOF et des autres cardiopathies congénitales (Lee et Hyun, 2009). Il pourrait être intéressant de se focaliser sur certains gènes potentiellement impliqués chez l’Homme tels que NKX2.5 (NK2 transcription factor related, locus 5 aussi appelé CSX pour cardiac homeobox gene), le complexe transcriptionnel formé par GATA4 (GATA binding protein 4) et FOG2 (FOG family member 2). D’autre part, le gène VEGF (Vascular endothelial growth factor) pourrait également être étudié, bien qu’il ne s’agisse pas d’un facteur de transcription, car un haplotype de VEGF, associé à un risque accru de TOF a été mis en évidence chez l’Homme (cf. paragraphe 1.4.2.4., page 22). 2.4.3.2. S’intéresser à l’étiologie génétique des anomalies associées à la TOF chez le chien Comme chez l’Homme, la TOF chez le chien est souvent associée à d’autres malformations congénitales comme l’hypoplasie trachéale, la hernie phréno-péricardique, les déformations sternales, la communication interatriale, la persistance du canal artériel ou de l’arc aortique (Lee et Hyun, 2009). Il est ainsi possible d’émettre l’hypothèse d’une origine génétique commune à toutes ces malformations, qu’il serait pertinent d’explorer. La recherche génétique concernant la TOF reste à ce jour limitée chez les carnivores domestiques et repose sur un petit nombre d’études (Lee et Hyun, 2009). Néanmoins, la recherche de l’étiologie de la TOF chez les carnivores domestiques n’a fait que progresser et elle fait encore l’objet de nombreuses études (Chetboul et al., 2012). Faute de financement, les chercheurs en médecine vétérinaire sont très souvent contraints de partir de ce qui est connu en génétique humaine et de tester des gènes candidats, afin de déterminer s’ils sont également impliqués chez les carnivores domestiques. Cette démarche, appelée approche gènecandidat, permet de réduire nettement le coût des études mais de nombreuses recherches restent vaines. En effet, seules des études à l’échelle du génome, réalisées à l’aide de panels de marqueurs répartis sur tous les chromosomes, permettent de rechercher des gènes sans a priori sur la fonction de ces gènes (ils sont identifiés uniquement à partir de leurs positions). Ces études dites de clonage positionnel ou genome-wide sont les seules réellement efficaces pour mettre en évidence des loci de prédisposition aux maladies complexes comme la TOF. Leur coût constitue malheureusement encore un frein à leur usage dans le domaine vétérinaire. 49 2.5. Signes cliniques La TOF a été beaucoup étudiée chez le Spitz Loup, ce qui a permis de mettre en évidence divers signes cliniques de gravité très variable (Fox et al., 1999). La TOF chez les carnivores domestiques engendre majoritairement des symptômes très proches de ceux observés chez l’Homme. En effet, les carnivores domestiques peuvent présenter des épisodes de syncope, de dyspnée (Figure 20), de convulsions, de faiblesse, de tremblements, une intolérance à l’effort et un retard de croissance. Toutefois, une perte de vision, qui n’est pas décrite chez l’Homme et dont la physiopathologie n’est pas définie à ce jour, est parfois rapportée chez les carnivores domestiques (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Une cyanose des muqueuses devient visible au repos lorsque la quantité d’hémoglobine non oxygénée est supérieure à 3 g/dL (Figure 21). Lorsque l’on soupçonne une cyanose, il est important de regarder à la fois les muqueuses buccales et vulvaire et de vérifier la température de toutes les extrémités. L’idéal étant d’observer la couleur des muqueuses caudales avant et après l’effort (l’effort majore le shunt droite-gauche et fait apparaître une cyanose chez la majorité des animaux atteints de TOF) (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008). Le degré de cyanose est néanmoins très variable d’un animal à l’autre selon les caractéristiques de la TOF, certains ne présentent pas de cyanose, même à l’exercice tandis que d’autres sont cyanosés au repos (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011). Le mode de vie des carnivores domestiques atteints de TOF doit néanmoins être adapté en limitant l’exercice physique, les émotions, la prise de poids… (Fox et al., 1999 ; Ware, 2007 ; Ettinger et Feldman, 2010). Figure 20 - Orthopnée chez un chaton de 4 mois atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007) 50 Figure 21 - Cyanose débutante au repos chez un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007) A la palpation, un frémissement cataire peut être présent au niveau du troisième espace intercostal gauche à proximité de la jonction chondro-costale (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008). A l’auscultation cardiaque, un souffle systolique basal gauche caractéristique de la sténose pulmonaire est l’anomalie la plus souvent rapportée. Un souffle systolique médio-thoracique droit résultant d’un flux sanguin passant par la CIV restrictive peut néanmoins prédominer lorsque la sténose pulmonaire est peu marquée. L’absence de souffle ou la présence d’un souffle de faible intensité doivent orienter vers une atrésie pulmonaire associée à une CIV large. Une hyperviscosité importante secondaire à une polycythémie peut néanmoins atténuer voire faire disparaître le souffle cardiaque par diminution de la turbulence du flux sanguin quelles que soient les caractéristiques anatomiques de la TOF (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Chanoit, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). L’auscultation du champ pulmonaire révèle communément une particularité qui n’est pas décrite chez l’Homme. En effet, des crépitements peuvent être audibles mais ne sont pas à mettre en relation avec un œdème pulmonaire. Leur origine n’est pas encore bien comprise (Fox et al., 1999). L’hippocratisme digital, rapporté chez l’enfant, n’a jamais été décrit chez l’animal. 51 2.6. Examens complémentaires 2.6.1. Radiographie thoracique Comme chez l’Homme, les signes radiographiques de la TOF ne sont pas spécifiques de la cardiopathie chez les carnivores domestiques. La radiographie met en évidence un cœur de taille normale ou réduite avec un ventricule droit généralement élargi et un bord droit arrondi (« cœur en sabot »). La dilatation du tronc pulmonaire n’est pas toujours visible. La vascularisation pulmonaire est souvent réduite lorsque l’animal présente une TOF avec shunt droite-gauche mais elle est compensée par une circulation bronchique accrue bien visible sur les radiographies (Figure 22) (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Cette compensation s’explique par la relation anatomique entre artère pulmonaire et artère bronchique. Les artères bronchiques peuvent avoir des origines variables néanmoins, chez la plupart des chiens, l’artère bronchique principale provient de l’artère bronchoœsophagienne dont l’origine (cinquième artère intercostale droite) est très proche de celle de l’aorte. Elle irrigue les nœuds lymphatiques trachéo-bronchiques, le tissu conjonctif péri-bronchique, la muqueuse bronchique et elle se termine en lit capillaire au niveau des bronchioles qui est en continuité avec le lit capillaire de l’artère pulmonaire. Un défaut de perfusion des bronchioles par l’intermédiaire de l’artère pulmonaire sera donc rapidement compensé par une circulation bronchique accrue (Evans, 1993). L’auricule gauche peut ne pas être visible en raison de la diminution du retour veineux (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Le ventricule droit hypertrophié déplace dorsalement le cœur gauche, ce qui peut induire une hypertrophie artéfactuelle du ventricule gauche (Ware, 2007). La dextroposition de l’aorte est parfois visible sur la vue de profil où elle dessine un bombement crânial (Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008). 52 Figure 22 - Radiographie thoracique de profil (A) et de face (incidence dorso-ventrale) (B) d’un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010) Cœur de taille normale, dextroposition de l’aorte, vascularisation pulmonaire réduite et circulation bronchique accrue. Dilatation du tronc pulmonaire non visible (pas de déplacement dorsal de la trachée). Ventricule droit hypertrophié (« cœur en sabot »), dextroposition de l’aorte (flèche bleue), vascularisation pulmonaire réduite compensée par une circulation bronchique accrue, discrète dilatation du tronc pulmonaire (flèche jaune). 53 2.6.2. Echocardiographie-Doppler Tout comme en cardiologie humaine, l’échographie est l’examen complémentaire de choix qui permet de limiter l’utilisation de méthodes invasives (cathétérisme et angiographie) pour établir un diagnostic définitif de TOF. Cet examen permet, en effet, de confirmer la malformation congénitale et d’en apprécier les conséquences hémodynamiques (Figure 23) (Chetboul et al., 2012). La coupe parasternale droite « grand axe » 4 cavités permet de visualiser directement l’hypertrophie ventriculaire droite (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Boon, 2011 ; Chetboul et al., 2012). En changeant légèrement l’orientation de la sonde, une coupe parasternale droite « grand axe » 5 cavités est obtenue, permettant de visualiser la CIV sousaortique (souvent large) (Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Chetboul et al., 2012) et la dextroposition de l’aorte. La large CIV membraneuse peut également être évaluée sur la coupe parasternale droite « petit axe » transaortique (Chetboul et al., 2012). Cette coupe est la plus adaptée pour évaluer les caractéristiques de la sténose pulmonaire (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Chetboul et al., 2012) ou encore diagnostiquer une hypoplasie du tronc pulmonaire (Chetboul et al., 2012). L’échocardiographie peut également mettre en évidence une diminution de la taille de l’atrium et du ventricule gauche (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). En effet, le volume de sang qui arrive à l’atrium gauche puis au ventricule gauche est réduit car la sténose pulmonaire diminue le flux sanguin pulmonaire. Si le sang passe du cœur gauche au cœur droit par la CIV, ce phénomène est accentué. Si inversement, le sang passe du cœur droit au cœur gauche par la CIV, il se dirige alors directement dans l’aorte en raison de la dextroposition de cette dernière et n’augmente donc pas le volume sanguin au sein du ventricule gauche. Des études invasives réalisées chez des chiens atteints de TOF ont permis de mettre en évidence les pressions intraventriculaires gauches pouvaient descendre jusqu’à 36 mmHg (Boon, 2011). L’écho-Doppler permet ainsi de déterminer la direction du flux à travers la CIV (droite-gauche, gauche-droite ou encore bidirectionnel) (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Boon, 2011). Le mode Doppler continu permet de quantifier les gradients de pression de part et d’autre de la CIV et de la sténose pulmonaire. Le plus souvent, la pression au sein du ventricule droit est égale ou légèrement supérieure à celle du ventricule gauche (Chetboul et al., 2012). Des gradients de pression de plus de 100 mmHg sont généralement associés à un shunt droite-gauche ou bidirectionnel. Lorsqu’une sténose pulmonaire sous-valvulaire serrée est présente ou qu’il existe une hypoplasie de l’anneau de la valve pulmonaire, il est parfois difficile d’obtenir une image convenable de la chambre de chasse droite et de la valve et donc d’effectuer un examen Doppler du flux transpulmonaire. La cavité ventriculaire droite est généralement de petite taille sauf si des régurgitations sont présentes. Il faut également toujours rechercher une insuffisance tricuspidienne (Boon, 2011). 54 Figure 23 - Echocardiographie-Doppler d’un chiot Spitz loup atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010) (Ao) : aorte (AG) : atrium gauche (VG) : ventricule gauche (AD) : atrium droit (VD) : ventricule droit (A) : coupe « grand axe » 4 cavités obtenue par voie parasternale droite mettant en évidence une hypertrophie concentrique importante du ventricule droit et une dilatation de l’atrium droit (mode bidimensionnel) (B) : coupe « petit axe » transventriculaire obtenue par voie parasternale droite mettant en évidence une hypertrophie concentrique importante du ventricule droit, un aplatissement du septum interventriculaire, un ventricule gauche légèrement sous-rempli et une hyperéchogénicité sous-endocardique du ventricule droit (mode bidimensionnel) (C) : hypertrophie-dilatation du ventricule droit (mode temps-mouvement) (D) : coupe « grand axe » 5 cavités obtenue par voie parasternale droite mettant en évidence une communication interventriculaire et une dextroposition de l’aorte (mode bidimentionnel) (E) : coupe (D) en mode Doppler couleur montrant le shunt droite-gauche à travers la communication interventriculaire (F) : sténose pulmonaire caractérisée par un flux sanguin systolique transpulmonaire de vitesse augmentée 55 2.6.3. Examen électrocardiographique Comme chez l’Homme, l’anomalie principale retrouvée à l’examen électrocardiographique est la déviation axiale droite, évocatrice d’une hypertrophie du ventricule droit (Figure 24) (Tilley, 1992 ; Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Cette anomalie, également retrouvée lors de dilatation du ventricule droit, n’est pas spécifique de TOF, d’où l’importance de l’échocardiographie pour confirmer le diagnostic (Tilley, 1992). Une arythmie n’est que rarement présente (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Moins fréquemment, une déviation axiale gauche peut être observée, notamment chez certains chats atteints de TOF (Tilley, 1992 ; Fox et al., 1999 ; Ware, 2007). Figure 24 - Electrocardiogramme d’un chien atteint de tétralogie de Fallot présentant une hypertrophie importante du ventricule droit (Tilley, 1992) Présence d’une déviation axiale droite de -180°. Grandes ondes S sur les dérivations I, II et aVF. 2.6.4. Examens sanguins L’hypoxie peut être confirmée par la mesure de la pression artérielle en O2. Comme chez l’Homme, il est également important chez les carnivores domestiques de réaliser régulièrement une numération et formule sanguine afin de rechercher une éventuelle polycythémie (en particulier chez les individus présentant un shunt droite-gauche ou bidirectionnel). Cette polycythémie peut engendrer une hyperviscosité sanguine et donc accroître les risques d’accidents cérébro-vasculaires (cf. paragraphe 2.3., page 47) (Ettinger et Feldman, 2010). 2.6.5. Cathétérisme cardiaque et angiographie Le cathétérisme et l’angiographie cardiaques sont recommandés chez les carnivores domestiques lorsqu’une TOF a été diagnostiquée par examen échocardiographique et qu’une correction chirurgicale est envisagée. Ces techniques permettent de préciser l’anatomie des lésions (Fox et al., 1999 ; Ettinger et Feldman, 2010). L’angiographie (Figure 25) permet de visualiser l’hypertrophie du ventricule droit, le rétrécissement infundibulaire du ventricule droit, la sténose pulmonaire valvulaire et/ou sous-valvulaire avec 56 dilation post-sténotique, l’hypoplasie plus ou moins marquée du tronc pulmonaire, la CIV sousaortique, le ventricule gauche de taille plus ou moins réduite déplacé dorsalement, la dextroposition de l’aorte élargie et la circulation bronchique anormalement élevée. Il est fréquent de retrouver un shunt bidirectionnel chez l’animal anesthésié. Il est important de prendre toutes les précautions nécessaires pour éviter une embolie gazeuse (Fox et al., 1999 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Le cathétérisme cardiaque permet de mettre en évidence l’équilibre des pressions systoliques dans les ventricules droit et gauche ce qui est compatible avec une CIV large non restrictive. Les mesures d’oxymétrie révèlent une diminution de celle-ci dans le sang contenu par le ventricule gauche. L’administration d’héparine est préférable pendant et juste après le cathétérisme cardiaque de façon à diminuer les risques d’embolie cérébrale (Fox et al., 1999 ; Ettinger et Feldman, 2010). Figure 25 - Angiographie du chien de la Figure 22 atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007) (324) Injection de produit de contraste dans le ventricule gauche mettant en évidence une dextroposition aortique marquée. Un shunt est révélé par la présence de produit de contraste dans la chambre de chasse du ventricule droit et dans les artères pulmonaires. Le ventricule droit hypertrophié a déplacé dorsalement l’apex du ventricule gauche. (325) Injection de produit de contraste dans le ventricule droit mettant en évidence un shunt droite-gauche. Une dilatation post-sténotique du tronc pulmonaire est présente. 2.7. Traitement médical 2.7.1 Intérêts des béta-bloquants Comme chez l’Homme, les béta-bloquants peuvent être utilisés pour diminuer les conséquences hémodynamiques de la sténose pulmonaire et pour atténuer la chute de la résistance vasculaire systémique à médiation béta-adrénergique. Ils permettraient ainsi de réduire l’intensité du shunt droite-gauche (Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008). Toutefois, l’efficacité clinique des bétabloquants (propanolol) pour traiter la TOF n’a pas encore été prouvée 57 en médecine vétérinaire (Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). 2.7.2. Correction de l’hyperviscosité sanguine Chez les carnivores domestiques, la polycythémie secondaire à l’hypoxémie chronique et les signes cliniques associés à l’hyperviscosité sanguine (faiblesse, essoufflement, crises hypoxiques) peuvent être contrôlés par des saignées régulières (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008). Les saignées ne sont plus pratiquées en médecine humaine car l’existence d’une hypoxémie marquée et l’apparition de crises hypoxiques sont des indications urgentes à une intervention chirurgicale (Friedli, 2004). En médecine vétérinaire, l’intervention chirurgicale est rarement pratiquée. Par conséquent, la mise en place de saignées est recommandée lorsque l’hématocrite devient supérieur à 68 % avec une polyglobulie confirmée par la numération et formule sanguine. Jusqu’à 20 mL/kg de sang peuvent être prélevés et remplacés par une solution physiologique (Ringer lactate ou chlorure de sodium 0,9a%). Le volume de sang ponctionné est, bien entendu, adapté en fonction de la gravité de la polyglobulie et de l’état général de l’animal (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Ces saignées peuvent être répétées, si nécessaire, en fonction de la réponse physiologique de l’individu. Lorsque les saignées deviennent trop fréquentes ou mal tolérées, il est possible d’administrer un agent myélosuppresseur tel que l’hydroxyurée (Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008). La dose initiale conseillée chez les carnivores domestiques pour cette indication est de 40 à 50 mg/kg par voie orale toutes les 48 heures ou trois fois par semaine. La posologie est néanmoins à adapter suivant la réponse au traitement. Au début du traitement, il est important de réaliser 1 à 2 numérations et formules sanguines par semaine afin d’adapter au mieux la posologie. Si l’animal tolère bien l’hydroxyurée et que l’observance du traitement est satisfaisante (en particulier les suivis de numération et formule sanguine), elle pourra être administrée sur le long terme. Elle peut néanmoins provoquer différents effets secondaires tels qu’une anorexie, des vomissements, une hypoplasie médullaire, une alopécie et du prurit (Moore et Stepien, 2001). Il est également important de ne pas abaisser de façon excessive et/ou trop rapide la quantité de globules rouges car c’est ce qui permet de compenser l’hypoxie chronique. Il s’agit donc avant tout de trouver un équilibre en corrigeant l’hyperviscosité sanguine tout en permettant à l’animal de compenser l’hypoxie (il est souvent préférable de conserver un hématocrite supérieur aux valeurs usuelles) (communication personnelle de Luca Zilberstein). 2.7.3. Cas particulier de la gestion de la crise hypoxique Aucune prise en charge « type » ne peut être définie lors de crise hypoxique. Il faut l’adapter au cas par cas en fonction de nombreux paramètres tels que l’hématocrite, l’importance de l’acidose métabolique, les caractéristiques anatomiques et échographiques de sa TOF (communication personnelle de Luca Zilberstein). Lors de crise hypoxique, une alcalose respiratoire est souvent présente. L’oxygénothérapie n’améliore généralement pas significativement l’état clinique de l’animal en raison de la présence du shunt droite-gauche. Il est donc primordial d’essayer d’inverser la direction du shunt et de diminuer les dépenses en O2 de l’organisme. Les traitements à base d’agents vasoconstrictants, tels que la phényléphrine, peuvent ainsi aider à réduire le shunt droite-gauche (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ettinger et Feldman, 2010). Il est primordial d’éviter les médicaments vasodilatateurs (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Ettinger et Feldman, 2010). En présence d’une acidose métabolique, qui intervient pour compenser l’alcalose respiratoire, il est nécessaire de supplémenter l’animal en bicarbonates de sodium quand le pH sanguin atteint des 58 valeurs trop basses (pH inférieur à 7,1 et HCO3- inférieurs à 10 mmol/L). Il est conseillé de corriger un tiers du déséquilibre total (différentiel entre réserve alcaline et la valeur normale, multiplié par 0,3) en urgence et un tiers lentement (le dernier tiers n’est corrigé que si l’organisme le nécessite réellement). A la fin de chaque phase de supplémentation, il faut surveiller régulièrement le ionogramme car des déséquilibres ioniques peuvent intervenir (une hypokaliémie et une hypocalcémie peuvent par exemple survenir) entraînant de multiples dysfonctionnements à l’échelle de l’organisme tels que des troubles cardiovasculaires (perte de contractilité liée au déficit en Ca2+), digestifs... L’état de vigilance doit également être surveillé car une hypovigilance peut conduire à une hypoventilation et à une aggravation de l’acidémie (communication personnelle de Luca Zilberstein). Il est important de réaliser une numération et formule sanguine car l’existence d’une hyperviscosité sanguine provoque une diminution du transport périphérique de l’O2. En effet, les capillaires ont un diamètre insuffisant pour permettre le passage d’un sang hypervisqueux. Dans ce cas, une saignée doit avoir lieu en urgence selon le protocole décrit dans le paragraphe 2.7.2. (communication personnelle de Luca Zilberstein). Une sédation peut également être envisagée afin d’abaisser le métabolisme et réduire l’état d’excitation de l’animal. Les molécules pouvant être utilisées sont : - les opioïdes comme le butorphanol à 0,2 mg/kg (en bolus ou en perfusion continue à 0,05 mg/kg/h) ou la métadone à 0,2 mg/kg en bolus. Ces opioïdes ont l’avantage de ne pas avoir d’action sur la contractilité cardiaque, ni d’effet vasomoteur (vasoconstricteur ou vasodilatateur), - les benzodiazépines comme le midazolam à 0,2-0,4 mg/kg en bolus ou en perfusion continue à 0,05 mg/kg/h pouvant être associées aux opioïdes, - le propofol, en dernier recours et à des doses sédatives, soit à 1-2 mg/kg/h en perfusion continue (communication personnelle de Luca Zilberstein). 2.8. Traitement chirurgical L’ensemble des techniques chirurgicales utilisées en médecine humaine et décrites précédemment (cf. paragraphe 1.9., page 29) peuvent être transposées aux carnivores domestiques. 2.8.1. Traitement chirurgical palliatif La correction chirurgicale palliative est la technique de choix chez les carnivores domestiques car moins complexe et moins coûteuse que la correction chirurgicale totale. Néanmoins, elle reste rarement pratiquée. Elle fait appel aux anastomoses de Blalock-Taussig classique et modifiée (principalement) et à l’anastomose de Potts décrites chez l’Homme (cf. paragraphe 1.9.1., page 29) (Eyster et al., 1977 ; Ringwald et Bonagura, 1988 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Brockman et al., 2007 ; Ware, 2007 ; Chanoit, 2008 ; Orton, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). L’anastomose aorto-pulmonaire directe a, comme chez l’Homme, été abandonnée chez les carnivores domestiques car elle engendre une surcharge cardiaque trop importante (Chanoit, 2008). Quelques descriptions anciennes de cas rapportant des anastomoses de Blalock-Taussig classique ou modifiée (le plus souvent) ou de Potts chez le chien sont disponibles dans la littérature mais les résultats sont controversés (Eyster et al., 1977 ; Ringwald et Bonagura, 1988). Nous allons nous intéresser plus en détails à deux techniques chirurgicales palliatives récentes, réalisées chez le chien dans les années 2000 (Pelosi et al., 2006 ; Brockman et al., 2007). Seule une description de chirurgie palliative réalisée chez un chat est disponible dans la littérature et date de 1985 (Miller et al., 1985). Elle concerne un chat croisé siamois de 9 mois, intolérant à 59 l’effort, cyanotique, faisant des syncopes, qui a subi dans un premier temps une anastomose entre oreillette droite et artère pulmonaire principale (afin d’éviter une hypertension pulmonaire) dont l’obstruction a été mise en évidence 10 jours après l’intervention par cathétérisme cardiaque et injection de produit de contraste. Suite à cet échec, une anastomose de Blalock-Taussig a été entreprise et le shunt était perméable 3 semaines plus tard (le suivi n’a pas pu être poursuivi au-delà de ces trois semaines pour une raison inconnue). L’hématocrite avait diminué (de 50,8 en préopératoire à 43,3 % trois semaines après l’intervention) et une amélioration des signes cliniques était objectivable (Miller et al., 1985). Une dilatation par ballonnet de la sténose pulmonaire sous-valvulaire d’une chienne Bull terrier miniature de 6 mois pesant 6,250 kg atteinte de TOF associée à une sténose aortique et à une insuffisance mitrale a aussi été rapportée (Oguchi et al., 1999). La chienne était dyspnéique, intolérante à l’effort et présentait une cyanose au repos. L’hématocrite était de 72 %. En postopératoire immédiat, le gradient de pression de part et d’autre de la valve pulmonaire avait diminué (63 mmHg versus 97 mmHg). Aucune complication liée à l’intervention ne fut à déplorer. Les symptômes fonctionnels de l’animal se sont significativement améliorés durant les 4 mois ayant suivi la dilatation. Malheureusement, l’animal est décédé 4 mois après l’intervention dans un tremblement de terre. D’autres études avec une population plus importante et un suivi plus long pourraient permettre d’établir les indications de cette intervention dans le cadre de la TOF (Oguchi et al., 1999). 2.8.1.1. Etude de Brockman et al. : technique de Blalock-Taussig modifiée faisant appel à une prothèse expansive en téflon ou à un segment d’artère carotide (Brockman et al., 2007) - Objectif de l’étude et population choisie : Brockman et al. ont inclu 6 chiens (2 croisés, 1 Spitz Loup, 1 Chihuahua, 1 Labrador et 1 Sussex Spaniel) âgés de 5 mois à 5 ans et présentant une forme grave de TOF (avec une importante intolérance à l’effort, une cyanose au repos et une augmentation progressive de l’hématocrite) diagnostiquée par échocardiographie et angiographie (Tableau 3). Une anastomose de Blalock-Taussig modifiée a été réalisée chez l’ensemble des chiens de l’étude. Une prothèse expansive en téflon a été utilisée chez 5 des 6 chiens (pesant tous plus de 10 kg) et un segment d’artère carotide pour le sixième (pesant 2,9 kg). Le but de l’étude était de suivre l’évolution post-opératoire à long terme de ces 6 chiens (Brockman et al., 2007). - Voie d’abord et technique chirurgicale : la voie d’abord thoracique a été effectuée soit par résection de la quatrième côte gauche, soit par le cinquième espace intercostal gauche. L’artère sous-clavière gauche a ensuite été disséquée. L’artère pulmonaire gauche a été exposée après une incision du péricarde. L’anastomose entre l’artère sous-clavière gauche et l’artère pulmonaire homolatérale a été réalisée par une prothèse expansive en téflon de 6 mm de diamètre chez 5 des 6 chiens et par un segment d’artère carotide pour le sixième (Brockman et al., 2007). - Résultats (Tableau 3) : un seul décès post-opératoire a été à déplorer, il concernait le Chihuahua de 13 mois pesant 2,9 kg ayant reçu la greffe autologue d’artère carotide (Brockman et al., 2007). Cette technique palliative a néanmoins permis de faire chuter l’hématocrite 1 mois après l’opération chez 4 des 5 chiens ayant survécu, l’hématocrite du 5ème étant resté stable à 50%. La baisse était de 1 et 18 % selon les chiens. Néanmoins, les dernières valeurs d’hématocrite disponibles (entre 8 et 45 mois après l’opération) ont montré une augmentation progressive pour 4 des 5 chiens et, pour 2 des 5 chiens qui ont survécu, cette valeur est même devenue supérieure à la valeur initiale (de 2 et 60 6a%). Chez ces 2 chiens, la perméabilité du shunt n’a malheureusement pas pu être vérifiée suite à ces résultats. Néanmoins, cette variation n’était pas majeure et pouvait être liée à d’autres facteurs (déshydratation, maladie intercurrente…). Une augmentation de la pression artérielle en O2 était quant à elle présente en post-opératoire chez 4 chiens ayant survécu, la valeur pré-opératoire n’étant pas disponible pour le 5ème (Tableau 3). Chez 4 des 5 chiens ayant survécu, la perméabilité du shunt a pu être mise en évidence à l’échographie entre 8 et 24 mois après l’opération et la qualité de vie des 5 chiens s’était améliorée. Le chien 1 est mort à 11,5 ans d’une insuffisance cardiaque congestive, soit 6 ans après l’intervention. Le chien 2 est mort subitement (une origine « cardiaque » est fortement suspectée) à 7 ans, soit 6 ans après l’opération également. Les 3 autres chiens étaient encore en vie lors du dernier suivi (30 à 54 mois après l’opération) (Brockman et al., 2007). Tableau 3 - Evolution de l’hématocrite et de la pression artérielle en O2 de l’ensemble des chiens de l’étude de Brockman et al. suite à la technique de Blalock-Taussig modifiée (Brockman et al., 2007) Chien 1 Chien 2 Chien 3 Chien 4 Chien 5 Chien 6 Sexe Race Mâle Croisé Femelle Spitz Loup Femelle Croisé Mâle Chihuahua Mâle Labrador Âge (mois) Poids (kg) 60 24,4 68 50 12 10,6 60 53 5 12,1 50 50 13 2,9 50 / 5 16,0 50 49 Femelle Sussex Spaniel 8 10,8 60 46 56 (18) 52 (12) 56 (36) / 52 (45) 58 (8) ND 52,7 56,0 ND 58,0 54,0 63,9 70,0 64,0 / 66,0 60,0 O (15 mois) O (12 mois) ND / O (24 mois) O (8 mois) Avant opération 1 mois après intervention Hématocrite Dernière valeur (%) (mois suivant l’opération) Avant Pression l’opération artérielle en Après O2 (mmHg) l’opération Perméabilité du shunt O/N (mois suivant l’opération) (ND) : non disponible (/) : animal décédé - Conclusion : la technique de Blalock-Taussig modifiée utilisant une prothèse expansive en téflon semble être une option chirurgicale intéressante qui permettrait d’augmenter significativement l’espérance et la qualité de vie des chiens atteints de TOF grave. La greffe autologue d’artère carotide a été réalisée chez un seul animal qui est décédé d’un arrêt cardio-respiratoire 24 heures après l’opération. L’autopsie de ce chien n’a pas pu être réalisée et la perméabilité du shunt n’a pas pu être étudiée. La technique chirurgicale était néanmoins plus complexe en raison de la petite taille de l’animal. En effet, il semble que le risque de complications chez les animaux de petit format soit significativement plus élevé que chez ceux de grand format. Des études ultérieures portant sur un plus grand nombre d’animaux sont néanmoins nécessaires pour confirmer ces résultats (Brockman et al., 2007). 61 2.8.1.2. Etude de Pelosi et al. : technique de Blalock-Taussig modifiée faisant appel à un segment de veine jugulaire (Pelosi et al., 2006) - Objectif de l’étude et population choisie : les auteurs ont inclus 15 Beagle adultes sains pesant 14,9 ± 1 kg. Des examens écho-Doppler ont été réalisés 4, 7 et 30 jours après l’intervention. Le but de cette étude était d’évaluer si l’utilisation d’une greffe autologue de veine jugulaire est une alternative intéressante ou non à la greffe synthétique utilisée dans la technique de Blalock-Taussig modifiée (Pelosi et al., 2006). - Voie d’abord et technique chirurgicale (Figure 26) : une incision cutanée de 6 cm parallèle au trajet de la veine jugulaire gauche a été pratiquée. De la papavérine a été placée sur la veine jugulaire pour contrôler ses spasmes. L’adventice a été retirée et l’incision a été recouverte par une éponge imbibée de NaCl 0,9 % pendant que l’abord thoracique a été pratiqué au niveau du quatrième espace intercostal gauche. L’artère sous-clavière a été identifiée et isolée puis l’adventice retirée. La veine jugulaire a été ligaturée puis 4 cm de veine ont été retirés afin de servir de greffon. Ce greffon a immédiatement été placé dans 100 mL de solution saline refroidie mélangée à 3 mL d’héparine et 0,2 mL de papavérine. Le greffon a ensuite été coupé obliquement au niveau de son extrémité proximale pour augmenter le diamètre du site d’anastomose. Un clamp bulldog a été placé au niveau de l’origine de l’artère sous-clavière ainsi qu’une ligature à au moins 2 cm du clamp. L’artère a été sectionnée à 1 cm de son origine et incisée obliquement en partie proximale pour augmenter le diamètre de l’anastomose. Puis l’anastomose entre le greffon et l’artère sousclavière a été réalisée. Ensuite, le péricarde a été incisé pour mettre en évidence l’artère pulmonaire et ainsi réaliser son occlusion partielle à l’aide d’un clamp de Satinsky. Puis l’artère pulmonaire a été incisée et l’extrémité distale du greffon a alors été coupée obliquement. Enfin, une anastomose a été pratiquée entre le greffon et l’artère pulmonaire. La circulation a été rétablie par retrait du clamp de Satinsky puis du clamp Bulldog. La perméabilité du shunt a été évaluée par palpation du thrill. Chez 12 des 15 chiens opérés, un Doppler en silicone relié à un sonomicromètre a été placé autour de l’artère sous-clavière ou au niveau de la greffe afin de mesurer la vitesse du flux (Pelosi et al., 2006). 62 Figure 26 - Photographies des trois étapes clés de l’anastomose entre artère sous-clavière et artère pulmonaire homolatérale utilisant la veine jugulaire comme greffon chez un chien sain (Pelosi et al., 2006) a (a) Occlusion complète de l’artère sous-clavière grâce à un clamp bulldog. (b) Anastomose réalisée sur la face médiale de l’artère pulmonaire. Occlusion partielle de l’artère pulmonaire principale grâce à un clamp de Satinsky. (c) Mise en place du greffon (portion de veine jugulaire) entre l’artère sous-clavière (flèche blanche) et l’artère pulmonaire (flèche noire). - Résultats : 30 jours après l’intervention, 9 des 12 chiens avec sonde de flux et les 3 chiens sans sonde de flux avaient un shunt perméable (Figures 27 et 28). Aucun signe d’œdème pulmonaire n’a été détecté sur les clichés radiographiques. La longueur moyenne de la greffe était de 3,9 cm ± 0,5 cm, le diamètre moyen de la greffe était de 2,1 cm ± 0,5 cm et le diamètre moyen de l’artère sous-clavière était de 2,1 cm ± 0,3 cm (Pelosi et al., 2006). 63 Figure 27 - Coupe écho-Doppler « petit axe » transaortique obtenue par voie parasternale droite chez un chien ayant subi 30 jours auparavant une anastomose entre artère sousclavière et artère pulmonaire homolatérale utilisant une portion de veine jugulaire comme greffon (Pelosi et al., 2006) (AG) : atrium gauche (Ao) : aorte (CCVD) : chambre de chasse du ventricule droit AG Présence d’un flux sanguin turbulent (flèche jaune) indiquant que le shunt est perméable. Figure 28 - Angiographie artérielle du chien de la Figure 28, 30 jours après l’anastomose entre artère sous-clavière et artère pulmonaire homolatérale utilisant la veine jugulaire comme greffon (Pelosi et al., 2006) Cathétérisme aortique Shunt perméable 30 jours après l’anastomose 64 - Résultats (suite) : le shunt a induit une hypertrophie excentrique du ventricule gauche par augmentation du volume de charge sans que son volume télésystolique n’ait été significativement modifié. En revanche, la fraction d’éjection et le volume télédiastolique du ventricule gauche étaient significativement augmentés. De plus, une dilatation de l’atrium gauche était présente 30 jours après l’intervention (Pelosi et al., 2006). Les chiens ont tous été euthanasiés 30 jours après la greffe afin de pratiquer une analyse histologique du greffon et de la veine jugulaire droite. Macroscopiquement, un remaniement de la greffe était visible. A l’analyse histologique, la greffe avait évolué vers une artérialisation (Figure 29). Ces changements mettaient en évidence la capacité d’adaptation de ce greffon, permettant d’émettre l’hypothèse d’un potentiel de croissance non étudié dans cette étude. Une couche continue de cellules endothéliales s’était formée entre la greffe et l’artère sous-clavière ce qui était en faveur d’une bonne tolérance du greffon. Chez tous les chiens possédant une sonde de flux, une diminution focale du diamètre (divisé par 4 ou 5) de la lumière du greffon a été mise en évidence en raison de la fibrose et de l’inflammation locale au niveau de la sonde (Pelosi et al., 2006). Figure 29 - Coupes histologiques comparatives d’une veine jugulaire normale de chien (à gauche) et d’une veine jugulaire utilisée comme greffon pour l’anastomose entre artère sousclavière et artère pulmonaire chez un chien sain 30 jours après sa mise en place (à droite) (Pelosi et al., 2006) Coloration immunohistochimique. Echelle : trait noir = 100µm. Coloration marron intense de la veine jugulaire 30 jours après l’anastomose soulignant la prolifération de léiomyocytes (artérialisation). - Conclusion : l’utilisation de la veine jugulaire comme greffon dans la technique de BlalockTaussig modifiée donne des résultats satisfaisants à court terme (30 jours) chez le chien sain. Ces résultats pourraient être meilleurs car 2 des 3 échecs semblent directement à mettre en relation avec la présence de la sonde de flux qui n’est pas indispensable. Aucune complication majeure à court terme n’est liée à l’utilisation de la veine jugulaire comme greffon. Un remodelage précoce du greffon est observé chez tous les chiens. Il pourrait désormais être intéressant de réaliser cette technique chez des animaux atteints de TOF et de réaliser un suivi sur le long terme (Pelosi et al., 2006). 65 2.8.2. Correction chirurgicale totale En médecine vétérinaire, la correction chirurgicale totale est encore plus rarement pratiquée que la chirurgie palliative. En effet, seule une description de deux cas chez le chien, détaillée ci-dessous, est disponible dans la littérature (Nelson, 2003 ; Pelosi et al., 2006). Aucun cas n’est rapporté chez le chat. 2.8.2.1. Description de deux cas d’Orton et al. : technique de correction chirurgicale chirurgicale totale standard utilisée chez l’Homme (Orton et al., 2001) - Objectif de la description de ces deux cas et population choisie : Orton a inclus deux chiens dans sa description. Le premier était un chien mâle croisé berger de 3 mois pesant 12 kg et présentant une cyanose modérée au repos mais majeure à l’effort. L’hématocrite était de 41 %. Le second était une chienne croisée berger stérilisée de 12 mois pesant 13 kg et présentant une intolérance à l’effort majeure, une cyanose marquée au repos et une polycythémie importante (hématocrite = 79 %) ayant nécessité des saignées 1 et 4 semaines avant l’intervention. L’objectif de cette description de deux cas était de rapporter l’évolution à moyen terme de deux chiens souffrant d’une forme grave de TOF ayant subi une correction chirurgicale totale dont la technique a été détaillée précédemment (cf. paragraphe 1.9.2., page 33) (Orton et al., 2001). - Voie d’abord et technique chirurgicale : l’abord a été effectué par sternotomie médiane. Le péricarde a été incisé sur sa face ventrale puis la circulation extra-corporelle a été mise en place (cf paragraphe 2.8.2.2, page 67). Une incision a ensuite été pratiquée au niveau de la chambre de chasse du ventricule droit. Chez la chienne, la sténose pulmonaire était caractérisée par une dysplasie de la valve pulmonaire (hypoplasie de l’anneau valvulaire, valvules immobiles et épaissies). La ventriculotomie a donc dû être étendue jusqu’à l’anneau de la valve pulmonaire. Quant au chien mâle, il n’a pas été nécessaire d’étendre la ventriculotomie car il présentait un infundibulum élargi sans atteinte de la valve pulmonaire (une simple excision d’une bande musculaire appartenant à la valve pulmonaire a été réalisée) (Orton et al., 2001). - Résultats : les deux chiens ont survécu à l’opération et une amélioration clinique significative a été objectivée en post-opératoire immédiat. Tous deux ont retrouvé une bonne tolérance à l’exercice quelques semaines après l’intervention. Le chien mâle était en bon état général lors de son dernier suivi 24 mois après l’intervention et participait même à des compétitions d’agility. La chienne présentait (de même) une bonne tolérance à l’exercice lors de son dernier suivi 36 mois après l’opération. Cette étude n’a néanmoins pas permis de déterminer si ces chiens avaient des risques accrus de mort subite suite à cette intervention. Aucune différence de récupération en postopératoire n’a pu être mise en évidence entre les deux alternatives chirurgicales (valvectomie/absence de valvectomie) (Orton et al., 2001). - Conclusion : la correction chirurgicale totale semble être une alternative intéressante pour les chiens atteints de TOF. Néanmoins, de nouvelles études portant sur un plus grand nombre d’animaux sont nécessaires pour pouvoir l’affirmer. 66 2.8.2.2. Une contrainte majeure : la CEC La correction chirurgicale totale est une chirurgie à cœur ouvert qui nécessite donc la mise en place d’une CEC. Cette technique a été décrite chez le chien mais son coût, sa difficulté et le postopératoire contraignant la rendent peu disponible (Ware, 2007 ; Chanoit, 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Les premières chirurgies cardiaques vétérinaires sous CEC ont été réalisées en Amérique du nord dans les années 70 par des chirurgiens vétérinaires universitaires (Borenstein et Behr, 2009). L’Unité de Cardiologie d’Alfort (UCA) en collaboration avec l’équipe de chirurgiens cardiaques et d’un perfusionniste de l’hôpital Montsouris (IMM recherche) a été une pionnière en Europe en ce qui concerne l’utilisation de la CEC chez le chien. La machine nécessaire à la CEC est constituée de pompes à galet, d’un oxygénateur qui réalise les échanges gazeux, d’un réchauffeur et d’une tuyauterie stérile (Figure 30a et b) (Borenstein et Behr, 2009). Le sang non oxygéné est détourné du cœur droit grâce à une canule placée dans l’atrium droit et le sang oxygéné entrant dans le cœur gauche par les veines pulmonaires est dévié par une canule placée dans le ventricule gauche. Le sang non oxygéné rentre dans le réservoir de la machine de CEC puis se dirige vers l’oxygénateur où le dioxyde de carbone est extrait et où le sang est enrichi en O2 (à ce niveau des gaz anesthésiques peuvent être également ajoutés). Le sang oxygéné est ensuite maintenu à 37,0°C dans l’échangeur thermique puis le sang retourne à l’animal par la canule fémorale (Borenstein et al., 2004 ; Behr et al., 2007). Le débit dans la CEC est réglable et dépend de la taille de l’animal et des étapes de la chirurgie. Le perfusionniste, également appelé pompiste, orchestre finement l’ajout de mannitol, de bicarbonates, de chlorure de calcium, d’héparine… (Borenstein et al., 2004). L’inconvénient de la CEC est qu’elle nécessite la collaboration d’environ 10 professionnels ainsi que du matériel très perfectionné. Le coût est donc important, ce qui reste un vrai facteur limitant, bien plus que la technique chirurgicale en elle-même, maitrisée par les collaborateurs chirurgiens de l’UCA à l’IMM recherche (Borenstein et Behr, 2009). La fondation « un cœur » a entre autre été créée pour faliciter l’accès aux techniques chirurgicales coûteuses nécessitant une CEC (www.fondationuncoeur.com). 67 Figure 30a (Borenstein et Behr, 2009) et b (Behr et al., 2007) - Principes de la circulation extracorporelle chez le chien Le sang non oxygéné (en bleu) est détourné du cœur droit (1) grâce à une canule placée dans l’atrium droit et le sang oxygéné entrant dans le cœur gauche par les veines pulmonaires est dévié par une canule placée dans le ventricule gauche (1). Le sang non oxygéné rentre dans le réservoir (2) puis se dirige vers l’oxygénateur (3) où le dioxyde de carbone est extrait et où le sang est enrichi en O2 (à ce niveau des gaz anesthésiques peuvent être également ajoutés). Le sang oxygéné (en rouge) est ensuite maintenu à 37,0°C dans l’échangeur thermique (5) puis se dirige vers la pompe (6) et retourne à l’animal par la canule fémorale (7). 68 2.9. Evolution et complications Le pronostic de la TOF dépend du degré de la sténose pulmonaire (Ware, 2007 ; Orton, 2008 ; Chetboul et al., 2012), de l’importance de la polycythémie (Ware, 2007) et de la réponse au traitement médical (Nelson, 2003). Certains carnivores domestiques peuvent vivre 4 à 8 ans sous traitement médical uniquement, à condition que l’hyperviscosité sanguine soit contrôlée (Fox et al., 1999 ; Nelson, 2003 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Chetboul et al., 2012) car une hypoxémie et une polycythémie progressives s’installent au fil des mois se traduisant par une intolérance à l’effort et par une aggravation des signes cliniques. Il n’est pas rare que des morts subites aient lieu (Fox et al., 1999 ; Ware, 2007 ; Orton, 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Les animaux atteints de forme grave de TOF ayant subi une chirurgie palliative ou correctrice avec succès pourraient vivre plusieurs années avec une excellente qualité de vie mais il existe très peu de données disponibles à ce sujet (Ware, 2007). Lorsque la sténose pulmonaire est serrée, le shunt droit-gauche devient permanent, entraînant cyanose, polycythémie, voire mort subite à un âge précoce (souvent avant l’âge d’1 an (Orton, 2008)) par thrombo-embolie aortique ou tachyarythmies. Si aucune correction chirurgicale n’est entreprise rapidement, le pronostic est sombre à court terme (Orton, 2008 ; Chetboul et al., 2012). 69 70 DEUXIÈME PARTIE : ÉTUDE RÉTROSPECTIVE DE 31 CAS DE TÉTRALOGIE DE FALLOT CHEZ DES CARNIVORES DOMESTIQUES DIAGNOSTIQUÉS ENTRE 2003 ET 2014 1. Objectifs de l’étude L’objectif principal de cette étude rétrospective était d’analyser les caractéristiques épidémiologiques, cliniques ainsi que la survie des carnivores domestiques atteints de TOF diagnostiquée d’avril 2003 à juin 2014 par un membre qualifié de l’UCA ou du CHV des Cordeliers (Meaux). De façon plus précise, les objectifs ont été de déterminer : - l’existence d’une prédisposition d’espèce, de race ou de sexe, - l’âge au diagnostic de la maladie, - les particularités cliniques, - les caractéristiques radiographiques et écho-Doppler (notamment : la morphologie de la CIV, de la sténose pulmonaire et du ventricule droit, la direction du shunt et l’importance de la sténose), - et enfin, la durée de vie des animaux inclus dans l’étude. 2. Matériel et méthode 2.1. Animaux Critères d’inclusion Tous les carnivores domestiques dont les anomalies caractéristiques de la TOF ont été visualisées avec certitude par un membre qualifié de l’UCA ou du CHV des Cordeliers à l’examen échocardiographique conventionnel et confirmées par méthode Doppler (mode couleur, pulsé et continu), avec ou sans symptômes d’insuffisance cardiaque associés, ont été inclus dans l’étude. Données recueillies Les données concernant les carnivores domestiques de l’étude ont été recueillies grâce au logiciel Clovis à l’ENVA (mis en place en 2001) et au logiciel Assistovet du CHV des Cordeliers (mis en place en 2007). Chaque animal bénéficiant d’une consultation à l’ENVA ou au CHV des Cordeliers possède un dossier auquel est attribué un numéro particulier. A L’UCA, les renseignements suivants sont systématiquement validés par un assistant hospitalier ou chargé de consultation, un praticien hospitalier ou un professeur : - le signalement de l’animal à la présentation (espèce, race, sexe, âge, poids), l’anamnèse, les commémoratifs et le motif de consultation, la présentation clinique de l’animal (intolérance à l’effort, toux, dyspnée, syncope, amaigrissement, retard de croissance, cyanose ou autres), l’intensité et la localisation du ou des souffles cardiaques objectivés à l’auscultation, les résultats de l’examen électrocardiographique, 71 - les paramètres d’intérêt de l’examen échocardiographique et Doppler, la thérapeutique mise en place, l’évolution clinique de l’animal lorsque des visites de suivi ont eu lieu pendant la période d’étude. Ces informations sont également disponibles dans le logiciel Assistovet du CHV des Cordeliers et sont systématiquement validées par le Docteur Eric Bomassi, qui est en charge des consultations de cardiologie au sein de la structure. 2.2. Examen clinique Dans les deux centres de recrutement, un examen clinique général complet et une auscultation cardiaque attentive ont été réalisés chez l’ensemble des carnivores domestiques de l’étude par un membre qualifié. La gradation du souffle cardiaque a été établie de la manière suivante (Freeman et Levine, 1933) : - Grade 1/6 : souffle intermittent, localisé, discret et difficilement audible, - Grade 2/6 : souffle permanent, localisé et de faible intensité, - Grade 3/6 : souffle permanent, localisé et d’intensité moyenne, - Grade 4/6 : souffle de forte intensité sur une aire d’auscultation large, - Grade 5/6 : souffle de forte intensité avec perception d’un frémissement cataire, - Grade 6/6 : souffle de très forte intensité directement audible à l’oreille, associé à un frémissement cataire. La présence de symptômes fonctionnels a été recherchée, en particulier l’existence d’une intolérance à l’effort, de toux, de dyspnée, de syncope, d’un amaigrissement, d’un retard de croissance et/ou d’une cyanose. 2.3. Examen échocardiographique et Doppler Un examen échocardiographique et Doppler a été réalisé par un membre qualifié et entraîné chez l’ensemble des carnivores domestiques inclus dans l’étude. L’examen a été réalisé chez les animaux vigiles, en position debout (Chetboul et al., 2003 ; Chetboul et al., 2005(b)), sans tonte préalable des espaces intercostaux et avec électrocardiogramme (ECG) continu concomitant. De l’alcool pour écarter les poils, puis du gel échographique ont été utilisés pour faciliter le passage des ultrasons et donc pour améliorer la qualité des images obtenues. A l’UCA, les échographes utilisés furent les appareils Vivid 5, Vivid 7 et Vivid 9 de General Electric Medical System (Waukesha, Wisconsin, USA) équipés des sondes à balayage électronique suivantes : - Vivid 5 : sonde 5S (2-5 MHz), sonde 7S (5-7,5 MHz), sonde 10S (7,5-10 MHz), - Vivid 7 : sonde 3S (1,5-3,5 MHz), sonde 5S (2,2-5 MHz), sonde 7S (3,5-8 MHz), Sonde 10S (5-11,5 MHz), - Vivid 9 : sonde 5S (1,5-4,6 MHz), sonde 6S (2,4-6,2 MHz), sonde 12S (4,5-12 MHz). Au CHV des Cordeliers, les échographes utilisés furent un Megas et un MyLab Twice d’Esaote Biomedica (Firenze, Italie) comprenant trois types de sonde à balayage électronique (2,5-3,5 Mhz, 5-7,5 Mhz et 7,5-10 Mhz). 72 Pour chaque animal, une échocardiographie complète a été réalisée. L’examen comprenait la réalisation d’images fixes et de films avec les modes standards : bidimensionnel (2D) et TempsMouvement (TM). Les modes Doppler pulsé et continu ont été utilisés pour mesurer la vitesse des flux sanguins intracardiaques et le mode Doppler couleur a permis de déterminer le sens du shunt, la localisation de la sténose pulmonaire et d’apprécier la présence d’autres anomalies éventuelles. De façon plus précise, voici les différentes coupes qui ont permis d’établir le diagnostic de TOF : - La coupe 2D petit axe transventriculaire obtenue par voie parasternale droite a permis d’objectiver l’hypertrophie de la paroi du ventricule droit. Le mode TM a été utilisé après s’être assuré que l’axe de tir était parfaitement perpendiculaire au septum interventriculaire et qu’il se situait bien entre les deux piliers. Ce mode a permis de mesurer plusieurs structures en télédiastole (d) et en télésystole (s) : l’épaisseur du septum interventriculaire (SIVd et SIVs), l’épaisseur de la paroi libre du ventricule gauche (PLVGd et PLVGs) et le diamètre cavitaire du ventricule gauche en télédiastole et en télésystole (VGd et VGs). Le rapport PVDs/PLVGs a été calculé pour tous les animaux de l’étude et a permis de quantifier l’hypertrophie ventriculaire droite. La fraction de raccourcissement (FR, exprimée en %) a ainsi pu être calculée grâce à la formule suivante : FR = (VGd – VGs)/(VGd), - La coupe 2D transaortique obtenue par voie parasternale droite et gauche a permis d’étudier, en mode 2D, la morphologie du tronc pulmonaire, de localiser la sténose pulmonaire et de mesurer le diamètre du tronc pulmonaire (TP). Le rapport TP/Ao a ainsi pu être calculé. Le flux transpulmonaire a ensuite été étudié grâce aux modes Doppler pulsé, continu et couleur. La vitesse maximale du flux transpulmonaire en m.s-1 (Vmax) et le gradient de pression trans-sténotique en mmHg (ΔP) ont été mesurés, - Les coupes 2D 4 cavités, ou le plus souvent 5 cavités, obtenues par voie parasternale droite ont permis de mettre en évidence et de mesurer la CIV qui a été confirmée au mode Doppler couleur. Afin de pouvoir étudier l’importance de la CIV, le diamètre maximal de la CIV a été mesuré (en mm) et le rapport CIV/Ao calculé. Le sens du shunt a pu être déterminé grâce aux modes Doppler couleur et continu. La coupe 5 cavités a également permis de visualiser la dextroposition de l’aorte. 2.4. Suivi de la population d’étude Le suivi a été réalisé de la façon suivante : si un animal a été vu en consultation dans le mois ayant précédé la fin du recrutement, la date de fin de suivi correspondait à la date de la dernière consultation. Dans les autres cas, sauf si la date de décès de l’animal était présente dans le logiciel, les propriétaires ont systématiquement été contactés par mail ou par téléphone afin d’obtenir le maximum de précisions concernant le mode de vie de l’animal, son évolution clinique, l’observance des traitements éventuels, la date de mort de l’animal le cas échant et sa cause (cardiaque ou non cardiaque). Ainsi, la date de fin de suivi correspondait soit à la date du décès de l’animal, soit à la date à laquelle l’animal a été perdu de vue et censuré (date de la dernière consultation ou du dernier contact par mail ou par téléphone). Concernant les animaux décédés au cours de la période d’étude, la cause du décès a été classée soit en mort d’origine « cardiaque » en lien avec la TOF (mort spontanée ou par euthanasie), soit en 73 mort n’ayant pas de relation avec la cardiopathie (mort dite « non-cardiaque »). Pour chaque animal, la durée séparant le premier examen et la mort a été calculée. 2.5. Analyses statistiques Les résultats sont exprimés sous forme moyenne ± écart-type, médiane et valeur minimale (min) et maximale (max) obtenus grâce au logiciel excel. La loi binomiale a été utilisée et le calcul de “p” a été réalisé grâce au site www.stattrek.com (programme intitulé « binomial calculator »). Les courbes de survie ont été tracées par la méthode de Kaplan-Meier et étudiées grâce au test logrank du logiciel Systat, version 10.0, SPSS Inc (Chicago, IL). 74 3. Résultats Au total, 31 carnivores domestiques dont 16 (51,6 %) chats et 15 (48,4 %) chiens ont été inclus d’avril 2003 à juin 2014. Vingt-et-un sur 31 (67,7 %) carnivores domestiques dont 11/16 (68,8 %) chats et 10/15 (66,7 %) chiens ont été diagnostiqués par un membre de l’UCA et 10/31 (32,3 %) carnivores domestiques dont 5/16 (31,3 %) chats et 5/15 (33,3 %) chiens au CHV des Cordeliers (Meaux). 3.1. Caractéristiques épidémiologiques Le Tableau 4 regroupe toutes les caractéristiques épidémiologiques des 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude. Tableau 4 - Caractéristiques épidémiologiques des 31 carnivores domestiques atteints de tétralogie de Fallot (diagnostiquée d’avril 2003 à juin 2014) et inclus dans l’étude ND : non disponible NOM DE L’ANIMAL ESPECE SEXE RACE POIDS (kg) BOUNTY Chien Mâle Bouledogue français 10,8 BACARA Chat Mâle Siamois ND BRUTUS Chien Mâle Chihuahua 1,8 CHANCE Chien Mâle Bouledogue anglais ND COMETTE Chat Mâle Européen 2,4 ÉMIL Chien Mâle Jack Russell 7,0 FARFADET Chien Femelle Chihuahua 0,5 FÉRIA Chien Femelle Jack Russell 2,2 FIDJI Chien Femelle Bichon maltais 3,2 FLOPY Chien Mâle Bichon 1,1 FREYA Chat Femelle Européen 2,0 FRIPOUILLE Chat Mâle Européen 5,2 GASPARD Chat Mâle Européen 4,3 GAVROCHE Chat Mâle Européen 1,2 GAVROCHE Chien Mâle Border terrier 2,0 GLAD Chien Mâle Malamute 13,6 GRIOTTE Chien Femelle Border terrier 2,6 HADES Chat Mâle Ragdoll 2,75 IMOKA Chien Femelle Boxer 15,2 JEAZY LYY Chien Femelle Cane Corso 5,6 KANETH Chat Mâle Européen ND O’MALEY Chat Mâle Européen ND PETITE Chat Femelle Européen 4,2 PIKA Chat Femelle Européen ND POOPY Chien Femelle Bouledogue français 6,2 RODOLFINA Chat Femelle Européen 4,0 SHIVA Chien Mâle Jack Russell 2,7 SIMBA Chat Mâle Européen ND TÉTRIS Chat Femelle Chartreux ND TOTO Chat Mâle Européen 3,2 UBU Chat Mâle Persan ND 75 Race Neuf races canines différentes ont été répertoriées incluant par ordre de fréquence décroissante : 3/15 (20 %) chiens de race Jack Russell terrier, 2/15 (13,3 %) chiens de race Bichon, 2/15 (13,3 %) chiens de race Border terrier, 2/15 (13,3 %) chiens de race Bouledogue français, 2/15 (13,3 %) chiens de race Chihuahua, 1/15 (6,7 %) chien de race Bouledogue anglais, 1/15 (6,7 %) chien de race Boxer, 1/15 (6,7 %) chien de race Cane Corso et 1/15 (6,7 %) chien de race Malamute. Les chiens de petite taille (< 10 kg à l’âge adulte) représentaient ainsi 60,0 % de la population canine de l’étude (n = 9/15). Afin de tester l’hypothèse d’une éventuelle prédisposition à la TOF des chiens < 10 kg à l’âge adulte, nous avons utilisé la loi binomiale que nous avons appliquée à la sous-population des chiens de l’étude. Nous avons choisi comme hypothèse nulle : H0 : « il existe autant de chiens < 10 kg à l’âge adulte dans l’échantillon que dans la population générale ». Nous avons utilisé le site Stat Trek « binomial calculator » et rempli le progamme de la façon suivante : - probability of success on a single trial = 0.5 (probabilité que l’animal fasse < 10 kg à l’âge adulte dans la population générale), - number of trials = 15 (nombre de chiens atteints de TOF dans la sous-population étudiée), - number of successes = 9 (nombre de chiens < 10 kg à l’âge adulte atteints de TOF dans la population étudiée). Nous avons obtenu p = 0,30 (> 0,05). La supériorité numérique des chiens < 10 kg à l’âge adulte dans notre étude pourrait donc être due au hasard. Cinq races félines différentes ont été répertoriées incluant par ordre de fréquence décroissante : 12/16 (75,0 %) chats de race européenne, 1/16 (6,3 %) chat de race Persan, 1/16 (6,3 %) chat de race Ragdoll, 1/16 (6,3 %) chat de race Siamois et 1/16 (6,3 %) chat de race Chartreux. Sexe La population générale (n=31) incluait 19 (61,3 %) mâles et 12 (38,7 %) femelles, avec 11/16 (68,8 %) mâles et 5/16 (31,2 %) femelles pour la sous-population féline et 8/15 (53,3 %) mâles et 7/15 (46,7 %) femelles pour la sous-population canine. Afin de tester l’hypothèse d’une éventuelle prédisposition sexuelle à la TOF, nous avons utilisé la loi binomiale que nous avons appliquée à la population générale, puis aux deux sous-populations (chats/chiens). Nous avons choisi comme hypothèse nulle : H0 : « il existe autant de mâles dans l’échantillon que dans la population générale ». Nous avons utilisé le site Stat Trek (« binomial calculator », probability of success on a single trial = 0.5 qui correspond à la probabilité que le carnivores domestiques soit un mâle dans la population générale ; number of trials = nombre total de carnivores domestiques, de chats ou de chiens ; number of successes = nombre de mâles respectivement pour la population totale et pour chaque sous-population). Nous avons obtenu : - p = 0,14 (> 0,05) pour la population totale, - p = 0,11 (> 0,05) pour la sous-population féline, - et enfin, p = 0,5 (> 0,05) pour la sous-population canine. Nous obtenons un p > 0,05 pour les trois « groupes d’animaux ». La supériorité numérique des mâles dans notre étude pourrait donc être due au hasard. 76 Âge au diagnostic de TOF L’âge au diagnostic était disponible pour tous les carnivores domestiques inclus dans l’étude. L’ensemble des résultats se trouve dans le Tableau 5. L’âge moyen au diagnostic (en mois) des carnivores domestiques de l’étude était de 11,9 ± 9,5 mois [min = 1,7 ; max = 54,0] avec une médiane à 7,0 mois. Les chiens (n = 15/31) ont néanmoins été diagnostiqués plus tôt que les chats (n = 16/31), avec un âge moyen au diagnostic de 7,9 ± 6,8 mois [min = 1,7 ; max = 49,4] et une médiane de 3,6 mois, contre un âge moyen au diagnostic de 15,7 ± 10,4 mois [min = 2,9 ; max = 54,0] et une médiane de 9,8 mois pour les chats. Tableau 5 - Âge au diagnostic (mois) des 31 animaux (16 chats, 15 chiens) atteints de tétralogie de Fallot n = nombre d’animaux Population de l’étude Chats Chiens Âge au diagnostic (mois) n Moyenne Écart-type Médiane Min Max 31 11,9 9,5 7,0 1,7 54,0 16 15,7 10,4 9,8 2,9 54,0 15 7,9 6,8 3,6 1,7 49,4 Poids au moment du diagnostic de TOF Le poids au moment du diagnostic de TOF était disponible pour 23/31 (74,2 %) carnivores domestiques dont 9/16 (56,3 %) chats et 14/15 (93,3 %) chiens. L’ensemble des résultats est présenté dans le Tableau 6. Le poids moyen des chiens de l’étude (kg) était de 5,3 ± 3,8 [min = 0,5 ; max =15,2] et le poids moyen des chats (kg) était de 3,3 ± 1,0 [min = 1,2 ; max = 5,2]. La TOF a été diagnostiquée avant la fin de la croissance de l’animal (12 mois) pour 23/31 (74,2 %) carnivores domestiques de l’étude dont 10/16 (62,5 %) chats et 13/15 (86,7 %) chiens. Notons que certains carnivores domestiques inclus dans l’étude présentaient un retard de croissance. Cela a été décrit pour 6/31 (19,4 %) carnivores domestiques recrutés dont 3/16 (18,8 %) chats et 3/15 chiens (20,0 %). Tableau 6 - Poids au moment du diagnostic (kg) de 23 animaux (9 chats, 14 chiens) atteints de tétralogie de Fallot n = nombre d’animaux Poids (kg) n Moyenne Écart-type Médiane Min Max Population de 23 4,5 2,8 3,2 0,5 15,2 l’étude Chats 9 3,3 1,0 3,2 1,2 5,2 Chiens 14 5,3 3,8 77 3,0 0,5 15,2 3.2. Examen clinique au moment du diagnostic de TOF Symptômes fonctionnels Au moment du diagnostic de TOF, 3/31 (9,7 %) animaux dont 1/16 (6,3 %) chats et 2/15 (13,3 %) chiens étaient asymptomatiques, c’est-à-dire, ne présentaient aucun symptôme fonctionnel à relier avec la cardiopathie. Les symptômes fonctionnels détectés chez les 28/31 (90,3 %) carnivores domestiques restants sont répertoriés dans le Tableau 7. Par ailleurs, 2/16 (12,5 %) chats et 1/15 (6,67 %) chiens ont développé une cyanose durant le suivi qui était absente lors du diagnostic de TOF. Tableau 7 - Symptômes fonctionnels présents lors du diagnostic de tétralogie de Fallot des 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude n = nombre d’animaux 78 Auscultation cardiaque Les caractéristiques auscultatoires des animaux de l’étude au moment du diagnostic de TOF étaient disponibles pour 27/31 (87,1 %) carnivores domestiques dont 15/16 (93,8 %) chats et 12/15 (80 %) chiens. Ces caractéristiques sont répertoriées dans le Tableau 8. En résumé, le souffle cardiaque le plus souvent retrouvé, aussi bien chez les chats que chez les chiens atteints de TOF, était le souffle systolique basal gauche (sans autre souffle associé). Il concernait 8/16 chats (50,0 %) et 7/15 chiens (46,7 %). Deux sur 31 (6,5 %) carnivores domestiques dont 1/16 (6,3 %) chats et 1/15 (6,7 %) chiens ne présentaient pas de souffle audible à l’auscultation au moment du diagnostic de TOF. Seuls 2/16 (12,5 %) chats présentaient deux souffles distincts lors du diagnostic : - le premier avait un souffle systolique médiothoracique droit et gauche de grade 5/6 ainsi qu’une composante basale de grade 5/6, - le second présentait un souffle systolique médiothoracique droit et gauche de grade 4/6 et un souffle diastolique médiothoracique droit et gauche de grade 2/6. Tableau 8 - Caractéristiques du ou des souffle(s) cardiaque(s) présent(s) au moment du diagnostic de tétralogie de Fallot des 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude n = nombre d’animaux - ND : non disponible - Les valeurs entre parenthèses correspondent aux pourcentages. Caractéristiques du souffle au moment du diagnostic Moment d’apparition du souffle Localisation du souffle Hémithorax droit ou gauche Intensité du souffle Systolique Diastolique Non décrit Souffle absent Médiothoracique Basal Médiothoracique avec composante basale Apexien Sternal Non décrit Droit Gauche Droit et gauche Non décrit Grade 2 Grade 3 Grade 4 Grade 5 Grade 6 Non décrite Population totale de l’étude (n = 31) 25/31 (80,6 %) 1/31 (3,2 %) 4/31 (12,9 %) 2/31 (6,5 %) 3/31 (9,7 %) 19/31 (61,3 %) 1/31 (3,2 %) Chats (n = 16) Chiens (n = 15) 14/16 (87,5 %) 1/16 (6,3 %) 1/16 (6,3 %) 1/16 (6,3 %) 2/16 (12,5 %) 9/16 (56,3 %) 1/16 (6,3 %) 11/15 (73,3 %) 0/15 (0 %) 3/15 (20,0 %) 1/15 (6,7 %) 1/15 (6,7 %) 10/15 (66,7 %) 0/15 (0 %) 1/31 (3,2 %) 1/31 (3,2 %) 4/31 (12,9 %) 1/31 (3,2 %) 17/31 (54,8 %) 7/31 (22,6 %) 4/31 (12,9 %) 2/31 (6,5 %) 4/31 (12,9 %) 15/31 (48,4 %) 4/31 (12,9 %) 1/31 (3,2 %) 4/31 (12,9 %) 1/16 (6,3 %) 1/16 (6,3 %) 1/16 (6,3 %) 1/16 (6,3 %) 10/16 (62,5 %) 3/16 (18,8 %) 1/16 (6,3 %) 1/16 (6,3 %) 1/16 (6,3 %) 9/16 (56,3 %) 3/16 (18,8 %) 1/16 (6,3 %) 1/16 (6,3 %) 0/15 (0 %) 0/15 (0 %) 3/15 (20,0 %) 0/15 (0 %) 7/15 (46,7 %) 4/15 (26,7 %) 3/15 (20,0 %) 1/15 (6,7 %) 3/15 (20,0 %) 6/15 (40,0 %) 1/15 (6,7 %) 0/15 (0 %) 3/15 (20,0 %) 79 3.3. Examens complémentaires 3.3.1. Radiographie thoracique L’ensemble des radiographies thoraciques réalisées chez les carnivores domestiques de l’étude dont la TOF a été diagnostiquée à l’UCA ont été relues par le Docteur Pascaline Pey, diplômée de l’« European College of Veterinary Diagnostic Imaging » (ECVDI). Une radiographie thoracique a été réalisée chez 5/31 (16 %) animaux de l’étude (4/5 à l’UCA) dont 2/16 (13 %) chats et 3/15 chiens (20 %). Une cardiomégalie globale était présente chez 3/5 (60 %) d’entre eux dont 2/2 chats (100 %) et 1/3 chien (33 %). Une cardiomégalie droite était présente chez l’ensemble des animaux de l’étude. La dextroposition de l’aorte a été mise en évidence chez 1/5 animal (1/3 chien, 33 %). Une dilatation post-sténotique a été retrouvée chez 2/5 animaux (2/3 chiens, 67 %). L’hypoperfusion de l’ensemble du champ pulmonaire était présente chez 3/5 carnivores domestiques dont 1/2 chat (50 %) et 2/3 (67 %) chiens. Enfin, une circulation bronchique accrue a été mise en évidence chez 1/5 animal (1/2 chat, 50 %). Voici trois interprétations de radiographies thoraciques (face, profil) d’un chat et de deux chiens de l’étude (Figure 31a et b, Figure 32a et b) : 80 Figure 31 (a et b) - Radiographies thoraciques de face (a) et de profil (b) d’un Chihuahua de 6,2 mois atteint de tétralogie de Fallot diagnostiqué à l’Unité de Cardiologie d’Alfort * a Source : Service d’Imagerie de l’ENVA b Source : Service d’Imagerie de l’ENVA Les principales anomalies observées sont les suivantes : présence d’une hypertrophie du ventricule droit (augmentation du contact cœur/sternum indiquée par la flèche rose sur la vue de profil, silhouette cardiaque en « D inversé » délimitée en pointillés verts et apex du cœur déplacé vers la gauche* sur la vue dorso-ventrale) et d’une hypoperfusion pulmonaire. 81 Figure 32 (a et b) - Radiographies thoraciques de face (a) et de profil (b) d’un chat européen de 7,0 mois atteint de tétralogie de Fallot diagnostiqué à l’Unité de Cardiologie d’Alfort D * Source : Service d’Imagerie de l’ENVA S L b Source : Service d’Imagerie de l’ENVA Les principales anomalies observées sont les suivantes : présence d’une cardiomégalie globale (Vertebral Heart Score = Long Axis Line (L) + Short Axis Line (S) = 8,6 > 8), d’une hypertrophie du ventricule droit (augmentation du contact cœur/sternum indiquée par la flèche rose sur la vue de profil, apex du cœur déplacé vers la gauche* sur la vue dorso-ventrale) et d’une vascularisation pulmonaire réduite mais compensée par une circulation bronchique accrue. 82 3.3.2. Examen électrocardiographique Les caractéristiques électrocardiographiques observées lors du diagnostic étaient disponibles pour 13/31 (41,9 %) animaux de l’étude dont 6/16 (37,5 %) chats et 7/15 (46,7 %) chiens. L’ensemble des ECG des chats inclus dans l’étude ont mis en évidence un rythme sinusal, sans anomalie associée. Les caractéristiques de l’ECG des 7 chiens étaient les suivantes : - rythme sinusal avec une déviation axiale droite associée chez 3/7 chiens (43 %), - tachycardie sinusale chez 2/7 chiens (29 %), - rythme sinusal avec néanmoins quelques ESV droites bigéminées chez 1/7 chien (14 %), - rythme sinusal sans anomalie associée chez 1/7 chien (14 %). 3.3.3. Examens échocardiographique et Doppler Le rapport PVDs/PLVGs Le rapport PVDs/PLVGs a pu être calculé pour 17/31 (54,8 %) carnivores domestiques de l’étude dont 8/16 (50 %) chats et 9/15 (60 %) chiens. L’ensemble des résultats est présenté dans le Tableau 9. Pour être dans les valeurs usuelles, le rapport PVDs/PLVGs doit être compris entre 0,11 et 0,81 chez le chat (Chetboul et al., 2006) et proche de 0,33 chez le chien (aucune publication établissant un intervalle de référence n’est disponible dans la littérature). Les 17 animaux inclus présentaient tous une hypertrophie importante du ventricule droit, avec une paroi ventriculaire droite en moyenne 1,5 fois plus épaisse que celle du gauche. La Figure 33 illustre une hypertrophie majeure du ventricule droit chez une chienne de l’étude diagnostiquée à 5,6 mois. Chez cette chienne de race Boxer, la paroi libre du ventricule droit (PVDs) était 1,8 fois plus épaisse que la paroi libre du ventricule gauche (PLVGs). Tableau 9 - Valeurs du rapport de l’épaisseur de la paroi libre du ventricule droit (PVDs) sur l’épaisseur de la paroi libre du ventricule gauche (PLVGs) chez 17 animaux (8 chats et 9 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude n = nombre d’animaux - ND : non disponible PVDs/PLVGs n 1,4 0,2 1,4 0,9 1,9 Intervalles de référence / 1,4 1,5 0,3 0,2 1,4 1,3 0,9 1,3 1,9 1,9 0,11 - 0,81* ND Moyenne Écart-type Médiane Min Max Population 17 de l’étude Chats 8 Chiens 9 *Chetboul et al., 2006 83 Figure 33 - Coupe petit axe transventriculaire en mode Temps-Mouvement, obtenue par voie parasternale droite chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Noter l’hypertrophie importante du ventricule droit (PVDs/PLVGs = 1,76). Source : Unité de Cardiologie d’Alfort (PVDs) : paroi du ventricule droit en systole (PLVGd) : paroi libre du ventricule gauche en diastole (PLVGs) : paroi libre du ventricule gauche en systole (SIVd) : septum interventriculaire en diastole (SIVs) : septum interventriculaire en systole (VDd) : diamètre interne du ventricule droit en diastole (VGd) : diamètre interne du ventricule gauche en diastole (VGs) : diamètre interne du ventricule gauche en systole 84 La fraction de raccourcissement (FR) La fraction de raccourcissement a été obtenue pour 27/31 (87,1 %) animaux de l’étude dont 13/16 (81,3 %) chats et 14/15 (93,3 %) chiens. Les résultats sont présentés dans le Tableau 10. Pour être dans les valeurs usuelles, la fraction de raccourcissement doit être comprise entre 35 et 63 % chez le chat (Chetboul et al., 2006) et entre 30,1 et 49,0 % chez le chien (Chetboul et al., 2005(a)). Tableau 10 - Valeurs de la fraction de raccourcissement (FR, %) chez 27 animaux (13 chats et 14 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude n = nombre d’animaux FR (%) n Moyenne Écart-type Médiane Min Max Population de l’étude Chats 27 44,9 8,9 45,9 16,1 66,7 Intervalles de référence / 13 42,5 10,3 45,0 19,0 66,7 35 - 63* Chiens 14 47,3 8,0 48,0 16,1 65,2 30,1 - 49,0** *Chetboul et al., 2006 **Chetboul et al., 2005(a) Localisation de la sténose pulmonaire La localisation de la sténose pulmonaire était disponible pour 25/31 (80,6 %) des carnivores domestiques de l’étude dont 12/16 (75,0 %) chats et 13/15 (86,7 %) chiens. Les résultats sont présentés dans la Figure 34. La sténose sous-valvulaire était la plus représentée dans la population étudiée et en particulier chez les chats inclus dans l’étude. En effet, elle concernait 9/25 (36,0 %) animaux dont 7/12 chats (58,3 %) et 2/13 chiens (15,4 %). La sténose la plus fréquente chez les chiens inclus dans l’étude était une sténose « mixte » (associant au moins deux obstacles) avec composantes sous-valvulaire, valvulaire et supra-valvulaire. Elle a été objectivée chez 4/13 (30,8 %) chiens mais chez aucun des chats inclus dans l’étude. La sténose « mixte » avec composantes sous-valvulaire et valvulaire était le deuxième type de sténose le plus fréquemment observé chez les chiens de l’étude. Il a été retrouvé chez 3/13 (23,1 %) chiens et chez seulement 1/12 chat (8,3 %). 85 Figure 34 - Localisation de la sténose pulmonaire chez 25 animaux (12 chats et 13 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude ND : non disponible Hypoplasie du tronc pulmonaire L’information concernant l’existence ou l’absence d’hypoplasie de l’artère pulmonaire était disponible pour 27/31 (87,1 %) des carnivores domestiques de l’étude dont 13/16 (81,3 %) chats et 14/15 (93,3 %) chiens. Les résultats sont présentés dans la Figure 35. Dix sur 27 (37,0 %) animaux de l’étude présentaient une hypoplasie du tronc pulmonaire dont 5/13 chats (38,5 %) et 5/14 (35,7 %) chiens. 86 Figure 35 - Morphologie du tronc pulmonaire chez 27 animaux (13 chats et 14 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude O : présence d’une hypoplasie du tronc pulmonaire - N : absence d’hypoplasie du tronc pulmonaire - ND : non disponible. L’hypoplasie du tronc pulmonaire a pu être objectivée grâce au rapport TP/Ao qui présente un avantage majeur par rapport au diamètre du tronc pulmonaire seul : il ne dépend pas du format de l’animal considéré. Le rapport TP/Ao a pu être obtenu pour 14/31 (45,2 %) des carnivores domestiques de l’étude dont 9/16 (56,3 %) chats et 5/15 (33,3 %) chiens. Les résultats sont présentés dans le Tableau 11. Pour être dans les valeurs usuelles, le rapport TP/Ao doit être proche de 1 chez le chat (aucune publication établissant un intervalle de référence n’est disponible dans la littérature) et entre 0,87 et 1,19 chez le chien (Serres et al., 2007). Tableau 11 - Valeurs du rapport du diamètre du tronc pulmonaire sur le diamètre de l’aorte (TP/Ao) chez 14 animaux (9 chats et 5 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude n = nombre d’animaux - ND : non disponible. TP/Ao Écart-type Médiane n Moyenne Min Max 0,79 0,31 1,40 Intervalles de référence / Population de l’étude Chats 14 0,83 0,27 9 0,86 0,22 0,79 0,50 1,40 ND Chiens 5 0,77 0,34 0,62 0,31 1,22 0,87 - 1,19* *Serres et al., 2007 87 Le flux transpulmonaire La vitesse maximale du flux transpulmonaire et donc le gradient de pression trans-sténotique étaient disponibles pour 22/31 (71,0 %) animaux de l’étude dont 10/16 (62,5 %) chats et 12/15 (80,0 %) chiens. Les résultats sont présentés dans le Tableau 12. Tous les animaux étant atteints de sténose pulmonaire, le gradient de pression ventricule droit - tronc pulmonaire était augmenté pour tous les animaux de l’étude. Cinq classes de sténose pulmonaire de degré de gravité croissant ont ainsi été établies sur la base des valeurs de gradients de pression mesurées (Chenebaux, 2012) : - Grade 1 : gradient de pression < 80 mmHg (4/10 (40,0 %) chats, 5/12 (41,7 %) chiens), - Grade 2 : 80 mmHg ≤ gradient de pression < 120 mmHg (1/10 (10,0 %) chat, 1/12 (8,3 %) chien), - Grade 3 : 120 ≤ gradient de pression < 160 mmHg (4/10 (40,0 %) chats, 5/12 (41,7 %) chiens), - Grade 4 : 160 ≤ gradient de pression < 200 mmHg (1/10 (10,0 %) chat), - Grade 5 : gradient de pression ≥ 200 mmHg (1/12 (8,3 %) chien). La Figure 36 illustre un flux pulmonaire de vitesse très augmentée chez un chat européen mâle de 9 mois inclus dans l’étude. Tableau 12 - Valeur maximale du flux pulmonaire (Vmax) et du gradient de pression transsténotique (ΔP) mesurée chez 22 carnivores domestiques (10 chats, 12 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude n = nombre d’animaux Vmax (m.s-1) ΔP (mmHg) n Moyenne Écart-type Médiane Min Max Intervalles de référence Population de l’étude Chats 22 5,0 1,2 5,2 2,6 8,0 / 10 4,8 1,1 5,2 2,6 6,5 0,5 - 1,3* Chiens 12 5,1 1,2 5,1 3,1 8,0 0,50 - 1,50** Population de l’étude Chats 22 105,3 45,8 108,5 26,0 255,4 / 10 97,2 40,8 108,5 26,0 169,0 1,0 - 6,8* Chiens 12 112,0 50,0 105,6 38,7 255,4 1,0 - 9,0** *Chetboul et al., 2006 **Chetboul et al., 2005(a) 88 Figure 36 - Mode Doppler continu réalisé à partir d’une coupe petit axe transaortique obtenue par voie parasternale droite chez un chat européen mâle de 9 mois atteint de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude La vitesse maximale du flux trans-sténotique est de 5,1 m.s-1, soit 4,6 fois plus importante que la vitesse maximale chez un chat sain et le gradient de 104 mmHg soit 21,7 fois plus élevé que le gradient maximal chez un chat sain (Chetboul et al., 2006). Vmax = 5,1 m.s-1 (G = 104 mmHg) Source : Unité de Cardiologie d’Alfort La taille de la communication interventriculaire (CIV) et le rapport CIV/Ao Le diamètre de la CIV était connu pour 26/31 (83,9 %) animaux de l’étude dont 14/16 (87,5 %) chats et 12/15 (80,0 %) chiens. Les valeurs sont présentées dans le Tableau 13. Tableau 13 - Diamètre de la communication interventriculaire (CIV) chez 26 animaux (14 chats et 12 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude n = nombre d’animaux Population de l’étude Chats Chiens n 26 CIV (mm) Moyenne Écart-type 6,8 2,4 Médiane 6,1 Min 1,7 Max 15,0 14 6,1 2,1 5,4 1,7 15,0 12 7,7 2,2 7,7 3,7 11,4 89 Le rapport CIV/Ao, présenté dans le Tableau 14, a pu être calculé pour 24/31 (77,4 %) des animaux de l’étude dont 14/16 (87,5 %) chats et 10/15 (66,7 %) chiens. Ce rapport présente un intérêt majeura: il varie moins suivant la taille de l’animal que le diamètre seul de la CIV (Bomassi et al., 2014, article sous presse). Ainsi, il est préférable de l’utiliser pour comparer l’importance de la CIV au sein de notre population. Tableau 14 - Valeurs du rapport du diamètre de la communication interventriculaire (CIV) sur le diamètre de l’aorte (Ao) chez 24 animaux (14 chats et 10 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude n = nombre d’animaux Population de l’étude Chats Chiens CIV/Ao n Moyenne Écart-type Médiane Min Max 24 0,61 0,18 0,59 0,18 1,15 14 0,58 0,17 0,59 0,18 1,15 10 0,64 0,19 0,60 0,35 1,02 Le sens du shunt Le sens du shunt interventriculaire lors du diagnostic de TOF était disponible pour 28/31 (90,3 %) animaux de l’étude dont 14/16 (87,5 %) chats et 14/15 (93,3 %) chiens. Les résultats sont présentés dans la Figure 37. Le shunt bidirectionnel était le plus souvent retrouvé, mis en évidence chez 13/28 (46,4 %) animaux de l’étude dont 8/14 (57,1 %) chats et 5/14 (35,7 %) chiens. Le shunt gauchedroite était le deuxième le plus représenté, visualisé chez 8/28 (28,6 %) animaux de l’étude dont 4/14 (28,6 %) chats et 4/14 (28,6 %) chiens. Enfin, le shunt droite-gauche a été constaté chez 7/28 (25 %) animaux dont 2/14 (14,3 %) chats et 5/14 (35,7 %) chiens. La Figure 38 illustre un shunt droite-gauche chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de TOF et inclus dans l’étude. Figure 37 - Répartition du sens du shunt interventriculaire chez 28 animaux (14 chats et 14 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude DG : droite-gauche, GD : gauche-droite, BD : bidirectionnel - ND : non disponible. 90 Figure 38 - Coupe grand axe 5 cavités en mode Doppler couleur obtenue par voie parasternale droite chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude 1 : diamètre de la communication interventriculaire = 11,1 mm - AO : aorte - VD : ventricule droit - VG : ventricule gauche. Cette incidence confirme la présence d’une communication interventriculaire de diamètre important (11,1 mm). Le shunt est unidirectionnel et droite-gauche. Le flux interventiculaire a une vitesse maximale de 1,74 m.s-1. Le gradient de pression de part et d’autre de la communication interventriculaire n’est donc que de 12 mmHg seulement. Source : Unité de Cardiologie d’Alfort 3.4. Traitement Lors du diagnostic de TOF, 6/31 (19,4 %) animaux de l’étude dont 4/6 (66,7 %) chats et 2/6 (33,3 %) chiens recevaient déjà un traitement (instauré par le vétérinaire traitant). Trois chats recevaient du bénazépril (Fortekor®, Nelio ND®) respectivement à la dose de 0,19 mg/kg/jour (en association avec du furosémide à 0,78 mg/kg/jour), 0,31 mg/kg/jour et 0,48 mg/kg/jour par voie orale. Deux chiens étaient traités avec de l’aténolol (à 0,2 et 1,0 mg/kg/jour par voie orale). Enfin, un autre chat recevait du pimobendan (Vetmedin ND®) à la dose de 0,52 mg/kg/jour par voie orale. Chez un des trois chats, le traitement instauré par le vétérinaire traitement a été poursuivi à la même posologie suite au diagnostic échocardiographique établi par l’UCA (chat recevant une association de bénazépril et de furozémide). Tous les autres traitements ont été modifiés ou arrêtés. Le pimobendan (Vetmedin ND®) a été remplacé par de la spironolactone (Prilactone®) à la dose de 0,52 mg/kg/jour par voie orale. Chez un des chiens, l’aténolol a été remplacé par du clopidogrel (Plavix®) à 2,5 mg/kg/jour par voie orale car une hyperviscosité sanguine était fortement suspectée (forme grave de TOF avec un shunt droite-gauche à l’origine de symptômes fonctionnels invalidants). Chez un chien précédemment sans traitement, il a été conseillé de mettre en place du furosémide à petites doses. Pour un autre chat, le bénazépril (Fortekor®) a été prescrit à la même 91 posologie (0,31 mg/kg/jour par voie orale) et de l’acétylsalicylate de DL-lysine (Aspégic®) a été ajoutée à 2,5 mg/kg par voie orale deux fois par semaine. Enfin, la mise en place d’un traitement à base de spironolactone d’une part et de bénazépril à petite dose d’autre part ont été respectivement recommandés chez 2 chiens initialement sans traitement. Pour l’ensemble des carnivores domestiques de l’étude, une surveillance régulière de l’hématocrite et un contrôle échocardiographique dans 6 à 12 mois ont été recommandés. 3.5. Survie Sur les 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude, 2 ont été exclus de l’étude de survie globale de la population car ils présentaient d’autres anomalies associées non caractéristiques de la TOF. Le premier était un chien Bouledogue français atteint de sténose sous-aortique avec communication interatriale associée. Le second était un chat Persan chez qui la TOF était associée à une communication interatriale et à une sténose aortique sous-valvulaire. La courbe de survie globale (mort toutes causes confondues) obtenue à partir des 29 carnivores domestiques atteints de TOF isolée est présentée dans la Figure 39. Le graphique comparant les courbes de survie des 15 chats et des 14 chiens inclus dans l’étude de survie est présenté en Figure 40. La date de fin de suivi correspond, soit à la date du décès de l’animal, soit à la date à laquelle il a été perdu de vue (appelée censure). Cinq chiens sur 14 (35,7 %) étaient encore vivants à la fin du suivi. Ils étaient âgés de 1,7 à 43,5 mois. Pour 3 d’entre eux, la date de fin de suivi correspondait à la date du diagnostic (l’un d’entre eux a été diagnostiqué la veille de la fin de l’étude). Quatre chats sur 15 (26,7 %) étaient encore vivants à la fin du suivi et ils étaient âgés de 14,7 à 57,4 mois. Pour un seul d’entre eux, la date de fin de suivi correspondait à la date du diagnostic. Tous les chiens décédés pendant le suivi sont morts de leur cardiopathie (euthanasie, n = 2 ou mort spontanée, n = 7) entre 3,5 et 92,9 mois. En ce qui concerne les chats, 10/11 (90,9 %) sont morts de leur cardiopathie (euthanasie, n = 3 ou mort spontanée, n = 7) entre 6,2 et 83,5 mois et le 11ème est décédé d’une péritonite infectieuse féline (forme humide) à 65 mois. La médiane de survie était ainsi de 23,4 mois pour l’ensemble des animaux de l’étude inclus dans l’étude de survie, de 23,4 mois pour les chats et de 13,0 mois pour les chiens. En ce qui concerne les deux animaux exclus de l’étude de survie, le chat Persan est mort subitement à 12 mois de sa cardiopathie tandis que le Bouledogue français a été euthanasié à 75,4 mois suite à une décompensation cardiaque (ascite majeure, faiblesse extrême). 92 Figure 39 - Courbe de survie globale des 29 carnivores domestiques atteints de tétralogie de Fallot isolée inclus dans l’étude Âge (mois) Figure 40 - Comparaison des courbes de survie des 15 chats et des 14 chiens atteints de Survival Analysis tétralogie de Fallot isolée inclus dans l’étude 1,0 Chien Chiens Chats Chat Survival 0,8 0,6 0,4 Âge (mois) 0,2 93 0,0 0 20 40 60 Time 80 100 94 4. Discussion 4.1. Caractéristiques épidémiologiques, cliniques, échocardiographiques et Doppler La race canine la plus représentée dans l’étude était le Jack Russell terrier constituant 20 % des animaux atteints, suivie de près par les races Bichon, Border terrier, Bouledogue français et Chihuahua (13 % chacune). Enfin, un Bouledogue anglais, un Boxer, un Cane Corso et un Malamute ont aussi été inclus. Cette étude n’a donc pas permis de mettre en évidence une prédisposition de certaines races canines à la TOF contrairement aux données bibliographiques qui affirment que le Spitz Loup, le Caniche, le Schnauzer miniature, le Beagle, le Bouledogue anglais, le Border Collie, le Berger des Shetlands et certains terriers dont le Fox terrier sont des races prédisposées (Fox et al., 1999 ; Orton et al., 2001 ; Nelson, 2003 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008). Les chiens de petite taille (< 10 kg à l’âge adulte) représentaient 60 % de la population canine de l’étude. Ce résultat indique une prévalence plus élevée chez les petites races (Ettinger et Feldman, 2010). Néanmoins, l’effectif est insuffisant (n = 9/15) pour conclure à une prédisposition des chiens de petit format à la TOF (p > 0,05). Les chats de race européenne étaient les plus nombreux représentant 75 % des chats inclus dans l’étude. Quatre races félines étaient également représentées (chacune par un animal seulement) : Persan, Ragdoll, Siamois et Chartreux. Ces résultats semblent aussi confirmer l’absence de prédisposition de certaines races félines à la TOF (Fox et al., 1999 ; Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011). Parmi les 31 animaux atteints de TOF et inclus dans l’étude, 61 % étaient des mâles et 39 % étaient des femelles, avec 69 % de mâles et 31 % de femelles pour la sous-population féline et 53 % de mâles et 47 % de femelles pour la sous-population canine. Ces résultats évoquaient l’existence d’une prédisposition des mâles à la TOF notamment chez le chat (Ettinger et Feldman, 2010). Néanmoins, l’effectif était insuffisant pour affirmer ce résultat (p > 0,05). L’âge au diagnostic était de 11,9 ± 9,5 mois [1,7 ; 54,0] avec une médiane à 7,0 mois. Les chiens ont néanmoins été diagnostiqués plus tôt que les chats, avec un âge moyen au diagnostic de 7,9 ± 6,8 mois [1,7 ; 49,4] versus 15,7 ± 10,4 mois [2,9 ; 54,0] pour les chats. Il semblerait que le diagnostic de TOF soit plus précoce chez le chien. Nous pouvons donc émettre l’hypothèse que les chiens présentaient plus rapidement des symptômes fonctionnels que les chats, ayant ainsi motivé une visite chez le vétérinaire traitant. A notre connaissance, aucune donnée concernant l’âge au diagnostic de la TOF n’était disponible jusqu’à présent dans la littérature. Le poids des chiens inclus dans l’étude était de 5,3 ± 3,8 kg [0,5 ; 15,2] et de 3,3 ± 1,0 kg [1,2 ; 5,2] pour les chats. Néanmoins, la TOF a été diagnostiquée avant la fin de la croissance (12 mois) pour 74 % des carnivores domestiques de l’étude dont 63 % des chats et 87 % des chiens. Par conséquent, l’intérêt de cette donnée au moment du diagnostic est limité dans le cadre de la TOF. Au moment du diagnostic de TOF, 10 % des animaux (dont 6 % des chats et 13 % des chiens) étaient asymptomatiques, c’est-à-dire, ne présentaient aucun symptôme fonctionnel à relier avec la cardiopathie. Les symptômes fonctionnels détectés chez les chats étaient par ordre de fréquence décroissante : l’intolérance à l’effort (94 % des cas), la dyspnée (63 %), la cyanose (38 %), le retard de croissance (19 %), l’amaigrissement et la toux (13 %) et enfin, l’existence de syncope retrouvée chez 6 % des animaux. 95 Quant aux symptômes fonctionnels détectés chez les chiens, ils étaient les suivants, toujours par ordre de fréquence décroissante : l’intolérance à l’effort (87 % des cas), la cyanose (60 %), la dyspnée (53 %), l’existence de syncope (27 %), le retard de croissance et l’amaigrissement (20 %) et enfin, la toux retrouvée chez 7 % des animaux. Aucun symptôme fonctionnel ne semble donc « spécifique » d’une espèce. Néanmoins, l’existence de syncope était 4 fois plus fréquente chez le chien que chez le chat et la présence d’une cyanose était retrouvée 2 fois plus souvent chez le chien que chez le chat. Les symptômes fonctionnels retrouvés chez les animaux de l’étude sont tous rapportés dans la littérature. Certains symptômes fonctionnels décrits dans la bibliographie n’ont néanmoins pas été retrouvés dans notre étude tels que les convulsions, les tremblements et la perte de vision (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Le souffle cardiaque le plus souvent retrouvé, aussi bien chez les chats que chez les chiens inclus dans l’étude, était le souffle systolique basal gauche lié à la présence de la sténose pulmonaire. Il concernait 50 % des chats et 47 % des chiens. Pour 6 % des chats et 7 % des chiens, aucun souffle n’a été détecté à l’auscultation au moment du diagnostic de TOF. Dix-neuf pour cent des chats et 7 % des chiens présentaient un souffle systolique médiothoracique, soit droit et gauche (2 chats, 1 chien), soit uniquement gauche (1 chat). Ces résultats corroborent les données de la littérature (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Chanoit, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Enfin, il n’a pas été rapporté de crépitements à l’auscultation du champ pulmonaire pourtant décrits dans la littérature sans qu’ils ne soient à mettre en relation avec un œdème pulmonaire (Fox et al., 1999). A la radiographie thoracique, aucun animal de l’étude n’avait un cœur de taille réduite. Au contraire, 3 d’entre eux présentaient même une cardiomégalie globale. Ces résultats ne sont pas totalement en accord avec les données retrouvées dans la littérature qui rapportent un cœur de taille normale ou réduite à la radiographie (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Néanmoins, l’ensemble des animaux avait un ventricule droit élargi et un bord droit arrondi (« cœur en sabot »). La dilatation du tronc pulmonaire tout comme la dextroposition de l’aorte n’étaient pas toujours visibles. La vascularisation pulmonaire était parfois réduite et plus rarement compensée par une circulation bronchique accrue. Ces derniers résultats sont en accord avec les informations disponibles dans la littérature (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Seules 13 interprétations du tracé ECG étaient disponibles (6 chats, 7 chiens). Six chats et 1 chien ne présentaient pas d’anomalie à l’ECG. L’anomalie la plus souvent retrouvée (43 % des chiens) était la déviation axiale droite, évocatrice d’une hypertrophie du ventricule droit, ce qui est en accord avec la littérature (Tilley, 1992 ; Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Néanmoins, une tachycardie sinusale a également été observée (2 chiens) ainsi quelques ESV droites bigéminées (1 chien). La littérature rapportait également une arythmie dans de rares cas mais pas la présence d’une potentielle tachycardie sinusale (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Aucune déviation axiale gauche, qui peut exister chez les animaux atteints de TOF, en particulier chez les chats, n’a pu être observée chez les animaux inclus dans l’étude (Tilley, 1992 ; Fox et al., 1999 ; Ware, 2007). Une hypertrophie ventriculaire droite a été retrouvée au mode TM chez l’ensemble des animaux de l’étude, avec une paroi libre du ventricule droit en moyenne 1,5 fois plus épaisse que celle du 96 gauche. Cette hypertrophie du ventricule droit est consécutive à l’existence d’un gradient de pression trans-sténotique augmenté chez l’ensemble des animaux. L’ensemble des données bibliographiques évoquait une hypertrophie ventriculaire droite marquée sans toutefois comparer l’épaisseur de sa paroi libre à celle du ventricule gauche ou la mettre en relation avec le gradient trans-sténotique (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Boon, 2011 ; Chetboul et al., 2012). La fraction de raccourcissement, pour laquelle aucune donnée n’était disponible dans la littérature concernant les animaux atteints de TOF, était très variable selon les individus. Certains avaient une FR augmentée, d’autres diminuée ou normale. Quatre chats et 1 chien avaient une FR diminuée. La FR moyenne de la sous-population féline de l’étude restait dans les valeurs usuelles tandis que celle des chiens était supérieure de 7,6 points à la valeur usuelle maximale. Contrairement aux données bibliographiques, la sténose pulmonaire n’était pas uniquement sousvalvulaire et/ou valvulaire dans notre étude (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011). En effet, les types de sténose pulmonaire rencontrés chez les animaux étaient les suivants : - sténoses isolées (64 %) : sous-valvulaire (7 chats, 2 chiens), valvulaire (3 chats, 2 chiens), supravalvulaire (1 chat, 1 chien), - sténoses « mixtes » (36 %) : sous-valvulaire et valvulaire (1 chat, 3 chiens), valvulaire et supravalvulaire (1 chien) et enfin, sous-valvulaire, valvulaire et supra-valvulaire (4 chiens). Dans notre étude, une hypoplasie du tronc pulmonaire, objectivée par le rapport TP/Ao, a été mise en évidence chez 37 % des animaux dont 39 % des chats et 36 % des chiens. L’existence d’une hypoplasie potentielle du tronc pulmonaire était rapportée dans la littérature sans précision sur sa fréquence (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011, Chetboul et al., 2012). Le gradient transpulmonaire était augmenté chez l’ensemble des animaux de l’étude avec une moyenne de 105,3 mmHg confirmant ainsi le diagnostic de sténose pulmonaire. Il n’existait pas de différence significative entre les chats et les chiens inclus dans l’étude. De façon plus précise, 59 % des animaux inclus (6 chats, 7 chiens) présentaient un gradient de pression ≥ 80 mmHg, témoignant d’une sténose serrée à très serrée et au contraire, modérée (< 80 mmHg) pour 41 % d’entre eux. A l’instar des données bibliographiques disponibles, la CIV était unique et de grande taille chez l’ensemble des animaux inclus dans l’étude (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011). La taille moyenne de la CIV et le rapport CIV/Ao étaient respectivement de 6,8 mm et 0,61. Aucune différence significative n’a pu être mise en évidence concernant la taille de la CIV des chats et des chiens inclus dans l’étude. Les données bibliographiques évoquaient un shunt interventriculaire pouvant être droite-gauche, gauche-droite ou encore bidirectionnel sans toutefois donner plus d’informations (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Boon, 2011). Dans notre étude, le shunt interventriculaire était majoritairement bidirectionnel, mis en évidence chez 46 % des animaux de l’étude (57 % des chats et 36 % des chiens). Le shunt gauche-droite était le deuxième le plus représenté, visualisé chez 29 % des animaux de l’étude (29 % des chats et 29 % des chiens). Enfin, le shunt droite-gauche a été constaté chez 25 % des animaux (14 % des chats et 36 % des chiens). Des gradients de pression de plus de 80 mmHg étaient systématiquement associés à un shunt droitegauche ou bidirectionnel à l’exception d’un cas, ce qui corrobore les données bibliographiques (Boon, 2011). Des gradients de pression inférieurs à 100 mmHg pouvaient néanmoins être associés à 97 un shunt droite-gauche, gauche-droite ou bidirectionnel. Aucune prise en charge thérapeutique « type » des patients atteints de TOF ne peut être définie. Il faut l’adapter au cas par cas en fonction de nombreux paramètres tels que l’hématocrite, les caractéristiques anatomiques et échographiques de sa TOF et les symptômes fonctionnels présents. Malgré l’intérêt potentiel des béta-bloquants évoqué dans la littérature, aucun animal inclus de l’étude n’en a bénéficié (Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008). Quant à la gestion de la polyglobulie secondaire à l’hypoxie chronique, seul un animal (Bouledogue français) inclus dans l’étude a subi des saignées régulières car son hématocrite atteignait périodiquement 85 %. Aucun carnivore domestique n’a reçu de l’hydroxyurée. 4.2. Étude de survie Notre étude illustre le fait que la TOF est une cardiopathie congénitale mal tolérée sur le court à moyen terme. Sur les 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude, après exclusion de 2 animaux atteints de TOF associée à d’autres anomalies cardiovasculaires, seuls 36 % des chiens et 27 % des chats étaient encore en vie à la fin du suivi, âgés respectivement de 1,7 à 43,5 mois et 14,7 à 57,4 mois. Tous les chiens décédés pendant le suivi sont morts suite à leur cardiopathie (euthanasie, n = 2 ou mort spontanée, n = 7) entre 3,5 et 92,9 mois. En ce qui concerne les chats, 91 % sont morts suite à leur cardiopathie (euthanasie, n = 3 ou mort spontanée, n = 7) entre 6,2 et 83,5 mois. Les taux de mortalité global et d’origine cardiaque étaient respectivement de 69 % et 66 % pour les animaux inclus dans l’étude dont le suivi était disponible. La médiane de survie était ainsi de 23,4 mois pour l’ensemble des animaux inclus dans l’étude de survie, de 23,4 mois pour les chats et de 13,0 mois pour les chiens. Les chats semblaient donc mieux tolérer cette cardiopathie, leur médiane de survie étant presque deux fois supérieure à celle des chiens. Cela va donc dans le sens de l’observation faite précédemment concernant l’âge des animaux au moment du diagnostic. Nous n’avons pas pu établir de facteurs pronostiques statistiquement significatifs en raison du petit nombre d’animaux recrutés. Toutefois, il semblerait qu’une sténose pulmonaire importante et un shunt droite-gauche soient des facteurs pronostiques négatifs qui majorent les risques de mort subite ou de décompensation cardiaque motivant une euthanasie. Cela corrobore les données de la littérature (Ware, 2007 ; Orton, 2008 ; Chetboul et al., 2012). Malheureusement, les valeurs de l’hématocrite des animaux de l’étude étaient rarement disponibles. Ainsi, nous n’avons pas pu vérifier qu’il s’agissait d’un facteur pronostique négatif, comme évoqué par certains auteurs (Ware, 2007). Aucun animal inclus dans l’étude n’a subi à ce jour d’intervention chirurgicale. Nous ne pouvons donc apporter aucune information sur la survie des carnivores domestiques atteints de TOF suite à un traitement chirurgical palliatif ou à une correction chirurgicale totale. 98 4.3. Limites de l’étude Les biais de cette étude rétrospective sont les suivants : - sélection des animaux de l’étude a posteriori ce qui peut nuire à la représentativité de la population étudiée, - sélection des individus parmi les patients de l’UCA et du CHV des Cordeliers qui sont deux centres de référés en cardiologie, ce qui fausse également la représentativité de l’échantillon, - absence de groupe témoin, - absence de suivi pour 4 individus (la date de fin de suivi correspond alors à la date du diagnostic), - subjectivité et imprécisions des réponses données par les propriétaires (notamment aux questions sur la cause de la mort, les signes cliniques, l’observance du traitement et des suivis de l’hématocrite), - indisponibilité de certaines données, en particulier de certains paramètres échocardiographiques et biochimiques (dont l’hématocrite lorsqu’il est effectué chez le vétérinaire traitant) ; - traitements instaurés très divers : certains chiens n’ont pas été traités, d’autres l’ont été avec différentes molécules, à des posologies adaptées au cas par cas, - inclusion dans l’étude de deux animaux (exclus uniquement de la survie) qui présentaient d’autres anomalies associées non caractéristiques de la TOF. Malgré toutes les limites qui viennent d’être évoquées, inhérentes à la rareté de cette cardiopathie et au caractère rétrospectif de ce travail, cette étude est la première à notre connaissance spécifiquement dédiée à la TOF qui comprend autant d’animaux. Le choix de l’étude rétrospective nous a été imposé par la rareté de cette cardiopathie congénitale. En effet, cela nous a permis de réunir 31 carnivores domestiques atteints de TOF sur ces 11 dernières années sur deux centres de référés de la région parisienne. A notre connaissance toujours, l’étude spécifiquement dédiée à la TOF comprenant le plus grand nombre de cas est celle de Brockman et al., incluant 6 chiens âgés de 5 mois à 5 ans qui ont subi une anastomose de Blalock-Taussig modifiée faisant appel à une prothèse extensive en téflon ou à un segment d’artère carotide. Cette étude avait pour seul objectif de suivre l’évolution postopératoire à long terme de ces 6 animaux (Brockman et al., 2007). Quant à l’étude de Patterson et al., qui concernait un plus grand nombre d’individus (149 chiens issus de différents mariages dont 22 chiens atteints de TOF), elle ne donnait aucune description des caractéristiques épidémiologiques, cliniques, échocardiographique et Doppler. En effet, elle avait pour unique objectif de préciser les aspects embryologique et génétique de la cardiopathie (Patterson et al., 1993). 99 100 CONCLUSION La TOF, cardiopathie cyanogène la plus fréquente chez l’Homme et chez les carnivores domestiques, reste encore peu étudiée en médecine vétérinaire. Tandis qu’à l’heure actuelle, cette cardiopathie fait l’objet d’une correction chirurgicale systématique, précoce et bien maîtrisée en médecine humaine, le recours à la correction chirurgicale demeure rarissime et risqué en médecine vétérinaire. Malgré les limites principalement liées à son caractère rétrospectif, ce travail est, à notre connaissance, le premier à étudier spécifiquement les caractéristiques épidémiologiques, cliniques, échographiques et Doppler de cette cardiopathie congénitale chez un nombre aussi important de carnivores domestiques. En effet, cette étude portant sur 31 cas de TOF diagnostiqués et suivis entre avril 2003 et juin 2014 dans deux centres de référés en cardiologie a permis, d’une part, de confirmer et de préciser des données bibliographiques déduites de cas ponctuels, et d’autre part, d’apporter des informations nouvelles sur cette cardiopathie. A l’instar des précédentes publications, le pourcentage de mâles atteints de TOF dans la présente étude était supérieur à celui des femelles, à la fois dans la population globale (61 % versus 39 %, respectivement) mais aussi chez le chat. En revanche, cette tendance n’a pas été identifiée ici chez le chien. De plus, les chiens de petit format étaient les plus nombreux, représentant 60 % de la population canine. Les symptômes fonctionnels retrouvés étaient concordants avec ceux classiquement décrits dans la littérature. Néanmoins, de manière intéressante et sans explication rationnelle, ces derniers étaient plus précoces et plus invalidants chez le chien que chez le chat. Un souffle systolique basal gauche lié à la présence de la sténose pulmonaire était retrouvé dans la moitié des cas, aussi bien dans l’espèce féline que dans l’espèce canine, soulignant ainsi l’intérêt de l’auscultation cardiaque dans la démarche diagnostique de cette cardiopathie congénitale. Concernant les résultats de l’examen écho-Doppler, chez plus de la moitié des animaux atteints de TOF (59 % des cas), la sténose pulmonaire était importante, caractérisée par un gradient de pression trans-sténotique ≥ 80 mmHg et une inversion partielle ou totale du shunt à travers la CIV toujours unique et large, a été systématiquement observée (à l’exception d’un cas). Ces sténoses pulmonaires, pour la plupart serrées, avaient ainsi pour conséquence une hypertrophie de la paroi ventriculaire droite, modérée à très importante (épaisseur en moyenne 1,5 fois supérieure à celle de la paroi libre du ventricule gauche), présente chez tous les animaux de l’étude. Néanmoins, à l’ECG, une déviation axiale droite, pourtant caractéristique d’une hypertrophie ventriculaire droite, était identifiée chez seulement 43 % d’entre eux. La localisation de l’obstacle sténotique était plus variée que celle décrite dans la littérature avec 64 % des sténoses isolées (sous-valvulaire prédominante, mais aussi valvulaire et supra-valvulaire) et 36 % de sténoses combinant au minimum 2 obstacles. L’inversion de shunt, principalement à l’origine des symptômes fonctionnels et des complications observés, a été détectée chez près des trois quarts des animaux inclus, expliquant une survie limitée à court et moyen terme, illustrée pour la première fois par cette étude. En effet, la médiane de survie n’était que de 23,4 mois seulement dans la population générale et elle était presque divisée par deux chez le chien (13 mois), à mettre en relation avec l’apparition plus précoce de symptômes fonctionnels par comparaison à la sous-population féline. Les progrès qui restent à réaliser concernant la TOF chez les carnivores domestiques sont essentiellement relatifs à sa correction chirurgicale. Il conviendrait ainsi de déterminer la technique optimale de correction (palliative ou curative) et de préciser quelles en seraient les indications selon l’espèce considérée. 101 102 BIBLIOGRAPHIE 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. 18. ALLAN L. Congenital heart disease. Antenatal diagnosis of heart disease. Heart, 2000, 83, 367-370. ALLAN LD, SHARLAND GK, MILBURN A, LOCKHART SM, GROVES AM, ANDERSON RH et al. Prospective diagnosis of 1,006 consecutive cases of congenital heart disease in the fetus. J. Am. Coll. Cardiol., 1994, 23, 1452-1458. APITZ C, WEBB GD, REDINGTON AN. Tetralogy of Fallot. Lancet, 2009, 374, 14621471. BAILLE Y. Arthur Fallot (1850-1911) et la maladie bleue. In: Histoire des sciences médicales, Tome XLV, n°1, 2011, 81-84. BAJOLLE F. Prise en charge périnatale d’une cardiopathie congénitale diagnostiquée in utero. DU Médecine périnatale, 11-12 [en ligne]. Mise à jour 01/05/2012. [http://carpedem.fr/] (Consulté le 12/12/13). BARRON DJ. Tetralogy of Fallot: Controversies in Early Management. World Journal for Pediatric and Congenital Heart Surgery, 2013, 4(2), 186-191. BECKER A, ANDERSON R. Pathology of congenital heart disease. Butterworths, London, 1981, 498 p. BEHR L, CHETBOUL V, CARLOS SAMPREDRANO C, GOUNI V, POUCHELON J-L, LABORDE F et al. Beating Heart Mitral Valve Replacement with a Bovine Pericardial Bioprosthesis for Treatment of Mitral Valve Dysplasia in a Bull Terrier. Vet. Surg., 2007, 36, 190-198. BOMASSI E, MISBACH C, TISSIER R, GOUNI V, TREHIOU SECHI E, PETIT A, DESMYTER A, DAMOISEAUX C, POUCHELON J-L, CHETBOUL V. Epidemiological and clinical features, echocardiographic data, and survival of dogs and cats with ventricular septal defect: a retrospective study of 109 cases (1992-2013). J. Am. Vet. Med. Assoc. Sous presse. BONOW RO, MANN DL, ZIPES DP et al. Braunwald's Heart Disease. 9th ed. SaundersElsevier, Philadelphia, 2012, 2048 p. BOON JA. Veterinary echocardiography. 2nd ed. Wiley-Blackwell, Oxford, 2011, 632 p. BORENSTEIN N, BEHR L. Les traitements du futur : cardiologie interventionnelle et chirurgie cardiaque. Cardiologie & pneumologie. Pratique Vet’, 2009, 44, 671-674. BORENSTEIN N, DANIEL P, BEHR L, POUCHELON J-L, CARBOGNANI D, PIERREL A et al. Successful Surgical Treatment of Mitral Valve Stenosis in a Dog. Vet. Surg., 2004, 33, 138-145. BOSSERT T, GUMMERT J, HUBALD R, KOSTELKA M, MOHR F-W, WALTHER T. Orphanet. Tetralogy of Fallot [en ligne]. Mise à jour le 01/01/09. [http://www.orpha.net/] (Consulté le 28/10/13). BRANT WE, HELMS CA. Fundamentals of Diagnostic Radiology. 3rd ed. Lippincott Williams & Wilkins, Philadelphia, 2007, 1584 p. BROCKMAN DJ, HOLT DE, GAYNOR JW, THEMAN TE. Long-term palliation of tetralogy of Fallot in dogs by use of modified Blalock-Taussig shunt. J. Am. Vet. Med. Assoc., 2007, 231(5), 721-726. BUCHANAN JW. Prevalence of Cardiovascular Disorders. In: Fox PR, Sisson DD, Moïse NS. Textbook of Canine and Feline Cardiology: Principles and Clinical Practice. WB Saunders, Philadelphia, 1999, 457-461. CARVALHO JS, MAVRIDES E, SHINEBOURNE EA, CAMPBELL S, THILAGANATHAN B. Improving the effectiveness of routine prenatal screening for major 103 19. 20. 21. 22. 23. 24. 25. 26. 27. 28. 29. 30. 31. 32. 33. 34. 35. 36. congenital heart defects. Heart, 2002, 88, 387-391. CHANOIT G. Chirurgie cardiaque chez le chien : bons résultats du traitement palliatif de la tétralogie de Fallot. Sciences & pratique, février 2008, n°974. CHENEBAUX M. Etude prospective clinique, épidémiologique, échocardiographique et Doppler de 43 cas de sténose pulmonaire congénitale chez le Bouledogie français (2004 2012). Thèse Méd. Vét., Alfort, 2012. CHETBOUL V, BUSSADORI C, DE MADRON E. Echocardiographie clinique du chien et du chat. Techniques et applications pratiques. Elsevier-Masson, Paris, 2012, 400 p. CHETBOUL V, CARLOS SAMPREDRANO C, CONCORDET D, TISSIER R, LAMOUR T, GINESTA J, GOUNI V, NICOLLE AP, POUCHELON J-L, LEFEBVRE HP. Use of quantitative two-dimensional color tissue Doppler imaging for assessment of left ventricular radial and longitudinal myocardial velocities in dogs. Am. J. Vet. Res., 2005(a), 66(6), 953961. CHETBOUL V, CARLOS SAMPREDRANO C, TISSIER R, GOUNI V, SAPONARO V, NICOLLE AP, POUCHELON JL. Quantitative assessment of velocities of the annulus of the left atrioventricular valve and left ventricular free wall in healthy cats by use of twodimensional color tissue Doppler imaging. Am. J. Vet. Res., 2006, 67(2), 250-258. CHETBOUL V, CONCORDET D, POUCHELON JL, ATHANASSIADIS N, MULLER C, BENIGNI L, MUNARI AC, LEFEBVRE HP. Effects of inter- and intra-observer variability on echocardiographic measurements in awake cats. J. Vet. Med., 2003, 50, 326-331. CHETBOUL V, TIDHOLM A, NICOLLE A, et al. Effects of animal position and number of repeated measurements on selected two-dimensional and M-mode echocardiographic variables in healthy dogs. J. Am. Vet. Med. Assoc., 2005(b), 227, 743-747. CLARK EB. Mechanisms in the pathogenesis of congenital heart defects. In: Pierpont ME, Moller JM. The Genetics of Cardiovascular Disease. Martinus-Nijoff, Boston, 1986, 3-11. COMBES N, HEITZ F, CHAMBRAN P, VAHDAT O. ECG des cardiopathies congénitales (partie I) : tétralogie de Fallot. CONSENSUS CARDIO pour le praticien, février 2012, n°76, 24-25. COPEL JA, PILU G, KLEINMAN CS. Congenital heart disease and extracardiac anomalies: associations and indications for fetal echocardiography. Am. J. Obstet. Gynecol., 1986, 154, 1121-1132. DIEZ-PRIETO I, GARCIA-RODRIGUEZ B, RIOS-GRANJA A, CANO-RABANO M, PENABAD M, GARCIA CP. Cardiac conotruncal malformations in a family of beagle dogs. J. Small Anim. Pract., 2009, 50(11), 597-603. DI FELICE V, ZUMMO G. Tetralogy of Fallot as a Model to Study Cardiac Progenitor Cell Migration and Differentiation During Heart Development. Trends Cardiovasc. Med., 2009, 19(4), 130-135. DUPUIS C, KACHANER J, FREEDOM M, PAYOT M, DAVIGNON A. Tétralogie de Fallot. In: Cardiologie Pediatrique. 2ème ed., Flammarion, Chevilly-Larue, 1991, 327-346. DYCE KM, SACK WO, WENSINS CJG. Textbook of Veterinary Anatomy. 3rd ed. Saunders-Elsevier, Philadelphia, 2002, 856 p. ETTINGER SJ, FELDMAN EC. Congenital Heart Disease. In: Textbook of Veterinary Internal Medicine. 7th ed. Saunders-Elsevier, Philadelphia, 2010, 389-466. EVANS HE. Miller’s Anatomy of the Dog. 3rd ed. Saunders-Elsevier, Philadelphia, 1993, 1130 p. EYSTER GE, BRADEN TD, APPLEFORD M, JOHNSTON J, CHAFFE A, SCHWEGLER S. Surgical management of tetralogy of Fallot. J. Small Anim. Pract., 1977, 18, 387-394. FERENCZ C, BOUGHMAN JA, NEILL CA, BRENNER JI, PERRY LW. Congenital cardiovascular malformations: questions on inheritance. Baltimore-Washington Infant Study Group. J. Am. Coll. Cardiol., 1989, 14, 756-763. 104 37. 38. 39. 40. 41. 42. 43. 44. 45. 46. 47. 48. 49. 50. 51. 52. 53. 54. 55. 56. 57. 58. FOX P.R., SISSON D., MOISE N.S. Textbook of Canine and Feline Cardiology: Principles and Clinical Practice. Saunders-Elsevier, Philadelphia, 1999, 955 p. FREEMAN AR, LEVINE SA. The Clinical Significance of the Systolic Murmur: A Study of 1000 Consecutive "Non-Cardiac" Cases. Ann. Intern. Med., 1933, 6(11), 1371-1385. FRIEDLI B. Tetralogy of Fallot. EMC-Pédiatrie 1, 2004, 365-378. GEVA T. Indications and timing of pulmonary valve replacement after tetralogy of Fallot repair. Semin. Thorac. Cardiovasc. Surg. Pediatr. Card. Surg. Annu., 2006, 9, 11-22. HARRIS JA, FRANCANNET C, PRADAT P, ROBERT E. The epidemiology of cardiovascular defects, part 2: a study based on data from three large registries of congenital malformations. Pediatr. Cardiol., 2003, 24, 222-235. HIRJI A, BERNASCONI A, McCRINDLE B W, DUNN E, GUROFSKY R, MANLHIOT C et al. Outcomes of prenatally diagnosed tetralogy of Fallot: Implications for valve-sparing repair versus transannular patch. Can. J. Cardiol., 2010, 26(1), e1-e6. HIRSCH J.C., MOSCA R.S., BOVE E.L. Complete repair of tetralogy of Fallot in the neonate: results in the modern era. Ann. Surg., 2000, 232, 508-514. JONAS RA. Early Primary Repair of Tetralogy of Fallot. Semin. Thorac. Cardiovasc. Surg. Pediatr. Card. Surg. Ann., 2009, 12, 39-47. KAGUELIDOU F. Pronostic de la tétralogie de Fallot fœtale. Thèse Méd., faculté de médecine René Descartes Paris 5, 2006. KARL TR. Tetralogy of Fallot: A Surgical Perspective. Korean J. Thorac. Cardiovasc. Surg., 2012, 45(4), 213-224. KHOSHNOOD B, DE VIGAN C, VODOVAR V, GOUJARD J, LHOMME A, BONNET D et al. Trends in prenatal diagnosis, pregnancy termination, and perinatal mortality of newborns with congenital heart disease in France, 1983-2000: a population-based evaluation. Pediatrics, 2005, 115, 95-101. LAPLANE R., ETIENNE M., GRAVELEAU D., LASFARGUES G., LEPERCQ G., POLONOVSKI Cl. Pédiatrie. 3ème ed. Masson, Paris, 1977, 542 p. LARSEN WJ. Human embryology. 3rd ed. Elsevier Science, St. Louis, 2001, 568 p. LEE JS, HYUN C. Genetic screening of the canine zinc finger protein multitype 2 (cZFPM2) gene in dogs with tetralogy of Fallot (TOF). J. Anim. Breed. Genet., 2009, 126(4), 304-310. LEVI S, ZHANG WH, ALEXANDER S, VIART P, GRANDJEAN H. Short-term outcome of isolated and associated congenital heart defects in relation to antenatal ultrasound screening. Ultrasound Obstet. Gynecol., 2003, 21, 532-538. MILLER CW, HOLMBERG DL, BOWEN V, PHARR JW, KRUTH S. Microsurgical management of tetralogy of Fallot in a cat. J. Am. Vet. Med. Assoc., 1985, 186, 708-709. MOLLER J.H., HOFFMAN J.I.E. Pediatric Cadiovascular Medicine. 2nd ed. WileyBlackwell, Oxford, 2012, 1078 p. MONTANA E, KHOURY MJ, CRAGAN JD, SHARMA S, DHAR P, FYFE D. Trends and outcomes after prenatal diagnosis of congenital cardiac malformations by fetal echocardiography in a well defined birth population, Atlanta, Georgia, 1990-1994. J. Am. Coll. Cardiol., 1996, 28, 1805-1809. MOORE KW, STEPIEN RL. Hydroxyurea for treatment of polycythemia secondary to right-to-left shunting patent ductus arteriosus in 4 dogs. J. Vet. Intern. Med., 2001, 15, 418421. NELSON O.L. The Practical Veterinarian. Small Animal Cardiology. Butterworth Heinemann, Saint Louis, 2003, 213 p. NORA JJ. Causes of congenital heart diseases: old and new modes, mechanisms, and models. Am. Heart. J., 1993, 125, 1409-1419. OGUCHI Y, MATSUMOTO H, MASUDA Y, TAKASHIMA H, TAKASHIMA K, 105 59. 60. 61. 62. 63. 64. 65. 66. 67. 68. 69. 70. 71. 72. 73. 74. 75. 76. 77. YAMANE Y. Balloon dilation of right ventricular outflow tract in a dog with tetralogy of Fallot. Journal of Veterinary Medical Science, 1999, 61(9), 1067-1069. OLIVEIRA P, DOMENECH O, SILVA J, VANNINI S, BUSSADORI R, BUSSADORI C. Retrospective Review of Congenital Heart Disease in 976 Dogs. J. Vet. Intern. Med., 2010, 25(3), 477-483. ORTON EC. Cardiac Surgery. In: Tilley LP, Smith FWK, Yama MA et al. Manual of Canine and Feline Cardiology. 4th ed. Saunders-Elsevier, St. Louis, 2008, 376-385. ORTON EC, MAMA K, HELLYER P, HACKETT TB. Open surgical repair of tetralogy of Fallot in dogs. J. Am. Vet. Med. Assoc., 2001, 219(8), 1089-1093. OTTO CM, SCHWAEGLER RG, FREEMAN RV. Echocardiography Review Guide: Companion to the Textbook of Clinical Echocardiography. 2nd ed. Saunders-Elsevier, Philadelphia, 2011, 426p. PATTERSON DF, PEXIEDER T, SCHNARR WR, NAVRATIL T, ALAILI R. A single major-gene defect underlying cardiac conotruncal malformations interferes with myocardial growth during embryonic development: studies in the CTD line of keeshond dogs. Am. J. Hum. Genet., 1993, 52(2), 388-397. PATTERSON DF, PYLE RL, VAN MIEROP L, MELBIN J, OLSON M. Hereditary defects of the conotruncal septum in Keeshond dogs: pathologic and genetic studies. Am. J. Cardiol., 1974, 34(2), 187-205. PELOSI A, EYSTER GE, DEJARDIN LM, KIUPEL M, REES JL, RICHTER MA. Use a jugular vein graft in a modified Blalock-Taussig procedure in dogs. Am. J. Vet. Res., 2006, 67(1), 174-179. REDDY VM, McELHINNEY DB, AMIN Z, MOORE P, PARRY AJ, TEITEL DF et al. Early and intermediate outcomes after repair of pulmonary atresia with ventricular septal defect and major aortopulmonary collateral arteries: experience with 85 patients. Circulation, 2000, 101, 1826-1832. RINGWALD RJ, BONAGURA JD. Tetralogy of Fallot in the dog: clinical findings in 13 cases. J. Am. Anim. Hosp. Assoc., 1988, 24, 33-43. SCHULTZ AH, WERNOVSKY G. Late Outcomes in Patients With Surgically Treated Congenital Heart Disease. Semin. Thorac. Cardiovasc. Surg. Pediatr. Card. Surg. Ann., 2005, 8, 145-156. SCHWARZ T, JOHNSON V. BSAVA Manual of Canine and Feline Thoracic Imaging. Wiley, Hoboken, 2008, 200 p. SERRES F, CHETBOUL V, GOUNI V, TISSIER R, CARLOS SAMPEDRANO C, POUCHELON J-L. Diagnostic Value of Echo-Doppler and Tissue Doppler Imaging in Dogs with Pulmonary Arterial Hypertension. J. Vet. Intern. Med., 2007, 21, 1280-1289. SHELTON DK. Fundamentals of Diagnostic Radiology. 3rd ed. W.B. Saunders, Philadelphia, 2007, 614 p. SLUYSMANS T, NEVEN B, RUBAY J, LINTERMANS J, OVAERT C, MUCUMBITSI J et al. Early balloon dilatation of the pulmonary valve in infants with tetralogy of Fallot. Risks and benefits. Circulation, 1995, 91, 1506-1511. SOLER R, RODRIGUEZ E, ALVAREZ M, RAPOSO I. Postoperative Imaging in Cyanotic Congenital Heart Diseases: Part 2, Complications. AJR, 2007,189, 1361-1369. TCHERVENKOV CI, ROY N. Congenital Heart Surgery Nomenclature and Database Project: pulmonary atresia-ventricular septal defect. Ann. Thorac. Surg., 2000, 69, 97-105. TILLEY LP. Essentials of canine and feline electrocardiography. Interpretation and Treatment. 3rd ed., W.B. Saunders, Philadelphia ,1992, 470 p. TILLEY LP, GOODWIN JK. Manual of Canine and Feline Cardiology. 3rd ed. W.B. Saunders, Philadelphia, 2001, 533 p. TILLEY LP, SMITH FWK, OYAMA MA, SLEEPER MM. Manual of Canine and Feline 106 78. 79. 80. 81. 82. Cardiology. 4th ed. Saunders-Elsevier, St. Louis, 2008, 443 p. VELDTMAN GR, CONNOLLY HM, GROGAN M, AMMASH NM, WARNES CA. Outcomes of Pregnancy in Women With Tetralogy of Fallot. J. Am. Coll. Cardiol., 2004, 44(1), 174-180. VILLAFANE J, FEINSTEIN JA, JENKINS KJ, VINCENT RN, WALSH EP, DUBIN AM et al. Hot Topics in Tetralogy Of Fallot. J. Am. Coll. Cardiol., 2013, 62(23), 2155-2166. WARE WA. Cardiovascular Disease in Small Animal Medicine. Manson Publishing, London, 2007, 396 p. WERNER P, RADUCHA MG., PROCIUK U, OSTRANDER EA, SPIELMAN RS, KIRKNESS EF et al. The keeshond defect in cardiac conotruncal development is oligogenic. Hum. Genet., 2005, 116(5), 368-377. YOUNG ID, CLARKE M. Lethal malformations and perinatal mortality: a 10 year review with comparison of ethnic differences. Br. Med. J., 1987, 295, 89-91. 107 108 LISTE DES FIGURES Figure 1 - Représentation schématique d’un cœur sain (Bajolle, 2012) Figure 2 - Représentation schématique d’un cœur lors de tétralogie de Fallot (Bonow et al., 2012) Figure 3 - Photographie d’une coupe transversale d’un cœur d’enfant atteint de tétralogie de Fallot (Moller et Hoffman, 2012) Figure 4 - Schéma présentant l’anatomie de la vascularisation cardiaque chez un individu sain (Dyce et al., 2002) Figure 5 - Aortogramme (projection grand axe oblique/crâniale) présentant l’anomalie de distribution des artères coronaires la plus fréquente chez les patients atteints de tétralogie de Fallot (Moller et Hoffman, 2012) Figure 6 - Schéma présentant le cloisonnement des ventricules au 46ème jour du développement embryonnaire (Larsen, 2001) Figure 7 - Localisation du second champ cardiaque au cours du développement embryonnaire (Di Felice et Zummo, 2009) Figure 8 - Classification des cardiopathies congénitales (Clark, 1986) Figure 9 - Représentation schématique des caractéristiques des différentes anomalies conotroncales (Bajolle, 2012) Figure 10 - Hippocratisme digital chez une fillette atteinte de tétralogie de Fallot (Laplane et al., 1977) Figure 11 - Radiographie de thorax (vue de face) chez un patient atteint de tétralogie de Fallot (Shelton, 2007) Figure 12 - Caractéristiques échocardiographiques de la tétralogie de Fallot présentées en miroir avec les anomalies anatomo-pathologiques (Bonow et al., 2012) Figure 13 - Représentation schématique de l’anastomose de Blalock-Taussig modifiée (Kaguelidou, 2006) Figure 14 - Etapes (a, b, c) de la levée de la sténose pulmonaire lors de la correction chirurgicale totale de la tétralogie de Fallot sans incision de l’anneau valvulaire pulmonaire (Jonas, 2009) Figure 15 - Représentation schématique de la correction chirurgicale totale de la tétralogie de Fallot avec élargissement de l’anneau valvulaire pulmonaire (Bonow et al., 2012) Figure 16 - Coupe « grand axe » par voie parasternale chez un patient qui a subi une correction chirurgicale totale (Otto et al., 2011) Figure 17 - IRM thoracique d’un nouveau-né de 6 mois atteint de tétralogie de Fallot compliquée d’une atrésie pulmonaire et venant de subir une anastomose de Blalock-Taussig modifiée (Soler et al., 2007) Figure 18 - IRM thoracique d’un homme de 20 ans ayant subi une correction chirurgicale totale de sa tétralogie de Fallot et présentant une dyspnée à l’effort (Soler et al., 2007) Figure 19 - Coupes longitudinales transventriculaires du cœur gauche (A) et du cœur droit (B) d’un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010) Figure 20 - Orthopnée chez un chaton de 4 mois atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007) Figure 21 - Cyanose débutante au repos chez un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007) Figure 22 - Radiographie thoracique de profil (A) et de face (incidence dorso-ventrale) (B) d’un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010) Figure 23 - Echocardiographie-Doppler d’un chiot Spitz loup atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010) Figure 24 - Electrocardiogramme d’un chien atteint de tétralogie de Fallot présentant une hypertrophie importante du ventricule droit (Tilley, 1992) Figure 25 - Angiographie du chien de la Figure 22 atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007) 109 Figure 26 - Photographies des trois étapes clés de l’anastomose entre artère sous-clavière et artère pulmonaire homolatérale utilisant la veine jugulaire comme greffon chez un chien sain (Pelosi et al., 2006) Figure 27 - Coupe écho-Doppler « petit axe » transaortique obtenue par voie parasternale droite chez un chien ayant subi 30 jours auparavant une anastomose entre artère sous-clavière et artère pulmonaire homolatérale utilisant une portion de veine jugulaire comme greffon (Pelosi et al., 2006) Figure 28 - Angiographie artérielle du chien de la Figure 28, 30 jours après l’anastomose entre artère sous-clavière et artère pulmonaire homolatérale utilisant la veine jugulaire comme greffon (Pelosi et al., 2006) Figure 29 - Coupes histologiques comparatives d’une veine jugulaire normale de chien (à gauche) et d’une veine jugulaire utilisée comme greffon pour l’anastomose entre artère sous-clavière et artère pulmonaire chez un chien sain 30 jours après sa mise en place (à droite) (Pelosi et al., 2006) Figure 30a (Borenstein et Behr, 2009) et b (Behr et al., 2007) - Principes de la circulation extracorporelle chez le chien Figure 31 (a et b) - Radiographies thoraciques de face (a) et de profil (b) d’un Chihuahua de 6,2 mois atteint de tétralogie de Fallot diagnostiqué à l’Unité de Cardiologie d’Alfort Figure 32 (a et b) - Radiographies thoraciques de face (a) et de profil (b) d’un chat européen de 7,0 mois atteint de tétralogie de Fallot diagnostiqué à l’Unité de Cardiologie d’Alfort Figure 33 - Coupe petit axe transventriculaire en mode Temps-Mouvement, obtenue par voie parasternale droite chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Figure 34 - Localisation de la sténose pulmonaire chez 25 animaux (12 chats et 13 chiens) atteints de tétralogie de Fallot inclus dans l’étude Figure 35 - Morphologie du tronc pulmonaire chez 27 animaux (13 chats et 14 chiens) atteints de tétralogie de Fallot inclus dans l’étude Figure 36 - Mode Doppler continu réalisé à partir d’une coupe petit axe transaortique obtenue par voie parasternale droite chez un chat européen mâle de 9 mois atteint de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Figure 37 - Répartition du sens du shunt interventriculaire chez 28 animaux (14 chats et 14 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Figure 38 - Coupe grand axe 5 cavités en mode Doppler couleur obtenue par voie parasternale droite chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Figure 39 - Courbe de survie globale des 29 carnivores domestiques atteints de tétralogie de Fallot isolée inclus dans l’étude Figure 40 - Comparaison des courbes de survie des 15 chats et des 14 chiens atteints de tétralogie de Fallot isolée inclus dans l’étude 110 LISTE DES TABLEAUX Tableau 1 - Avantages et inconvénients des deux techniques de Blalock-Taussig Tableau 2 - Avantages et inconvénients des deux abords possibles pour la correction chirurgicale totale de la tétralogie de Fallot Tableau 3 - Evolution de l’hématocrite et de la pression artérielle en O2 de l’ensemble des chiens de l’étude de Brockman et al. suite à la technique de Blalock-Taussig modifiée (Brockman et al., 2007) Tableau 4 - Caractéristiques épidémiologiques des 31 carnivores domestiques atteints de tétralogie de Fallot (diagnostiquée d’avril 2003 à juin 2014) et inclus dans l’étude Tableau 5 - Âge au diagnostic (mois) des 31 animaux (16 chats, 15 chiens) atteints de tétralogie de Fallot Tableau 6 - Poids au moment du diagnostic (kg) de 23 animaux (9 chats, 14 chiens) atteints de tétralogie de Fallot Tableau 7 - Symptômes fonctionnels présents lors du diagnostic de tétralogie de Fallot des 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude Tableau 8 - Caractéristiques du ou des souffle(s) cardiaque(s) présent(s) au moment du diagnostic de tétralogie de Fallot des 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude Tableau 9 - Valeurs du rapport de l’épaisseur de la paroi libre du ventricule droit (PVDs) sur l’épaisseur de la paroi libre du ventricule gauche (PLVGs) chez 17 animaux (8 chats et 9 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Tableau 10 - Valeurs de la fraction de raccourcissement (FR, %) chez 27 animaux (13 chats et 14 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Tableau 11 - Valeurs du rapport du diamètre du tronc pulmonaire sur le diamètre de l’aorte (TP/Ao) chez 14 animaux (9 chats et 5 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Tableau 12 - Valeur maximale du flux pulmonaire (Vmax) et du gradient de pression transsténotique (ΔP) mesurée chez 22 carnivores domestiques (10 chats, 12 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Tableau 13 - Diamètre de la communication interventriculaire (CIV) chez 26 animaux (14 chats et 12 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude Tableau 14 - Valeurs du rapport du diamètre de la communication interventriculaire (CIV) sur le diamètre de l’aorte (Ao) chez 24 animaux (14 chats et 10 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude 111 ÉTUDE RÉTROSPECTIVE ÉPIDÉMIOLOGIQUE, CLINIQUE, ÉCHOCARDIOGRAPHIQUE ET DOPPLER DE 31 CAS DE TÉTRALOGIE DE FALLOT CHEZ DES CARNIVORES DOMESTIQUES DIAGNOSTIQUÉS ENTRE 2003 ET 2014 Auteur : PITSCH Isabelle Résumé : La tétralogie de Fallot est une cardiopathie congénitale complexe et cyanogène, peu fréquente chez l’Homme et chez les carnivores domestiques. Cette affection est grave et invalidante, nécessitant chez l’homme une correction chirurgicale totale et précoce. Peu de données sont disponibles dans la littérature vétérinaire concernant cette cardiopathie, la majorité d’entre elles provenant de descriptions de cas ponctuels. L’objectif de la première partie bibliographique de ce travail était ainsi d’analyser de façon comparative l’étiologie, l’épidémiologie, la physiopathologie et les caractéristiques cliniques de la tétralogie de Fallot en cardiologie vétérinaire et humaine. Le but de l’étude rétrospective, présentée dans la deuxième partie du document, était d’analyser les données épidémiologiques, cliniques, échocardiographiques et Doppler ainsi que la survie de chats et de chiens ayant fait l’objet d’un diagnostic de tétralogie de Fallot dans deux centres de référés en cardiologie vétérinaire. Un total de 31 cas (16 chats et 15 chiens) atteints de tétralogie de Fallot, diagnostiqués à l’Unité de Cardiologie d’Alfort et au Centre Hospitalier Vétérinaire des Cordeliers entre avril 2003 et juin 2014 a été analysé de façon rétrospective. L’âge au diagnostic était de 11,9 ± 9,5 mois. Le pourcentage de mâles atteints était supérieur à celui des femelles, à la fois dans la population globale (61,3 % versus 38,7 %, respectivement) mais également chez le chat (61,3 % versus 38,7e%). En revanche, cette particularité n’a pas été retrouvée chez le chien, avec 53,3 % de mâles et 46,7 % de femelles atteints. Les chiens de petit format étaient les plus nombreux, représentant 60 % de la population canine. Les principaux symptômes fonctionnels observés étaient l’intolérance à l’effort (90,3 %), la dyspnée (58,0 %) et la cyanose (48,4 %). A l’auscultation cardiaque, un souffle systolique basal gauche a été détecté dans la moitié des cas, aussi bien dans l’espèce féline que dans l’espèce canine. A l’examen électrocardiographique, une déviation axiale droite a été identifiée dans 43 % des cas. Concernant les résultats de l’examen écho-Doppler, une hypertrophie de la paroi ventriculaire droite modérée à très importante (épaisseur en moyenne 1,5 fois supérieure à celle de la paroi libre du ventricule gauche) était présente chez tous les animaux de l’étude. La localisation de l’obstacle sténotique était plus variée que celle décrite dans la littérature avec 64 % des sténoses isolées (sous-valvulaire, valvulaire, ou supravalvulaire) et 36 % de sténoses combinant au minimum 2 obstacles. La communication interventriculaire était toujours unique et large, avec un rapport moyen entre son diamètre et celui de l’aorte égal à 0,61. Lorsque la sténose pulmonaire était associée à un gradient de pression trans-sténotique supérieur à 80 mmHg, une inversion partielle ou totale du shunt à travers la communication interventriculaire était observée chez tous les animaux à l’exception d’un cas. L’inversion de shunt était présente chez 71,4 % des animaux au moment du diagnostic, expliquant une survie limitée à court et moyen terme. En effet, la médiane de survie n’était que de 23,4 mois seulement dans la population générale et elle était presque divisée par deux chez le chien (13 mois), à mettre en relation avec l’apparition plus précoce de symptômes fonctionnels par comparaison à la sous-population féline. En conclusion, cette étude est la première à décrire de manière exhaustive et précise les caractéristiques épidémiologiques, cliniques, écho-Doppler ainsi que la survie d’une population de carnivores domestiques atteints de tétralogie de Fallot. Les résultats montrent en particulier que les décès surviennent majoritairement chez le jeune adulte (malgré quelques exceptions), soulignant ainsi l’intérêt de développer des techniques chirurgicales palliatives ou curatives, à l’instar de ce qui est réalisé chez le nouveau-né. Mots clés : TÉTRALOGIE DE FALLOT / CARDIOPATHIE / CARDIOPATHIE CONGÉNITALE / STÉNOSE PULMONAIRE / COMMUNICATION INTERVENTRICULAIRE / DEXTROPOSITION DE L’AORTE / HYPERTROPHIE / VENTRICULE DROIT / ÉCHOCARDIOGRAPHIE / DOPPLER / CARNIVORE / CHIEN / CHAT / CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT / UNITÉ DE CARDIOLOGIE D’ALFORT / CENTRE HOSPITALIER VÉTÉRINAIRE DES CORDELIERS Jury : Président : Pr. Directeur : Pr. Valérie CHETBOUL Assesseur : Pr. Renaud TISSIER Invité : Dr. Eric BOMASSI A RETROSPECTIVE STUDY OF 31 CASES OF TETRALOGY OF FALLOT FROM 2003 TO 2014 : EPIDEMIOLOGIC, CLINICAL AND ECHO-DOPPLER FINDINGS Author: PITSCH Isabelle Summary: Tetralogy of Fallot is a complex cyanotic congenital heart defect, which is uncommon in human and small animals. This severe and disabling heart disease requires early surgical correction. Little information is available about this disease in the veterinary literature, and most data are derived from description of isolated cases. The first part of this report is a bibliographic review presenting the comparative etiological, pathophysiological, epidemiological, and clinical features of Tetralogy of Fallot in humans and small animals. The second part of this report is composed of a retrospective study dedicated to cats and dogs diagnosed with Tetralogy of Fallot in two French referral centers of veterinary cardiology, with the aim to assess their epidemiological, clinical, echocardiographic and Doppler, and survival characteristics. A total of 31 recruited animals (16 cats, 15 dogs), diagnosed at the Cardiology Unit of Alfort and the Veterinary Hospital « les Cordeliers » between April 2003 and June 2014, were retrospectively analyzed. Age at diagnosis was 11.9 ± 9.5 months. The percentage of males was higher than that of females both for general population (61.3 % versus 38.7 % respectively) and for cats (61.3 % versus 38.7 %). By contrast, this was not the case for dogs, with 53,3 % of males and 46,7 % of females suffering from tetralogy of Fallot. Small dogs were much more prominent with 60 % of the canine population. The main clinical signs were exercise intolerance (90,3 %), dyspnea (58,0 %) and cyanosis (48,4 %). A left basal systolic heart murmur was detected at cardiac auscultation in half of the cases in both feline and canine species. A right axis deviation was observed on ECG tracings in 43 % of cases. Regarding echocardiographic and Doppler findings, a moderate to significant right ventricular hypertrophy was found (the right end-systolic wall thickness was on average 1,5 fold higher than that of the end-systolic left ventricular free wall) in all tested animals. Pulmonic stenosis localization was more varied than previously described including 64 % of isolated stenosis (subvalvular, valvular or supravalvular) and 36 % of « mixted » stenosis combining at least two obstructive lesions. A single and large ventricular septal defect was always found with a mean defect diameter on aorta ratio of 0,61. A complete or partial reverse of the interventricular shunt was observed in all but one animals when the systolic pulmonic pressure gradient was higher than 80 mmHg. A reverse intraventricular shunt was already present in 71,4 % of cases at the time of diagnosis, thus explaining medium and long-term limited survival rate. Indeed, the median survival times was only 23,4 months for the general population and was nearly halved in dogs (13 months), which can be related to an earlier onset of clinical signs by comparison with the feline sub-population. In conclusion, this study is the first to exhaustively and accurately describe the epidemiological, clinical, echo-Doppler and survival characteristics of a canine and feline population with tetralogy of Fallot. The present results show that death occurs predominantly in young adult animals (with a few exceptions), underlying the interest to develop palliative or curative surgical techniques, as is already the case for newborn children. Keywords: TETRALOGY OF FALLOT / CARDIOPATHY / CONGENITAL HEART DEFECT / PULMONARY STENOSIS / VENTRICULAR SEPTAL DEFECT / DEXTROPOSITIONING OF THE AORTA / HYPERTROPHY / RIGHT VENTRICLE / ECHOCARDIOGRAPHY / TISSUE DOPPLER / CARNIVORE / DOG / CAT / VETERINARY UNIVERSITY CENTER OF ALFORT / CARDIOLOGY UNIT OF ALFORT / VETERINARY CENTER OF « LES CORDELIERS » Jury: Président : Pr. Directeur : Pr. Valérie CHETBOUL Assesseur : Pr. Renaud TISSIER Invité : Dr. Eric BOMASSI