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ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT
Année 2014
ÉTUDE RÉTROSPECTIVE ÉPIDÉMIOLOGIQUE,
CLINIQUE, ÉCHOCARDIOGRAPHIQUE ET DOPPLER
DE 31 CAS DE TÉTRALOGIE DE FALLOT CHEZ DES
CARNIVORES DOMESTIQUES DIAGNOSTIQUÉS
ENTRE 2003 ET 2014
THÈSE
Pour le
DOCTORAT VÉTÉRINAIRE
Présentée et soutenue publiquement devant
LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL
le……………
par
Isabelle, Marguerite PITSCH
Née le 8 septembre 1989 à Saint-Mandé (Val-de-Marne)
JURY
Président : Pr.
Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL
Membres
Directeur : Mme Valérie CHETBOUL
Professeur de Cardiologie à l’ENVA
Assesseur : M. Renaud TISSIER
Professeur en Pharmacie et en Toxicologie à l’ENVA
Invité : M. Eric Bomassi
Docteur vétérinaire au CHV des Cordeliers (Meaux)
Janvier 2014
LISTE DES MEMBRES DU CORPS ENSEIGNANT
Directeur : M. le Professeur GOGNY Marc
Directeurs honoraires : MM. les Professeurs : COTARD Jean-Pierre, MIALOT Jean-Paul, MORAILLON Robert, PARODI André-Laurent, PILET Charles, TOMA Bernard.
Professeurs honoraires : Mme et MM. : BENET Jean-Jacques, BRUGERE Henri, BRUGERE-PICOUX Jeanne, BUSSIERAS Jean, CERF Olivier, CLERC Bernard,
CRESPEAU François, DEPUTTE Bertrand, MOUTHON Gilbert, MILHAUD Guy, POUCHELON Jean-Louis, ROZIER Jacques.
DEPARTEMENT D’ELEVAGE ET DE PATHOLOGIE DES EQUIDES ET DES CARNIVORES (DEPEC)
Chef du département par intérim : M. GRANDJEAN Dominique, Professeur - Adjoint : M. BLOT Stéphane, Professeur
UNITE DE CARDIOLOGIE
- Mme CHETBOUL Valérie, Professeur *
- Mme GKOUNI Vassiliki, Praticien hospitalier
- Mme SECHI-TREHIOU, Praticien hospitalier
DISCIPLINE : NUTRITION-ALIMENTATION
- M. PARAGON Bernard, Professeur
DISCIPLINE : OPHTALMOLOGIE
- Mme CHAHORY Sabine, Maître de conférences
UNITE DE CLINIQUE EQUINE
- M. AUDIGIE Fabrice, Professeur
- M. DENOIX Jean-Marie, Professeur
- Mme BERTONI Lélia, Maître de conférences contractuel
- Mme GIRAUDET Aude, Praticien hospitalier *
- M. LECHARTIER Antoine, Maître de conférences contractuel
- Mme MESPOULHES-RIVIERE Céline, Praticien hospitalier
- Mme TRACHSEL Dagmar, Maître de conférences contractuel
UNITE DE PARASITOLOGIE ET MALADIES PARASITAIRES
- M. BLAGA Radu Gheorghe, Maître de conférences (rattaché au DPASP)
- M. CHERMETTE René, Professeur (rattaché au DSBP)
- Mme FAIVRE Noëlle, Praticien hospitalier
- M. GUILLOT Jacques, Professeur *
- Mme MARIGNAC Geneviève, Maître de conférences
- M. POLACK Bruno, Maître de conférences
UNITE DE PATHOLOGIE CHIRURGICALE
- M. FAYOLLE Pascal, Professeur
- M. MAILHAC Jean-Marie, Maître de conférences
- M. MANASSERO Mathieu, Maître de conférences contractuel
- M. MOISSONNIER Pierre, Professeur*
- Mme RAVARY-PLUMIOEN Bérangère, Maître de conférences (rattachée au DPASP)
- Mme VIATEAU-DUVAL Véronique, Professeur
- M. ZILBERSTEIN Luca, Maître de conférences
UNITE D’IMAGERIE MEDICALE
- Mme PEY Pascaline, Maître de conférences contractuel
- Mme STAMBOULI Fouzia, Praticien hospitalier
UNITE DE MEDECINE
- Mme BENCHEKROUN Ghita, Maître de conférences contractuel
- M. BLOT Stéphane, Professeur*
- Mme FREICHE-LEGROS Valérie, Praticien hospitalier
- Mme MAUREY-GUENEC Christelle, Maître de conférences
DISCIPLINE : URGENCE SOINS INTENSIFS
- Mme STEBLAJ Barbara, Praticien Hospitalier
UNITE DE MEDECINE DE L’ELEVAGE ET DU SPORT
- Mme CLERO Delphine, Maître de conférences contractuel
- M. GRANDJEAN Dominique, Professeur *
- Mme YAGUIYAN-COLLIARD Laurence, Maître de conférences contractuel
DISCIPLINE : NOUVEAUX ANIMAUX DE COMPAGNIE
- M. PIGNON Charly, Praticien hospitalier
DEPARTEMENT DES PRODUCTIONS ANIMALES ET DE LA SANTE PUBLIQUE (DPASP)
Chef du département : M. MILLEMANN Yves, Professeur - Adjoint : Mme DUFOUR Barbara, Professeur
UNITE D’HYGIENE ET INDUSTRIE DES ALIMENTS D’ORIGINE ANIMALE
- M. AUGUSTIN Jean-Christophe, Maître de conférences
- M. BOLNOT François, Maître de conférences *
- M. CARLIER Vincent, Professeur
UNITE DE REPRODUCTION ANIMALE
- Mme CONSTANT Fabienne, Maître de conférences
- M. DESBOIS Christophe, Maître de conférences (rattaché au DEPEC)
- M. FONTBONNE Alain, Maître de conférences (rattaché au DEPEC)
- Mme MAENHOUDT Cindy, Praticien hospitalier
- Mme MASSE-MOREL Gaëlle, Maître de conférences contractuel
- M. MAUFFRE Vincent, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel
- M. NUDELMANN Nicolas, Maître de conférences (rattaché au DEPEC)
- M. REMY Dominique, Maître de conférences*
UNITE DES MALADIES CONTAGIEUSES
- Mme DUFOUR Barbara, Professeur*
- Mme HADDAD/HOANG-XUAN Nadia, Professeur
- Mme PRAUD Anne, Maître de conférences
- Mme RIVIERE Julie, Maître de conférences contractuel
UNITE DE PATHOLOGIE DES ANIMAUX DE PRODUCTION
- M. ADJOU Karim, Maître de conférences *
- M. BELBIS Guillaume, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel
- M. HESKIA Bernard, Professeur contractuel
- M. MILLEMANN Yves, Professeur
UNITE DE ZOOTECHNIE, ECONOMIE RURALE
- M. ARNE Pascal, Maître de conférences
- M. BOSSE Philippe, Professeur*
- M. COURREAU Jean-François, Professeur
- Mme GRIMARD-BALLIF Bénédicte, Professeur
- Mme LEROY-BARASSIN Isabelle, Maître de conférences
- M. PONTER Andrew, Professeur
DEPARTEMENT DES SCIENCES BIOLOGIQUES ET PHARMACEUTIQUES (DSBP)
Chef du département : Mme COMBRISSON Hélène, Professeur - Adjoint : Mme LE PODER Sophie, Maître de conférences
UNITE D’ANATOMIE DES ANIMAUX DOMESTIQUES
- M. CHATEAU Henry, Maître de conférences*
- Mme CREVIER-DENOIX Nathalie, Professeur
- M. DEGUEURCE Christophe, Professeur
- Mme ROBERT Céline, Maître de conférences
UNITE D’HISTOLOGIE, ANATOMIE PATHOLOGIQUE
- Mme CORDONNIER-LEFORT Nathalie, Maître de conférences*
- M. FONTAINE Jean-Jacques, Professeur
- Mme LALOY Eve, Maître de conférences contractuel
- M. REYES GOMEZ Edouard, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel
DISCIPLINE : ANGLAIS
- Mme CONAN Muriel, Professeur certifié
UNITE DE PATHOLOGIE GENERALE MICROBIOLOGIE,
IMMUNOLOGIE
- M. BOULOUIS Henri-Jean, Professeur
- Mme LE ROUX Delphine, Maître de conférences
- Mme QUINTIN-COLONNA Françoise, Professeur*
UNITE DE BIOCHIMIE
- M. BELLIER Sylvain, Maître de conférences*
- Mme LAGRANGE Isabelle, Praticien hospitalier
- M. MICHAUX Jean-Michel, Maître de conférences
DISCIPLINE : BIOSTATISTIQUES
- M. DESQUILBET Loïc, Maître de conférences
DISCIPLINE : EDUCATION PHYSIQUE ET SPORTIVE
- M. PHILIPS Pascal, Professeur certifié
DISCIPLINE : ETHOLOGIE
- Mme GILBERT Caroline, Maître de conférences
UNITE DE GENETIQUE MEDICALE ET MOLECULAIRE
- Mme ABITBOL Marie, Maître de conférences
- M. PANTHIER Jean-Jacques, Professeur*
UNITE DE PHARMACIE ET TOXICOLOGIE
- Mme ENRIQUEZ Brigitte, Professeur
- M. PERROT Sébastien, Maître de conférences
- M. TISSIER Renaud, Professeur*
UNITE DE PHYSIOLOGIE ET THERAPEUTIQUE
- Mme COMBRISSON Hélène, Professeur
- Mme PILOT-STORCK Fanny, Maître de conférences
- M. TIRET Laurent, Maître de conférences*
UNITE DE VIROLOGIE
- M. ELOIT Marc, Professeur
- Mme LE PODER Sophie, Maître de conférences *
* responsable d’unité
REMERCIEMENTS
Au Professeur de la Faculté de Médecine de Créteil,
Qui nous a fait l’honneur d’accepter la présidence de notre jury de thèse,
Hommage respectueux.
A Madame Valérie Chetboul,
Chef de l’Unité de Cardiologie d’Alfort et Professeur à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort,
Pour m’avoir fait l’honneur de m’encadrer tout au long de ce travail, pour sa gentillesse, son
enthousiasme, sa rigueur dans ses corrections et sa passion de la cardiologie,
Mes sincères remerciements et ma profonde admiration.
A Monsieur Renaud Tissier,
Professeur en Pharmacie et Toxicologie à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort,
Pour sa collaboration dans ce travail, sa sympathie et son efficacité,
Sincères remerciements.
A Monsieur Eric Bomassi,
Docteur au CHV des Cordeliers (Meaux),
Pour son aide dans la réalisation de cette thèse, pour sa disponibilité, sa réactivité et ses précieux conseils,
Mes sincères remerciements.
A Madame Marie Abitbol,
Maître de conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort,
Pour sa gentillesse, sa pédagogie et sa rapidité de correction,
Sincères remerciements.
A Madame Pascaline Pey,
Maître de conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort,
Pour avoir accepté de participer à ce travail, pour sa réactivité et la précision de ses interprétations des
radiographies,
Mes sincères remerciements.
A Monsieur Luca Zilberstein,
Maître de conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort,
Pour l’intérêt qu’il a porté à ce travail et pour ses conseils avisés,
Sincères remerciements.
A toute l’équipe de l’Unité de Cardiologie d’Alfort,
Pour sa gentillesse, son enthousiasme et son aide dans la réalisation de cette thèse.
A tous les propriétaires des carnivores domestiques inclus dans l’étude,
Pour leur collaboration et le profond intérêt qu’ils ont porté à ce travail.
A mes parents,
Pour leur soutien en toutes circonstances, pour avoir toujours cru en moi, pour m’avoir permis d’arriver
jusqu’ici dans les meilleures conditions. Toute ma reconnaissance et mon amour.
A ma sœur,
Pour sa présence à mes côtés en toutes circonstances, pour son calme et pour m’avoir toujours soutenue.
A mes grands-parents,
Pour tous les bons souvenirs d’enfance, pour leur amour inconditionnel. Parce que j’aurais aimé partager
ce moment avec eux…
A Tom,
Pour son soutien sans faille et pour tout le bonheur que l’on partage au quotidien…
A Marie-Christine,
Pour la belle-mère que tout le monde voudrait avoir, pour sa passion des compagnons à quatre pattes et
pour l’intérêt qu’elle porte à mon métier-passion.
A mes beaux-frères, à ma belle sœur,
Pour tous les repas et les soirées remplis de bonne humeur et de bons vins !
A Béa, Robert et Laura,
Pour être toujours là pour nous, pour leur gentillesse et leur bonne humeur.
A Racine,
Pour son humour à toute épreuve, pour être le collègue que tout le monde rêve d’avoir,
Ravie de continuer l’aventure un an de plus !
A Cindy et Goujette,
Pour leurs préchauffes inégalables, pour ces cinq belles années à leurs côtés et tous ces souvenirs
inoubliables…
Au groupe 9,
Pour tous les bons moments que l’on a partagés, les soirées bien arrosées, les photos dossiers, les fous
rires… Pour que tous les kilomètres qui vont nous séparer ne soient qu’un prétexte pour organiser des
WE groupe 9 aux 4 coins de la France.
A Flo, Sergueï, Seb, Nico, Adeline, Popo, Mika,
Pour leur joie de vivre et pour tous les bons moments passés ensemble.
Aux poulots,
Pour avoir joué le jeu, pour égayer nos soirées et tout particulièrement à Brutinel, Laugier, Gombert,
Depré, Marginier, Porsmoguer, Wuillemin, Rivals, des poulots pas comme les autres (mais mieux !).
A tous les alforiens que j’ai côtoyés et qui ont rendu ces cinq années inoubliables…
A toute l’équipe de la clinique vétérinaire du Docteur Cordier, pour tout ce qu’ils m’ont appris, pour les
bons moments que l’on a passés et un merci tout particulier aux 3 meilleures ASV du monde.
A toute l’équipe du CHV des Cordeliers, pour m’avoir fait confiance et m’accueillir dans leur structure.
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION…………………………………………………………………………………………..7
PREMIERE PARTIE : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE ................................................... 9
1. La tétralogie de Fallot chez l'Homme……………………...……………………………………..9
1.1. Définitions anatomique et embryologique……………………………………………………..9
1.1.1. Définition anatomique……………….……………….….…………………………….…………9
1.1.1.1. La sténose pulmonaire : localisation et gravité variables….………….……………………11
1.1.1.2. La CIV…………….……………...…..……………………………………………………11
1.1.1.3. La dextroposition de l’aorte………………………………………………..……………...11
1.1.1.4. Les anomalies anatomiques cardiaques associées…….………….…………………..……12
1.1.2. Définition embryologique……………………………………………...……………………….13
1.1.2.1. Rappels sur le développement embryonnaire du cœur humain…….……………………..13
1.1.2.1.1. Développement cardiaque embryonnaire global………….…………………………13
1.1.2.1.2. Développement du septum interventriculaire et de la voie d’émergence du cœur…..13
1.1.2.2. Anomalies embryologiques induisant l’apparition d’une TOF………………………….…...14
1.1.2.2.1. Caractéristiques embryologiques des anomalies observées……………….….……...14
1.1.2.2.2. Localisation des cellules précurseurs de la région conotroncale………….……….....15
1.2. Epidémiologie……………………………………………………………………………………...19
1.3. Physiopathologie…………………………………………………………………………………..19
1.4. Etiologie………………………………………………………………………………………….…19
1.4.1. Association de la TOF avec d’autres syndromes………...……………...…...…….……….…...20
1.4.1.1. Le syndrome de DiGeorge ou syndrome vélo-cardio-facial…….……………...…….…....20
1.4.1.2. Le syndrome de Down (trisomie 21)…………………………………….…….…..……....21
1.4.1.3. Le syndrome d’Alagille…………..…………………………………………….…….……21
1.4.1.4. Le syndrome de Holt-Oram………………………………………….……………...……..21
1.4.2. Gènes qui pourraient être impliqués dans l’apparition d’une TOF isolée………………....…..21
1.4.2.1. Le gène ZFPM2…………………………………………………………………..………...21
1.4.2.2. Le gène NKX2.5 (CSX)……………………….……………………………………….…..22
1.4.2.3. Le complexe transcriptionnel formé par GATA4 et FOG2……….………………………22
1.4.2.4. Le gène VEGF…………………………………………………………….…….…………22
1.4.2.5. Autres gènes et locus……………………………………………………………..………...23
1.5. Signes cliniques………………………………………………………………….………………...23
1.5.1. Chez le nouveau-né….…………………………..……………...…………………….………...23
1.5.2. Chez l'enfant ……...………………………………..……………….…………………………..24
1.6. Examens complémentaires………………………………………….…………………………...25
1.6.1. Radiographie thoracique....……………………………………...……….………………....….25
1.6.2. Echocardiographie-Doppler……………………………………………………………………26
1.6.3. Examen électrocardiographique………………………………………………………….……..27
1.6.4. Examens sanguins………………………………………………………………………….…...27
1.6.5. Cathétérisme cardiaque et angiographie……………...…………………………….…………..27
1.6.6. IRM………………………………………………………………………………….………….27
1.7. Diagnostic anténatal…...……….……………….…..……….………...………………………….28
1
1.8. Traitement médical.........................................................................................................................28
1.9. Traitement chirurgical palliatif et correction chirurgicale totale………………………....29
1.9.1. Traitement chirurgical palliatif…….……………………………………………….…..….……29
1.9.1.1. Indications………………………..…………………….………………………………….29
1.9.1.2. Techniques de Blalock-Taussig classique et modifiée…………………………….….…...30
1.9.1.3. Cas particulier des formes extrêmes……………………………………………….…...…32
1.9.2. Correction chirurgicale totale…………………….…………………………………………….33
1.9.2.1. Indications et contre-indications…………..……………….……………………………...34
1.9.2.2. Techniques de correction chirurgicale totale……..…………..………….………………..34
1.10. Evolution et complications…………………………………………………………….……….38
1.10.1. Evolution et complications en l'absence de correction chirurgicale…………...…..….….…...38
1.10.2. Evolution et complications suite à une chirurgie palliative seule………………….…….……38
1.10.3. Evolution et complications suite une correction chirurgicale totale………….……...….…….38
1.10.3.1. Quelques chiffres concernant la survie des patients……………………….…………….38
1.10.3.2. De nombreuses complications post-opératoires...……….…………….………………...39
1.10.3.2.1. Sténose pulmonaire résiduelle……………………….……………….…………….39
1.10.3.2.2. Insuffisance valvulaire pulmonaire……………………………….………….……..40
1.10.3.2.3. Troubles de la conduction et du rythme cardiaques...………………….……...…...40
1.10.3.2.4. Dilatation de la racine de l'aorte………………………………….…………………41
1.10.3.2.5. Régurgitation tricuspidienne…...…………………………………………………...41
1.10.3.2.6. CIV résiduelle(s)……………………………….……………………………….…..41
1.10.3.3. Conséquence de certaines complications : un risque de mort subite accru……….….…..41
1.10.4. Principales complications post-opératoires visibles à l'IRM………...…………………….….42
1.10.5. Cas particulier de la grossesse des femmes atteintes de TOF…………...……………..….…..44
2. Données actuelles sur la TOF chez les carnivores domestiques……………………….…45
2.1. Définitions anatomique et embryologique……………………………………………………45
2.1.1. Définition anatomique……………………………………………….…………………..……..45
2.1.2. Définition embryologique……………………………………………….……………………..46
2.2. Epidémiologie………………………………………………………………..…………………....46
2.2.1. Quelques chiffres………………………………………………………………………….……46
2.2.2. Prédispositions raciale et sexuelle……………………………………………………….……..47
2.3. Physiopathologie………………………………………………………………………………….47
2.4. Etiologie……………………………………………………………………………………………47
2.4.1. Mode de transmission……………………………………………………………………….….47
2.4.2. Etude concernant l'implication du gène ZFPM2………………………………………………48
2.4.3. Pistes de recherches actuelles………………………………………………………………….49
2.4.3.1. Etudier les facteurs de transcription impliqués dans la morphogénèse cardiaque…….…..49
2.4.3.2. S'intéresser à l'étiologie génétique des anomalies associées à la TOF chez le chien….…..49
2.5. Signes cliniques…………………………………………………………………………………...50
2.6. Examens complémentaires……………………………………………………………………...52
2.6.1. Radiographie thoracique………………………………………………………………………...52
2.6.2. Echocardiographie-Doppler……………………………………………………………….…....54
2.6.3. Examen électrocardiographique ................................................................................................. 56
2.6.4. Examens sanguins ....................................................................................................................... 56
2.6.5. Cathétérisme cardiaque et angiographie……...………………………………………………...56
2.7. Traitement médical………………………………………………………………………….……57
2.7.1. Intérêts des béta-bloquants….…..…....………………………………………………………57
2.7.2. Correction de l’hyperviscosité sanguine……………………………………………..………....58
2
2.7.3. Cas particulier de la gestion de la crise hypoxique…………………………………..……….....58
2.8. Traitement chirurgical……………………………………………………………………….…..59
2.8.1. Traitement chirurgical palliatif…………………………………………………………….........59
2.8.1.1. Etude de Brockman et al. : technique de Blalock-Taussig modifiée faisant appel à une
prothèse expansive en téflon ou à un segment d’artère carotide (Brockman et al., 2007)……........60
2.8.1.2. Etude de Pelosi et al. : technique de Blalock-Taussig modifiée faisant appel à un
segment de veine jugulaire (Pelosi et al., 2006)………...……………..……………………..........62
2.8.2. Correction chirurgicale totale……………………………………..……………………...…......66
2.8.2.1. Description de deux cas d’Orton et al. : technique de correction chirurgicale totale
standard utilisée chez l'Homme (Orton et al., 2001)…………………...……..…………...….…....66
2.8.2.2. Une contrainte majeure : la CEC…………………...…………………………..……........67
2.9. Evolution et complications………………………………………..………………..…………...69
DEUXIÈME PARTIE : ÉTUDE RÉTROSPECTIVE DE 31 CAS DEaa
TÉTRALOGIE DE FALLOT CHEZ DES CARNIVORES DOMESTIQUES
DIAGNOSTIQUÉS ENTRE 2003 ET 2014………………………………….……….......71
1. Objectifs de l’étude………………………………………………………………………….………71
2. Matériel et méthode……………………………………………………………………………….…71
2.1. Animaux…………………………………………………………………………………….……..71
2.2. Examen clinique………………………………………………..…………………...….………...72
2.3. Examen échocardiographique et Doppler…………………………………...……………....72
2.4. Suivi de la population d’étude……………………………………….……………….………....73
2.5. Analyses statistiques……………………………………………………………….…….……....74
3. Résultats………………………………………………………………………………………………...75
3.1. Caractéristiques épidémiologiques………………………………….…….…………………....75
3.2. Examen clinique au moment du diagnotic de TOF………………………..………………..78
3.3. Examens complémentaires……………………………………………..……………….……….80
3.3.1. Radiographie thoracique…………………………………………………………………….….80
3.3.2. Examen électrocardiographique ……………………..……...……………….………………….83
3.3.3. Examens échocardiographique et Doppler…………………………………….………………..83
3.4. Traitement……………………………………………………...……………………….…………91
3.5. Survie…………..………………………………………………………………………………........92
4. Discussion…………………………………………….………….………………………………..……95
4.1. Caractéristiques épidémiologiques, cliniques, échocardiographiques et Doppler….….95
4.2. Étude de survie……………………………………………………………………………………98
4.3. Limites de l'étude…………………………………………………………………………………99
CONCLUSION..........................................................................................................................................101
BIBLIOGRAPHIE………………………………….……………………………………………………103
LISTE DES FIGURES…………………………………………………………………………………..109
LISTE DES TABLEAUX……………………………………………………………………………….111
3
4
LISTE DES ABREVIATIONS
APSO = Atrésie pulmonaire à septum ouvert
CEC = Circulation extra-corporelle
CIV = Communication interventriculaire
ECG = Électrocardiogramme
IRM = Imagerie par résonance magnétique
O2 = Dioxygène
TOF = Tétralogie de Fallot
UCA = Unité de Cardiologie d’Alfort
5
6
INTRODUCTION
L’anatomiste et géologue danois Niels Stensen fut le premier à décrire l’anatomie de la
tétralogie de Fallot chez l’enfant en 1671 (Friedli, 2004). Nicolas Sténon en 1771 puis Eduard
Sandifort en 1777 décrivirent une nouvelle fois cette cardiopathie congénitale, suivis de James
Hope, Thomas Peacock et Sir Thomas Watson qui complétèrent la description anatomique dans le
milieu des années 1800 (Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Baille, 2011). Cette cardiopathie était alors
appelée la « maladie bleue » (Baille, 2011).
Etienne-Louis Arthur Fallot, médecin anatomo-pathologiste français né à Sète le 29 septembre
1850, est à l’origine du terme « tétralogie ». Il fut également le premier à décrire avec précision
cette cardiopathie en présentant une série anatomo-clinique (comprenant trois hommes de 19, 26 et
36 ans) avec explication anatomique, physiopathologique et clinique (Baille, 2011).
Sa description, publiée en 1888 dans un article intitulé « Contribution to the Pathologic Anatomy of
Morbus Caeruleus » (Friedli, 2004), comprend : une sténose pulmonaire, une large communication
interventriculaire, un chevauchement de l’aorte sur le septum interventriculaire et une hypertrophie
concentrique du ventricule droit consécutive à la sténose pulmonaire à l’origine d’une augmentation
de pression au sein de ce ventricule (Dupuis et al., 1991 ; Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Veldtman et al.,
2004 ; Di Felice et Zumo, 2009 ; Baille 2011 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman,
2012).
Embryologiquement, il s’agit de l’aboutissement d’une anomalie unique : la déviation antérieure et
supérieure du septum infundibulaire séparant normalement les chambres de chasse ventriculaires
droite et gauche (Becker et Anderson, 1981 ; Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Moller et Hoffman, 2012).
Chez l’Homme, la tétralogie de Fallot représente 5 à 10 % des cardiopathies congénitales et
est la plus fréquente des cardiopathies cyanogènes. Il s’agit d’une malformation cardiaque
congénitale bien connue, faisant à l’heure actuelle l’objet de corrections chirurgicales systématiques
et évoluées (Dupuis et al., 1991 ; Friedli, 2004 ; Veldtman et al., 2004 ; Pelosi et al., 2006 ; Di Felice et
Zumo, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012).
Chez les carnivores domestiques en revanche, la tétralogie de Fallot reste peu décrite. Comme
chez l’Homme, elle est la cardiopathie cyanogène la plus fréquente, représentant 1 à 6 % des
cardiopathies congénitales (Buchanan, 1999 ; Orton et al., 2001 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Pelosi et al.,
2006 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Oliveira et al., 2010).
La première partie bibliographique présentera de façon comparative l’épidémiologie, la
physiopathologie, l’étiologie, la clinique et la thérapeutique en cardiologie vétérinaire et humaine.
La deuxième partie, expérimentale, sera consacrée à une étude rétrospective ayant porté sur
31 cas de tétralogie de Fallot diagnostiqués à l’Unité de Cardiologie d’Alfort (UCA) et au Centre
Hospitalier Vétérinaire des Cordeliers (Meaux) entre avril 2003 et juin 2014. Les résultats obtenus
seront comparés aux données actuelles de la bibliographie. Enfin, l’intérêt d’étendre certaines
connaissances et techniques de médecine humaine à l’animal sera discuté.
7
8
PREMIERE PARTIE : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE
1. La tétralogie de Fallot chez l'Homme
1.1. Définitions anatomique et embryologique
1.1.1. Définition anatomique
En 1888, Fallot a donné à cette cardiopathie congénitale complexe le nom de tétralogie de Fallot
(TOF) et a décrit ses quatre composantes (Dupuis et al., 1991 ; Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Veldtman
et al., 2004 ; Di Felice et Zumo, 2009 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012)
(Figures 1, 2 et 3) :
- communication interventriculaire (CIV),
- sténose pulmonaire,
- dextroposition de l’aorte,
- hypertrophie du ventricule droit, secondaire à une surcharge de pression qui s’installe au
sein de ce ventricule.
Figure 1 - Représentation schématique d’un cœur sain (Bajolle, 2012)
(Ao) : aorte
(AG) : atrium gauche
(VG) : ventricule gauche
(TP) : tronc pulmonaire
(AD) : atrium droit
(VD) : ventricule droit
9
Figure 2 - Représentation schématique d’un cœur lors de tétralogie de Fallot (Bonow et al.,
2012)
(1) : sténose pulmonaire
(2) : communication interventriculaire
(3) : dextroposition de l’aorte
(4) : hypertrophie du ventricule droit
(Ao) : aorte
(AG) : atrium gauche
(VG) : ventricule gauche
(TP) : tronc pulmonaire
(AD) : atrium droit
(VD) : ventricule droit
Figure 3 - Photographie d’une coupe transversale d’un cœur d’enfant atteint de tétralogie de
Fallot (Moller et Hoffman, 2012)
(AO) : dextroposition de l’aorte
(SI) : septum infundibulaire hypertrophié
(TP) : tronc pulmonaire
(TSP) : trabéculations septo-pariétales hypertrophiées
(VT) : valve tricuspide
(CIV) : communication interventriculaire
★ : bord musculaire (inférieur et postérieur) du septum
interventriculaire séparant les valves tricuspide et aortique
10
1.1.1.1. La sténose pulmonaire : localisation et gravité variables
Lors de TOF, la sténose pulmonaire est toujours infundibulaire (l’infundibulum correspondant à la
partie du ventricule droit d’où naît le tronc pulmonaire) et essentiellement musculaire mais elle peut
comprendre un anneau fibreux. Il en existe trois types :
- sténose infundibulaire basse avec une chambre infundibulaire large en aval, la valve
pulmonaire est alors normale,
- sténose infundibulaire distale avec valve souvent sténosée,
- sténose avec infundibulum long et hypoplasique se terminant par un anneau valvulaire
pulmonaire hypoplasique.
L’infundibulum est toujours concerné. Quant à l’orifice valvulaire, il est atteint dans 2/3 des cas. La
valve est fréquemment bicuspide et le tronc pulmonaire souvent hypoplasique ou sténosé (Friedli,
2004 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012). La présence d’une atrésie pulmonaire complique
la gestion de la maladie et l’évolution est souvent moins favorable (Bonow et al., 2012).
Rarement, l’artère pulmonaire gauche peut être absente. Il est également possible d’observer une
forme de TOF avec absence de valve pulmonaire (chez 2 à 10 % des patients atteints). Cette
anomalie engendre une dilatation importante des artères pulmonaires et le pronostic est assez
sombre (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et Hoffman, 2012).
Dans les formes extrêmes, la TOF peut aussi être compliquée d’une atrésie pulmonaire à septum
ouvert (APSO) caractérisée par l’absence de continuité directe entre le ventricule droit et le tronc
pulmonaire. Il existe 3 formes d’APSO :
- vascularisation pulmonaire assurée par le canal artériel qui irrigue deux artères pulmonaires
bien développées et confluentes avec un tronc pulmonaire présent ou absent,
- deux artères pulmonaires hypoplasiques et vascularisées par le canal artériel ainsi que par
des artères systémiques de gros diamètre naissant de l’aorte descendante ou des artères sousclavières appelées artères collatérales aorto-pulmonaires majeures,
- tronc pulmonaire absent et vascularisation pulmonaire assurée en totalité par des collatérales
aorto-pulmonaires (Tchervenkov et Roy, 2000).
1.1.1.2. La CIV
La CIV est le plus souvent large, haute, unique et de type péri-membraneuse à extension
infundibulaire et sous-aortique. Elle est généralement unique mais il peut parfois exister une CIV
secondaire (chez 3 à 15 % des patients) dans le septum trabéculé. Dans de rares cas, il est également
possible de trouver des CIV multiples (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Moller et Hoffman, 2012).
1.1.1.3. La dextroposition de l’aorte
Le chevauchement de l’aorte est la conséquence du malalignement entre le septum infundibulaire et
le septum trabéculé. Il existe une rotation de la racine de l’aorte qui amène le sinus de Valsalva non
coronarien plus en avant et le sinus de Valsalva coronarien droit vers la gauche. La dextroposition
de l’aorte peut-être plus ou moins marquée selon les patients (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ;
Moller et Hoffman, 2012).
Lors de TOF, la continuité mitro-aortique est néanmoins conservée (Friedli, 2004).
11
1.1.1.4. Les anomalies anatomiques cardiaques associées
Chez 25 % des patients, la TOF est associée à un arc aortique droit. De plus, des anomalies des
artères coronaires sont retrouvées chez un tiers des patients (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Moller
et Hoffman, 2012) et sont très importantes à objectiver avant d’envisager une chirurgie. L’anomalie la
plus fréquente, retrouvée chez 4 % des patients atteints de TOF, est la suivante : la branche
descendante antérieure de l’artère coronaire gauche provient du segment proximal de l’artère
coronaire droite et emprunte un trajet inadapté en traversant la chambre de chasse du ventricule
droit (Figures 4 et 5) (Karl, 2012 ; Moller et Hoffman, 2012).
Figure 4 - Schéma présentant l’anatomie de la vascularisation cardiaque chez un individu
sain (Dyce et al., 2002)
(1) : tronc pulmonaire
(2) : artère coronaire gauche
(2’) : branche interventriculaire paraconale de l’artère coronaire gauche
(2’’) : branche circonflexe de l’artère coronaire gauche
(3) : grande veine cardiaque
(3’) : branche interventriculaire paraconale de la grande veine cardiaque
12
Figure 5 - Aortogramme (projection grand axe oblique/crâniale) présentant l’anomalie de
distribution des artères coronaires la plus fréquente chez les patients atteints de tétralogie de
Fallot (Moller et Hoffman, 2012)
(ACC) : artère coronaire circonflexe
(ACG) : artère coronaire gauche
(ACD) : artère coronaire droite
La branche descendante antérieure de l’artère coronaire gauche provient du segment proximal de l’artère
coronaire droite et emprunte un trajet inadapté en traversant la chambre de chasse du ventricule droit.
1.1.2. Définition embryologique
1.1.2.1. Rappels sur le développement embryonnaire du cœur humain
1.1.2.1.1. Développement cardiaque embryonnaire global
La région cardiogénique se trouve dans le mésoderme splanchnopleural, à l’extrêmité crâniale du
disque embryonnaire. Elle comprend l’ébauche du cœur et a une forme de fer à cheval.
L’endoderme sous-jacent émet des signaux qui vont induire la formation d’une paire de tubes
endocardiques latéraux par fusion des cordons angioblastiques. Lors de la 4ème semaine, l’embryon
subit des courbures céphalique et latérale et un déplacement vers la ligne médiane dans la région
thoracique puis les tubes endocardiques s’unissent pour former un tube cardiaque primitif. Entre la
5ème et la 8ème semaine, le tube cardiaque primitif s’infléchit, est remanié et cloisonné en quatre
cavités du cœur définitif avec mise en place de la séparation des circulations pulmonaire et fœtale
qui se produira à la naissance (Lee et Hyun, 2009).
1.1.2.1.2. Développement du septum interventriculaire et de la voie
d’émergence du cœur
A la fin de la 4ème semaine, la partie inférieure du sillon interventriculaire commence à faire
protrusion dans la lumière cardiaque et à délimiter deux cavités (Figure 6). La croissance de ce
septum musculaire ventriculaire s’arrête au milieu de la 7ème semaine avant qu’il ne rencontre le
septum intermedium. Les deux ventricules communiquent entre eux par le foramen
interventriculaire et par la base élargie du cône du tronc. Un cloisonnement plus abouti des
ventricules et de la voie d’émergence doit alors se faire avec une très grande coordination pour que
le cœur ait un fonctionnement normal. La voie d’émergence du cœur est séparée en deux grâce à
13
deux bourrelets volumineux qui se forment à partir des parois opposées du cône du cœur et du tronc
artériel pour se rejoindre. Ensuite, ces bourrelets s’amincissent avant de se rejoindre pour former un
septum qui sépare totalement les voies d’émergence des ventricules droit et gauche. Enfin, le tronc
artériel se sépare en aorte ascendante et en tronc pulmonaire grâce à une fente qui se développe
dans le plan du septum. La séparation totale des courants aortique et pulmonaire a lieu lorsque,
entre la 5ème et la 8ème semaine, les bourrelets du conotronc fusionnent avec le bourrelet
endocardique inférieur et le septum musculaire interventriculaire. Les ventricules droit et gauche
sont alors totalement isolés l’un de l’autre (Larsen, 2001).
Figure 6 - Schéma présentant le cloisonnement des ventricules au 46ème jour du développement
embryonnaire (Larsen, 2001)
Mise en place progressive du septum musculaire interventriculaire dans la région du sillon
interventriculaire au 46ème jour du développement embryonnaire.
1.1.2.2. Anomalies embryologiques induisant l’apparition d’une TOF
1.1.2.2.1. Caractéristiques embryologiques des anomalies observées
La TOF est un exemple de cardiopathie pour laquelle une malformation cardiaque primaire
engendre une cascade d’anomalies (Larsen, 2001).
Embryologiquement, il s’agit de l’aboutissement d’une anomalie unique : la déviation antérieure et
supérieure du septum infundibulaire (ou conal) séparant normalement les chambres de chasse
ventriculaires droite et gauche. Le septum conal ne fusionne pas avec le septum interventriculaire
(Becker et Anderson, 1981 ; Larsen, 2001 ; Friedli, 2004 ; Moller et Hoffman, 2012). Autrement dit, la
TOF résulte d’un mauvais alignement entre le septum musculaire et les orifices de départ de l’aorte
et du tronc pulmonaire. D’une part, il existe une absence de fusion des septa ventriculaires
musculaire et membraneux ainsi qu’une dextroposition de l’aorte. D’autre part, les tissus musculaire
et fibreux du septum anormal et les trabécules ventriculaires mal positionnés causent un
rétrécissement de l’orifice sous-pulmonaire et donc une sténose pulmonaire. Suite à cela, les
orifices de l’aorte et du tronc pulmonaire ne s’alignent pas convenablement avec les régions
14
d’émergence des deux ventricules (Larsen, 2001).
1.1.2.2.2. Localisation des cellules précurseurs de la région conotroncale
Cette anomalie semble avoir pour origine une migration anormale des cellules de la crête neurale
qui sont responsables de la différentiation du conotronc (Di Felice et Zumo, 2009). Le conotronc est
l’extrêmité supérieure du bulbe du cœur qui donnera le cône du cœur et le tronc artériel (Larsen,
2001). Cette région embryonnaire est composée de deux segments myocardiques : le conus et le
truncus. Dans un cœur normal, ces deux segments se différencient en valves semi-lunaires et en
infundibulum sous-pulmonaire (appelé chambre de chasse ventriculaire droite). Le truncus est le
segment antérieur qui se différencie pour former deux orifices distincts des valves semi-lunaires de
l’aorte et du tronc pulmonaire. Le conus se différencie quant à lui en infundibulum sous-pulmonaire
(Di Felice et Zumo, 2009).
Depuis 2001, plusieurs équipes ont montré qu’il existe une seconde source de précurseurs
cardiaques, nécessaire au développement du cœur des vertébrés. Cette population de cellules,
localisée dans le mésoderme pharyngé ventral, contribue à la formation des pôles artériel et veineux
du cœur, ainsi qu’au ventricule droit. Le territoire formé par ces précurseurs cardiaques est appelé
« second champ cardiaque » (Figure 7). Il fournit les précurseurs des atria, du ventricule droit et de
la région conotroncale. Le retrait de ce second champ cardiaque conduit à des malformations
typiques de la TOF (Di Felice et Zumo, 2009).
15
Figure 7 - Localisation du second champ cardiaque au cours du développement embryonnaire
(Di Felice et Zummo, 2009)
La zone gris foncé représente la localisation au cours du développement embryonnaire des cellules
précurseurs cardiaques provenant du second champ cardiaque.
La TOF fait donc partie des anomalies conotroncales (Figures 8 et 9) (Clark, 1986 ; Larsen, 2001 ; Di
Felice et Zumo, 2009). Le conotronc se forme donc grâce aux cellules de la crête neurale et du second
champ cardiaque (Di Felice et Zumo, 2009).
La découverte de cette seconde source de précurseurs cardiaques pourrait permettre d’identifier de
nouveaux gènes impliqués dans l’apparition de la TOF (Clark, 1986 ; Di Felice et Zumo, 2009).
16
Figure 8 - Classification des cardiopathies congénitales (Clark, 1986)
1. ANOMALIES DE MIGRATION DES CELLULES DE LA CRETE
NEURALE : CARDIOPATHIES CONOTRONCALES
1.1. Anomalies de la région conotroncale
- Truncus arteriosus communis
- Tétralogie de Fallot
- Atrésie pulmonaire avec communication interventriculaire
- Agénésie des valves pulmonaires
- Communication interventriculaire avec malalignement du septum conal
- Certaines formes de malposition vasculaire
1.2. Anomalies des arcs aortiques
- Arc aortique droit
- Interruption de la crosse sous-clavière rétro-oesophagienne
- Double arc aortique
2. LES CARDIOPATHIES DE DEBIT
2.1. Cardiopathies de réduction du débit
2.1.1. Du cœur gauche
- Syndrome d’hypoplasie du cœur gauche
- Rétrécissement mitral congénital
- Sténose sous-aortique
- Sténose aortique sur valve mono- ou bicuspide
- Coarctation isthmique de l’aorte
2.1.2. Du cœur droit
- Atrésie pulmonaire à septum interventriculaire intact
- Sténose valvulaire pulmonaire
- Valve pulmonaire bicuspide
2.2. Cardiopathies d’excès de flux
- Communication interatriale type ostium secundum
3. ANOMALIES DE LA MORT CELLULAIRE
- Communication interventriculaire musculaire
- Maladie d’Ebstein (valve tricuspide)
4. ANOMALIES DE LA MATRICE EXTRACARDIAQUE
- Communication interatriale ostium primum
- Valve pulmonaire ou aortique dysplasique
- Canaux atrio-ventriculaires sous toutes leurs formes
5. ANOMALIES CIBLEES DU DEVELOPPEMENT
- Retour veineux pulmonaire anormal
6. ANOMALIES DE LA BOUCLE CARDIAQUE PRIMITIVE
- Anomalies du situs viscéro-atrial avec ou sans cardiopathie complexe
- Isomérismes atriaux
- Doubles discordances ou transpositions corrigées des gros vaisseaux
17
Figure 9 - Représentation schématique des caractéristiques des différentes anomalies
conotroncales (Bajolle, 2012)
CŒUR SANS ANOMALIE
T4F
APSO
18
AVP
1.2. Epidémiologie
Chez l’Homme, les cardiopathies représentent 26 % des malformations congénitales (Levi et al.,
2003) et sont responsables de plus de 20 % des morts périnatales liées à une affection congénitale
(tous organes confondus) (Young et Clarke, 1987). Environ 8 nouveau-nés sur 1000 sont affectés par
une cardiopathie congénitale (Montana et al., 1996). De plus, 25 à 30 % des cardiopathies
congénitales sont associées à des anomalies extra-cardiaques pouvant affecter différents appareils :
musculo-squelettique, nerveux, urogénital, digestif…(Copel et al., 1986).
La TOF représente 5 à 10 % des cardiopathies congénitales (Dupuis et al., 1991 ; Friedli, 2004 ;
Veldtman et al., 2004 ; Pelosi et al., 2006 ; Di Felice et Zumo, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Moller et
Hoffman, 2012). Elle est la plus fréquente des cardiopathies cyanogènes. Selon différents auteurs,
elle toucherait 1 (Di Felice et Zumo, 2009 ; Bonow et al., 2012) à 3 (Larsen, 2001) nouveau-nés sur 3000
naissances. Les enfants nés d’une mère atteinte de TOF ont plus de risque d’être atteints d’une
cardiopathie congénitale avec une incidence d’environ 3,1 % (Veldtman et al., 2004). La TOF semble
affecter autant les filles que les garçons (Apitz et al., 2009).
1.3. Physiopathologie
La direction du shunt et son intensité dépendent de la gravité de la sténose pulmonaire (Friedli,
2004 ; Bonow et al., 2012). Si cette dernière est modérée, la pression au sein du ventricule droit n’est
que modérément augmentée et le shunt sera donc majoritairement « gauche-droit » alors que si la
sténose est serrée, le shunt sera « droite-gauche » et s’accompagnera ainsi d’un débit pulmonaire
diminué. La surcharge de pression au sein du ventricule droit engendre l’hypertrophie de celui-ci
(Friedli, 2004). Le pronostic est établi en fonction de la gravité de la sténose pulmonaire. En absence
de collatérales aorto-pulmonaires, l’intensité de la cyanose est le reflet de la gravité de la sténose
pulmonaire et du niveau de résistance vasculaire systémique (Bonow et al., 2012).
1.4. Etiologie
Dans les années 90, des études épidémiologiques au sein de familles touchées par des
malformations cardiaques congénitales ont rapidement mis en évidence une agrégation familiale de
celles-ci. Ces découvertes ont fait naître l’hypothèse d’une composante génétique dans le
déterminisme des cardiopathies congénitales. Les modèles de transmission n’étaient pas
compatibles avec une transmission monogénique à pénétrance complète. Suite à ces études, la
plupart des malformations cardiaques congénitales ont été qualifiées de multifactorielles.
Rapidement, la composante génétique a été dite polygénique ce qui signifie qu’elle est due à de
nombreux gènes dont les effets individuels sont faibles mais cumulatifs. Cependant, plus
récemment, le terme « multifactoriel » a été utilisé pour faire référence aux situations dans
lesquelles l’anomalie est causée par une combinaison de facteurs génétiques, stochastiques et
environnementaux. En effet, les maladies polygéniques sont des maladies multifactorielles, la
composante génétique polygénique étant très généralement en interaction avec des facteurs
environnementaux. Il a été estimé que 8 à 20 % des anomalies cardiaques congénitales sont dues à
des anomalies chromosomiques ou à la mutation d’un ou plusieurs gènes, que 2 à 9 % sont dues à
un facteur de risque environnemental et/ou maternel et que les 71 à 90 % restantes sont
multifactorielles (Ferencz et al., 1989 ; Nora, 1993 ; Patterson et al., 1993). Lorsque les parents ne
présentent aucune anomalie chromosomique et qu’il n’y pas de cas rapporté de cardiopathie
19
congénitale dans la famille, le risque pour un fœtus de présenter une cardiopathie congénitale est de
5 à 6 % (Bonow et al., 2012).
L’étiologie de la TOF est donc qualifiée de multifactorielle comme pour la majorité des
cardiopathies congénitales (Villafane et al., 2013). Toutefois, il existe parfois une accumulation de
cas au sein d’une même famille pouvant évoquer une hérédité mendélienne. Cela a donc encouragé
de nombreuses études visant à mieux comprendre le déterminisme génétique de la TOF (Friedli,
2004).
Les principaux événements permettant la septation de la chambre de chasse sont en lien avec les
cellules précardiaques du 2ème territoire cardiaque et les cellules de la crête neurale ainsi qu’avec
leurs interactions. Par conséquent, les anomalies de la septation de la chambre de chasse pourraient
être liées à des anomalies des gènes qui gouvernent la multiplication, la migration et la survie de ces
deux populations cellulaires (Moller et Hoffman, 2012).
1.4.1. Association de la TOF avec d’autres syndromes
La TOF peut survenir seule ou en association avec d’autres anomalies tels que les syndromes de
DiGeorge (ou syndrome vélo-cardio-facial), de Down (ou trisomie 21), d’Alagille ou de Holt-Oram
(Allan et al., 1994 ; Harris et al., 2003 ; Bonow et al., 2012 ; Villafane et al., 2013). Il a ainsi été estimé
que 10 à 27 % des TOF sont associées à des anomalies chromosomiques (Allan et al., 1994 ; Harris et
al., 2003 ; Villafane et al., 2013).
1.4.1.1. Le syndrome de DiGeorge ou syndrome vélo-cardio-facial
Le syndrome de DiGeorge est associé à la TOF dans 15 % des cas. Il concerne une naissance sur
2000 à 4000 et son mode de transmission est autosomique dominant. Il se caractérise par des
malformations de la chambre de chasse droite du cœur, une hypocalcémie secondaire à une
hypoplasie des parathyroïdes, une hypoplasie thymique et fréquemment des anomalies
neurologiques. Les manifestations cliniques sont variables et sont fonction de l’expressivité de la
maladie. Le Syndrome de DiGeorge est dû à une microdélétion au niveau du locus 22q11. La
microdélétion résulte de la recombinaison homologue entre des séquences qui encadrent le locus
22q11, avec excision d’environ trois millions de paires de bases qui délète une quarantaine de gènes
dont TBX1 (T-box transcription factor 1), qui est impliqué dans la plupart des phénotypes associés
au syndrome de DiGeorge. Les patients touchés par ce syndrome présentent une perturbation dans
la migration des cellules de la crête neurale.
Le gène TBX1 fonctionnel est en effet nécessaire à la migration des cellules de la crête neurale mais
les gènes cibles régulés par ce facteur de transcription sont encore méconnus (Bonow et al., 2012).
Un syndrome moins sévère que le syndrome de DiGeorge est également dû à une microdélétion
22q11. Il ne comporte pas d’anomalie immunologique, ni d’hypocalcémie, mais une TOF et se
nomme le syndrome de Shprintzen (Villafane et al., 2013).
Les anomalies conotroncales au sens large semblent souvent en relation avec cette microdélétion du
chromosome 22 (locus 22q11.2) (Bonow et al., 2012). Le screening du chromosome 22 est
maintenant réalisé en routine chez les fœtus et les nouveau-nés atteints d’une malformation
conotroncale. Cependant, nous ne savons toujours pas pourquoi cette haplo-insuffisance présente
une telle variabilité de pénétrance et d’expressivité (Di Felice et Zumo, 2009).
20
1.4.1.2. Le syndrome de Down (trisomie 21)
Il a été montré que 7 % des cas de TOF sont associés à une trisomie 21. La trisomie 21 représente 1
naissance sur 600, il s’agit de l’anomalie chromosomique la plus fréquente chez l’Homme. Elle
inclut des anomalies de la face, de l’audition, un retard mental et des malformations cardiaques
congénitales majeures dans 40 à 50 % des cas, dont la TOF. Les patients atteints sont plus sujets
aux leucémies, à la démence progressive et à la maladie d’Alzheimer, ces maladies pouvant
apparaître précocement. La vascularisation peut également subir un vieillissement prématuré (Di
Felice et Zumo, 2009). Des microdélétions isolées et fréquentes découvertes récemment et présentes
chez des patients atteints de trisomie 21 semblent être responsables des malformations observées
dans la TOF et font encore l’objet de recherche (Bonow et al., 2012).
1.4.1.3. Le syndrome d’Alagille
La TOF peut également apparaître chez des patients touchés par le syndrome d’Alagille. Une étude
a montré qu’1 à 2 % des patients atteints de TOF et d’un syndrome d’Alagille ont une mutation
d’un gène codant un récepteur transmembranaire NOTCH2 (Notch homolog 2) ou du gène codant
son ligand JAG1 (Jagged 1). Le gène JAG1 code une protéine hautement conservée qui permet un
signalement intra-cellulaire déterminant le devenir des cellules. Or, l’ARNm de JAG1 s’exprime
dans le développement cardiaque des mammifères et sa perturbation chez la souris engendre un
développement cardiovasculaire anormal et de la mortalité embryonnaire (Di Felice et Zumo, 2009 ;
Bonow et al., 2012).
1.4.1.4. Le syndrome de Holt-Oram
La TOF peut parfois toucher des patients atteints du syndrome de Holt-Oram. Celui-ci concerne 1
cas pour 100000 naissances vivantes et se caractérise par des cardiopathies congénitales de gravité
variable ainsi que par des anomalies du squelette des membres supérieurs (absence ou anomalie du
radius, anomalies transversales du membre supérieur et diverses des pouces) (Bossert et al., 2003 ;
Bonow et al., 2012). Ce syndrome se transmet suivant un mode autosomique dominant dont la
pénétrance est complète. L’anomalie génétique en cause se situe sur le bras long du chromosome 12
(12q2) où se trouvent les gènes TBX3 (T-box transcription factor 3) et TBX5 (T-box transcription
factor 5) dont les mutations donnent lieu à une importante variabilité phénotypique (Bossert et al.,
2003).
1.4.2. Gènes qui pourraient être impliqués dans l’apparition d’une TOF isolée
Plusieurs gènes, lorsqu’ils sont mutés, pourraient être impliqués dans l’apparition de cas de TOF
isolée : ZFPM2 (Zinc finger protein FOG family member 2), NKX2.5 (NK2 transcription factor
related, locus 5 aussi appelé CSX pour cardiac homeobox gene), le complexe transcriptionnel formé
par GATA4 (GATA binding protein 4) et FOG2 (FOG family member 2) et le gène VGEF (Vascular
endothelial growth factor) (Felice et Zumo, 2009, Lee et Hyun, 2009 ; Moller et Hoffman, 2012).
1.4.2.1. Le gène ZFPM2
Une étude récente a passé au crible le gène ZFPM2 qui est un régulateur du facteur de transcription
GATA. Une mutation hétérozygote de ce gène a été mise en évidence et semble responsable de
plusieurs cas isolés de TOF (Lee et Hyun, 2009).
Dans une autre étude, le gène ZFPM2 a été séquencé chez quelques patients atteints de TOF et deux
mutations dans l’exon codant du gène ont été identifiées : substitution A>G qui entraine un
21
changement de l’acide aminé 1968 dans la protéine et substitution A>G qui entraine une
modification de l’acide aminé 88 (Lee et Hyun, 2009).
D’autres mutations connues du gène ZFPM2 ont été localisées sur le motif en doigt de Zinc et
touchent les 30ème (E30G) et 657ème (S657G) acides aminés. Or, une quelconque modification du
domaine en doigt de Zinc qui se fixe à l’ADN impacte l’activation de nombreux gènes cardiaques
régulés en aval par ZFPM2 (Lee et Hyun, 2009).
1.4.2.2. Le gène NKX2.5 (CSX)
Il a été mis en évidence chez 4 % des patients atteints de TOF une mutation du gène NKX2.5
(également appelé CSX). Il code une protéine homéobox cardiaque qui est essentielle pour obtenir
un développement cardiaque normal. Ce gène régule la formation cardiaque primitive et une
fonction commune pourrait exister chez tous les mammifères. Il s’agit du marqueur le plus précoce
identifié chez des cellules souches myocardiques. Chez les mammifères, son inactivation engendre
une mortalité embryonnaire. Grâce à ces études, il est désormais clair que le gène NKX2.5 joue un
rôle majeur dans la détermination du destin des cellules myocardiques.
Différents types de mutation du gène NKX2.5 ont été identifiés chez des patients atteints de TOF
mais la plus fréquente est la substitution Arg25Cys en position 25 dans la protéine. Des études
concernant cette mutation ont révélé une localisation nucléaire et une fixation à l’ADN conservées
de la protéine mutante. Par contre, pour un fonctionnement semblable de la protéine mutante, sa
concentration doit être trois fois supérieure à celle de la protéine normale. Cela suggère une
dimérisation affaiblie dans les cellules possédant une protéine NKX2.5 mutante.
Cependant, une étude récente a fait l’hypothèse que la mutation Arg25Cys pourrait être en réalité un
polymorphisme et pas une mutation conduisant à des anomalies cardiaques pour trois raisons :
- la mutation Arg25Cys ne se trouve pas dans un domaine important pour la fonction de la
protéine, ce qui signifie que la cystéine erronée ne serait pas directement en cause mais elle
induirait une différence de potentiel hydrostatique,
- des homologues de ce gène ont un acide aminé glutamine en position 25, suggérant une
conservation relativement faible de l’acide aminé en position 25,
- les protéines possédant cette substitution ont un site de liaison normal à l’ADN.
D’autres auteurs pensent que cette substitution n’est présente que pour un petit pourcentage
d’individus atteints de TOF, tandis que certains affirment qu’il n’y a pas de preuves formelles
permettant de l’impliquer dans cette cardiopathie. D’autres investigations semblent donc
nécessaires pour préciser l’implication du gène NKX2.5 dans l’étiologie de la TOF (Felice et Zumo,
2009).
1.4.2.3. Le complexe transcriptionnel formé par GATA4 et FOG2
Le complexe transcriptionnel formé par les protéines GATA4 et FOG2 est indispensable pour le
développement et la morphogénèse cardiaque (Di Felice et Zumo, 2009 ; Lee et Hyun, 2009). Il agit en
tant qu’inhibiteur et activateur de la transcription.
Des recherches récentes ont confirmé que les mutations lésant le complexe GATA4/FOG2
pourraient jouer un rôle dans la migration et le comportement des cellules précardiaques lors du
développement du cœur et dans l’apparition de la TOF (Di Felice et Zumo, 2009).
1.4.2.4. Le gène VEGF
Une étude récente a mis en évidence une association entre un haplotype, composé de deux allèles
pour deux SNP (single nucleotide polymorphism) situés dans le promoteur et dans la séquence
codante de VEGF, avec un risque accru de TOF (Lee et Hyun, 2009 ; Moller et Hoffman, 2012).
22
1.4.2.5. Autres gènes et locus
Plusieurs polymorphismes situés dans différents gènes ont également été mis en évidence comme
associés au développement d’une TOF : dans GDF1 (Growth differentiation factor 1), CFC1
(Cryptic family 1), FOXH1 (Forkhead box H1), TDGF1 (Teratocarcinoma-derived growth factor
1), NODAL (Nodal growth differentiation factor), GATA6 (GATA binding protein 6) ou encore dans
LPP (Lipoma preferred partner) (Villafane et al., 2013).
De plus, des CNV (Copy number variant), ont été mis en évidence chez des patients atteints de
TOF. Ils intéressaient des régions chromosomiques variées telles que les locus 1q21, 3p25, 7p21 et
22q11 (Villafane et al., 2013).
Les mécanismes sous-jacents de la TOF ont pendant longtemps été négligés par les chercheurs. Ce
n’est que récemment que différentes mutations ont été découvertes et nous ne sommes qu’au début
de la compréhension de la composante génétique de cette cardiopathie.
Les différentes mutations qui ont pu être mises en évidence chez les patients atteints de TOF ont
permis de faire l’hypothèse suivante : la TOF pourrait être due à une altération de la multiplication,
de la différenciation ou de la migration des cellules précardiaques du 2ème territoire cardiaque du
mésoderme durant le développement embryonnaire du cœur. Il apparaît donc nécessaire de
comprendre le comportement des cellules souches du cœur afin d’envisager un jour de corriger la
TOF sans affecter le fonctionnement global du cœur.
De nombreuses études sont en cours et seront nécessaires pour confirmer l’implication de certains
gènes dans l’apparition de cette cardiopathie congénitale.
1.5. Signes cliniques
1.5.1. Chez le nouveau-né
Les nouveau-nés atteints de TOF ne présentent souvent aucun symptôme à la naissance car la
sténose pulmonaire est fréquemment très modérée et de ce fait, il n’existe pas encore de shunt
droite-gauche. Cette sténose modérée peut empêcher l’établissement d’un shunt gauche-droite par la
CIV protégeant ainsi la circulation pulmonaire d’un débit excessif. Il n’y a alors pas d’insuffisance
cardiaque (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012).
A la palpation, un choc à droite et un signe de Harzer sont souvent rapportés (palpation d'un choc de
pointe au niveau de l'épigastre) (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012).
A l’auscultation, le premier bruit est unique et peut être associé à un clic de dilatation aortique dans
les formes graves (principalement lorsqu’une atrésie pulmonaire est présente). Le deuxième bruit
est unique, claqué et aortique car le deuxième bruit pulmonaire est inaudible. Il existe un souffle
éjectionnel, losangique et de haute fréquence lié à la sténose infundibulaire. Un souffle long
pansystolique est en faveur d’une sténose modérée tandis qu’un souffle court témoigne d’une
sténose très serrée avec un infundibulum qui se ferme en systole et qui bloque le flux sanguin
(Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012).
Lorsque la sténose pulmonaire est très peu marquée, elle ne prévient pas l’établissement d’un shunt
gauche-droite à travers la CIV non restrictive, une insuffisance cardiaque peut donc survenir lors de
la chute des résistances pulmonaires qui intervient à la naissance (Friedli, 2004).
23
A l’opposé, certains patients sont atteints de sténose pulmonaire très marquée d’emblée, voire
d’atrésie du tronc pulmonaire. La cyanose demeure peu importante jusqu’à la fermeture du canal
artériel (la plupart du temps dans les 72 heures suivant la naissance). Lors de sa fermeture, une
hypoxémie associée à une cyanose grave apparaît brutalement (Friedli, 2004).
Les nourrissons atteints de TOF présentent le plus souvent une prise de poids normale dans les
premiers mois de vie (Friedli, 2004).
1.5.2. Chez l’enfant
Les symptômes de TOF sont de moins en moins observés chez l’enfant en raison de la correction
chirurgicale qui est réalisée de plus en plus précocement. Ils sont variés et souvent invalidants :
- une cyanose centrale (touchant à la fois les muqueuses et les téguments) dont la gravité
augmente au fil des années. Elle est exacerbée lors d’efforts, de pleurs et apparaît plus nette
au froid. Lorsque la saturation en dioxygène (O2) diminue à 75-80 %, il s’agit d’une
indication chirurgicale urgente (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009),
- un hippocratisme digital (conséquence de la cyanose chronique) qui apparaît en plusieurs
mois. Dans un premier temps, les ongles s’incurvent en verre de montre puis, dans un
second temps, les phalangettes s’élargissent donnant un aspect singulier aux doigts qui
ressemblent alors à des « baguettes de tambour » (Figure 10) (Laplane et al., 1977 ; Friedli,
2004),
Figure 10 - Hippocratisme digital chez une fillette atteinte de tétralogie de Fallot (Laplane
et al., 1977)
Hypertrophie de la dernière phalange, bombement unguéal en verre de montre et cyanose des extrémités
-
un accroupissement souvent après l’effort ou une mise en position génupectorale qui
représentent des moyens instinctifs de lutte contre l’hypoxie. Cela réduit le shunt droitegauche par augmentation de la résistance périphérique (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012),
une intolérance à l’effort qui se caractérise par une dyspnée et une fatigue marquées (Friedli,
2004 ; Bonow et al., 2012),
-
des crises hypoxiques (surtout après l’âge d’1 an) s’accompagnant d’une cyanose et d’une
tachypnée. L’enfant devient gris, pâle et dans les formes graves, une perte de connaissance
peut survenir. Les éléments déclencheurs sont une émotion, une angoisse, un cathétérisme
cardiaque, une anesthésie… A l’auscultation, le souffle systolique disparaît durant une crise
(car l’infundibulum se ferme) (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009). La mise en position genupectorale
24
est conseillée durant la crise pour augmenter la résistance périphérique (Jonas, 2009). Les
crises sont suivies d’une période de cyanose où la saturation artérielle en O2 est inférieure à
20-30 %. Il peut exister des séquelles cérébrales (suite à des accidents vasculaires cérébraux
par hypoxie) et quelques rares patients décèdent (surtout si les crises sont récurrentes)
(Friedli, 2004 ; Jonas, 2009),
-
un retard staturo-pondéral est fréquent mais généralement modéré (Friedli, 2004).
1.6. Examens complémentaires
1.6.1. Radiographie thoracique
La radiographie peut mettre en évidence deux caractéristiques majeures : une hypoperfusion
pulmonaire et un cœur « en sabot » (forme typique mais inconstante, Figure 11). Le cœur est de
taille normale ou discrètement augmentée. Le ventricule droit est proéminent et il existe une
concavité anormale au niveau de la chambre de chasse du ventricule droit et du tronc pulmonaire.
Un arc aortique est présent dans 25 % des cas. L’aorte ascendante est souvent proéminente (Friedli,
2004 ; Bonow et al., 2012). Chez le nouveau-né, seule l’hypoperfusion pulmonaire et l’arc aortique
droit peuvent orienter le diagnostic à la radiographie thoracique (Friedli, 2004).
Figure 11 - Radiographie de thorax (vue de face) chez un patient atteint de tétralogie de Fallot
(Shelton, 2007)
Flux sanguin asymétrique avec augmentation du flux à droite. Hypertrophie du ventricule droit et segment
artériel pulmonaire concave.
25
1.6.2. Echocardiographie-Doppler
Un diagnostic complet peut être établi par les examens échocardiographique et Doppler seuls.
Ils permettent d’examiner l’intensité et la direction des flux cardiaques. L’équation modifiée de
Bernoulli permet de convertir la vitesse maximale du flux en unité de pression (mmHg).
Gradient de pression entre deux chambres cardiaques (mmHg) = 4*(vitesse maximale du flux)2
La coupe « grand axe » permet de mettre en évidence une CIV, une dextroposition de l’aorte, une
continuité mitro-aortique, une sténose pulmonaire (sous-valvulaire, valvulaire ou supra-valvulaire
pouvant inclure une artère pulmonaire), une dilatation et une hypertrophie du ventricule droit
(Figure 12) (Friedli, 2004 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012).
La coupe « petit axe » parasternale met en évidence la chambre de chasse droite. Elle est facile à
visualiser chez le nourrisson mais cela est plus difficile chez l’enfant. Il est alors possible de
mesurer l’anneau valvulaire, le tronc pulmonaire et les branches proximales. Une évaluation du
diamètre des artères pulmonaires peut aussi être obtenue en position suprasternale (Friedli, 2004 ;
Bonow et al., 2012). En utilisant un abord parasternal, le Doppler pulsé ou continu permet d’estimer
le gradient de pression maximal sur la chambre de chasse droite grâce à l’équation de Bernoulli
(Friedli, 2004 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012). Il est possible de grader la sténose en fonction du
gradient de pression transvalvulaire maximal. Si le gradient est inférieur à 25 mmHg, la sténose est
discrète, s’il est compris entre 25 et 50 mmHg, elle est modérée et s’il est supérieur à 50 mmHg,
elle est importante. Les modes Doppler couleur et continu permettent de mettre en évidence une
éventuelle régurgitation pulmonaire concomitante, plus fréquente après une correction chirurgicale
totale comme nous le verrons. La visualisation de la valve pulmonaire est très difficile que ce soit
par abord transthoracique ou transœsophagien (Otto et al., 2011).
Figure 12 - Caractéristiques échocardiographiques de la tétralogie de Fallot présentées en
miroir avec les anomalies anatomo-pathologiques (Bonow et al., 2012)
(AO) : aorte
(SI) : septum infundibulaire
(AG) : atrium gauche
(VG) : ventricule gauche
(TP) : tronc pulmonaire
(AD) : atrium droit
(VD) : ventricule droit
26
1.6.3. Examen électrocardiographique
L’anomalie la plus souvent retrouvée est une déviation axiale droite de 120 à 150°. L’hypertrophie
du ventricule droit engendre une onde R exclusive ou prédominante avec une petite onde S dans les
dérivations précordiales droites V3R, V4R et V1. L’onde S prédomine déjà souvent en V2 et elle
est profonde jusqu’en V6. Les signes de dilatation atriale droite sont inconstants (Friedli, 2004). La
largeur du complexe QRS est le reflet de l’ampleur de la dilatation du ventricule droit et peut être
un facteur de risque de tachycardie ventriculaire et de mort subite (Bonow et al., 2012).
Les particularités retrouvées à l’examen électrocardiographique des patients opérés de TOF seront
détaillées dans la partie évolution et complications (cf. paragraphe 1.10, page 38).
1.6.4. Examens sanguins
L’hypoxie chronique induit une polyglobulie progressive qui permet dans un premier temps
d’accroître la capacité de transport de l’O2 dans le sang. Néanmoins, lorsque l’hématocrite devient
supérieur à 65 %, une hyperviscosité sanguine s’installe et va être à l’origine d’une diminution du
débit cardiaque et donc du transport en O2 (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012).
Une carence martiale (déficit en fer) est fréquemment retrouvée chez le nourrisson et peut entraîner
une anémie hypochrome microcytaire arégénérative (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012).
1.6.5. Cathétérisme cardiaque et angiographie
Le cathétérisme cardiaque a été l’examen pré-opératoire de choix mais il est aujourd’hui rarement
nécessaire avant une correction chirurgicale totale grâce à l’évolution de l’examen écho-Doppler et
de l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Le cathétérisme cardiaque doit en particulier être
évité chez les patients dont les crises hypoxiques sont difficilement contrôlées (Friedli, 2004 ; Schultz
et Wernovsky, 2005 ; Bonow et al., 2012). Il reste un examen pré-opératoire de choix en cas de doute
sur l’arborisation des artères pulmonaires ou sur l’anatomie des artères coronaires (Friedli, 2004 ;
Bonow et al., 2012).
Quant à l’angiographie, elle permet une excellente visualisation de la chambre de chasse droite et
des artères pulmonaires jusqu’en périphérie. Elle apporte au chirurgien un bilan anatomique
complet et précis. L’examen se termine systématiquement par une aortographie qui permet de
suspecter une anomalie des artères coronaires. En cas de doute, une coronarographie sélective est
réalisée et précise l’existence d’éventuelles anomalies de l’origine et de la distribution des artères
coronaires qui sont des informations capitales pour le chirurgien (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012).
1.6.6. IRM
L’IRM présente également un intêret considérable pour préciser les caractéristiques anatomiques de
la TOF. En effet, elle permet l’évaluation quantitative du volume et de la fraction d’éjection des
deux ventricules. De plus, la chambre de chasse droite, les artères pulmonaires, l’aorte et les
collatérales aorto-pulmonaires peuvent être parfaitement visualisées. Enfin, les régurgitations
pulmonaire, aortique et tricuspide peuvent être quantifiées avec précision (Friedli, 2004 ; Jonas,
2009 ; Otto et al., 2011 ; Bonow et al., 2012).
27
1.7. Diagnostic anténatal
En France, le cœur fœtal est systématiquement évalué à l’échographie depuis 1985 car la majorité
des cardiopathies congénitales surviennent chez des femmes qui ne présentent pas de facteurs de
risque particuliers (Allan, 2000).
La détection de la TOF s’est beaucoup améliorée entre les années 80 et 2000, en effet, elle serait
passée de 20 % en 1983 à 69,7 % en 2000. Une étude publiée en 2002 a estimé que près de 83 %
des cardiopathies congénitales sont détectables à l’examen échographique anténatal. Ce
pourcentage est bien entendu très variable suivant la qualité du matériel utilisé et l’expérience de
l’opérateur (Carvalho et al., 2002).
Une étude réalisée dans un centre spécialisé avec des imageurs chevronnés et sur une population
référée (donc à risque) donne un pourcentage de détection anténatale de la TOF de 81 %. Le cœur
fœtal peut néanmoins être difficile à observer en raison d’une position fœtale inadaptée et/ou d’une
mauvaise échogénicité du liquide amniotique (Kaguelidou, 2006).
Lorsqu’une TOF est diagnostiquée pendant la grossesse, une recherche d’anomalies
chromosomiques et/ou extra-cardiaques est systématiquement réalisée (Khoshnood et al., 2005).
1.8. Traitement médical
Au fil des années, les indications du traitement médical dans la gestion de la TOF se sont
considérablement réduites (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Bonow et al., 2012).
Lors d’une crise hypoxique, il est préconisé d’administrer de l’O2 et de placer le patient en position
génupectorale (vasoconstriction systémique), d’injecter 0,05 à 0,1 mg/kg de propranolol (bêtabloquant) en intra-veineuse lente pour contrer les catécholamines qui exacerbent la crise et
0,2 mg/kg de morphine en sous-cutanée pour calmer l’agitation de l’enfant (Friedli, 2004 ; Jonas,
2009 ; Bonow et al., 2012).
Dans les cas extrêmes, l’enfant peut être anesthésié, intubé, paralysé et ventilé (Jonas, 2009).
Lorsque la crise hypoxique est associée à une hypotension ou à une hémorragie, l’administration de
plasma ou de sang devient essentielle. Il faut également toujours penser à corriger une acidose
éventuelle. Certains cas rebelles nécessitent une administration d’angiotensine ou de phényléphrine
(alpha-agoniste) pour augmenter la résistance périphérique (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009).
Suite à une crise hypoxique, un traitement visant à éviter les récidives peut être mis en place sur le
court terme et consiste en l’administration de 2 à 5 mg/kg/jour de propranolol en 3 à 4 prises par
jour. Néanmoins, la crise hypoxique constitue une indication chirurgicale urgente (Friedli, 2004 ;
Jonas, 2009).
Dans les formes sévères ducto-dépendantes (avec atrésie pulmonaire) et en l’absence de collatérales
aorto-pulmonaires, une perfusion de prostaglandines en intra-veineuse (Prostine®) est nécessaire
dans l’attente d’une opération palliative ou d’une correction chirurgicale totale. Cela permet le
maintien du canal artériel ouvert et donc d’assurer une perfusion pulmonaire correcte (Friedli, 2004 ;
Kaguelidou, 2006 ; Jonas, 2009).
28
1.9. Traitement chirurgical palliatif et correction chirurgicale totale
Ces dernières années, les techniques chirurgicales palliative et correctrice de la TOF se sont
considérablement perfectionnées. Ces évolutions ont permis d’augmenter l’espérance de vie des
patients atteints de cette malformation (Pelosi et al., 2006 ; Karl, 2012). La correction chirurgicale
totale est toujours nécessaire pour permettre la survie du patient à moyen voire long terme (cf.
paragraphe 1.10.1., page 38) (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Soler et al., 2007, Orton, 2008 ; Bonow
et al., 2012). Bien qu’une correction chirurgicale totale en première intention soit la technique de
choix pour certains, une approche en deux temps reste préconisée par d’autres (Pelosi et al., 2006 ;
Jonas, 2009).
Lorsque des crises hypoxiques apparaissent, l’intervention chirurgicale devient indispensable quel
que soit l’âge du patient. Il faut alors choisir entre chirurgie palliative et correction chirurgicale
totale. La décision est prise en fonction de l’âge du patient, de l’expérience de l’équipe chirurgicale
et des caractéristiques anatomiques de la TOF (Friedli, 2004).
La discussion thérapeutique actuelle se concentre autour de la question suivante : quel est le
meilleur moment pour pratiquer une correction chirurgicale totale ? (Schultz et Wernovsky, 2005 ;
Orton, 2008 ; Jonas, 2009 ; Karl, 2012).
1.9.1. Traitement chirurgical palliatif
Le traitement chirurgical palliatif a été réalisé pour la première fois en 1945 (Schultz et Wernovsky,
2005 ; Moller et Hoffman, 2012). Les objectifs du traitement palliatif sont d’augmenter transitoirement
le flux sanguin pulmonaire et ainsi d’induire une meilleure oxygénation et une croissance plus
satisfaisante des artères pulmonaires (souvent hypoplasiques) en attendant la correction chirurgicale
totale (Soler et al., 2007). Actuellement, certains centres mettent en avant une très faible mortalité
(Karl, 2012) lors de la chirurgie palliative tandis que d’autres affirment le contraire. Il n’existe donc
pas de consensus à ce sujet mais la tendance actuelle est de préférer une correction chirurgicale
totale d’emblée lorsqu’elle est possible (Jonas, 2009). Le pourcentage de patients subissant une
chirurgie palliative en première intention ne cesse de diminuer depuis les années 50 (Schultz et
Wernovsky, 2005).
1.9.1.1. Indications
Les premières corrections chirurgicales totales en première intention ont entraîné une morbidité et
une mortalité importantes ; c’est la raison pour laquelle une approche en deux temps a d’abord été
préférée (Jonas, 2009).
Si les signes cliniques sont importants chez le nouveau-né et/ou si la présentation anatomique est
peu favorable à une correction chirurgicale totale d’emblée (arbre pulmonaire très hypoplasique ou
sténosé, anomalies des artères coronaires, CIV multiples, nombreuses collatérales aortopulmonaires, APSO, corps de trop petite taille et/ou enfant prématuré, maladies graves généralisées
concomitantes), un geste palliatif est dans un premier temps réalisé (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ;
Chanoit, 2008 ; Jonas, 2009 ; Karl, 2012 ; Barron, 2013). Cela permet au nouveau-né de grandir dans
de bonnes conditions et de devenir apte à supporter la correction chirurgicale totale (Friedli, 2004 ;
Kaguelidou, 2006 ; Chanoit, 2008).
En ce qui concerne le cas particulier de TOF associée à une atrésie pulmonaire, une chirurgie en 2
voire 3 temps est toujours nécessaire (Kaguelidou, 2006).
29
1.9.1.2. Techniques de Blalock-Taussig classique et modifiée
Lors d’une approche en deux temps, un shunt circulatoire permanent dérivant une partie du flux
sanguin aortique vers la circulation pulmonaire est créé précocement pour diminuer l’hypoxémie.
Puis dans une seconde phase, une correction chirurgicale totale sera réalisée et le shunt
précédemment créé sera ligaturé.
L’anastomose entre artère sous-clavière (du côté opposé à celui de la crosse aortique) et artère
pulmonaire homolatérale est considérée comme la meilleure stratégie à adopter (Friedli, 2004 ;
Kaguelidou, 2006 ; Pelosi et al., 2006 ; Soler et al., 2007 ; Jonas, 2009) : il s’agit de la technique de
Blalock-Taussig qui est la plus ancienne méthode palliative utilisée chez les patients atteints de
TOF (Figure 13) (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009).
Initialement, l’anastomose était directement réalisée entre l’artère sous-clavière et l’artère
pulmonaire homolatérale : il s’agit de la technique de Blalock-Taussig classique. L’efficacité de
cette technique a été remise en cause car les obstructions de cette anastomose sont fréquentes et elle
prive le bras de son principal affluent artériel, ce qui est bien toléré chez le nourrisson et le jeune
enfant uniquement (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009).
Dans les années 80, la technique de Blalock-Taussig modifiée a été mise en place et est à ce jour la
technique de choix lors d’intervention palliative. Elle fait appel à une prothèse tubulaire en GoreTex (contenant notamment du polytétrafluoroéthylène) placée entre l’artère sous-clavière et l’artère
pulmonaire homolatérale pour créer l’anastomose. Cette nouvelle technique a permis de diminuer la
mortalité et la morbidité chez les nouveau-nés subissant une intervention palliative (Friedli, 2004 ;
Jonas, 2009 ; Kaguelidou, 2006 ; Pelosi et al., 2006). Elle a plusieurs avantages par rapport à la
technique de Blalock-Taussig classique (Tableau 1). En effet, elle permet d’adapter le calibre de la
prothèse suivant l’âge du patient, de ne pas modifier l’apport artériel au bras et de diminuer les
risques d’obstruction retardée. Toutefois, elle présente aussi certains inconvénients car la prothèse
peut induire des complications précoces telles que des infections et une thrombose. De plus, la
prothèse ne s’adapte pas lors de la croissance du patient. Enfin, elle est constituée d’un matériau
coûteux (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Pelosi et al., 2006).
Quant aux anastomoses de Waterston-Cooley (entre la face postérieure de l’aorte ascendante et
l’artère pulmonaire droite) et de Potts (entre l’aorte descendante et l’artère pulmonaire gauche),
elles ont été abandonnées car elles déforment l’arbre vasculaire pulmonaire et deviennent
rapidement une cause d’hypertension pulmonaire par excès de débit (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009).
30
Figure 13 - Représentation schématique de l’anastomose de Blalock-Taussig modifiée
(Kaguelidou, 2006)
6
5
3
4
Réalisation d’une anastomose entre artère sous-clavière (du côté opposé à celui de la crosse aortique) et
artère pulmonaire homolatérale grâce à une prothèse tubulaire en Gore-Tex.
(1) : sténose pulmonaire
(2) : communication interventriculaire
(3) : dextroposition de l’aorte
(4) : hypertrophie du ventricule droit
(5) : artère pulmonaire
(6) : artère sous-clavière
(7) : prothèse tubulaire
(AO) : aorte
(AG) : atrium gauche
(VG) : ventricule gauche
(TP) : tronc pulmonaire
(AD) : atrium droit
(VD) : ventricule droit
31
Tableau 1 - Avantages et inconvénients des deux techniques de Blalock-Taussig
Technique de Blalock-Taussig
classique
Avantages
-
Inconvénients
-
Aucune prothèse nécessaire (pas de
« corps étranger »)
Coût réduit
Pas d’adaptation possible du calibre
de la prothèse à la taille du patient
Bras privé de son principal affluent
artériel
Risques d’obstruction retardée
importants
Morbidité et mortalité non
négligeables
Technique de Blalock-Taussig
modifiée
-
Possibilité d’adapter le calibre de la
prothèse à la taille du patient
Apport artériel au bras conservé
Diminution des risques d’obstruction
retardée
Moins de morbidité et de mortalité
Pas de croissance de la greffe
Risque de complications précoces :
infections, thrombose principalement
Coût important
1.9.1.3. Cas particulier des formes extrêmes
En cas de sténose pulmonaire périphérique et/ou d’oblitération des collatérales systémiques, il est
possible de dilater la chambre de chasse droite grâce à un ballonnet (avec ou sans stent) (Sluysmans
et al., 1995 ; Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012 ; Barron, 2013). Cette intervention présente
un risque non négligeable de crises hypoxiques mais permet d’améliorer les saturations artérielles
ainsi que le développement de l’anneau et des artères pulmonaires. Cette technique, qui donne
globalement de bons résultats, permet de réaliser par la suite une correction chirurgicale totale dans
de meilleures conditions (Friedli, 2004 ; Karl, 2012 ; Barron, 2013).
Il est aussi possible de poser un stent ductal qui permet au nouveau-né d’atteindre 5 à 7,5 kg et
d’envisager ensuite une correction chirurgicale totale en première intention (Karl, 2012).
En cas de forme extrême de la TOF avec APSO, une anastomose de Blalock-Taussig peut être
indiquée. Toutefois, la plupart des chirurgiens optent pour le rétablissement d’une continuité entre
l’infundibulum ventriculaire droit et le tronc pulmonaire par l’intermédiaire d’une pièce en
Dacron® (téréphtalate de polyéthylène) si l’infundibulum est contigu au tronc pulmonaire. Si ce
n’est pas le cas, ils utilisent un tube ou greffon de préférence valvé pour relier le ventricule droit au
tronc pulmonaire (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012). Cette intervention permet d’obtenir un flux
antérograde plus proche du flux physiologique et d’accroître les chances de développement
harmonieux de l’arbre vasculaire pulmonaire. Cela facilite l’accès ultérieur aux artères pulmonaires
et il sera donc possible de placer un ballon pour lever d’éventuelles sténoses pulmonaires
périphériques. Lors d’atrésie pulmonaire, certaines artères lobaires sont irriguées par des
collatérales aorto-pulmonaires mais ne sont pas reliées aux artères pulmonaires centrales. Il faut
alors tenter de les relier par anastomose directe ou par un greffon en supprimant les collatérales :
c’est l’unifocalisation.
Une correction chirurgicale totale sera envisagée lorsque l’arbre artériel sera complet et de bonne
dimension. Les collatérales venant de l’aorte deviennent inutiles si elles n’ont pas été reliées à
l’arbre artériel pulmonaire et sont à supprimer, soit chirurgicalement, soit par cathétérisme
interventionnel à l’aide d’une spirale ou d’un coil (Friedli, 2004 ; Kaguelidou, 2006 ; Bonow et al.,
2012).
32
1.9.2. Correction chirurgicale totale
C’est en 1955 que Lillehei et son équipe ont réalisé la première correction chirurgicale totale chez
un patient atteint de TOF ayant déjà subi une chirurgie palliative. La première correction
chirurgicale totale en première intention date quant à elle de 1973. La correction chirurgicale totale
a permis d’augmenter la durée de survie des patients atteints de TOF tout en améliorant
considérablement leur qualité de vie (Veldtman et al., 2004 ; Di Felice et Zummo, 2009 ; Karl, 2012 ;
Moller et Hoffman, 2012).
L’âge moyen lors de correction chirurgicale totale et la mortalité associée ne cessent de baisser
depuis 1955 (Schultz et Wernovsky, 2005). En effet, à la fin des années 50, la mortalité précoce
associée à la correction chirurgicale totale était d’environ 50 % (Karl, 2012), dans les années 70 elle
est tombée à 5 à 10 % (Schultz et Wernovsky, 2005) et aujourd’hui, elle est estimée à 1,1 % selon la
« Society of Thoracic Surgeons database » (Karl, 2012).
Toutefois, il semblerait que chez le nouveau-né, la circulation extra-corporelle (CEC) et
l’hypothermie nécessaires à la correction chirurgicale totale augmentent le risque de développement
anormal du cerveau et d’anomalies généralisées du système nerveux central (Karl, 2012).
Les syndromes évoqués dans la partie 1.4. (page 19) peuvent venir compliquer la prise en charge
chirurgicale de la TOF et accroître les risques associés à l’intervention (Karl, 2012).
Il existe de nombreux avantages à rétablir avant l’âge d’un an un fonctionnement cardiaque
« normal ». En effet, chez les enfants atteints de TOF, la vascularisation pulmonaire en
développement est exposée à une pression anormalement basse et à un flux sanguin diminué ce qui
provoque une baisse des échanges gazeux au niveau des alvéoles pulmonaires. Une chirurgie
tardive peut donc engendrer une réduction irréversible des zones d’échange. Le développement du
cœur est également anormal car le ventricule droit peut être exposé à une pression systémique
conduisant à une hypertrophie puis à une fibrose et donc à une diminution irréversible de sa
compliance. La fonction du ventricule gauche est également altérée quand la correction est tardive
et les arythmies sont plus fréquentes (Hirsch et al., 2000 ; Reddy et al., 2000 ; Jonas, 2009 ; Bonow et al.,
2012 ; Karl, 2012).
De plus, une correction chirurgicale totale d’emblée permet d’éviter les complications pouvant être
associées à la chirurgie palliative (Karl, 2012).
Il est également probable qu’une cyanose chronique au cours de la première année de vie ait des
conséquences irréversibles sur le développement cérébral (Jonas, 2009 ; Karl, 2012).
Enfin, une correction chirurgicale totale d’emblée a également des effets psycho-socioéconomiques bénéfiques sur le patient et sa famille qui n’ont pas à subir le stress de deux
interventions consécutives (Jonas, 2009).
Pour obtenir un résultat optimal, il est recommandé de réaliser la correction chirurgicale totale chez
le nouveau-né âgé de 6 à 12 mois (Di Felice et Zummo, 2009, Jonas, 2009). Barron affirme que la
correction chirurgicale totale est réalisable dès 3 mois d’âge si l’anatomie est favorable (Friedli,
2004, Bonow et al., 2012, Barron, 2013). Karl affirme quant à lui que si la chirurgie peut être reportée
sans danger, alors il est préférable de ne pas intervenir avant l’âge de 6 mois (Karl, 2012). Il n’y a
donc aucun consensus à ce sujet, hormis sur le fait que la correction chirurgicale totale doit avoir
lieu dans la première année de vie quelle que soit la gravité de la TOF.
33
1.9.2.1. Indications et contre-indications
Comme nous l’avons déjà évoqué, l’existence de crises hypoxiques est une indication urgente et
majeure à la correction chirurgicale totale si l’âge et l’anatomie du patient sont compatibles avec
cette intervention (cf. paragraphe 1.8., page 28) (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009).
La question de la taille adéquate des artères pulmonaires pour qu’une correction chirurgicale totale
puisse être pratiquée est actuellement au cœur du débat. Des artères pulmonaires de taille très
réduite ne doivent que très rarement nous permettre de déclarer un enfant inopérable. Il faut
toujours avoir à l’esprit qu’avant la correction chirurgicale, les artères pulmonaires sont moins
remplies et que la pression qui y règne est très inférieure à la pression physiologique. De plus,
aucune technique d’imagerie ne permet d’avoir accès à la taille potentielle des artères pulmonaires.
Toutefois, si la saturation artérielle en O2 est supérieure à 70 %, les artères pulmonaires pourront
aisément s’adapter à un flux pulmonaire complet (Jonas, 2009).
La taille de la CIV et sa localisation sont remarquablement uniformes dans les TOF simples. La
présence d’une ou plusieurs CIV additionnelles doit être bien définie avant intervention mais ne
constitue pas une contre-indication à la correction chirurgicale totale (Jonas, 2009).
Comme nous l’avons décrit précédemment, la sténose pulmonaire revêt un large spectre de sévérité
(cf. paragraphe 1.1.1., page 9). La principale variable à considérer en pré-opératoire est la longueur
du septum conal qui va déterminer la technique chirurgicale utilisée. Dans certaines formes
extrêmes de TOF, le septum conal est totalement absent et il existe uniquement une petite bande
fibreuse sous la valve pulmonaire. Dans ce cas précis, la CIV peut être facilement visualisée même
à travers une petite incision ventriculaire. Il existe également des formes de TOF avec un long
septum conal qui nécessite une grande incision infundibulaire pour exposer la CIV et pour
permettre l’élargissement du patch sur toute la longueur de l’infundibulum sous-développé (Jonas,
2009).
La dextroposition de l’aorte génère une augmentation de la distance à parcourir pour l’artère
coronaire principale gauche ce qui engendre une distribution coronaire anormale chez près d’un
tiers des patients (cf. paragraphe 1.1.1.4., page 12). Cette dernière doit être explorée avant
intervention pour que la technique chirurgicale soit adaptée (Friedli, 2004 ; Jonas, 2009 ; Bonow et al.,
2012 ; Moller et Hoffman, 2012).
Chez l’adulte, la correction chirurgicale totale est toujours recommandée car les résultats sont très
satisfaisants et les risques opératoires ne sont pas plus élévés que chez l’enfant (Bonow et al., 2012).
1.9.2.2. Techniques de correction chirurgicale totale
La correction chirurgicale totale est réalisée sous CEC et hypothermie modérée (Friedli, 2004 ;
Jonas, 2009 ; Karl, 2012). Elle repose sur la fermeture de la CIV et la levée de la sténose pulmonaire
(Friedli, 2004, Di Felice et Zummo, 2009 ; Bonow et al., 2012). Trois voies d’abord peuvent être
envisagées par le chirurgien, chacune présentant des avantages et des inconvénients (Tableau 2).
Abord standard par ventriculotomie droite
L’abord standard consiste en une ventriculotomie droite de taille limitée au niveau de
l’infundibulum (Figure 14a) pour accéder à la fois à la sténose pulmonaire et à la CIV (Di Felice et
Zummo, 2009 ; Karl, 2012). Il faut prendre garde de ne pas léser les artères coronaires lors de la
ventriculotomie. L’objectif est d’élargir suffisamment l’infundibulum hypoplasique sans faire de
34
résection agressive du muscle qui conduirait à une cicatrice endocardique étendue et donc à des
troubles de la conduction en post-opératoire (Jonas, 2009 ; Karl, 2012).
Cette approche facilite la mise en place d’un patch transannulaire (détaillée ci-dessous) quand le
degré d’hypoplasie est sévère (Jonas, 2009 ; Karl, 2012).
Abord par l’atrium droit ou par le tronc pulmonaire
Certains chirurgiens préfèrent un abord par l’atrium droit ou par le tronc pulmonaire (Friedli, 2004 ;
Karl, 2012). Cette approche diminuerait significativement la dilatation du ventricule droit et
préserverait davantage sa contractilité 10 ans après la chirurgie. Ces deux voies d’abord sont à
privilégier lorsqu’une branche d’une artère coronaire traverse l’infundibulum (Karl, 2012).
Plusieurs études rapportent d’excellents résultats en utilisant une approche transatriale. Toutefois, il
faut retirer davantage de muscle pour atteindre l’infundibulum ce qui pourrait augmenter le degré de
fibrose endocardique et les lésions cicatricielles (Jonas, 2009).
Fermeture de la CIV et la levée de la sténose pulmonaire
Quel que soit l’abord choisi, une pièce en Dacron® est suturée au niveau de la CIV en prenant garde
de ne pas léser le faisceau de His situé au niveau de son bord inférieur (Friedli, 2004 ; Bonow et al.,
2012). La CIV est fermée sans traction excessive de l’anneau tricuspidien pour éviter de léser les
cordages de la valve (Jonas, 2009 ; Karl, 2012). Si la dextroposition de l’aorte est importante, la pièce
doit être bombée en direction du ventricule droit (Friedli, 2004). Ensuite, le chirurgien procède à la
résection de la sténose infundibulaire (retrait de la bande musculeuse et/ou fibreuse obstructive
(Karl, 2012)) et inspecte la valve pulmonaire. Les tiges d’Hégar permettent d’évaluer le diamètre de
l’anneau valvulaire et du tronc pulmonaire. Si les diamètres mesurés sont supérieurs aux valeurs
limites fixées par rapport à la surface corporelle du patient, l’infundibulum est élargi par une pièce
de péricarde autologue traité au glutaraldéhyde 0,2 % pendant 10 minutes (Friedli, 2004 ; Bonow et
al., 2012 ; Karl, 2012) (Figures 14b, 14c). Dans le cas contraire, le chirurgien, en plus d’élargir le
tronc pulmonaire, fend l’anneau valvulaire pulmonaire, puis suture à l’endocarde un patch
transannulaire constitué d’une pièce en Dacron® doublée de péricarde autologue en commençant
par la zone la plus proche de l’apex (Figure 15) (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012). La
taille de ce patch est déterminée par le diamètre indexé de l’anneau de la valve pulmonaire, il doit
être de 2 à 3 cm plus grand que cette valeur. Dans la majorité des cas, la valve pulmonaire est
bicuspide avec une position des commissures à 90 et 270°. Une incision est réalisée au milieu de la
cuspide antérieure puis est étendue au bord libre du ventricule droit sur 10 à 15 cm. Cette méthode,
employée chez 20 à 40 % des patients atteints de TOF, engendre systématiquement une insuffisance
valvulaire pulmonaire mais elle semble préférable à la persistance d’un gradient trop élevé. La mise
en place d’un greffon valvé peut se justifier en cas d’artères pulmonaires périphériques de faible
calibre ou sténosées (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012).
35
Figure 14 – Etapes (a, b, c) de la levée de la sténose pulmonaire lors de la correction
chirurgicale totale de la tétralogie de Fallot sans incision de l’anneau valvulaire pulmonaire
(Jonas, 2009)
Elargissement de l’infundibulum par une pièce de péricarde autologue
Figure 15 - Représentation schématique de la correction chirurgicale totale de la tétralogie de
Fallot avec élargissement de l’anneau valvulaire pulmonaire (Bonow et al., 2012)
(1) : patch fermant la communication
interventriculaire
(2) : patch transannulaire élargissant la
chambre de chasse droite et la partie
proximale du tronc pulmonaire
(Ao) : aorte
(AG) : atrium gauche
(VG) : ventricule gauche
(TP) : tronc pulmonaire
(AD) : atrium droit
(VD) : ventricule droit
Suture d’une pièce en Dacron® au niveau de la CIV ainsi que d’une pièce en Dacron® doublée de péricarde
autologue au niveau du départ du tronc pulmonaire, de la valve pulmonaire et de la chambre de chasse du
VD après incision de l’anneau valvulaire pulmonaire.
36
Tableau 2 - Avantages et inconvénients des deux abords possibles pour la correction
chirurgicale totale de la tétralogie de Fallot
Abord par ventriculotomie
Avantages
-
-
Inconvénients -
Accès facilité à la sténose pulmonaire et à la
communication interventriculaire
L’infundibulum hypoplasique peut être
élargi sans faire une résection excessive du
muscle (cicatrice endocardique peu étendue)
La communication interventriculaire est
fermée sans traction excessive de l’anneau
tricuspidien (moins de risque de lésions de
la valve et d’anomalie de la conduction)
Mise en place d’un patch transannulaire
facilitée
Risque de diminution de la contractilité et de
dilatation du ventricule droit
Contre-indiquée en présence de certaines
anomalies coronariennes
Abord
transatrial/transpulmonaire
-
-
Diminution significative de la
dilatation du ventricule droit
Meilleure contractilité 10 ans
après la chirurgie
Technique adaptée à la pose
d’un patch transannulaire
Technique de choix lorsqu’une
branche d’une artère coronaire
traverse l’infundibulum
Retrait de muscle plus important
pour atteindre l’infundibulum
(degré de fibrose endocardique
augmenté et lésions cicatricielles
plus étendues)
Un contrôle échocardiographique post-opératoire immédiat doit être réalisé pour évaluer les
anomalies qui persistent malgré la chirurgie. Ces dernières pouvent être plus ou moins marquées
selon les patients (Figure 16) (Otto et al., 2011).
Figure 16 - Coupe « grand axe » par voie parasternale chez un patient qui a subi une
correction chirurgicale totale (Otto et al., 2011)
(Ao) : aorte
(VG) : ventricule gauche
(VD) : ventricule droit
Elargissement de la chambre de chasse droite, septum interventriculaire continu mais hyperéchogène au niveau du patch
qui comble la communication interventriculaire (flèche) et aorte modérément élargie qui chevauche légèrement le septum.
37
1.10. Evolution et complications
Ces dernières années, la mortalité per-opératoire et en post-opératoire immédiat a considérablement
diminué et ce aussi bien pour la chirurgie palliative que la correction chirurgicale totale. Par
conséquent, le principal objectif actuel est de minimiser les complications à moyen et long terme en
s’attachant à leur compréhension (Karl, 2012).
1.10.1. Evolution et complications en l’absence de correction chirurgicale
La TOF peut engendrer la mort du patient si elle n’est pas traitée (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ;
Karl, 2012). Sans correction chirurgicale, les probabilités de survie approximatives sont les suivantes
(Karl, 2012) :
- 66 % de survie à 1 an,
- 49 % de survie à 3 ans,
- 24 % de survie à 10 ans.
Certains rares patients atteints de TOF et non opérés peuvent néanmoins vivre jusqu’à 80-90 ans
(Karl, 2012).
Une hypoxémie progressive s’installe dans les premières années de vie (Friedli, 2004 ; Bonow et al.,
2012 ; Karl, 2012) et des degrés de cyanose variables existent (Bonow et al., 2012). L’évolution de la
cyanose et de ses complications peut être retardée en présence de collatérales aorto-pulmonaires.
Une cyanose très importante dans les deux premières années de vie peut engendrer des accidents
vasculaires cérébraux (infarcti cérébraux par hypoxie ou par embolie) et plus rarement, un abcès
cérébral peut se former vers l’âge de 2 ans. L’abcès se manifeste dans un premier temps par de la
fièvre associée à des céphalées (il est possible de ne pas avoir de signes neurologiques en début
d’évolution). Enfin, une endocardite d’Osler (qui est lente ou subaiguë) peut survenir en particulier
chez les adolescents n’ayant pas subi de correction chirurgicale totale (Friedli, 2004).
1.10.2. Evolution et complications suite à une chirurgie palliative seule
Tout au début de la gestion chirurgicale de la TOF (avant que la correction chirurgicale totale ne
soit disponible), les shunts entre artère principale et artère pulmonaire étaient utilisés pour une
palliation à long terme de la TOF. Une amélioration clinique était alors observée chez 85 % des
patients dans les 20 années suivant la chirurgie palliative seule (Orton, 2008).
Les complications pouvant être associées à la chirurgie palliative sont une obstruction ou une
sténose de l’anastomose engendrant un déficit secondaire de perfusion pulmonaire (Soler et al.,
2007 ; Bonow et al., 2012), un pseudoanévrisme, une hypertension pulmonaire et un
dysfonctionnement du ventricule gauche secondaire à la surcharge volumique (Soler et al., 2007).
1.10.3. Evolution et complications suite à une correction chirurgicale totale
1.10.3.1. Quelques chiffres concernant la survie des patients
La durée de survie des patients atteints de TOF ayant subi une correction chirurgicale totale n’a
cessé de s’allonger depuis 1955 comme en témoignent les chiffres suivant :
- 86 % de survie 32 ans après la chirurgie pour des patients opérés entre 1955 et 1960 (en
excluant la mortalité per-opératoire) (Schultz et Wernovsky, 2005),
- 89 % de survie 30 ans après l’intervention pour des patients opérés entre 1958 et 1977 ayant
survécu à la première année suivant la chirurgie (Schultz et Wernovsky, 2005),
- plus récemment, Jonas a publié une étude dans laquelle le taux de survie 20 ans après une
correction chirurgicale totale précoce est de 85 % (Jonas, 2009) tandis que selon Bonow, le
38
taux de survie atteint 94 % 25 ans après la correction chirurgicale totale (Bonow et al., 2012).
Seuls 7 % des patients sont réopérés dans les 5 ans suivant la correction chirurgicale totale (Jonas,
2009) et 10 (Bonow et al., 2012) à 21 % (Jonas, 2009) dans les 20 ans suivant l’intervention, toutes
voies d’abord confondues. Les causes de réintervention sont les suivantes : sténose pulmonaire
résiduelle importante, apparition d’une insuffisance valvulaire pulmonaire mal tolérée,
remplacement du tube prothétique qui se détériore au fil du temps… (Kaguelidou, 2006).
Un abord par l’atrium droit ou par le tronc pulmonaire a été réalisé sur 611 enfants au « Royal
Children’s Hospital » de Melbourne dont 36 (5,9 %) présentaient des anomalies notables des artères
coronaires. Seuls 3,5 % des patients ont dû être réopérés dans les 120 mois suivant la chirurgie
(aucune différence significative entre patients présentant ou non des anomalies des artères
coronaires) (Karl, 2012).
Avec les techniques chirurgicales totales actuelles, la létalité précoce de la TOF est faible à la fois
pour les formes classiques et pour les TOF avec APSO favorable à la chirurgie (artères pulmonaires
confluentes et bien développées). En revanche, pour les autres formes, le pronostic est plus réservé
(Kaguelidou, 2006 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012).
La correction chirurgicale totale améliore donc considérablement le pronostic vital. De nombreux
patients vivent normalement 20 à 30 ans après la correction chirurgicale totale, toutefois, de
nombreuses complications post-opératoires touchent un pourcentage non négligeable d’opérés
(Friedli, 2004 ; Di Felice et Zummo, 2009 ; Karl, 2012). Des contrôles médicaux complets tous les ans,
voire 2 ans durant toute la vie de l’opéré sont indispensables pour détecter les complications à long
terme (Kaguelidou, 2006 ; Bonow et al., 2012).
1.10.3.2. De nombreuses complications post-opératoires
1.10.3.2.1. Sténose pulmonaire résiduelle
Une sténose pulmonaire peut subsister. Elle est à relier soit à une fibrose myocardique, soit à un
élargissement chirurgical insuffisant (Soler et al., 2007 ; Di Felice et Zummo, 2009 ; Bonow et al., 2012 ;
Karl, 2012). Selon Soler, la sténose pulmonaire est presque systématique chez les patients qui ont
subi un rétablissement de la continuité entre l’infundibulum ventriculaire droit et le tronc
pulmonaire (Soler et al., 2007). Une sténose pulmonaire résiduelle est la principale indication à une
réopération tardive (Jonas, 2009). Certaines équipes considèrent qu’il faut réintervenir
chirurgicalement lorsque le rapport pression systolique du ventricule droit sur pression systolique
du ventricule gauche est supérieur à 0,75 (Karl, 2012). En effet, la surcharge de pression au sein du
ventricule droit conduit au fil du temps à une diminution de sa contractilité (Karl, 2012).
Dans certains cas, la sténose pulmonaire semble néanmoins avoir des effets bénéfiques en présence
d’une insuffisance pulmonaire. En effet, en causant une hypertrophie du ventricule droit, elle limite
la dilatation de ce dernier et améliore la contractilité du myocarde. Cela remet donc en cause la
croyance qui affirme que même peu serrée, la sténose pulmonaire est toujours néfaste pour le
fonctionnement du ventricule droit tandis que l’insuffisance pulmonaire est souvent bien tolérée
(Karl, 2012).
39
1.10.3.2.2. Insuffisance valvulaire pulmonaire
L’insuffisance valvulaire pulmonaire est la complication post-chirurgicale à long terme la plus
fréquente (Hirji et al., 2010 ; Otto, 2011). Elle concerne 54 à 60 % des patients ayant subi une
correction chirurgicale totale (Friedli, 2004 ; Schultz et Wernovsky, 2005 ; Di Felice et Zummo, 2009) et
est souvent la conséquence de la mise en place du patch transannulaire lors de correction
chirurgicale totale avec valvulotomie pulmonaire (Schultz et Wernovsky, 2005).
De plus, la régurgitation pulmonaire est presque systématique chez les patients ayant subi un
rétablissement de la continuité entre l’infundibulum ventriculaire droit et le tronc pulmonaire (Soler
et al., 2007).
Actuellement, la question du moment optimal pour pratiquer le remplacement de la valve
pulmonaire reste au cœur du débat (Schultz et Wernovsky, 2005 ; Soler et al., 2007 ; Karl, 2012).
Les indications de remplacement de la valve pulmonaire chez des patients ayant déjà subi une
correction chirurgicale totale sont les suivantes :
- gradient pulmonaire supérieur à 50 mmHg (Soler et al., 2007),
- volume télédiastolique du ventricule droit supérieur à 150 mL par m2 (Geva, 2006 ; Bonow et
al., 2012),
- fraction de régurgitation pulmonaire supérieure à 25 % (Geva, 2006 ; Bonow et al., 2012),
- fraction d’éjection du ventricule droit inférieure à 45 % (Geva, 2006 ; Bonow et al., 2012),
- complexe QRS de durée augmentée et existence d’une arythmie (Karl, 2012).
La régurgitation pulmonaire est le plus souvent modérée et bien tolérée pendant de nombreuses
années. En s’aggravant, elle va induire une dilatation progressive du ventricule droit à l’origine
d’une intolérance à l’effort avec prédisposition aux arythmies, voire d’une mort subite dans les cas
les plus graves. La substitution valvulaire pulmonaire est donc préconisée avant qu’une insuffisance
cardiaque droite s’installe. Si cela est réalisé suffisamment précocement, le ventricule droit semble
pouvoir retrouver un fonctionnement normal (Friedli, 2004, Schultz et Wernovsky, 2005). Le taux de
remplacement de la valve pulmonaire atteint 38 % (Schultz et Wernovsky, 2005) et le taux de mortalité
associé à cette intervention est de 1 % (Bonow et al., 2012).
1.10.3.2.3. Troubles de la conduction et du rythme cardiaques
Les troubles de la conduction sont fréquents suite à une correction chirurgicale totale (Friedli, 2004 ;
Karl, 2012). Les lésions peuvent se situer à différents étages de l’axe His-Purkinje et sont à mettre en
relation avec les cicatrices de la correction chirurgicale totale qui altèrent l’architecture du
myocarde et engendre des anomalies électromécaniques (Friedli, 2004 ; Di Felice et Zummo, 2009 ;
Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012).
La forme la plus grave de troubles de la conduction, retrouvée chez 1 % des patients, est une lésion
du faisceau de His au niveau du bord inférieur de la CIV, à l’origine d’un bloc atrio-ventriculaire
complet. Cette lésion se fait toutefois de plus en plus rare car les chirurgiens ont appris à mieux
localiser le faisceau de His. L’existence d’un bloc atrio-ventriculaire complet nécessite la mise en
place d’un stimulateur cardiaque (Friedli, 2004).
Les troubles de la conduction intraventriculaire sont fréquents et se manifestent presque
systématiquement par un bloc de branche droit atypique avec une durée de QRS pouvant être très
variable sur l’ensemble des dérivations (Friedli, 2004, Combes et al., 2012). Le bloc bifasciculaire
(déviation axiale gauche associée au bloc de branche droit) n’évolue que très rarement vers un bloc
atrio-ventriculaire tardif (Friedli, 2004).
40
L’arythmie ventriculaire est considérée comme la première cause de mort subite chez les patients
opérés (Schultz et Wernovsky, 2005 ; Di Felice et Zummo, 2009 ; Bonow et al., 2012 ; Karl, 2012) et peut
être corrigée par cryoablation (Bonow et al., 2012). Sur une période de 24 heures, 40 à 50 % des
patients qui ont subi une correction chirurgicale totale présentent une arythmie ventriculaire (Di
Felice et Zummo, 2009).
Les patients peuvent également présenter des extrasystoles, isolées, en doublets ou en courtes
salves. Ces anomalies ne sont pas annonciatrices d’une mort subite. Le traitement médical de ces
anomalies est indiqué en cas de :
- symptômes associés à ces extrasystoles,
- surpression au sein du ventricule droit en systole ou en diastole,
- dysfonctionnement ventriculaire (Di Felice et Zummo, 2009).
Chez 4 à 7 % des patients opérés, une tachycardie ventriculaire marquée est observée. Celle-ci est
responsable de 0,5 à 6 % des arrêts cardiaques qui surviennent chez les patients opérés (Di Felice et
Zummo, 2009, Combes et al., 2012). Dans ce cas, un traitement médical est mis en place dans un
premier temps et s’il n’est pas suffisant, une intervention chirurgicale est réalisée (ablation par
radiofréquences) (Friedli, 2004).
Chez l’adulte, il peut également exister des arythmies supraventriculaires de type flutter et une
fibrillation atriale qui nécessitent toutes deux un traitement symptomatique (Friedli, 2004 ; Bonow et
al., 2012).
1.10.3.2.4. Dilatation de la racine de l’aorte
La dilatation de la racine de l’aorte survient chez 14,8 % des patients ayant subi une correction
chirurgicale totale (Schultz et Wernovsky, 2005). Le remplacement de la valve aortique ou de la racine
de l’aorte est parfois nécessaire mais reste rare. Il est préconisé lorsque l’élargissement de la racine
de l’aorte est supérieur ou égal à 55 mm et a pour objectif de corriger la dilatation progressive de la
racine de l’aorte avec régurgitation aortique éventuelle (Friedli, 2004 ; Soler et al., 2007 ; Otto et al.,
2011 ; Bonow et al., 2012).
1.10.3.2.5. Régurgitation tricuspidienne
Il est possible d’observer une régurgitation tricuspidienne d’importance variable au niveau de la
valve tricuspide nécessitant, dans les cas graves, une valvuloplastie (Di Felice et Zummo, 2009 ;
Bonow et al., 2012).
1.10.3.2.6. CIV résiduelle(s)
En post-opératoire immédiat, il n’est pas rare de mettre en évidence une ou plusieurs CIV
résiduelle(s) masquée(s) jusque là par les autres anomalies anatomiques. La correction chirurgicale
doit être envisagée lorsque le rapport flux pulmonaire sur flux systémique devient supérieur à 1,5
(Friedli, 2004 ; Soler et al., 2007 ; Bonow et al., 2012).
1.10.3.3. Conséquence de certaines complications : un risque mort subite accru
Le risque de mort subite chez les patients qui ont subi une correction chirurgicale totale est connu
depuis les années 70 et augmente significativement 20 ans après la chirurgie. En effet, il est de
1,2a% dans les 10 ans suivant la chirurgie, de 2,2 % dans les 20 ans, de 4 % dans les 25 ans et de
6a% dans les 30 ans suivant la correction chirurgicale totale (Schultz et Wernovsky, 2005). Un tiers
41
des dècès qui surviennent dans les 20 ans suivant la chirurgie (après exclusion des décès peropératoires) sont des morts subites (Bonow et al., 2012). Il semblerait que les patients ayant subi une
correction chirurgicale à l’âge adulte soient davantage victime de mort subite dans les années qui
suivent l’intervention (Schultz et Wernovsky, 2005).
Certaines complications post-opératoires comme une durée de complexe QRS supérieure à 180 ms,
la présence de potentiels ventriculaires tardifs, une dispersion de l’espace QT, une dilatation
importante du ventricule droit, des syncopes et une tachycardie ventriculaire soutenue et durable
pourraient être des indicateurs de risque de mort subite (Friedli, 2004 ; Bonow et al., 2012 ; Combes et
al., 2012 ; Karl, 2012). Les patients présentant un ou plusieurs de ces paramètres sont de bons
candidats à l’implantation d’un défibrillateur automatique bien que les indications de cette mesure
préventive soient encore controversées (Bonow et al., 2012).
1.10.4. Principales complications post-opératoires visibles à l’IRM
L’IRM est également un moyen performant pour mettre en évidence certaines complications postopératoires (cf. paragraphe 1.6.6., page 27). Voici ci-dessous deux figures illustrant des
complications que l’on peut observer à l’IRM suite à une chirurgie palliative d’une part (Figure 17)
et à une correction chirurgicale totale d’autre part (Figure 18) (Soler et al., 2007).
42
Figure 17 - IRM thoracique d’un nouveau-né de 6 mois atteint de tétralogie de Fallot
compliquée d’une atrésie pulmonaire et venant de subir une anastomose de Blalock-Taussig
modifiée (Soler et al., 2007)
Défaut de perfusion du poumon droit (étoile) et du lobe crânial du poumon gauche (flèche) secondaire à la
sténose de l’anastomose établie entre l’artère sous-clavière gauche et l’artère pulmonaire homolatérale.
Figure 18 - IRM thoracique d’un homme de 20 ans ayant subi une correction chirurgicale
totale de sa tétralogie de Fallot et présentant une dyspnée à l’effort (Soler et al., 2007)
Reflux sanguin dans le ventricule droit (flèche de gauche) dû à la régurgitation de la valve pulmonaire et
sténose résiduelle du tronc pulmonaire (flèche de droite).
43
1.10.5. Cas particulier de la grossesse des femmes atteintes de TOF
Les mères atteintes d’une malformation cardiaque congénitale cyanogène donnent naissance à 37 %
de nouveau-nés prématurés (contre 10 % environ dans la population générale). Le risque d’avoir un
enfant atteint d’une cardiopathie congénitale est plus élevé et les complications néonatales plus
nombreuses (Veldtman et al., 2004 ; Schultz et Wernovsky, 2005). Récemment, une étude concernant
des femmes atteintes de maladies cardiovasculaires a rapporté une incidence de 4 % d’enfants trop
petits pour leur âge gestationnel contre seulement 2 % pour le groupe de patients contrôles
(Veldtman et al., 2004).
La grossesse induit une augmentation d’environ 50 % du débit cardiaque corrélée à une
augmentation de la fréquence cardiaque et du volume d’éjection systolique (Veldtman et al., 2004).
Chez les femmes atteintes de TOF, la chute de la résistance périphérique induite par la grossesse
(Veldtman et al., 2004 ; Bonow et al., 2012) engendre une augmentation du shunt droite-gauche à
travers la CIV, ce qui aggrave la cyanose et peut mettre en danger la vie du fœtus et de la mère
(Bonow et al., 2012).
Avant les années 50, très peu de femmes atteintes de TOF atteignaient l’âge de procréer, par
conséquent, les grossesses menées à terme étaient rares. Des avortements spontanés, des morts-nés
et des accouchements prématurés étaient souvent observés (Veldtman et al., 2004).
Plus récemment, il a été montré chez quelques patientes non opérées ou ayant juste subi une
correction palliative que les risques de complications pendant la grossesse étaient proportionnels au
degré de cyanose. Il semblerait également que les patientes avec une saturation artérielle en O2
supérieure à 85 % et une concentration en hémoglobine inférieure ou égale à 18 g/dL présentent un
risque de malformations et de mort fœtales significativement plus faible (Veldtman et al., 2004).
Actuellement, la plupart des femmes atteintes de TOF et en âge de procréer ont déjà subi une
correction chirurgicale totale et ne sont plus cyanosées. Chez ces femmes, il faut procéder à un bilan
cardiaque complet avant la grossesse pour évaluer avec précision les séquelles post-chirurgicales et
leurs conséquences afin de pouvoir quantifier les risques associés à une grossesse. Chez les femmes
qui ont subi une correction chirurgiale totale, qui ont peu de séquelles, ont retrouvé une bonne
tolérance à l’effort et n’ont pas d’autre pathologie, la grossesse sera menée à terme dans de bonnes
conditions si elle est correctement suivie. Dans le cas contraire, les femmes atteintes de TOF auront
beaucoup de mal à tolérer l’augmentation du volume de charge liée à la grossesse (Bonow et al.,
2012). En effet, les conséquences hémodynamiques de la grossesse associées à des lésions
cardiovasculaires résiduelles peuvent être responsables d’une progression du dysfonctionnement du
ventricule droit, d’arythmies atriale et ventriculaire, de thromboembolies, de morts fœtales et/ou
maternelles liées à une hypertension pulmonaire importante, d’une dilatation progressive de la
racine de l’aorte, d’un retard de croissance intra-utérin ou encore d’une endocardite. Les femmes
souffrant de perturbations hémodynamiques importantes avant la grossesse doivent donc être
informées des risques encourus. Si une nouvelle intervention permet de diminuer ces perturbations
qui persistent chez certaines patientes malgré la correction chirurgicale totale, elle doit être
recommandée afin de pouvoir envisager une grossesse dans de meilleures conditions (Veldtman et
al., 2004).
44
2. Données actuelles sur la TOF chez les carnivores domestiques
2.1. Définitions anatomique et embryologique
2.1.1. Définition anatomique
La TOF est, comme chez l’Homme, la cardiopathie congénitale cyanogène la plus fréquente chez
les carnivores domestiques. Ses caractéristiques anatomiques générales sont similaires à celles
décrites précédemment (Figure 19) (Fox et al., 1999 ; Orton et al., 2001 ; Tilley et Goodwin, 2001 ;
Nelson, 2003 ; Pelosi et al., 2006 ; Chanoit, 2008 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Lee et
Hyun, 2009 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Boon, 2011 ; Chetboul et al., 2012).
La sténose pulmonaire peut être sous-valvulaire et/ou valvulaire. Dans la plupart des cas, il n’existe
pas de dilatation post-sténotique. Une hypoplasie du tronc pulmonaire peut parfois être observée. La
CIV est le plus souvent unique et de grande taille (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al.,
2008 ; Boon, 2011) et le septum interventriculaire aligné avec le centre de l’aorte (Boon, 2011).
Figure 19 - Coupes longitudinales transventriculaires du cœur gauche (A) et du cœur droit (B)
d’un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010)
(Ao) : aorte
(VG) : ventricule gauche
(TP) : tronc pulmonaire
(VD) : ventricule droit
A
B
(A) Mise en évidence d’une large communication interventriculaire située entre l’aorte et le ventricule gauche. La
base de l’aorte et la communication interventriculaire sont très proches et il existe un prolapsus d’une partie de
la valve aortique dans la communication interventriculaire.
(B) Mise en évidence d’une communication interventriculaire de grande taille (flèche noire), d’une sténose
pulmonaire (flèche blanche) et d’une hypertrophie du ventricule droit.
45
2.1.2. Définition embryologique
A l’instar de la TOF chez l’Homme, l’anomalie initiale à l’origine de la TOF chez les carnivores
domestiques concerne une phase précoce de la morphogénèse cardiaque (Lee et Hyun, 2009). En
effet, au cours du développement embryonnaire, a lieu une déviation antérieure du septum conal
(Fox et al., 1999 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Chetboul et al., 2012) ainsi qu’une septation anormale des
portions conale et troncale de la voie d’éjection cardiaque. Il en résulte une large CIV par
malalignement, associée à un anneau valvulaire pulmonaire et un tronc pulmonaire hypoplasiés, des
feuillets valvulaires pulmonaires rudimentaires, une hypertrophie infundibulaire ainsi qu’un
chevauchement de l’aorte sur le septum interventriculaire (Fox et al., 1999 ; Ettinger et Feldman,
2010 ; Chetboul et al., 2012). Le degré d’anomalie peut néanmoins être très variable (Patterson et al.,
1974).
Compte tenu de ses caractéristiques embryologiques, la TOF fait partie des anomalies conotroncales
que Patterson et al. (1978), suite à des études réalisées chez des Spitz Loups apparentés, ont classées
de la façon suivante :
- Grade 1 : anomalies subcliniques du crista supraventricularis (légère hypoplasie des
bourgeons du conus, retard de fusion du septum conotroncal en région proximale et
anomalie du muscle papillaire du conus),
- Grade 2 : anomalies du stade 1 associées à une CIV plus ou moins large (hypoplasie
modérée à importante des bourgeons du conus avec un défaut de fusion en région
proximale),
Grade 3 : anomalies du stade 2 associées à une sténose ou une atrésie pulmonaire (dysplasie
marquée des bourgeons du conus, septum conal incomplet, dysplasie marquée des
bourgeons du truncus avec une obstruction du flux ventriculaire droit). La TOF est donc
une anomalie conotroncale de grade 3,
- Grade 4 : truncus arteriosus persistant (hypoplasie marquée des bourgeons du conus avec
absence de septum conal, hypoplasie importante et défaut de fusion des bourgeons du
truncus et septum aorticopulmonaire anormal) (Patterson et al., 1974).
2.2. Epidémiologie
2.2.1 Quelques chiffres
En Amérique du nord, la prévalence des cardiopathies congénitales est comprise entre 0,46 et
0,85a% des hospitalisations (toutes causes confondues) chez le chien et entre 0,2 et 1 % chez le chat
(Ettinger et Feldman, 2010).
Les cardiopathies congénitales les plus fréquentes chez le chien sont la persistance du canal artériel,
la sténose aortique sous-valvulaire et la sténose pulmonaire. Selon une étude récente de Buchanan
incluant 1300 chiens atteints de cardiopathies congénitales, la persistance du canal artériel concerne
31,7 % des chiens, la sténose sous-aortique 22,1 % des chiens et 18,3% pour la sténose pulmonaire
(Ettinger et Feldman, 2010).
La TOF est également la cardiopathie congénitale cyanogène la plus fréquente chez les carnivores
domestiques (Buchanan, 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al., 2008). Elle représente 1 à 6 % des
cardiopathies congénitales des carnivores domestiques selon les auteurs (Orton et al., 2001 ; Pelosi et
al., 2006 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Oliveira et al., 2010). Toutefois, la prévalence actuelle pourrait
être supérieure à celle précédemment rapportée en raison du décès rapide des animaux atteints au
jeune âge (Lee et Hyun, 2009) et de la difficulté du diagnostic pour les équipes non expérimentées.
Elle pourrait donc en réalité être très proche de la prévalence décrite chez l’Homme.
46
2.2.2. Prédispositions raciale et sexuelle
Le Spitz Loup (plus connu sous le terme anglais Keeshond), le Caniche, le Schnauzer miniature, le
Beagle, le Bouledogue anglais, le Border Collie, le Berger des Shetlands et certains terriers dont le
Fox terrier semblent prédisposés à la TOF (Fox et al., 1999 ; Orton et al., 2001 ; Nelson, 2003 ;
Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008). Toutes les races de chien peuvent néanmoins être
concernées par cette cardiopathie avec une prévalence plus élevée chez les petites races. Toutefois,
la popularité de certaines races peut influencer la prévalence régionale, voire globale, d’une
anomalie congénitale (Ettinger et Feldman, 2010).
La TOF a également été décrite chez le chat mais aucune prédisposition raciale n’est disponible
dans la littérature (Fox et al., 1999 ; Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Boon,
2011).
Contrairement à la TOF chez l’Homme, les carnivores domestiques mâles semblent presque deux
fois plus touchés que les femelles (Ettinger et Feldman, 2010).
2.3. Physiopathologie
La physiopathologie est similaire à celle détaillée précédemment chez l’Homme (cf. paragraphe
1.3., page 19) (Orton et al., 2001 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Schwarz et
Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011 ; Chetboul et al., 2012).
L’option chirurgicale n’est que très rarement choisie chez les carnivores domestiques atteints de
TOF. Par conséquent, la plupart d’entre eux souffrent d’hypoxie chronique stimulant la fabrication
d’érythropoïétine par les reins et favorisant ainsi l’apparition d’une polycythémie. Cette dernière est
à l’origine d’une hyperviscosité sanguine qui exacerbe les risques d’accidents cérébro-vasculaires et
diminue l’espérance de vie (Fox et al., 1999 ; Orton et al., 2001 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al.,
2008 ; Ettinger et Feldman, 2010).
2.4. Etiologie
2.4.1. Mode de transmission
Patterson est un pionnier de la recherche génétique concernant les cardiopathies canines. Il a
commencé à réaliser des études épidémiologiques et familiales sur des cardiopathies congénitales
canines à la fin des années 50 et au début des années 60, qui ont mis en évidence de nombreuses
similitudes avec des cardiopathies déjà décrites chez l’Homme. Certaines d’entre elles ont été
retrouvées plus fréquemment dans quelques races, ce qui a encouragé les chercheurs à en explorer
l’étiologie génétique.
Une cardiopathie congénitale très proche de la TOF de l’Homme a semblé particulièrement
fréquente chez le Spitz loup comparé aux autres races de chien. Des études ultérieures réalisées
chez des Spitz loups apparentés ont confirmé qu’une série de malformations cardiaques, toutes
imputables à un degré variable d’anomalie du développement du septum conotroncal, était à
déterminisme héréditaire dans une lignée de Spitz loups ne présentant par ailleurs pas d’anomalie
extracardiaque. Les malformations cardiaques observées incluaient la plupart des anomalies
considérées comme conotroncales chez l’Homme. Les analyses de ségrégation réalisées dans la
colonie initiale de Spitz loups ont montré que les résultats n’étaient pas compatibles avec une
transmission monogénique à pénétrance complète. Par conséquent, un modèle a été établi selon
lequel de nombreux gènes auraient une action cumulative (modèle polygénique ou multifactoriel)
(Patterson et al., 1974).
47
Par la suite, dans les années 90, des croisements entre chiens atteints basés sur une consanguinité
sélective ont permis d’obtenir un degré d’homogénéité génétique accru dans un groupe de Spitz
loups, de façon à affiner le modèle précédemment établi. De nouvelles études ont été réalisées sur
ce groupe et ont permis d’aboutir à une nouvelle hypothèse : les anomalies conotroncales seraient la
conséquence de la mutation d’un seul gène (locus unique). Des études embryologiques ont été
réalisées en parallèle et ont permis de penser que la mutation causale interfèrerait avec la croissance
myocardique de la région conotroncale durant la courte période du développement embryonnaire
précoce où a lieu la septation conotroncale. Le modèle qui expliquait le mieux les résultats obtenus
était une transmission monogénique et autosomique avec un allèle à pénétrance partielle chez les
hétérozygotes et à pénétrance complète chez les homozygotes. En effet, les hétérozygotes de la
première génération (appelés F1) ne présentaient pas de lésions significatives mais parfois quelques
anomalies subcliniques et il existait un léger excédent de descendants affectés dans la génération F1
backcross (croisement en retour). Chez les homozygotes, la pénétrance de l’allèle délétère était
complète, comme le prouvaient les proportions obtenues dans les différents mariages. Toutefois, il
existait différents degrés d’anomalies chez les homozygotes.
Patterson est donc arrivé à la conclusion suivante : chez le Spitz loup, la TOF semble être la
conséquence de l’effet d’un gène majeur influant sur le développement conotroncal avec une
variation mineure surajoutée (expliquant la gravité variable de la TOF chez les homozygotes)
pouvant être due aux effets de gènes d’autres loci (gènes modificateurs) ou à l’environnement. Le
fait d’utiliser des Spitz Loup avec un fort taux de consanguinité a totalement changé les résultats de
l’étude probablement grâce à la diminution des effets des gènes mineurs qui masquaient la
transmission mendélienne (Patterson et al., 1993).
Cependant, en 2005, une analyse de liaison réalisée à l’aide d’un pedigree de chiens F1 backcross
croisés Spitz Loup x Beagle et de marqueurs génétiques répartis sur tous les chromosomes du chien,
a permis de contredire l’hypothèse d’un gène à effet majeur et de mettre en évidence trois loci
impliqués dans la TOF, dans ce pedigree. Ces trois loci étaient situés sur trois chromosomes
différents et agissaient en interaction pour gouverner le développement d’une TOF (Werner et al.,
2005).
Enfin, en 2009, une étude portant sur une famille de chiens Beagle atteinte d’anomalies
conotroncales a suggéré un mode de transmission autosomique récessif dans ce cas particulier (DiezPrieto et al., 2009).
2.4.2. Etude concernant l’implication du gène ZFPM2
Compte-tenu de l’implication probable du gène ZFPM2 (Zinc finger protein FOG family member 2)
dans l’apparition de la TOF chez l’Homme, un groupe de chercheurs a fait l’hypothèse que cela
pourrait également être le cas chez le chien. Ce gène a été isolé, séquencé puis comparé aux
séquences d’autres espèces et il a été mis en évidence que le gène ZFPM2 canin était très proche de
celui de l’Homme. Les études n’ont pas permis de mettre en évidence des expressions géniques
différentes entre chiens sains et chiens atteints de TOF. Aucune variation de séquence n’a pu être
mise en évidence chez les animaux atteints de TOF, dans les régions codantes du gène. Le niveau
d’expression de la protéine a aussi été étudié et comparé entre chiens sains et chiens atteints de
TOF. Il n’y avait aucune différence d’expression significative entre les deux groupes. Le gène
ZFPM2 ne semble donc pas impliqué dans l’apparition de la TOF dans les races considérées dans
l’étude (Schnauzer nain et Shiba Inu) (Lee et Hyun, 2009).
48
2.4.3. Pistes de recherches actuelles
2.4.3.1. Etudier les facteurs de transcription impliqués dans la morphogénèse
cardiaque
Les facteurs régulateurs du niveau de transcription (facteurs de transcription) des gènes impliqués
dans la morphogénèse cardiaque sont les principales cibles de recherche pour identifier l’étiologie
génétique de la TOF et des autres cardiopathies congénitales (Lee et Hyun, 2009). Il pourrait être
intéressant de se focaliser sur certains gènes potentiellement impliqués chez l’Homme tels que
NKX2.5 (NK2 transcription factor related, locus 5 aussi appelé CSX pour cardiac homeobox gene),
le complexe transcriptionnel formé par GATA4 (GATA binding protein 4) et FOG2 (FOG family
member 2). D’autre part, le gène VEGF (Vascular endothelial growth factor) pourrait également
être étudié, bien qu’il ne s’agisse pas d’un facteur de transcription, car un haplotype de VEGF,
associé à un risque accru de TOF a été mis en évidence chez l’Homme (cf. paragraphe 1.4.2.4.,
page 22).
2.4.3.2. S’intéresser à l’étiologie génétique des anomalies associées à la TOF chez
le chien
Comme chez l’Homme, la TOF chez le chien est souvent associée à d’autres malformations
congénitales comme l’hypoplasie trachéale, la hernie phréno-péricardique, les déformations
sternales, la communication interatriale, la persistance du canal artériel ou de l’arc aortique (Lee et
Hyun, 2009). Il est ainsi possible d’émettre l’hypothèse d’une origine génétique commune à toutes
ces malformations, qu’il serait pertinent d’explorer.
La recherche génétique concernant la TOF reste à ce jour limitée chez les carnivores domestiques et
repose sur un petit nombre d’études (Lee et Hyun, 2009). Néanmoins, la recherche de l’étiologie de la
TOF chez les carnivores domestiques n’a fait que progresser et elle fait encore l’objet de
nombreuses études (Chetboul et al., 2012).
Faute de financement, les chercheurs en médecine vétérinaire sont très souvent contraints de partir
de ce qui est connu en génétique humaine et de tester des gènes candidats, afin de déterminer s’ils
sont également impliqués chez les carnivores domestiques. Cette démarche, appelée approche gènecandidat, permet de réduire nettement le coût des études mais de nombreuses recherches restent
vaines. En effet, seules des études à l’échelle du génome, réalisées à l’aide de panels de marqueurs
répartis sur tous les chromosomes, permettent de rechercher des gènes sans a priori sur la fonction
de ces gènes (ils sont identifiés uniquement à partir de leurs positions). Ces études dites de clonage
positionnel ou genome-wide sont les seules réellement efficaces pour mettre en évidence des loci de
prédisposition aux maladies complexes comme la TOF. Leur coût constitue malheureusement
encore un frein à leur usage dans le domaine vétérinaire.
49
2.5. Signes cliniques
La TOF a été beaucoup étudiée chez le Spitz Loup, ce qui a permis de mettre en évidence divers
signes cliniques de gravité très variable (Fox et al., 1999).
La TOF chez les carnivores domestiques engendre majoritairement des symptômes très proches de
ceux observés chez l’Homme. En effet, les carnivores domestiques peuvent présenter des épisodes
de syncope, de dyspnée (Figure 20), de convulsions, de faiblesse, de tremblements, une intolérance
à l’effort et un retard de croissance. Toutefois, une perte de vision, qui n’est pas décrite chez
l’Homme et dont la physiopathologie n’est pas définie à ce jour, est parfois rapportée chez les
carnivores domestiques (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ;
Ettinger et Feldman, 2010). Une cyanose des muqueuses devient visible au repos lorsque la quantité
d’hémoglobine non oxygénée est supérieure à 3 g/dL (Figure 21). Lorsque l’on soupçonne une
cyanose, il est important de regarder à la fois les muqueuses buccales et vulvaire et de vérifier la
température de toutes les extrémités. L’idéal étant d’observer la couleur des muqueuses caudales
avant et après l’effort (l’effort majore le shunt droite-gauche et fait apparaître une cyanose chez la
majorité des animaux atteints de TOF) (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et
al., 2008). Le degré de cyanose est néanmoins très variable d’un animal à l’autre selon les
caractéristiques de la TOF, certains ne présentent pas de cyanose, même à l’exercice tandis que
d’autres sont cyanosés au repos (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al.,
2008 ; Boon, 2011).
Le mode de vie des carnivores domestiques atteints de TOF doit néanmoins être adapté en limitant
l’exercice physique, les émotions, la prise de poids… (Fox et al., 1999 ; Ware, 2007 ; Ettinger et
Feldman, 2010).
Figure 20 - Orthopnée chez un chaton de 4 mois atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007)
50
Figure 21 - Cyanose débutante au repos chez un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ware,
2007)
A la palpation, un frémissement cataire peut être présent au niveau du troisième espace intercostal
gauche à proximité de la jonction chondro-costale (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al.,
2008).
A l’auscultation cardiaque, un souffle systolique basal gauche caractéristique de la sténose
pulmonaire est l’anomalie la plus souvent rapportée. Un souffle systolique médio-thoracique droit
résultant d’un flux sanguin passant par la CIV restrictive peut néanmoins prédominer lorsque la
sténose pulmonaire est peu marquée. L’absence de souffle ou la présence d’un souffle de faible
intensité doivent orienter vers une atrésie pulmonaire associée à une CIV large. Une hyperviscosité
importante secondaire à une polycythémie peut néanmoins atténuer voire faire disparaître le souffle
cardiaque par diminution de la turbulence du flux sanguin quelles que soient les caractéristiques
anatomiques de la TOF (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Chanoit, 2008 ; Tilley et
al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010).
L’auscultation du champ pulmonaire révèle communément une particularité qui n’est pas décrite
chez l’Homme. En effet, des crépitements peuvent être audibles mais ne sont pas à mettre en
relation avec un œdème pulmonaire. Leur origine n’est pas encore bien comprise (Fox et al., 1999).
L’hippocratisme digital, rapporté chez l’enfant, n’a jamais été décrit chez l’animal.
51
2.6. Examens complémentaires
2.6.1. Radiographie thoracique
Comme chez l’Homme, les signes radiographiques de la TOF ne sont pas spécifiques de la
cardiopathie chez les carnivores domestiques. La radiographie met en évidence un cœur de taille
normale ou réduite avec un ventricule droit généralement élargi et un bord droit arrondi (« cœur en
sabot »). La dilatation du tronc pulmonaire n’est pas toujours visible. La vascularisation pulmonaire
est souvent réduite lorsque l’animal présente une TOF avec shunt droite-gauche mais elle est
compensée par une circulation bronchique accrue bien visible sur les radiographies (Figure 22) (Fox
et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al.,
2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Cette compensation s’explique par la relation anatomique entre
artère pulmonaire et artère bronchique. Les artères bronchiques peuvent avoir des origines variables
néanmoins, chez la plupart des chiens, l’artère bronchique principale provient de l’artère bronchoœsophagienne dont l’origine (cinquième artère intercostale droite) est très proche de celle de l’aorte.
Elle irrigue les nœuds lymphatiques trachéo-bronchiques, le tissu conjonctif péri-bronchique, la
muqueuse bronchique et elle se termine en lit capillaire au niveau des bronchioles qui est en
continuité avec le lit capillaire de l’artère pulmonaire. Un défaut de perfusion des bronchioles par
l’intermédiaire de l’artère pulmonaire sera donc rapidement compensé par une circulation
bronchique accrue (Evans, 1993). L’auricule gauche peut ne pas être visible en raison de la
diminution du retour veineux (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ;
Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Le ventricule droit hypertrophié déplace dorsalement le
cœur gauche, ce qui peut induire une hypertrophie artéfactuelle du ventricule gauche (Ware, 2007).
La dextroposition de l’aorte est parfois visible sur la vue de profil où elle dessine un bombement
crânial (Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson, 2008).
52
Figure 22 - Radiographie thoracique de profil (A) et de face (incidence dorso-ventrale) (B)
d’un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010)
Cœur de taille normale, dextroposition de l’aorte, vascularisation pulmonaire réduite et circulation
bronchique accrue. Dilatation du tronc pulmonaire non visible (pas de déplacement dorsal de la trachée).
Ventricule droit hypertrophié (« cœur en sabot »), dextroposition de l’aorte (flèche bleue), vascularisation
pulmonaire réduite compensée par une circulation bronchique accrue, discrète dilatation du tronc
pulmonaire (flèche jaune).
53
2.6.2. Echocardiographie-Doppler
Tout comme en cardiologie humaine, l’échographie est l’examen complémentaire de choix qui
permet de limiter l’utilisation de méthodes invasives (cathétérisme et angiographie) pour établir un
diagnostic définitif de TOF. Cet examen permet, en effet, de confirmer la malformation congénitale
et d’en apprécier les conséquences hémodynamiques (Figure 23) (Chetboul et al., 2012).
La coupe parasternale droite « grand axe » 4 cavités permet de visualiser directement l’hypertrophie
ventriculaire droite (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman,
2010 ; Boon, 2011 ; Chetboul et al., 2012). En changeant légèrement l’orientation de la sonde, une
coupe parasternale droite « grand axe » 5 cavités est obtenue, permettant de visualiser la CIV sousaortique (souvent large) (Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman,
2010 ; Chetboul et al., 2012) et la dextroposition de l’aorte. La large CIV membraneuse peut
également être évaluée sur la coupe parasternale droite « petit axe » transaortique (Chetboul et al.,
2012). Cette coupe est la plus adaptée pour évaluer les caractéristiques de la sténose pulmonaire
(Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ;
Chetboul et al., 2012) ou encore diagnostiquer une hypoplasie du tronc pulmonaire (Chetboul et al.,
2012).
L’échocardiographie peut également mettre en évidence une diminution de la taille de l’atrium et du
ventricule gauche (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger
et Feldman, 2010). En effet, le volume de sang qui arrive à l’atrium gauche puis au ventricule gauche
est réduit car la sténose pulmonaire diminue le flux sanguin pulmonaire. Si le sang passe du cœur
gauche au cœur droit par la CIV, ce phénomène est accentué. Si inversement, le sang passe du cœur
droit au cœur gauche par la CIV, il se dirige alors directement dans l’aorte en raison de la
dextroposition de cette dernière et n’augmente donc pas le volume sanguin au sein du ventricule
gauche. Des études invasives réalisées chez des chiens atteints de TOF ont permis de mettre en
évidence les pressions intraventriculaires gauches pouvaient descendre jusqu’à 36 mmHg (Boon,
2011).
L’écho-Doppler permet ainsi de déterminer la direction du flux à travers la CIV (droite-gauche,
gauche-droite ou encore bidirectionnel) (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ;
Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Boon, 2011). Le mode Doppler continu permet de
quantifier les gradients de pression de part et d’autre de la CIV et de la sténose pulmonaire. Le plus
souvent, la pression au sein du ventricule droit est égale ou légèrement supérieure à celle du
ventricule gauche (Chetboul et al., 2012). Des gradients de pression de plus de 100 mmHg sont
généralement associés à un shunt droite-gauche ou bidirectionnel. Lorsqu’une sténose pulmonaire
sous-valvulaire serrée est présente ou qu’il existe une hypoplasie de l’anneau de la valve
pulmonaire, il est parfois difficile d’obtenir une image convenable de la chambre de chasse droite et
de la valve et donc d’effectuer un examen Doppler du flux transpulmonaire. La cavité ventriculaire
droite est généralement de petite taille sauf si des régurgitations sont présentes. Il faut également
toujours rechercher une insuffisance tricuspidienne (Boon, 2011).
54
Figure 23 - Echocardiographie-Doppler d’un chiot Spitz loup atteint de tétralogie de Fallot
(Ettinger et Feldman, 2010)
(Ao) : aorte
(AG) : atrium gauche
(VG) : ventricule gauche
(AD) : atrium droit
(VD) : ventricule droit
(A) : coupe « grand axe » 4 cavités obtenue par voie parasternale droite mettant en évidence une hypertrophie
concentrique importante du ventricule droit et une dilatation de l’atrium droit (mode bidimensionnel)
(B) : coupe « petit axe » transventriculaire obtenue par voie parasternale droite mettant en évidence une
hypertrophie concentrique importante du ventricule droit, un aplatissement du septum interventriculaire, un
ventricule gauche légèrement sous-rempli et une hyperéchogénicité sous-endocardique du ventricule droit (mode
bidimensionnel)
(C) : hypertrophie-dilatation du ventricule droit (mode temps-mouvement)
(D) : coupe « grand axe » 5 cavités obtenue par voie parasternale droite mettant en évidence une communication
interventriculaire et une dextroposition de l’aorte (mode bidimentionnel)
(E) : coupe (D) en mode Doppler couleur montrant le shunt droite-gauche à travers la communication
interventriculaire
(F) : sténose pulmonaire caractérisée par un flux sanguin systolique transpulmonaire de vitesse augmentée
55
2.6.3. Examen électrocardiographique
Comme chez l’Homme, l’anomalie principale retrouvée à l’examen électrocardiographique est la
déviation axiale droite, évocatrice d’une hypertrophie du ventricule droit (Figure 24) (Tilley, 1992 ;
Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et
Feldman, 2010). Cette anomalie, également retrouvée lors de dilatation du ventricule droit, n’est pas
spécifique de TOF, d’où l’importance de l’échocardiographie pour confirmer le diagnostic (Tilley,
1992). Une arythmie n’est que rarement présente (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson,
2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010).
Moins fréquemment, une déviation axiale gauche peut être observée, notamment chez certains chats
atteints de TOF (Tilley, 1992 ; Fox et al., 1999 ; Ware, 2007).
Figure 24 - Electrocardiogramme d’un chien atteint de tétralogie de Fallot présentant une
hypertrophie importante du ventricule droit (Tilley, 1992)
Présence d’une déviation axiale droite de -180°. Grandes ondes S sur les dérivations I, II et aVF.
2.6.4. Examens sanguins
L’hypoxie peut être confirmée par la mesure de la pression artérielle en O2. Comme chez l’Homme,
il est également important chez les carnivores domestiques de réaliser régulièrement une
numération et formule sanguine afin de rechercher une éventuelle polycythémie (en particulier chez
les individus présentant un shunt droite-gauche ou bidirectionnel). Cette polycythémie peut
engendrer une hyperviscosité sanguine et donc accroître les risques d’accidents cérébro-vasculaires
(cf. paragraphe 2.3., page 47) (Ettinger et Feldman, 2010).
2.6.5. Cathétérisme cardiaque et angiographie
Le cathétérisme et l’angiographie cardiaques sont recommandés chez les carnivores domestiques
lorsqu’une TOF a été diagnostiquée par examen échocardiographique et qu’une correction
chirurgicale est envisagée. Ces techniques permettent de préciser l’anatomie des lésions (Fox et al.,
1999 ; Ettinger et Feldman, 2010).
L’angiographie (Figure 25) permet de visualiser l’hypertrophie du ventricule droit, le rétrécissement
infundibulaire du ventricule droit, la sténose pulmonaire valvulaire et/ou sous-valvulaire avec
56
dilation post-sténotique, l’hypoplasie plus ou moins marquée du tronc pulmonaire, la CIV sousaortique, le ventricule gauche de taille plus ou moins réduite déplacé dorsalement, la dextroposition
de l’aorte élargie et la circulation bronchique anormalement élevée. Il est fréquent de retrouver un
shunt bidirectionnel chez l’animal anesthésié. Il est important de prendre toutes les précautions
nécessaires pour éviter une embolie gazeuse (Fox et al., 1999 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Ettinger et
Feldman, 2010).
Le cathétérisme cardiaque permet de mettre en évidence l’équilibre des pressions systoliques dans
les ventricules droit et gauche ce qui est compatible avec une CIV large non restrictive. Les mesures
d’oxymétrie révèlent une diminution de celle-ci dans le sang contenu par le ventricule gauche.
L’administration d’héparine est préférable pendant et juste après le cathétérisme cardiaque de façon
à diminuer les risques d’embolie cérébrale (Fox et al., 1999 ; Ettinger et Feldman, 2010).
Figure 25 - Angiographie du chien de la Figure 22 atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007)
(324) Injection de produit de contraste dans le ventricule gauche mettant en évidence une dextroposition aortique
marquée. Un shunt est révélé par la présence de produit de contraste dans la chambre de chasse du ventricule droit et
dans les artères pulmonaires. Le ventricule droit hypertrophié a déplacé dorsalement l’apex du ventricule gauche.
(325) Injection de produit de contraste dans le ventricule droit mettant en évidence un shunt droite-gauche. Une
dilatation post-sténotique du tronc pulmonaire est présente.
2.7. Traitement médical
2.7.1 Intérêts des béta-bloquants
Comme chez l’Homme, les béta-bloquants peuvent être utilisés pour diminuer les conséquences
hémodynamiques de la sténose pulmonaire et pour atténuer la chute de la résistance vasculaire
systémique à médiation béta-adrénergique. Ils permettraient ainsi de réduire l’intensité du shunt
droite-gauche (Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008). Toutefois,
l’efficacité clinique des bétabloquants (propanolol) pour traiter la TOF n’a pas encore été prouvée
57
en médecine vétérinaire (Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010).
2.7.2. Correction de l’hyperviscosité sanguine
Chez les carnivores domestiques, la polycythémie secondaire à l’hypoxémie chronique et les signes
cliniques associés à l’hyperviscosité sanguine (faiblesse, essoufflement, crises hypoxiques) peuvent
être contrôlés par des saignées régulières (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008).
Les saignées ne sont plus pratiquées en médecine humaine car l’existence d’une hypoxémie
marquée et l’apparition de crises hypoxiques sont des indications urgentes à une intervention
chirurgicale (Friedli, 2004).
En médecine vétérinaire, l’intervention chirurgicale est rarement pratiquée. Par conséquent, la mise
en place de saignées est recommandée lorsque l’hématocrite devient supérieur à 68 % avec une
polyglobulie confirmée par la numération et formule sanguine. Jusqu’à 20 mL/kg de sang peuvent
être prélevés et remplacés par une solution physiologique (Ringer lactate ou chlorure de sodium
0,9a%). Le volume de sang ponctionné est, bien entendu, adapté en fonction de la gravité de la
polyglobulie et de l’état général de l’animal (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ;
Ettinger et Feldman, 2010). Ces saignées peuvent être répétées, si nécessaire, en fonction de la
réponse physiologique de l’individu.
Lorsque les saignées deviennent trop fréquentes ou mal tolérées, il est possible d’administrer un
agent myélosuppresseur tel que l’hydroxyurée (Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008). La dose initiale
conseillée chez les carnivores domestiques pour cette indication est de 40 à 50 mg/kg par voie orale
toutes les 48 heures ou trois fois par semaine. La posologie est néanmoins à adapter suivant la
réponse au traitement. Au début du traitement, il est important de réaliser 1 à 2 numérations et
formules sanguines par semaine afin d’adapter au mieux la posologie. Si l’animal tolère bien
l’hydroxyurée et que l’observance du traitement est satisfaisante (en particulier les suivis de
numération et formule sanguine), elle pourra être administrée sur le long terme. Elle peut
néanmoins provoquer différents effets secondaires tels qu’une anorexie, des vomissements, une
hypoplasie médullaire, une alopécie et du prurit (Moore et Stepien, 2001). Il est également important
de ne pas abaisser de façon excessive et/ou trop rapide la quantité de globules rouges car c’est ce
qui permet de compenser l’hypoxie chronique. Il s’agit donc avant tout de trouver un équilibre en
corrigeant l’hyperviscosité sanguine tout en permettant à l’animal de compenser l’hypoxie (il est
souvent préférable de conserver un hématocrite supérieur aux valeurs usuelles) (communication
personnelle de Luca Zilberstein).
2.7.3. Cas particulier de la gestion de la crise hypoxique
Aucune prise en charge « type » ne peut être définie lors de crise hypoxique. Il faut l’adapter au cas
par cas en fonction de nombreux paramètres tels que l’hématocrite, l’importance de l’acidose
métabolique, les caractéristiques anatomiques et échographiques de sa TOF (communication
personnelle de Luca Zilberstein).
Lors de crise hypoxique, une alcalose respiratoire est souvent présente. L’oxygénothérapie
n’améliore généralement pas significativement l’état clinique de l’animal en raison de la présence
du shunt droite-gauche. Il est donc primordial d’essayer d’inverser la direction du shunt et de
diminuer les dépenses en O2 de l’organisme. Les traitements à base d’agents vasoconstrictants, tels
que la phényléphrine, peuvent ainsi aider à réduire le shunt droite-gauche (Tilley et Goodwin, 2001 ;
Ettinger et Feldman, 2010). Il est primordial d’éviter les médicaments vasodilatateurs (Tilley et
Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Ettinger et Feldman, 2010).
En présence d’une acidose métabolique, qui intervient pour compenser l’alcalose respiratoire, il est
nécessaire de supplémenter l’animal en bicarbonates de sodium quand le pH sanguin atteint des
58
valeurs trop basses (pH inférieur à 7,1 et HCO3- inférieurs à 10 mmol/L). Il est conseillé de corriger
un tiers du déséquilibre total (différentiel entre réserve alcaline et la valeur normale, multiplié par
0,3) en urgence et un tiers lentement (le dernier tiers n’est corrigé que si l’organisme le nécessite
réellement). A la fin de chaque phase de supplémentation, il faut surveiller régulièrement le
ionogramme car des déséquilibres ioniques peuvent intervenir (une hypokaliémie et une
hypocalcémie peuvent par exemple survenir) entraînant de multiples dysfonctionnements à l’échelle
de l’organisme tels que des troubles cardiovasculaires (perte de contractilité liée au déficit en Ca2+),
digestifs... L’état de vigilance doit également être surveillé car une hypovigilance peut conduire à
une hypoventilation et à une aggravation de l’acidémie (communication personnelle de Luca
Zilberstein).
Il est important de réaliser une numération et formule sanguine car l’existence d’une hyperviscosité
sanguine provoque une diminution du transport périphérique de l’O2. En effet, les capillaires ont un
diamètre insuffisant pour permettre le passage d’un sang hypervisqueux. Dans ce cas, une saignée
doit avoir lieu en urgence selon le protocole décrit dans le paragraphe 2.7.2. (communication
personnelle de Luca Zilberstein).
Une sédation peut également être envisagée afin d’abaisser le métabolisme et réduire l’état
d’excitation de l’animal. Les molécules pouvant être utilisées sont :
- les opioïdes comme le butorphanol à 0,2 mg/kg (en bolus ou en perfusion continue à
0,05 mg/kg/h) ou la métadone à 0,2 mg/kg en bolus. Ces opioïdes ont l’avantage de ne pas
avoir d’action sur la contractilité cardiaque, ni d’effet vasomoteur (vasoconstricteur ou
vasodilatateur),
- les benzodiazépines comme le midazolam à 0,2-0,4 mg/kg en bolus ou en perfusion continue
à 0,05 mg/kg/h pouvant être associées aux opioïdes,
- le propofol, en dernier recours et à des doses sédatives, soit à 1-2 mg/kg/h en perfusion
continue (communication personnelle de Luca Zilberstein).
2.8. Traitement chirurgical
L’ensemble des techniques chirurgicales utilisées en médecine humaine et décrites précédemment
(cf. paragraphe 1.9., page 29) peuvent être transposées aux carnivores domestiques.
2.8.1. Traitement chirurgical palliatif
La correction chirurgicale palliative est la technique de choix chez les carnivores domestiques car
moins complexe et moins coûteuse que la correction chirurgicale totale. Néanmoins, elle reste
rarement pratiquée. Elle fait appel aux anastomoses de Blalock-Taussig classique et modifiée
(principalement) et à l’anastomose de Potts décrites chez l’Homme (cf. paragraphe 1.9.1., page 29)
(Eyster et al., 1977 ; Ringwald et Bonagura, 1988 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Brockman et
al., 2007 ; Ware, 2007 ; Chanoit, 2008 ; Orton, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010).
L’anastomose aorto-pulmonaire directe a, comme chez l’Homme, été abandonnée chez les
carnivores domestiques car elle engendre une surcharge cardiaque trop importante (Chanoit, 2008).
Quelques descriptions anciennes de cas rapportant des anastomoses de Blalock-Taussig classique
ou modifiée (le plus souvent) ou de Potts chez le chien sont disponibles dans la littérature mais les
résultats sont controversés (Eyster et al., 1977 ; Ringwald et Bonagura, 1988). Nous allons nous
intéresser plus en détails à deux techniques chirurgicales palliatives récentes, réalisées chez le chien
dans les années 2000 (Pelosi et al., 2006 ; Brockman et al., 2007).
Seule une description de chirurgie palliative réalisée chez un chat est disponible dans la littérature et
date de 1985 (Miller et al., 1985). Elle concerne un chat croisé siamois de 9 mois, intolérant à
59
l’effort, cyanotique, faisant des syncopes, qui a subi dans un premier temps une anastomose entre
oreillette droite et artère pulmonaire principale (afin d’éviter une hypertension pulmonaire) dont
l’obstruction a été mise en évidence 10 jours après l’intervention par cathétérisme cardiaque et
injection de produit de contraste. Suite à cet échec, une anastomose de Blalock-Taussig a été
entreprise et le shunt était perméable 3 semaines plus tard (le suivi n’a pas pu être poursuivi au-delà
de ces trois semaines pour une raison inconnue). L’hématocrite avait diminué (de 50,8 en préopératoire à 43,3 % trois semaines après l’intervention) et une amélioration des signes cliniques
était objectivable (Miller et al., 1985).
Une dilatation par ballonnet de la sténose pulmonaire sous-valvulaire d’une chienne Bull terrier
miniature de 6 mois pesant 6,250 kg atteinte de TOF associée à une sténose aortique et à une
insuffisance mitrale a aussi été rapportée (Oguchi et al., 1999). La chienne était dyspnéique,
intolérante à l’effort et présentait une cyanose au repos. L’hématocrite était de 72 %. En postopératoire immédiat, le gradient de pression de part et d’autre de la valve pulmonaire avait diminué
(63 mmHg versus 97 mmHg). Aucune complication liée à l’intervention ne fut à déplorer. Les
symptômes fonctionnels de l’animal se sont significativement améliorés durant les 4 mois ayant
suivi la dilatation. Malheureusement, l’animal est décédé 4 mois après l’intervention dans un
tremblement de terre. D’autres études avec une population plus importante et un suivi plus long
pourraient permettre d’établir les indications de cette intervention dans le cadre de la TOF (Oguchi et
al., 1999).
2.8.1.1. Etude de Brockman et al. : technique de Blalock-Taussig modifiée
faisant appel à une prothèse expansive en téflon ou à un segment d’artère
carotide (Brockman et al., 2007)
- Objectif de l’étude et population choisie : Brockman et al. ont inclu 6 chiens (2 croisés, 1 Spitz
Loup, 1 Chihuahua, 1 Labrador et 1 Sussex Spaniel) âgés de 5 mois à 5 ans et présentant une forme
grave de TOF (avec une importante intolérance à l’effort, une cyanose au repos et une augmentation
progressive de l’hématocrite) diagnostiquée par échocardiographie et angiographie (Tableau 3).
Une anastomose de Blalock-Taussig modifiée a été réalisée chez l’ensemble des chiens de l’étude.
Une prothèse expansive en téflon a été utilisée chez 5 des 6 chiens (pesant tous plus de 10 kg) et un
segment d’artère carotide pour le sixième (pesant 2,9 kg).
Le but de l’étude était de suivre l’évolution post-opératoire à long terme de ces 6 chiens (Brockman
et al., 2007).
- Voie d’abord et technique chirurgicale : la voie d’abord thoracique a été effectuée soit par
résection de la quatrième côte gauche, soit par le cinquième espace intercostal gauche. L’artère
sous-clavière gauche a ensuite été disséquée. L’artère pulmonaire gauche a été exposée après une
incision du péricarde. L’anastomose entre l’artère sous-clavière gauche et l’artère pulmonaire
homolatérale a été réalisée par une prothèse expansive en téflon de 6 mm de diamètre chez 5 des 6
chiens et par un segment d’artère carotide pour le sixième (Brockman et al., 2007).
- Résultats (Tableau 3) : un seul décès post-opératoire a été à déplorer, il concernait le Chihuahua de
13 mois pesant 2,9 kg ayant reçu la greffe autologue d’artère carotide (Brockman et al., 2007).
Cette technique palliative a néanmoins permis de faire chuter l’hématocrite 1 mois après l’opération
chez 4 des 5 chiens ayant survécu, l’hématocrite du 5ème étant resté stable à 50%. La baisse était de
1 et 18 % selon les chiens. Néanmoins, les dernières valeurs d’hématocrite disponibles (entre 8 et
45 mois après l’opération) ont montré une augmentation progressive pour 4 des 5 chiens et, pour 2
des 5 chiens qui ont survécu, cette valeur est même devenue supérieure à la valeur initiale (de 2 et
60
6a%). Chez ces 2 chiens, la perméabilité du shunt n’a malheureusement pas pu être vérifiée suite à
ces résultats. Néanmoins, cette variation n’était pas majeure et pouvait être liée à d’autres facteurs
(déshydratation, maladie intercurrente…). Une augmentation de la pression artérielle en O2 était
quant à elle présente en post-opératoire chez 4 chiens ayant survécu, la valeur pré-opératoire n’étant
pas disponible pour le 5ème (Tableau 3). Chez 4 des 5 chiens ayant survécu, la perméabilité du shunt
a pu être mise en évidence à l’échographie entre 8 et 24 mois après l’opération et la qualité de vie
des 5 chiens s’était améliorée. Le chien 1 est mort à 11,5 ans d’une insuffisance cardiaque
congestive, soit 6 ans après l’intervention. Le chien 2 est mort subitement (une origine
« cardiaque » est fortement suspectée) à 7 ans, soit 6 ans après l’opération également. Les 3 autres
chiens étaient encore en vie lors du dernier suivi (30 à 54 mois après l’opération) (Brockman et al.,
2007).
Tableau 3 - Evolution de l’hématocrite et de la pression artérielle en O2 de l’ensemble des
chiens de l’étude de Brockman et al. suite à la technique de Blalock-Taussig modifiée
(Brockman et al., 2007)
Chien 1
Chien 2
Chien 3
Chien 4
Chien 5
Chien 6
Sexe
Race
Mâle
Croisé
Femelle
Spitz Loup
Femelle
Croisé
Mâle
Chihuahua
Mâle
Labrador
Âge (mois)
Poids (kg)
60
24,4
68
50
12
10,6
60
53
5
12,1
50
50
13
2,9
50
/
5
16,0
50
49
Femelle
Sussex
Spaniel
8
10,8
60
46
56 (18)
52 (12)
56 (36)
/
52 (45)
58 (8)
ND
52,7
56,0
ND
58,0
54,0
63,9
70,0
64,0
/
66,0
60,0
O (15 mois)
O (12 mois)
ND
/
O (24 mois)
O (8 mois)
Avant opération
1 mois après
intervention
Hématocrite
Dernière valeur
(%)
(mois suivant
l’opération)
Avant
Pression
l’opération
artérielle en
Après
O2 (mmHg)
l’opération
Perméabilité du shunt O/N
(mois suivant l’opération)
(ND) : non disponible
(/) : animal décédé
- Conclusion : la technique de Blalock-Taussig modifiée utilisant une prothèse expansive en téflon
semble être une option chirurgicale intéressante qui permettrait d’augmenter significativement
l’espérance et la qualité de vie des chiens atteints de TOF grave. La greffe autologue d’artère
carotide a été réalisée chez un seul animal qui est décédé d’un arrêt cardio-respiratoire 24 heures
après l’opération. L’autopsie de ce chien n’a pas pu être réalisée et la perméabilité du shunt n’a pas
pu être étudiée. La technique chirurgicale était néanmoins plus complexe en raison de la petite taille
de l’animal. En effet, il semble que le risque de complications chez les animaux de petit format soit
significativement plus élevé que chez ceux de grand format. Des études ultérieures portant sur un
plus grand nombre d’animaux sont néanmoins nécessaires pour confirmer ces résultats (Brockman et
al., 2007).
61
2.8.1.2. Etude de Pelosi et al. : technique de Blalock-Taussig modifiée faisant
appel à un segment de veine jugulaire (Pelosi et al., 2006)
- Objectif de l’étude et population choisie : les auteurs ont inclus 15 Beagle adultes sains pesant
14,9 ± 1 kg. Des examens écho-Doppler ont été réalisés 4, 7 et 30 jours après l’intervention.
Le but de cette étude était d’évaluer si l’utilisation d’une greffe autologue de veine jugulaire est une
alternative intéressante ou non à la greffe synthétique utilisée dans la technique de Blalock-Taussig
modifiée (Pelosi et al., 2006).
- Voie d’abord et technique chirurgicale (Figure 26) : une incision cutanée de 6 cm parallèle au
trajet de la veine jugulaire gauche a été pratiquée. De la papavérine a été placée sur la veine
jugulaire pour contrôler ses spasmes. L’adventice a été retirée et l’incision a été recouverte par une
éponge imbibée de NaCl 0,9 % pendant que l’abord thoracique a été pratiqué au niveau du
quatrième espace intercostal gauche. L’artère sous-clavière a été identifiée et isolée puis l’adventice
retirée. La veine jugulaire a été ligaturée puis 4 cm de veine ont été retirés afin de servir de greffon.
Ce greffon a immédiatement été placé dans 100 mL de solution saline refroidie mélangée à 3 mL
d’héparine et 0,2 mL de papavérine. Le greffon a ensuite été coupé obliquement au niveau de son
extrémité proximale pour augmenter le diamètre du site d’anastomose. Un clamp bulldog a été
placé au niveau de l’origine de l’artère sous-clavière ainsi qu’une ligature à au moins 2 cm du
clamp. L’artère a été sectionnée à 1 cm de son origine et incisée obliquement en partie proximale
pour augmenter le diamètre de l’anastomose. Puis l’anastomose entre le greffon et l’artère sousclavière a été réalisée. Ensuite, le péricarde a été incisé pour mettre en évidence l’artère pulmonaire
et ainsi réaliser son occlusion partielle à l’aide d’un clamp de Satinsky. Puis l’artère pulmonaire a
été incisée et l’extrémité distale du greffon a alors été coupée obliquement. Enfin, une anastomose a
été pratiquée entre le greffon et l’artère pulmonaire. La circulation a été rétablie par retrait du clamp
de Satinsky puis du clamp Bulldog. La perméabilité du shunt a été évaluée par palpation du thrill.
Chez 12 des 15 chiens opérés, un Doppler en silicone relié à un sonomicromètre a été placé autour
de l’artère sous-clavière ou au niveau de la greffe afin de mesurer la vitesse du flux (Pelosi et al.,
2006).
62
Figure 26 - Photographies des trois étapes clés de l’anastomose entre artère sous-clavière et
artère pulmonaire homolatérale utilisant la veine jugulaire comme greffon chez un chien sain
(Pelosi et al., 2006)
a
(a) Occlusion complète de l’artère sous-clavière grâce à un clamp bulldog.
(b) Anastomose réalisée sur la face médiale de l’artère pulmonaire. Occlusion partielle de l’artère
pulmonaire principale grâce à un clamp de Satinsky.
(c) Mise en place du greffon (portion de veine jugulaire) entre l’artère sous-clavière (flèche blanche)
et l’artère pulmonaire (flèche noire).
- Résultats : 30 jours après l’intervention, 9 des 12 chiens avec sonde de flux et les 3 chiens sans
sonde de flux avaient un shunt perméable (Figures 27 et 28). Aucun signe d’œdème pulmonaire n’a
été détecté sur les clichés radiographiques. La longueur moyenne de la greffe était de
3,9 cm ± 0,5 cm, le diamètre moyen de la greffe était de 2,1 cm ± 0,5 cm et le diamètre moyen de
l’artère sous-clavière était de 2,1 cm ± 0,3 cm (Pelosi et al., 2006).
63
Figure 27 - Coupe écho-Doppler « petit axe » transaortique obtenue par voie parasternale
droite chez un chien ayant subi 30 jours auparavant une anastomose entre artère sousclavière et artère pulmonaire homolatérale utilisant une portion de veine jugulaire comme
greffon (Pelosi et al., 2006)
(AG) : atrium gauche
(Ao) : aorte
(CCVD) : chambre de chasse du ventricule
droit
AG
Présence d’un flux sanguin turbulent (flèche jaune) indiquant que le shunt est perméable.
Figure 28 - Angiographie artérielle du chien de la Figure 28, 30 jours après l’anastomose
entre artère sous-clavière et artère pulmonaire homolatérale utilisant la veine jugulaire
comme greffon (Pelosi et al., 2006)
Cathétérisme aortique
Shunt perméable 30 jours après l’anastomose
64
- Résultats (suite) : le shunt a induit une hypertrophie excentrique du ventricule gauche par
augmentation du volume de charge sans que son volume télésystolique n’ait été significativement
modifié. En revanche, la fraction d’éjection et le volume télédiastolique du ventricule gauche
étaient significativement augmentés. De plus, une dilatation de l’atrium gauche était présente 30
jours après l’intervention (Pelosi et al., 2006).
Les chiens ont tous été euthanasiés 30 jours après la greffe afin de pratiquer une analyse
histologique du greffon et de la veine jugulaire droite. Macroscopiquement, un remaniement de la
greffe était visible. A l’analyse histologique, la greffe avait évolué vers une artérialisation (Figure
29). Ces changements mettaient en évidence la capacité d’adaptation de ce greffon, permettant
d’émettre l’hypothèse d’un potentiel de croissance non étudié dans cette étude. Une couche
continue de cellules endothéliales s’était formée entre la greffe et l’artère sous-clavière ce qui était
en faveur d’une bonne tolérance du greffon. Chez tous les chiens possédant une sonde de flux, une
diminution focale du diamètre (divisé par 4 ou 5) de la lumière du greffon a été mise en évidence en
raison de la fibrose et de l’inflammation locale au niveau de la sonde (Pelosi et al., 2006).
Figure 29 - Coupes histologiques comparatives d’une veine jugulaire normale de chien (à
gauche) et d’une veine jugulaire utilisée comme greffon pour l’anastomose entre artère sousclavière et artère pulmonaire chez un chien sain 30 jours après sa mise en place (à droite)
(Pelosi et al., 2006)
Coloration immunohistochimique. Echelle : trait noir = 100µm.
Coloration marron intense de la veine jugulaire 30 jours après l’anastomose soulignant la prolifération de
léiomyocytes (artérialisation).
- Conclusion : l’utilisation de la veine jugulaire comme greffon dans la technique de BlalockTaussig modifiée donne des résultats satisfaisants à court terme (30 jours) chez le chien sain. Ces
résultats pourraient être meilleurs car 2 des 3 échecs semblent directement à mettre en relation avec
la présence de la sonde de flux qui n’est pas indispensable. Aucune complication majeure à court
terme n’est liée à l’utilisation de la veine jugulaire comme greffon. Un remodelage précoce du
greffon est observé chez tous les chiens. Il pourrait désormais être intéressant de réaliser cette
technique chez des animaux atteints de TOF et de réaliser un suivi sur le long terme (Pelosi et al.,
2006).
65
2.8.2. Correction chirurgicale totale
En médecine vétérinaire, la correction chirurgicale totale est encore plus rarement pratiquée que la
chirurgie palliative. En effet, seule une description de deux cas chez le chien, détaillée ci-dessous,
est disponible dans la littérature (Nelson, 2003 ; Pelosi et al., 2006). Aucun cas n’est rapporté chez le
chat.
2.8.2.1. Description de deux cas d’Orton et al. : technique de correction
chirurgicale
chirurgicale totale standard utilisée chez l’Homme (Orton et al., 2001)
- Objectif de la description de ces deux cas et population choisie : Orton a inclus deux chiens dans
sa description. Le premier était un chien mâle croisé berger de 3 mois pesant 12 kg et présentant
une cyanose modérée au repos mais majeure à l’effort. L’hématocrite était de 41 %. Le second était
une chienne croisée berger stérilisée de 12 mois pesant 13 kg et présentant une intolérance à l’effort
majeure, une cyanose marquée au repos et une polycythémie importante (hématocrite = 79 %) ayant
nécessité des saignées 1 et 4 semaines avant l’intervention.
L’objectif de cette description de deux cas était de rapporter l’évolution à moyen terme de deux
chiens souffrant d’une forme grave de TOF ayant subi une correction chirurgicale totale dont la
technique a été détaillée précédemment (cf. paragraphe 1.9.2., page 33) (Orton et al., 2001).
- Voie d’abord et technique chirurgicale : l’abord a été effectué par sternotomie médiane. Le
péricarde a été incisé sur sa face ventrale puis la circulation extra-corporelle a été mise en place (cf
paragraphe 2.8.2.2, page 67). Une incision a ensuite été pratiquée au niveau de la chambre de
chasse du ventricule droit. Chez la chienne, la sténose pulmonaire était caractérisée par une
dysplasie de la valve pulmonaire (hypoplasie de l’anneau valvulaire, valvules immobiles et
épaissies). La ventriculotomie a donc dû être étendue jusqu’à l’anneau de la valve pulmonaire.
Quant au chien mâle, il n’a pas été nécessaire d’étendre la ventriculotomie car il présentait un
infundibulum élargi sans atteinte de la valve pulmonaire (une simple excision d’une bande
musculaire appartenant à la valve pulmonaire a été réalisée) (Orton et al., 2001).
- Résultats : les deux chiens ont survécu à l’opération et une amélioration clinique significative a été
objectivée en post-opératoire immédiat. Tous deux ont retrouvé une bonne tolérance à l’exercice
quelques semaines après l’intervention. Le chien mâle était en bon état général lors de son dernier
suivi 24 mois après l’intervention et participait même à des compétitions d’agility. La chienne
présentait (de même) une bonne tolérance à l’exercice lors de son dernier suivi 36 mois après
l’opération. Cette étude n’a néanmoins pas permis de déterminer si ces chiens avaient des risques
accrus de mort subite suite à cette intervention. Aucune différence de récupération en postopératoire n’a pu être mise en évidence entre les deux alternatives chirurgicales
(valvectomie/absence de valvectomie) (Orton et al., 2001).
- Conclusion : la correction chirurgicale totale semble être une alternative intéressante pour les
chiens atteints de TOF. Néanmoins, de nouvelles études portant sur un plus grand nombre
d’animaux sont nécessaires pour pouvoir l’affirmer.
66
2.8.2.2. Une contrainte majeure : la CEC
La correction chirurgicale totale est une chirurgie à cœur ouvert qui nécessite donc la mise en place
d’une CEC. Cette technique a été décrite chez le chien mais son coût, sa difficulté et le postopératoire contraignant la rendent peu disponible (Ware, 2007 ; Chanoit, 2008 ; Ettinger et Feldman,
2010).
Les premières chirurgies cardiaques vétérinaires sous CEC ont été réalisées en Amérique du nord
dans les années 70 par des chirurgiens vétérinaires universitaires (Borenstein et Behr, 2009).
L’Unité de Cardiologie d’Alfort (UCA) en collaboration avec l’équipe de chirurgiens cardiaques et
d’un perfusionniste de l’hôpital Montsouris (IMM recherche) a été une pionnière en Europe en ce
qui concerne l’utilisation de la CEC chez le chien. La machine nécessaire à la CEC est constituée de
pompes à galet, d’un oxygénateur qui réalise les échanges gazeux, d’un réchauffeur et d’une
tuyauterie stérile (Figure 30a et b) (Borenstein et Behr, 2009). Le sang non oxygéné est détourné du
cœur droit grâce à une canule placée dans l’atrium droit et le sang oxygéné entrant dans le cœur
gauche par les veines pulmonaires est dévié par une canule placée dans le ventricule gauche. Le
sang non oxygéné rentre dans le réservoir de la machine de CEC puis se dirige vers l’oxygénateur
où le dioxyde de carbone est extrait et où le sang est enrichi en O2 (à ce niveau des gaz
anesthésiques peuvent être également ajoutés). Le sang oxygéné est ensuite maintenu à 37,0°C dans
l’échangeur thermique puis le sang retourne à l’animal par la canule fémorale (Borenstein et al.,
2004 ; Behr et al., 2007). Le débit dans la CEC est réglable et dépend de la taille de l’animal et des
étapes de la chirurgie. Le perfusionniste, également appelé pompiste, orchestre finement l’ajout de
mannitol, de bicarbonates, de chlorure de calcium, d’héparine… (Borenstein et al., 2004).
L’inconvénient de la CEC est qu’elle nécessite la collaboration d’environ 10 professionnels ainsi
que du matériel très perfectionné. Le coût est donc important, ce qui reste un vrai facteur limitant,
bien plus que la technique chirurgicale en elle-même, maitrisée par les collaborateurs chirurgiens de
l’UCA à l’IMM recherche (Borenstein et Behr, 2009). La fondation « un cœur » a entre autre été créée
pour faliciter l’accès aux techniques chirurgicales coûteuses nécessitant une CEC
(www.fondationuncoeur.com).
67
Figure 30a (Borenstein et Behr, 2009) et b (Behr et al., 2007) - Principes de la circulation extracorporelle chez le chien
Le sang non oxygéné (en bleu) est détourné du cœur droit (1) grâce à une canule placée dans l’atrium droit
et le sang oxygéné entrant dans le cœur gauche par les veines pulmonaires est dévié par une canule placée
dans le ventricule gauche (1). Le sang non oxygéné rentre dans le réservoir (2) puis se dirige vers
l’oxygénateur (3) où le dioxyde de carbone est extrait et où le sang est enrichi en O2 (à ce niveau des gaz
anesthésiques peuvent être également ajoutés). Le sang oxygéné (en rouge) est ensuite maintenu à 37,0°C
dans l’échangeur thermique (5) puis se dirige vers la pompe (6) et retourne à l’animal par la canule
fémorale (7).
68
2.9. Evolution et complications
Le pronostic de la TOF dépend du degré de la sténose pulmonaire (Ware, 2007 ; Orton, 2008 ;
Chetboul et al., 2012), de l’importance de la polycythémie (Ware, 2007) et de la réponse au traitement
médical (Nelson, 2003). Certains carnivores domestiques peuvent vivre 4 à 8 ans sous traitement
médical uniquement, à condition que l’hyperviscosité sanguine soit contrôlée (Fox et al., 1999 ;
Nelson, 2003 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Chetboul et al., 2012) car une hypoxémie et une
polycythémie progressives s’installent au fil des mois se traduisant par une intolérance à l’effort et
par une aggravation des signes cliniques. Il n’est pas rare que des morts subites aient lieu (Fox et al.,
1999 ; Ware, 2007 ; Orton, 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010).
Les animaux atteints de forme grave de TOF ayant subi une chirurgie palliative ou correctrice avec
succès pourraient vivre plusieurs années avec une excellente qualité de vie mais il existe très peu de
données disponibles à ce sujet (Ware, 2007).
Lorsque la sténose pulmonaire est serrée, le shunt droit-gauche devient permanent, entraînant
cyanose, polycythémie, voire mort subite à un âge précoce (souvent avant l’âge d’1 an (Orton,
2008)) par thrombo-embolie aortique ou tachyarythmies. Si aucune correction chirurgicale n’est
entreprise rapidement, le pronostic est sombre à court terme (Orton, 2008 ; Chetboul et al., 2012).
69
70
DEUXIÈME PARTIE : ÉTUDE RÉTROSPECTIVE DE 31 CAS DE
TÉTRALOGIE DE FALLOT CHEZ DES CARNIVORES
DOMESTIQUES DIAGNOSTIQUÉS ENTRE 2003 ET 2014
1. Objectifs de l’étude
L’objectif principal de cette étude rétrospective était d’analyser les caractéristiques
épidémiologiques, cliniques ainsi que la survie des carnivores domestiques atteints de TOF
diagnostiquée d’avril 2003 à juin 2014 par un membre qualifié de l’UCA ou du CHV des Cordeliers
(Meaux).
De façon plus précise, les objectifs ont été de déterminer :
- l’existence d’une prédisposition d’espèce, de race ou de sexe,
- l’âge au diagnostic de la maladie,
- les particularités cliniques,
- les caractéristiques radiographiques et écho-Doppler (notamment : la morphologie de la CIV,
de la sténose pulmonaire et du ventricule droit, la direction du shunt et l’importance de la
sténose),
- et enfin, la durée de vie des animaux inclus dans l’étude.
2. Matériel et méthode
2.1. Animaux
Critères d’inclusion
Tous les carnivores domestiques dont les anomalies caractéristiques de la TOF ont été visualisées
avec certitude par un membre qualifié de l’UCA ou du CHV des Cordeliers à l’examen
échocardiographique conventionnel et confirmées par méthode Doppler (mode couleur, pulsé et
continu), avec ou sans symptômes d’insuffisance cardiaque associés, ont été inclus dans l’étude.
Données recueillies
Les données concernant les carnivores domestiques de l’étude ont été recueillies grâce au logiciel
Clovis à l’ENVA (mis en place en 2001) et au logiciel Assistovet du CHV des Cordeliers (mis en
place en 2007). Chaque animal bénéficiant d’une consultation à l’ENVA ou au CHV des Cordeliers
possède un dossier auquel est attribué un numéro particulier.
A L’UCA, les renseignements suivants sont systématiquement validés par un assistant hospitalier
ou chargé de consultation, un praticien hospitalier ou un professeur :
-
le signalement de l’animal à la présentation (espèce, race, sexe, âge, poids),
l’anamnèse, les commémoratifs et le motif de consultation,
la présentation clinique de l’animal (intolérance à l’effort, toux, dyspnée, syncope,
amaigrissement, retard de croissance, cyanose ou autres),
l’intensité et la localisation du ou des souffles cardiaques objectivés à l’auscultation,
les résultats de l’examen électrocardiographique,
71
-
les paramètres d’intérêt de l’examen échocardiographique et Doppler,
la thérapeutique mise en place,
l’évolution clinique de l’animal lorsque des visites de suivi ont eu lieu pendant la période
d’étude.
Ces informations sont également disponibles dans le logiciel Assistovet du CHV des Cordeliers et
sont systématiquement validées par le Docteur Eric Bomassi, qui est en charge des consultations de
cardiologie au sein de la structure.
2.2. Examen clinique
Dans les deux centres de recrutement, un examen clinique général complet et une auscultation
cardiaque attentive ont été réalisés chez l’ensemble des carnivores domestiques de l’étude par un
membre qualifié. La gradation du souffle cardiaque a été établie de la manière suivante (Freeman et
Levine, 1933) :
- Grade 1/6 : souffle intermittent, localisé, discret et difficilement audible,
- Grade 2/6 : souffle permanent, localisé et de faible intensité,
- Grade 3/6 : souffle permanent, localisé et d’intensité moyenne,
- Grade 4/6 : souffle de forte intensité sur une aire d’auscultation large,
- Grade 5/6 : souffle de forte intensité avec perception d’un frémissement cataire,
- Grade 6/6 : souffle de très forte intensité directement audible à l’oreille, associé à un
frémissement cataire.
La présence de symptômes fonctionnels a été recherchée, en particulier l’existence d’une
intolérance à l’effort, de toux, de dyspnée, de syncope, d’un amaigrissement, d’un retard de
croissance et/ou d’une cyanose.
2.3. Examen échocardiographique et Doppler
Un examen échocardiographique et Doppler a été réalisé par un membre qualifié et entraîné chez
l’ensemble des carnivores domestiques inclus dans l’étude. L’examen a été réalisé chez les animaux
vigiles, en position debout (Chetboul et al., 2003 ; Chetboul et al., 2005(b)), sans tonte préalable des
espaces intercostaux et avec électrocardiogramme (ECG) continu concomitant. De l’alcool pour
écarter les poils, puis du gel échographique ont été utilisés pour faciliter le passage des ultrasons et
donc pour améliorer la qualité des images obtenues.
A l’UCA, les échographes utilisés furent les appareils Vivid 5, Vivid 7 et Vivid 9 de General
Electric Medical System (Waukesha, Wisconsin, USA) équipés des sondes à balayage
électronique suivantes :
- Vivid 5 : sonde 5S (2-5 MHz), sonde 7S (5-7,5 MHz), sonde 10S (7,5-10 MHz),
- Vivid 7 : sonde 3S (1,5-3,5 MHz), sonde 5S (2,2-5 MHz), sonde 7S (3,5-8 MHz), Sonde
10S (5-11,5 MHz),
- Vivid 9 : sonde 5S (1,5-4,6 MHz), sonde 6S (2,4-6,2 MHz), sonde 12S (4,5-12 MHz).
Au CHV des Cordeliers, les échographes utilisés furent un Megas et un MyLab Twice d’Esaote
Biomedica (Firenze, Italie) comprenant trois types de sonde à balayage électronique (2,5-3,5 Mhz,
5-7,5 Mhz et 7,5-10 Mhz).
72
Pour chaque animal, une échocardiographie complète a été réalisée. L’examen comprenait la
réalisation d’images fixes et de films avec les modes standards : bidimensionnel (2D) et TempsMouvement (TM). Les modes Doppler pulsé et continu ont été utilisés pour mesurer la vitesse des
flux sanguins intracardiaques et le mode Doppler couleur a permis de déterminer le sens du shunt,
la localisation de la sténose pulmonaire et d’apprécier la présence d’autres anomalies éventuelles.
De façon plus précise, voici les différentes coupes qui ont permis d’établir le diagnostic de TOF :
- La coupe 2D petit axe transventriculaire obtenue par voie parasternale droite a permis d’objectiver
l’hypertrophie de la paroi du ventricule droit. Le mode TM a été utilisé après s’être assuré que l’axe
de tir était parfaitement perpendiculaire au septum interventriculaire et qu’il se situait bien entre les
deux piliers. Ce mode a permis de mesurer plusieurs structures en télédiastole (d) et en télésystole
(s) : l’épaisseur du septum interventriculaire (SIVd et SIVs), l’épaisseur de la paroi libre du
ventricule gauche (PLVGd et PLVGs) et le diamètre cavitaire du ventricule gauche en télédiastole
et en télésystole (VGd et VGs). Le rapport PVDs/PLVGs a été calculé pour tous les animaux de
l’étude et a permis de quantifier l’hypertrophie ventriculaire droite. La fraction de raccourcissement
(FR, exprimée en %) a ainsi pu être calculée grâce à la formule suivante : FR = (VGd –
VGs)/(VGd),
- La coupe 2D transaortique obtenue par voie parasternale droite et gauche a permis d’étudier, en
mode 2D, la morphologie du tronc pulmonaire, de localiser la sténose pulmonaire et de mesurer le
diamètre du tronc pulmonaire (TP). Le rapport TP/Ao a ainsi pu être calculé. Le flux
transpulmonaire a ensuite été étudié grâce aux modes Doppler pulsé, continu et couleur. La vitesse
maximale du flux transpulmonaire en m.s-1 (Vmax) et le gradient de pression trans-sténotique en
mmHg (ΔP) ont été mesurés,
- Les coupes 2D 4 cavités, ou le plus souvent 5 cavités, obtenues par voie parasternale droite ont
permis de mettre en évidence et de mesurer la CIV qui a été confirmée au mode Doppler couleur.
Afin de pouvoir étudier l’importance de la CIV, le diamètre maximal de la CIV a été mesuré (en
mm) et le rapport CIV/Ao calculé. Le sens du shunt a pu être déterminé grâce aux modes Doppler
couleur et continu. La coupe 5 cavités a également permis de visualiser la dextroposition de l’aorte.
2.4. Suivi de la population d’étude
Le suivi a été réalisé de la façon suivante : si un animal a été vu en consultation dans le mois ayant
précédé la fin du recrutement, la date de fin de suivi correspondait à la date de la dernière
consultation. Dans les autres cas, sauf si la date de décès de l’animal était présente dans le logiciel,
les propriétaires ont systématiquement été contactés par mail ou par téléphone afin d’obtenir le
maximum de précisions concernant le mode de vie de l’animal, son évolution clinique, l’observance
des traitements éventuels, la date de mort de l’animal le cas échant et sa cause (cardiaque ou non
cardiaque).
Ainsi, la date de fin de suivi correspondait soit à la date du décès de l’animal, soit à la date à
laquelle l’animal a été perdu de vue et censuré (date de la dernière consultation ou du dernier
contact par mail ou par téléphone).
Concernant les animaux décédés au cours de la période d’étude, la cause du décès a été classée soit
en mort d’origine « cardiaque » en lien avec la TOF (mort spontanée ou par euthanasie), soit en
73
mort n’ayant pas de relation avec la cardiopathie (mort dite « non-cardiaque »). Pour chaque
animal, la durée séparant le premier examen et la mort a été calculée.
2.5. Analyses statistiques
Les résultats sont exprimés sous forme moyenne ± écart-type, médiane et valeur minimale (min) et
maximale (max) obtenus grâce au logiciel excel.
La loi binomiale a été utilisée et le calcul de “p” a été réalisé grâce au site www.stattrek.com
(programme intitulé « binomial calculator »).
Les courbes de survie ont été tracées par la méthode de Kaplan-Meier et étudiées grâce au test logrank du logiciel Systat, version 10.0, SPSS Inc (Chicago, IL).
74
3. Résultats
Au total, 31 carnivores domestiques dont 16 (51,6 %) chats et 15 (48,4 %) chiens ont été inclus
d’avril 2003 à juin 2014. Vingt-et-un sur 31 (67,7 %) carnivores domestiques dont 11/16 (68,8 %)
chats et 10/15 (66,7 %) chiens ont été diagnostiqués par un membre de l’UCA et 10/31 (32,3 %)
carnivores domestiques dont 5/16 (31,3 %) chats et 5/15 (33,3 %) chiens au CHV des Cordeliers
(Meaux).
3.1. Caractéristiques épidémiologiques
Le Tableau 4 regroupe toutes les caractéristiques épidémiologiques des 31 carnivores domestiques
inclus dans l’étude.
Tableau 4 - Caractéristiques épidémiologiques des 31 carnivores domestiques atteints de
tétralogie de Fallot (diagnostiquée d’avril 2003 à juin 2014) et inclus dans l’étude
ND : non disponible
NOM DE L’ANIMAL ESPECE SEXE
RACE
POIDS (kg)
BOUNTY
Chien
Mâle Bouledogue français
10,8
BACARA
Chat
Mâle
Siamois
ND
BRUTUS
Chien
Mâle
Chihuahua
1,8
CHANCE
Chien
Mâle
Bouledogue anglais
ND
COMETTE
Chat
Mâle
Européen
2,4
ÉMIL
Chien
Mâle
Jack Russell
7,0
FARFADET
Chien
Femelle
Chihuahua
0,5
FÉRIA
Chien
Femelle
Jack Russell
2,2
FIDJI
Chien
Femelle
Bichon maltais
3,2
FLOPY
Chien
Mâle
Bichon
1,1
FREYA
Chat
Femelle
Européen
2,0
FRIPOUILLE
Chat
Mâle
Européen
5,2
GASPARD
Chat
Mâle
Européen
4,3
GAVROCHE
Chat
Mâle
Européen
1,2
GAVROCHE
Chien
Mâle
Border terrier
2,0
GLAD
Chien
Mâle
Malamute
13,6
GRIOTTE
Chien
Femelle
Border terrier
2,6
HADES
Chat
Mâle
Ragdoll
2,75
IMOKA
Chien
Femelle
Boxer
15,2
JEAZY LYY
Chien
Femelle
Cane Corso
5,6
KANETH
Chat
Mâle
Européen
ND
O’MALEY
Chat
Mâle
Européen
ND
PETITE
Chat
Femelle
Européen
4,2
PIKA
Chat
Femelle
Européen
ND
POOPY
Chien
Femelle Bouledogue français
6,2
RODOLFINA
Chat
Femelle
Européen
4,0
SHIVA
Chien
Mâle
Jack Russell
2,7
SIMBA
Chat
Mâle
Européen
ND
TÉTRIS
Chat
Femelle
Chartreux
ND
TOTO
Chat
Mâle
Européen
3,2
UBU
Chat
Mâle
Persan
ND
75
Race
Neuf races canines différentes ont été répertoriées incluant par ordre de fréquence décroissante :
3/15 (20 %) chiens de race Jack Russell terrier, 2/15 (13,3 %) chiens de race Bichon, 2/15 (13,3 %)
chiens de race Border terrier, 2/15 (13,3 %) chiens de race Bouledogue français, 2/15 (13,3 %)
chiens de race Chihuahua, 1/15 (6,7 %) chien de race Bouledogue anglais, 1/15 (6,7 %) chien de
race Boxer, 1/15 (6,7 %) chien de race Cane Corso et 1/15 (6,7 %) chien de race Malamute.
Les chiens de petite taille (< 10 kg à l’âge adulte) représentaient ainsi 60,0 % de la population
canine de l’étude (n = 9/15).
Afin de tester l’hypothèse d’une éventuelle prédisposition à la TOF des chiens < 10 kg à l’âge
adulte, nous avons utilisé la loi binomiale que nous avons appliquée à la sous-population des chiens
de l’étude.
Nous avons choisi comme hypothèse nulle : H0 : « il existe autant de chiens < 10 kg à l’âge adulte
dans l’échantillon que dans la population générale ». Nous avons utilisé le site Stat Trek « binomial
calculator » et rempli le progamme de la façon suivante :
- probability of success on a single trial = 0.5 (probabilité que l’animal fasse < 10 kg à l’âge
adulte dans la population générale),
- number of trials = 15 (nombre de chiens atteints de TOF dans la sous-population étudiée),
- number of successes = 9 (nombre de chiens < 10 kg à l’âge adulte atteints de TOF dans la
population étudiée).
Nous avons obtenu p = 0,30 (> 0,05). La supériorité numérique des chiens < 10 kg à l’âge adulte
dans notre étude pourrait donc être due au hasard.
Cinq races félines différentes ont été répertoriées incluant par ordre de fréquence décroissante :
12/16 (75,0 %) chats de race européenne, 1/16 (6,3 %) chat de race Persan, 1/16 (6,3 %) chat de
race Ragdoll, 1/16 (6,3 %) chat de race Siamois et 1/16 (6,3 %) chat de race Chartreux.
Sexe
La population générale (n=31) incluait 19 (61,3 %) mâles et 12 (38,7 %) femelles, avec 11/16
(68,8 %) mâles et 5/16 (31,2 %) femelles pour la sous-population féline et 8/15 (53,3 %) mâles et
7/15 (46,7 %) femelles pour la sous-population canine.
Afin de tester l’hypothèse d’une éventuelle prédisposition sexuelle à la TOF, nous avons utilisé la
loi binomiale que nous avons appliquée à la population générale, puis aux deux sous-populations
(chats/chiens).
Nous avons choisi comme hypothèse nulle : H0 : « il existe autant de mâles dans l’échantillon que
dans la population générale ». Nous avons utilisé le site Stat Trek (« binomial calculator »,
probability of success on a single trial = 0.5 qui correspond à la probabilité que le carnivores
domestiques soit un mâle dans la population générale ; number of trials = nombre total de
carnivores domestiques, de chats ou de chiens ; number of successes = nombre de mâles
respectivement pour la population totale et pour chaque sous-population). Nous avons obtenu :
- p = 0,14 (> 0,05) pour la population totale,
- p = 0,11 (> 0,05) pour la sous-population féline,
- et enfin, p = 0,5 (> 0,05) pour la sous-population canine.
Nous obtenons un p > 0,05 pour les trois « groupes d’animaux ». La supériorité numérique des
mâles dans notre étude pourrait donc être due au hasard.
76
Âge au diagnostic de TOF
L’âge au diagnostic était disponible pour tous les carnivores domestiques inclus dans l’étude.
L’ensemble des résultats se trouve dans le Tableau 5. L’âge moyen au diagnostic (en mois) des
carnivores domestiques de l’étude était de 11,9 ± 9,5 mois [min = 1,7 ; max = 54,0] avec une
médiane à 7,0 mois. Les chiens (n = 15/31) ont néanmoins été diagnostiqués plus tôt que les chats
(n = 16/31), avec un âge moyen au diagnostic de 7,9 ± 6,8 mois [min = 1,7 ; max = 49,4] et une
médiane de 3,6 mois, contre un âge moyen au diagnostic de 15,7 ± 10,4 mois [min = 2,9 ;
max = 54,0] et une médiane de 9,8 mois pour les chats.
Tableau 5 - Âge au diagnostic (mois) des 31 animaux (16 chats, 15 chiens) atteints de
tétralogie de Fallot
n = nombre d’animaux
Population
de l’étude
Chats
Chiens
Âge au diagnostic (mois)
n Moyenne Écart-type Médiane Min Max
31
11,9
9,5
7,0
1,7 54,0
16
15,7
10,4
9,8
2,9
54,0
15
7,9
6,8
3,6
1,7
49,4
Poids au moment du diagnostic de TOF
Le poids au moment du diagnostic de TOF était disponible pour 23/31 (74,2 %) carnivores
domestiques dont 9/16 (56,3 %) chats et 14/15 (93,3 %) chiens. L’ensemble des résultats est
présenté dans le Tableau 6. Le poids moyen des chiens de l’étude (kg) était de 5,3 ± 3,8 [min = 0,5 ;
max =15,2] et le poids moyen des chats (kg) était de 3,3 ± 1,0 [min = 1,2 ; max = 5,2].
La TOF a été diagnostiquée avant la fin de la croissance de l’animal (12 mois) pour 23/31 (74,2 %)
carnivores domestiques de l’étude dont 10/16 (62,5 %) chats et 13/15 (86,7 %) chiens.
Notons que certains carnivores domestiques inclus dans l’étude présentaient un retard de croissance.
Cela a été décrit pour 6/31 (19,4 %) carnivores domestiques recrutés dont 3/16 (18,8 %) chats et
3/15 chiens (20,0 %).
Tableau 6 - Poids au moment du diagnostic (kg) de 23 animaux (9 chats, 14 chiens) atteints de
tétralogie de Fallot
n = nombre d’animaux
Poids (kg)
n Moyenne Écart-type Médiane Min Max
Population de 23
4,5
2,8
3,2
0,5 15,2
l’étude
Chats
9
3,3
1,0
3,2
1,2
5,2
Chiens
14
5,3
3,8
77
3,0
0,5
15,2
3.2. Examen clinique au moment du diagnostic de TOF
Symptômes fonctionnels
Au moment du diagnostic de TOF, 3/31 (9,7 %) animaux dont 1/16 (6,3 %) chats et 2/15 (13,3 %)
chiens étaient asymptomatiques, c’est-à-dire, ne présentaient aucun symptôme fonctionnel à relier
avec la cardiopathie. Les symptômes fonctionnels détectés chez les 28/31 (90,3 %) carnivores
domestiques restants sont répertoriés dans le Tableau 7.
Par ailleurs, 2/16 (12,5 %) chats et 1/15 (6,67 %) chiens ont développé une cyanose durant le suivi
qui était absente lors du diagnostic de TOF.
Tableau 7 - Symptômes fonctionnels présents lors du diagnostic de tétralogie de Fallot des 31
carnivores domestiques inclus dans l’étude
n = nombre d’animaux
78
Auscultation cardiaque
Les caractéristiques auscultatoires des animaux de l’étude au moment du diagnostic de TOF étaient
disponibles pour 27/31 (87,1 %) carnivores domestiques dont 15/16 (93,8 %) chats et 12/15 (80 %)
chiens. Ces caractéristiques sont répertoriées dans le Tableau 8.
En résumé, le souffle cardiaque le plus souvent retrouvé, aussi bien chez les chats que chez les
chiens atteints de TOF, était le souffle systolique basal gauche (sans autre souffle associé). Il
concernait 8/16 chats (50,0 %) et 7/15 chiens (46,7 %). Deux sur 31 (6,5 %) carnivores domestiques
dont 1/16 (6,3 %) chats et 1/15 (6,7 %) chiens ne présentaient pas de souffle audible à l’auscultation
au moment du diagnostic de TOF. Seuls 2/16 (12,5 %) chats présentaient deux souffles distincts
lors du diagnostic :
- le premier avait un souffle systolique médiothoracique droit et gauche de grade 5/6 ainsi
qu’une composante basale de grade 5/6,
- le second présentait un souffle systolique médiothoracique droit et gauche de grade 4/6 et un
souffle diastolique médiothoracique droit et gauche de grade 2/6.
Tableau 8 - Caractéristiques du ou des souffle(s) cardiaque(s) présent(s) au moment du
diagnostic de tétralogie de Fallot des 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude
n = nombre d’animaux - ND : non disponible - Les valeurs entre parenthèses correspondent aux
pourcentages.
Caractéristiques du souffle au moment
du diagnostic
Moment
d’apparition
du souffle
Localisation
du souffle
Hémithorax
droit ou
gauche
Intensité du
souffle
Systolique
Diastolique
Non décrit
Souffle absent
Médiothoracique
Basal
Médiothoracique avec
composante basale
Apexien
Sternal
Non décrit
Droit
Gauche
Droit et gauche
Non décrit
Grade 2
Grade 3
Grade 4
Grade 5
Grade 6
Non décrite
Population
totale de l’étude
(n = 31)
25/31 (80,6 %)
1/31 (3,2 %)
4/31 (12,9 %)
2/31 (6,5 %)
3/31 (9,7 %)
19/31 (61,3 %)
1/31 (3,2 %)
Chats
(n = 16)
Chiens
(n = 15)
14/16 (87,5 %)
1/16 (6,3 %)
1/16 (6,3 %)
1/16 (6,3 %)
2/16 (12,5 %)
9/16 (56,3 %)
1/16 (6,3 %)
11/15 (73,3 %)
0/15 (0 %)
3/15 (20,0 %)
1/15 (6,7 %)
1/15 (6,7 %)
10/15 (66,7 %)
0/15 (0 %)
1/31 (3,2 %)
1/31 (3,2 %)
4/31 (12,9 %)
1/31 (3,2 %)
17/31 (54,8 %)
7/31 (22,6 %)
4/31 (12,9 %)
2/31 (6,5 %)
4/31 (12,9 %)
15/31 (48,4 %)
4/31 (12,9 %)
1/31 (3,2 %)
4/31 (12,9 %)
1/16 (6,3 %)
1/16 (6,3 %)
1/16 (6,3 %)
1/16 (6,3 %)
10/16 (62,5 %)
3/16 (18,8 %)
1/16 (6,3 %)
1/16 (6,3 %)
1/16 (6,3 %)
9/16 (56,3 %)
3/16 (18,8 %)
1/16 (6,3 %)
1/16 (6,3 %)
0/15 (0 %)
0/15 (0 %)
3/15 (20,0 %)
0/15 (0 %)
7/15 (46,7 %)
4/15 (26,7 %)
3/15 (20,0 %)
1/15 (6,7 %)
3/15 (20,0 %)
6/15 (40,0 %)
1/15 (6,7 %)
0/15 (0 %)
3/15 (20,0 %)
79
3.3. Examens complémentaires
3.3.1. Radiographie thoracique
L’ensemble des radiographies thoraciques réalisées chez les carnivores domestiques de l’étude dont
la TOF a été diagnostiquée à l’UCA ont été relues par le Docteur Pascaline Pey, diplômée de
l’« European College of Veterinary Diagnostic Imaging » (ECVDI).
Une radiographie thoracique a été réalisée chez 5/31 (16 %) animaux de l’étude (4/5 à l’UCA) dont
2/16 (13 %) chats et 3/15 chiens (20 %). Une cardiomégalie globale était présente chez 3/5 (60 %)
d’entre eux dont 2/2 chats (100 %) et 1/3 chien (33 %). Une cardiomégalie droite était présente chez
l’ensemble des animaux de l’étude. La dextroposition de l’aorte a été mise en évidence chez 1/5
animal (1/3 chien, 33 %). Une dilatation post-sténotique a été retrouvée chez 2/5 animaux (2/3
chiens, 67 %). L’hypoperfusion de l’ensemble du champ pulmonaire était présente chez 3/5
carnivores domestiques dont 1/2 chat (50 %) et 2/3 (67 %) chiens. Enfin, une circulation bronchique
accrue a été mise en évidence chez 1/5 animal (1/2 chat, 50 %).
Voici trois interprétations de radiographies thoraciques (face, profil) d’un chat et de deux chiens de
l’étude (Figure 31a et b, Figure 32a et b) :
80
Figure 31 (a et b) - Radiographies thoraciques de face (a) et de profil (b) d’un Chihuahua de
6,2 mois atteint de tétralogie de Fallot diagnostiqué à l’Unité de Cardiologie d’Alfort
*
a
Source : Service d’Imagerie de l’ENVA
b
Source : Service d’Imagerie de l’ENVA
Les principales anomalies observées sont les suivantes : présence d’une hypertrophie du ventricule
droit (augmentation du contact cœur/sternum indiquée par la flèche rose sur la vue de profil,
silhouette cardiaque en « D inversé » délimitée en pointillés verts et apex du cœur déplacé vers la
gauche* sur la vue dorso-ventrale) et d’une hypoperfusion pulmonaire.
81
Figure 32 (a et b) - Radiographies thoraciques de face (a) et de profil (b) d’un chat européen
de 7,0 mois atteint de tétralogie de Fallot diagnostiqué à l’Unité de Cardiologie d’Alfort
D *
Source : Service d’Imagerie de l’ENVA
S
L
b
Source : Service d’Imagerie de l’ENVA
Les principales anomalies observées sont les suivantes : présence d’une cardiomégalie globale
(Vertebral Heart Score = Long Axis Line (L) + Short Axis Line (S) = 8,6 > 8), d’une hypertrophie
du ventricule droit (augmentation du contact cœur/sternum indiquée par la flèche rose sur la vue de
profil, apex du cœur déplacé vers la gauche* sur la vue dorso-ventrale) et d’une vascularisation
pulmonaire réduite mais compensée par une circulation bronchique accrue.
82
3.3.2. Examen électrocardiographique
Les caractéristiques électrocardiographiques observées lors du diagnostic étaient disponibles pour
13/31 (41,9 %) animaux de l’étude dont 6/16 (37,5 %) chats et 7/15 (46,7 %) chiens. L’ensemble
des ECG des chats inclus dans l’étude ont mis en évidence un rythme sinusal, sans anomalie
associée.
Les caractéristiques de l’ECG des 7 chiens étaient les suivantes :
- rythme sinusal avec une déviation axiale droite associée chez 3/7 chiens (43 %),
- tachycardie sinusale chez 2/7 chiens (29 %),
- rythme sinusal avec néanmoins quelques ESV droites bigéminées chez 1/7 chien (14 %),
- rythme sinusal sans anomalie associée chez 1/7 chien (14 %).
3.3.3. Examens échocardiographique et Doppler
Le rapport PVDs/PLVGs
Le rapport PVDs/PLVGs a pu être calculé pour 17/31 (54,8 %) carnivores domestiques de l’étude
dont 8/16 (50 %) chats et 9/15 (60 %) chiens. L’ensemble des résultats est présenté dans le Tableau
9. Pour être dans les valeurs usuelles, le rapport PVDs/PLVGs doit être compris entre 0,11 et 0,81
chez le chat (Chetboul et al., 2006) et proche de 0,33 chez le chien (aucune publication établissant un
intervalle de référence n’est disponible dans la littérature). Les 17 animaux inclus présentaient tous
une hypertrophie importante du ventricule droit, avec une paroi ventriculaire droite en moyenne 1,5
fois plus épaisse que celle du gauche. La Figure 33 illustre une hypertrophie majeure du ventricule
droit chez une chienne de l’étude diagnostiquée à 5,6 mois. Chez cette chienne de race Boxer, la
paroi libre du ventricule droit (PVDs) était 1,8 fois plus épaisse que la paroi libre du ventricule
gauche (PLVGs).
Tableau 9 - Valeurs du rapport de l’épaisseur de la paroi libre du ventricule droit (PVDs) sur
l’épaisseur de la paroi libre du ventricule gauche (PLVGs) chez 17 animaux (8 chats et 9
chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
n = nombre d’animaux - ND : non disponible
PVDs/PLVGs
n
1,4
0,2
1,4
0,9
1,9
Intervalles de
référence
/
1,4
1,5
0,3
0,2
1,4
1,3
0,9
1,3
1,9
1,9
0,11 - 0,81*
ND
Moyenne Écart-type Médiane Min Max
Population 17
de l’étude
Chats
8
Chiens
9
*Chetboul et al., 2006
83
Figure 33 - Coupe petit axe transventriculaire en mode Temps-Mouvement, obtenue par voie
parasternale droite chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de tétralogie de Fallot et
inclus dans l’étude
Noter l’hypertrophie importante du ventricule droit (PVDs/PLVGs = 1,76).
Source : Unité de Cardiologie d’Alfort
(PVDs) : paroi du ventricule droit en systole
(PLVGd) : paroi libre du ventricule gauche en diastole
(PLVGs) : paroi libre du ventricule gauche en systole
(SIVd) : septum interventriculaire en diastole
(SIVs) : septum interventriculaire en systole
(VDd) : diamètre interne du ventricule droit en diastole
(VGd) : diamètre interne du ventricule gauche en diastole
(VGs) : diamètre interne du ventricule gauche en systole
84
La fraction de raccourcissement (FR)
La fraction de raccourcissement a été obtenue pour 27/31 (87,1 %) animaux de l’étude dont 13/16
(81,3 %) chats et 14/15 (93,3 %) chiens. Les résultats sont présentés dans le Tableau 10. Pour être
dans les valeurs usuelles, la fraction de raccourcissement doit être comprise entre 35 et 63 % chez le
chat (Chetboul et al., 2006) et entre 30,1 et 49,0 % chez le chien (Chetboul et al., 2005(a)).
Tableau 10 - Valeurs de la fraction de raccourcissement (FR, %) chez 27 animaux (13 chats et
14 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
n = nombre d’animaux
FR (%)
n
Moyenne
Écart-type
Médiane
Min
Max
Population de
l’étude
Chats
27
44,9
8,9
45,9
16,1
66,7
Intervalles de
référence
/
13
42,5
10,3
45,0
19,0
66,7
35 - 63*
Chiens
14
47,3
8,0
48,0
16,1
65,2
30,1 - 49,0**
*Chetboul et al., 2006
**Chetboul et al., 2005(a)
Localisation de la sténose pulmonaire
La localisation de la sténose pulmonaire était disponible pour 25/31 (80,6 %) des carnivores
domestiques de l’étude dont 12/16 (75,0 %) chats et 13/15 (86,7 %) chiens. Les résultats sont
présentés dans la Figure 34. La sténose sous-valvulaire était la plus représentée dans la population
étudiée et en particulier chez les chats inclus dans l’étude. En effet, elle concernait 9/25 (36,0 %)
animaux dont 7/12 chats (58,3 %) et 2/13 chiens (15,4 %). La sténose la plus fréquente chez les
chiens inclus dans l’étude était une sténose « mixte » (associant au moins deux obstacles) avec
composantes sous-valvulaire, valvulaire et supra-valvulaire. Elle a été objectivée chez 4/13
(30,8 %) chiens mais chez aucun des chats inclus dans l’étude. La sténose « mixte » avec
composantes sous-valvulaire et valvulaire était le deuxième type de sténose le plus fréquemment
observé chez les chiens de l’étude. Il a été retrouvé chez 3/13 (23,1 %) chiens et chez seulement
1/12 chat (8,3 %).
85
Figure 34 - Localisation de la sténose pulmonaire chez 25 animaux (12 chats et 13 chiens)
atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
ND : non disponible
Hypoplasie du tronc pulmonaire
L’information concernant l’existence ou l’absence d’hypoplasie de l’artère pulmonaire était
disponible pour 27/31 (87,1 %) des carnivores domestiques de l’étude dont 13/16 (81,3 %) chats et
14/15 (93,3 %) chiens. Les résultats sont présentés dans la Figure 35. Dix sur 27 (37,0 %) animaux
de l’étude présentaient une hypoplasie du tronc pulmonaire dont 5/13 chats (38,5 %) et 5/14
(35,7 %) chiens.
86
Figure 35 - Morphologie du tronc pulmonaire chez 27 animaux (13 chats et 14 chiens) atteints
de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
O : présence d’une hypoplasie du tronc pulmonaire - N : absence d’hypoplasie du tronc pulmonaire - ND :
non disponible.
L’hypoplasie du tronc pulmonaire a pu être objectivée grâce au rapport TP/Ao qui présente un
avantage majeur par rapport au diamètre du tronc pulmonaire seul : il ne dépend pas du format de
l’animal considéré.
Le rapport TP/Ao a pu être obtenu pour 14/31 (45,2 %) des carnivores domestiques de l’étude dont
9/16 (56,3 %) chats et 5/15 (33,3 %) chiens. Les résultats sont présentés dans le Tableau 11. Pour
être dans les valeurs usuelles, le rapport TP/Ao doit être proche de 1 chez le chat (aucune
publication établissant un intervalle de référence n’est disponible dans la littérature) et entre 0,87 et
1,19 chez le chien (Serres et al., 2007).
Tableau 11 - Valeurs du rapport du diamètre du tronc pulmonaire sur le diamètre de l’aorte
(TP/Ao) chez 14 animaux (9 chats et 5 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans
l’étude
n = nombre d’animaux - ND : non disponible.
TP/Ao
Écart-type Médiane
n
Moyenne
Min
Max
0,79
0,31
1,40
Intervalles
de référence
/
Population
de l’étude
Chats
14
0,83
0,27
9
0,86
0,22
0,79
0,50
1,40
ND
Chiens
5
0,77
0,34
0,62
0,31
1,22
0,87 - 1,19*
*Serres et al., 2007
87
Le flux transpulmonaire
La vitesse maximale du flux transpulmonaire et donc le gradient de pression trans-sténotique étaient
disponibles pour 22/31 (71,0 %) animaux de l’étude dont 10/16 (62,5 %) chats et 12/15 (80,0 %)
chiens. Les résultats sont présentés dans le Tableau 12. Tous les animaux étant atteints de sténose
pulmonaire, le gradient de pression ventricule droit - tronc pulmonaire était augmenté pour tous les
animaux de l’étude. Cinq classes de sténose pulmonaire de degré de gravité croissant ont ainsi été
établies sur la base des valeurs de gradients de pression mesurées (Chenebaux, 2012) :
- Grade 1 : gradient de pression < 80 mmHg (4/10 (40,0 %) chats, 5/12 (41,7 %) chiens),
- Grade 2 : 80 mmHg ≤ gradient de pression < 120 mmHg (1/10 (10,0 %) chat, 1/12 (8,3 %) chien),
- Grade 3 : 120 ≤ gradient de pression < 160 mmHg (4/10 (40,0 %) chats, 5/12 (41,7 %) chiens),
- Grade 4 : 160 ≤ gradient de pression < 200 mmHg (1/10 (10,0 %) chat),
- Grade 5 : gradient de pression ≥ 200 mmHg (1/12 (8,3 %) chien).
La Figure 36 illustre un flux pulmonaire de vitesse très augmentée chez un chat européen mâle de 9
mois inclus dans l’étude.
Tableau 12 - Valeur maximale du flux pulmonaire (Vmax) et du gradient de pression transsténotique (ΔP) mesurée chez 22 carnivores domestiques (10 chats, 12 chiens) atteints de
tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
n = nombre d’animaux
Vmax
(m.s-1)
ΔP
(mmHg)
n
Moyenne
Écart-type
Médiane
Min
Max
Intervalles de
référence
Population
de l’étude
Chats
22
5,0
1,2
5,2
2,6
8,0
/
10
4,8
1,1
5,2
2,6
6,5
0,5 - 1,3*
Chiens
12
5,1
1,2
5,1
3,1
8,0
0,50 - 1,50**
Population
de l’étude
Chats
22
105,3
45,8
108,5
26,0
255,4
/
10
97,2
40,8
108,5
26,0
169,0
1,0 - 6,8*
Chiens
12
112,0
50,0
105,6
38,7
255,4
1,0 - 9,0**
*Chetboul et al., 2006
**Chetboul et al., 2005(a)
88
Figure 36 - Mode Doppler continu réalisé à partir d’une coupe petit axe transaortique
obtenue par voie parasternale droite chez un chat européen mâle de 9 mois atteint de
tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
La vitesse maximale du flux trans-sténotique est de 5,1 m.s-1, soit 4,6 fois plus importante que la vitesse
maximale chez un chat sain et le gradient de 104 mmHg soit 21,7 fois plus élevé que le gradient maximal
chez un chat sain (Chetboul et al., 2006).
Vmax = 5,1 m.s-1
(G = 104 mmHg)
Source : Unité de Cardiologie d’Alfort
La taille de la communication interventriculaire (CIV) et le rapport CIV/Ao
Le diamètre de la CIV était connu pour 26/31 (83,9 %) animaux de l’étude dont 14/16 (87,5 %)
chats et 12/15 (80,0 %) chiens. Les valeurs sont présentées dans le Tableau 13.
Tableau 13 - Diamètre de la communication interventriculaire (CIV) chez 26 animaux (14
chats et 12 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
n = nombre d’animaux
Population de
l’étude
Chats
Chiens
n
26
CIV (mm)
Moyenne Écart-type
6,8
2,4
Médiane
6,1
Min
1,7
Max
15,0
14
6,1
2,1
5,4
1,7
15,0
12
7,7
2,2
7,7
3,7
11,4
89
Le rapport CIV/Ao, présenté dans le Tableau 14, a pu être calculé pour 24/31 (77,4 %) des animaux
de l’étude dont 14/16 (87,5 %) chats et 10/15 (66,7 %) chiens. Ce rapport présente un intérêt
majeura: il varie moins suivant la taille de l’animal que le diamètre seul de la CIV (Bomassi et al.,
2014, article sous presse). Ainsi, il est préférable de l’utiliser pour comparer l’importance de la CIV
au sein de notre population.
Tableau 14 - Valeurs du rapport du diamètre de la communication interventriculaire (CIV)
sur le diamètre de l’aorte (Ao) chez 24 animaux (14 chats et 10 chiens) atteints de tétralogie de
Fallot et inclus dans l’étude
n = nombre d’animaux
Population de
l’étude
Chats
Chiens
CIV/Ao
n Moyenne Écart-type Médiane Min Max
24
0,61
0,18
0,59
0,18 1,15
14
0,58
0,17
0,59
0,18
1,15
10
0,64
0,19
0,60
0,35
1,02
Le sens du shunt
Le sens du shunt interventriculaire lors du diagnostic de TOF était disponible pour 28/31 (90,3 %)
animaux de l’étude dont 14/16 (87,5 %) chats et 14/15 (93,3 %) chiens. Les résultats sont présentés
dans la Figure 37. Le shunt bidirectionnel était le plus souvent retrouvé, mis en évidence chez 13/28
(46,4 %) animaux de l’étude dont 8/14 (57,1 %) chats et 5/14 (35,7 %) chiens. Le shunt gauchedroite était le deuxième le plus représenté, visualisé chez 8/28 (28,6 %) animaux de l’étude dont
4/14 (28,6 %) chats et 4/14 (28,6 %) chiens. Enfin, le shunt droite-gauche a été constaté chez 7/28
(25 %) animaux dont 2/14 (14,3 %) chats et 5/14 (35,7 %) chiens.
La Figure 38 illustre un shunt droite-gauche chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de
TOF et inclus dans l’étude.
Figure 37 - Répartition du sens du shunt interventriculaire chez 28 animaux (14 chats et 14
chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
DG : droite-gauche, GD : gauche-droite, BD : bidirectionnel - ND : non disponible.
90
Figure 38 - Coupe grand axe 5 cavités en mode Doppler couleur obtenue par voie parasternale
droite chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de tétralogie de Fallot et inclus dans
l’étude
1 : diamètre de la communication interventriculaire = 11,1 mm - AO : aorte - VD : ventricule droit - VG :
ventricule gauche.
Cette incidence confirme la présence d’une communication interventriculaire de diamètre important (11,1
mm). Le shunt est unidirectionnel et droite-gauche. Le flux interventiculaire a une vitesse maximale de 1,74
m.s-1. Le gradient de pression de part et d’autre de la communication interventriculaire n’est donc que de 12
mmHg seulement.
Source : Unité de Cardiologie d’Alfort
3.4. Traitement
Lors du diagnostic de TOF, 6/31 (19,4 %) animaux de l’étude dont 4/6 (66,7 %) chats et 2/6
(33,3 %) chiens recevaient déjà un traitement (instauré par le vétérinaire traitant). Trois chats
recevaient du bénazépril (Fortekor®, Nelio ND®) respectivement à la dose de 0,19 mg/kg/jour (en
association avec du furosémide à 0,78 mg/kg/jour), 0,31 mg/kg/jour et 0,48 mg/kg/jour par voie
orale. Deux chiens étaient traités avec de l’aténolol (à 0,2 et 1,0 mg/kg/jour par voie orale). Enfin,
un autre chat recevait du pimobendan (Vetmedin ND®) à la dose de 0,52 mg/kg/jour par voie orale.
Chez un des trois chats, le traitement instauré par le vétérinaire traitement a été poursuivi à la même
posologie suite au diagnostic échocardiographique établi par l’UCA (chat recevant une association
de bénazépril et de furozémide). Tous les autres traitements ont été modifiés ou arrêtés. Le
pimobendan (Vetmedin ND®) a été remplacé par de la spironolactone (Prilactone®) à la dose de
0,52 mg/kg/jour par voie orale. Chez un des chiens, l’aténolol a été remplacé par du clopidogrel
(Plavix®) à 2,5 mg/kg/jour par voie orale car une hyperviscosité sanguine était fortement suspectée
(forme grave de TOF avec un shunt droite-gauche à l’origine de symptômes fonctionnels
invalidants). Chez un chien précédemment sans traitement, il a été conseillé de mettre en place du
furosémide à petites doses. Pour un autre chat, le bénazépril (Fortekor®) a été prescrit à la même
91
posologie (0,31 mg/kg/jour par voie orale) et de l’acétylsalicylate de DL-lysine (Aspégic®) a été
ajoutée à 2,5 mg/kg par voie orale deux fois par semaine. Enfin, la mise en place d’un traitement à
base de spironolactone d’une part et de bénazépril à petite dose d’autre part ont été respectivement
recommandés chez 2 chiens initialement sans traitement.
Pour l’ensemble des carnivores domestiques de l’étude, une surveillance régulière de l’hématocrite
et un contrôle échocardiographique dans 6 à 12 mois ont été recommandés.
3.5. Survie
Sur les 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude, 2 ont été exclus de l’étude de survie globale
de la population car ils présentaient d’autres anomalies associées non caractéristiques de la TOF. Le
premier était un chien Bouledogue français atteint de sténose sous-aortique avec communication
interatriale associée. Le second était un chat Persan chez qui la TOF était associée à une
communication interatriale et à une sténose aortique sous-valvulaire.
La courbe de survie globale (mort toutes causes confondues) obtenue à partir des 29 carnivores
domestiques atteints de TOF isolée est présentée dans la Figure 39. Le graphique comparant les
courbes de survie des 15 chats et des 14 chiens inclus dans l’étude de survie est présenté en Figure
40.
La date de fin de suivi correspond, soit à la date du décès de l’animal, soit à la date à laquelle il a
été perdu de vue (appelée censure).
Cinq chiens sur 14 (35,7 %) étaient encore vivants à la fin du suivi. Ils étaient âgés de 1,7 à 43,5
mois. Pour 3 d’entre eux, la date de fin de suivi correspondait à la date du diagnostic (l’un d’entre
eux a été diagnostiqué la veille de la fin de l’étude).
Quatre chats sur 15 (26,7 %) étaient encore vivants à la fin du suivi et ils étaient âgés de 14,7 à 57,4
mois. Pour un seul d’entre eux, la date de fin de suivi correspondait à la date du diagnostic. Tous les
chiens décédés pendant le suivi sont morts de leur cardiopathie (euthanasie, n = 2 ou mort
spontanée, n = 7) entre 3,5 et 92,9 mois. En ce qui concerne les chats, 10/11 (90,9 %) sont morts de
leur cardiopathie (euthanasie, n = 3 ou mort spontanée, n = 7) entre 6,2 et 83,5 mois et le 11ème est
décédé d’une péritonite infectieuse féline (forme humide) à 65 mois.
La médiane de survie était ainsi de 23,4 mois pour l’ensemble des animaux de l’étude inclus dans
l’étude de survie, de 23,4 mois pour les chats et de 13,0 mois pour les chiens.
En ce qui concerne les deux animaux exclus de l’étude de survie, le chat Persan est mort subitement
à 12 mois de sa cardiopathie tandis que le Bouledogue français a été euthanasié à 75,4 mois suite à
une décompensation cardiaque (ascite majeure, faiblesse extrême).
92
Figure 39 - Courbe de survie globale des 29 carnivores domestiques atteints de tétralogie de
Fallot isolée inclus dans l’étude
Âge (mois)
Figure 40 - Comparaison des courbes de survie des 15 chats et des 14 chiens atteints de
Survival
Analysis
tétralogie de Fallot isolée inclus
dans l’étude
1,0
Chien
Chiens
Chats
Chat
Survival
0,8
0,6
0,4
Âge (mois)
0,2
93
0,0
0
20
40
60
Time
80
100
94
4. Discussion
4.1. Caractéristiques épidémiologiques, cliniques, échocardiographiques et Doppler
La race canine la plus représentée dans l’étude était le Jack Russell terrier constituant 20 % des
animaux atteints, suivie de près par les races Bichon, Border terrier, Bouledogue français et
Chihuahua (13 % chacune). Enfin, un Bouledogue anglais, un Boxer, un Cane Corso et un
Malamute ont aussi été inclus. Cette étude n’a donc pas permis de mettre en évidence une
prédisposition de certaines races canines à la TOF contrairement aux données bibliographiques qui
affirment que le Spitz Loup, le Caniche, le Schnauzer miniature, le Beagle, le Bouledogue anglais,
le Border Collie, le Berger des Shetlands et certains terriers dont le Fox terrier sont des races
prédisposées (Fox et al., 1999 ; Orton et al., 2001 ; Nelson, 2003 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al.,
2008).
Les chiens de petite taille (< 10 kg à l’âge adulte) représentaient 60 % de la population canine de
l’étude. Ce résultat indique une prévalence plus élevée chez les petites races (Ettinger et Feldman,
2010). Néanmoins, l’effectif est insuffisant (n = 9/15) pour conclure à une prédisposition des chiens
de petit format à la TOF (p > 0,05).
Les chats de race européenne étaient les plus nombreux représentant 75 % des chats inclus dans
l’étude. Quatre races félines étaient également représentées (chacune par un animal seulement) :
Persan, Ragdoll, Siamois et Chartreux. Ces résultats semblent aussi confirmer l’absence de
prédisposition de certaines races félines à la TOF (Fox et al., 1999 ; Ware, 2007 ; Schwarz et Johnson,
2008 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011).
Parmi les 31 animaux atteints de TOF et inclus dans l’étude, 61 % étaient des mâles et 39 % étaient
des femelles, avec 69 % de mâles et 31 % de femelles pour la sous-population féline et 53 % de
mâles et 47 % de femelles pour la sous-population canine. Ces résultats évoquaient l’existence
d’une prédisposition des mâles à la TOF notamment chez le chat (Ettinger et Feldman, 2010).
Néanmoins, l’effectif était insuffisant pour affirmer ce résultat (p > 0,05).
L’âge au diagnostic était de 11,9 ± 9,5 mois [1,7 ; 54,0] avec une médiane à 7,0 mois. Les chiens
ont néanmoins été diagnostiqués plus tôt que les chats, avec un âge moyen au diagnostic de 7,9 ±
6,8 mois [1,7 ; 49,4] versus 15,7 ± 10,4 mois [2,9 ; 54,0] pour les chats. Il semblerait que le
diagnostic de TOF soit plus précoce chez le chien. Nous pouvons donc émettre l’hypothèse que les
chiens présentaient plus rapidement des symptômes fonctionnels que les chats, ayant ainsi motivé
une visite chez le vétérinaire traitant. A notre connaissance, aucune donnée concernant l’âge au
diagnostic de la TOF n’était disponible jusqu’à présent dans la littérature.
Le poids des chiens inclus dans l’étude était de 5,3 ± 3,8 kg [0,5 ; 15,2] et de 3,3 ± 1,0 kg [1,2 ; 5,2]
pour les chats. Néanmoins, la TOF a été diagnostiquée avant la fin de la croissance (12 mois) pour
74 % des carnivores domestiques de l’étude dont 63 % des chats et 87 % des chiens. Par
conséquent, l’intérêt de cette donnée au moment du diagnostic est limité dans le cadre de la TOF.
Au moment du diagnostic de TOF, 10 % des animaux (dont 6 % des chats et 13 % des chiens)
étaient asymptomatiques, c’est-à-dire, ne présentaient aucun symptôme fonctionnel à relier avec la
cardiopathie.
Les symptômes fonctionnels détectés chez les chats étaient par ordre de fréquence décroissante :
l’intolérance à l’effort (94 % des cas), la dyspnée (63 %), la cyanose (38 %), le retard de croissance
(19 %), l’amaigrissement et la toux (13 %) et enfin, l’existence de syncope retrouvée chez 6 % des
animaux.
95
Quant aux symptômes fonctionnels détectés chez les chiens, ils étaient les suivants, toujours par
ordre de fréquence décroissante : l’intolérance à l’effort (87 % des cas), la cyanose (60 %), la
dyspnée (53 %), l’existence de syncope (27 %), le retard de croissance et l’amaigrissement (20 %)
et enfin, la toux retrouvée chez 7 % des animaux.
Aucun symptôme fonctionnel ne semble donc « spécifique » d’une espèce. Néanmoins, l’existence
de syncope était 4 fois plus fréquente chez le chien que chez le chat et la présence d’une cyanose
était retrouvée 2 fois plus souvent chez le chien que chez le chat. Les symptômes fonctionnels
retrouvés chez les animaux de l’étude sont tous rapportés dans la littérature. Certains symptômes
fonctionnels décrits dans la bibliographie n’ont néanmoins pas été retrouvés dans notre étude tels
que les convulsions, les tremblements et la perte de vision (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ;
Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010).
Le souffle cardiaque le plus souvent retrouvé, aussi bien chez les chats que chez les chiens inclus
dans l’étude, était le souffle systolique basal gauche lié à la présence de la sténose pulmonaire. Il
concernait 50 % des chats et 47 % des chiens. Pour 6 % des chats et 7 % des chiens, aucun souffle
n’a été détecté à l’auscultation au moment du diagnostic de TOF. Dix-neuf pour cent des chats et
7 % des chiens présentaient un souffle systolique médiothoracique, soit droit et gauche (2 chats, 1
chien), soit uniquement gauche (1 chat). Ces résultats corroborent les données de la littérature (Fox
et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Chanoit, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et
Feldman, 2010). Enfin, il n’a pas été rapporté de crépitements à l’auscultation du champ pulmonaire
pourtant décrits dans la littérature sans qu’ils ne soient à mettre en relation avec un œdème
pulmonaire (Fox et al., 1999).
A la radiographie thoracique, aucun animal de l’étude n’avait un cœur de taille réduite. Au
contraire, 3 d’entre eux présentaient même une cardiomégalie globale. Ces résultats ne sont pas
totalement en accord avec les données retrouvées dans la littérature qui rapportent un cœur de taille
normale ou réduite à la radiographie (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware,
2007 ; Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Néanmoins, l’ensemble
des animaux avait un ventricule droit élargi et un bord droit arrondi (« cœur en sabot »). La
dilatation du tronc pulmonaire tout comme la dextroposition de l’aorte n’étaient pas toujours
visibles. La vascularisation pulmonaire était parfois réduite et plus rarement compensée par une
circulation bronchique accrue. Ces derniers résultats sont en accord avec les informations
disponibles dans la littérature (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ;
Schwarz et Johnson, 2008 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010).
Seules 13 interprétations du tracé ECG étaient disponibles (6 chats, 7 chiens). Six chats et 1 chien
ne présentaient pas d’anomalie à l’ECG. L’anomalie la plus souvent retrouvée (43 % des chiens)
était la déviation axiale droite, évocatrice d’une hypertrophie du ventricule droit, ce qui est en
accord avec la littérature (Tilley, 1992 ; Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware,
2007 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010). Néanmoins, une tachycardie sinusale a également
été observée (2 chiens) ainsi quelques ESV droites bigéminées (1 chien). La littérature rapportait
également une arythmie dans de rares cas mais pas la présence d’une potentielle tachycardie
sinusale (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ;
Ettinger et Feldman, 2010).
Aucune déviation axiale gauche, qui peut exister chez les animaux atteints de TOF, en particulier
chez les chats, n’a pu être observée chez les animaux inclus dans l’étude (Tilley, 1992 ; Fox et al.,
1999 ; Ware, 2007).
Une hypertrophie ventriculaire droite a été retrouvée au mode TM chez l’ensemble des animaux de
l’étude, avec une paroi libre du ventricule droit en moyenne 1,5 fois plus épaisse que celle du
96
gauche. Cette hypertrophie du ventricule droit est consécutive à l’existence d’un gradient de
pression trans-sténotique augmenté chez l’ensemble des animaux.
L’ensemble des données bibliographiques évoquait une hypertrophie ventriculaire droite marquée
sans toutefois comparer l’épaisseur de sa paroi libre à celle du ventricule gauche ou la mettre en
relation avec le gradient trans-sténotique (Fox et al., 1999 ; Tilley et Goodwin, 2001 ; Tilley et al., 2008 ;
Ettinger et Feldman, 2010 ; Boon, 2011 ; Chetboul et al., 2012).
La fraction de raccourcissement, pour laquelle aucune donnée n’était disponible dans la littérature
concernant les animaux atteints de TOF, était très variable selon les individus. Certains avaient une
FR augmentée, d’autres diminuée ou normale. Quatre chats et 1 chien avaient une FR diminuée. La
FR moyenne de la sous-population féline de l’étude restait dans les valeurs usuelles tandis que celle
des chiens était supérieure de 7,6 points à la valeur usuelle maximale.
Contrairement aux données bibliographiques, la sténose pulmonaire n’était pas uniquement sousvalvulaire et/ou valvulaire dans notre étude (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ;
Boon, 2011). En effet, les types de sténose pulmonaire rencontrés chez les animaux étaient les
suivants :
- sténoses isolées (64 %) : sous-valvulaire (7 chats, 2 chiens), valvulaire (3 chats, 2 chiens), supravalvulaire (1 chat, 1 chien),
- sténoses « mixtes » (36 %) : sous-valvulaire et valvulaire (1 chat, 3 chiens), valvulaire et supravalvulaire (1 chien) et enfin, sous-valvulaire, valvulaire et supra-valvulaire (4 chiens).
Dans notre étude, une hypoplasie du tronc pulmonaire, objectivée par le rapport TP/Ao, a été mise
en évidence chez 37 % des animaux dont 39 % des chats et 36 % des chiens. L’existence d’une
hypoplasie potentielle du tronc pulmonaire était rapportée dans la littérature sans précision sur sa
fréquence (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ; Boon, 2011, Chetboul et al., 2012).
Le gradient transpulmonaire était augmenté chez l’ensemble des animaux de l’étude avec une
moyenne de 105,3 mmHg confirmant ainsi le diagnostic de sténose pulmonaire. Il n’existait pas de
différence significative entre les chats et les chiens inclus dans l’étude. De façon plus précise, 59 %
des animaux inclus (6 chats, 7 chiens) présentaient un gradient de pression ≥ 80 mmHg, témoignant
d’une sténose serrée à très serrée et au contraire, modérée (< 80 mmHg) pour 41 % d’entre eux.
A l’instar des données bibliographiques disponibles, la CIV était unique et de grande taille chez
l’ensemble des animaux inclus dans l’étude (Tilley et Goodwin, 2001 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008 ;
Boon, 2011). La taille moyenne de la CIV et le rapport CIV/Ao étaient respectivement de 6,8 mm et
0,61. Aucune différence significative n’a pu être mise en évidence concernant la taille de la CIV des
chats et des chiens inclus dans l’étude.
Les données bibliographiques évoquaient un shunt interventriculaire pouvant être droite-gauche,
gauche-droite ou encore bidirectionnel sans toutefois donner plus d’informations (Fox et al., 1999 ;
Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Tilley et al., 2008 ; Ettinger et Feldman, 2010 ; Boon, 2011). Dans
notre étude, le shunt interventriculaire était majoritairement bidirectionnel, mis en évidence chez
46 % des animaux de l’étude (57 % des chats et 36 % des chiens). Le shunt gauche-droite était le
deuxième le plus représenté, visualisé chez 29 % des animaux de l’étude (29 % des chats et 29 %
des chiens). Enfin, le shunt droite-gauche a été constaté chez 25 % des animaux (14 % des chats et
36 % des chiens).
Des gradients de pression de plus de 80 mmHg étaient systématiquement associés à un shunt droitegauche ou bidirectionnel à l’exception d’un cas, ce qui corrobore les données bibliographiques
(Boon, 2011). Des gradients de pression inférieurs à 100 mmHg pouvaient néanmoins être associés à
97
un shunt droite-gauche, gauche-droite ou bidirectionnel.
Aucune prise en charge thérapeutique « type » des patients atteints de TOF ne peut être définie. Il
faut l’adapter au cas par cas en fonction de nombreux paramètres tels que l’hématocrite, les
caractéristiques anatomiques et échographiques de sa TOF et les symptômes fonctionnels présents.
Malgré l’intérêt potentiel des béta-bloquants évoqué dans la littérature, aucun animal inclus de
l’étude n’en a bénéficié (Tilley et Goodwin, 2001 ; Nelson, 2003 ; Ware, 2007 ; Tilley et al., 2008). Quant
à la gestion de la polyglobulie secondaire à l’hypoxie chronique, seul un animal (Bouledogue
français) inclus dans l’étude a subi des saignées régulières car son hématocrite atteignait
périodiquement 85 %. Aucun carnivore domestique n’a reçu de l’hydroxyurée.
4.2. Étude de survie
Notre étude illustre le fait que la TOF est une cardiopathie congénitale mal tolérée sur le court à
moyen terme. Sur les 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude, après exclusion de 2 animaux
atteints de TOF associée à d’autres anomalies cardiovasculaires, seuls 36 % des chiens et 27 % des
chats étaient encore en vie à la fin du suivi, âgés respectivement de 1,7 à 43,5 mois et 14,7 à 57,4
mois. Tous les chiens décédés pendant le suivi sont morts suite à leur cardiopathie (euthanasie, n =
2 ou mort spontanée, n = 7) entre 3,5 et 92,9 mois. En ce qui concerne les chats, 91 % sont morts
suite à leur cardiopathie (euthanasie, n = 3 ou mort spontanée, n = 7) entre 6,2 et 83,5 mois. Les
taux de mortalité global et d’origine cardiaque étaient respectivement de 69 % et 66 % pour les
animaux inclus dans l’étude dont le suivi était disponible.
La médiane de survie était ainsi de 23,4 mois pour l’ensemble des animaux inclus dans l’étude de
survie, de 23,4 mois pour les chats et de 13,0 mois pour les chiens. Les chats semblaient donc
mieux tolérer cette cardiopathie, leur médiane de survie étant presque deux fois supérieure à celle
des chiens. Cela va donc dans le sens de l’observation faite précédemment concernant l’âge des
animaux au moment du diagnostic.
Nous n’avons pas pu établir de facteurs pronostiques statistiquement significatifs en raison du petit
nombre d’animaux recrutés. Toutefois, il semblerait qu’une sténose pulmonaire importante et un
shunt droite-gauche soient des facteurs pronostiques négatifs qui majorent les risques de mort subite
ou de décompensation cardiaque motivant une euthanasie. Cela corrobore les données de la
littérature (Ware, 2007 ; Orton, 2008 ; Chetboul et al., 2012). Malheureusement, les valeurs de
l’hématocrite des animaux de l’étude étaient rarement disponibles. Ainsi, nous n’avons pas pu
vérifier qu’il s’agissait d’un facteur pronostique négatif, comme évoqué par certains auteurs (Ware,
2007).
Aucun animal inclus dans l’étude n’a subi à ce jour d’intervention chirurgicale. Nous ne pouvons
donc apporter aucune information sur la survie des carnivores domestiques atteints de TOF suite à
un traitement chirurgical palliatif ou à une correction chirurgicale totale.
98
4.3. Limites de l’étude
Les biais de cette étude rétrospective sont les suivants :
- sélection des animaux de l’étude a posteriori ce qui peut nuire à la représentativité de la
population étudiée,
- sélection des individus parmi les patients de l’UCA et du CHV des Cordeliers qui sont deux
centres de référés en cardiologie, ce qui fausse également la représentativité de l’échantillon,
- absence de groupe témoin,
- absence de suivi pour 4 individus (la date de fin de suivi correspond alors à la date du diagnostic),
- subjectivité et imprécisions des réponses données par les propriétaires (notamment aux questions
sur la cause de la mort, les signes cliniques, l’observance du traitement et des suivis de
l’hématocrite),
- indisponibilité de certaines données, en particulier de certains paramètres échocardiographiques et
biochimiques (dont l’hématocrite lorsqu’il est effectué chez le vétérinaire traitant) ;
- traitements instaurés très divers : certains chiens n’ont pas été traités, d’autres l’ont été avec
différentes molécules, à des posologies adaptées au cas par cas,
- inclusion dans l’étude de deux animaux (exclus uniquement de la survie) qui présentaient d’autres
anomalies associées non caractéristiques de la TOF.
Malgré toutes les limites qui viennent d’être évoquées, inhérentes à la rareté de cette cardiopathie et
au caractère rétrospectif de ce travail, cette étude est la première à notre connaissance
spécifiquement dédiée à la TOF qui comprend autant d’animaux. Le choix de l’étude rétrospective
nous a été imposé par la rareté de cette cardiopathie congénitale. En effet, cela nous a permis de
réunir 31 carnivores domestiques atteints de TOF sur ces 11 dernières années sur deux centres de
référés de la région parisienne.
A notre connaissance toujours, l’étude spécifiquement dédiée à la TOF comprenant le plus grand
nombre de cas est celle de Brockman et al., incluant 6 chiens âgés de 5 mois à 5 ans qui ont subi
une anastomose de Blalock-Taussig modifiée faisant appel à une prothèse extensive en téflon ou à
un segment d’artère carotide. Cette étude avait pour seul objectif de suivre l’évolution postopératoire à long terme de ces 6 animaux (Brockman et al., 2007).
Quant à l’étude de Patterson et al., qui concernait un plus grand nombre d’individus (149 chiens
issus de différents mariages dont 22 chiens atteints de TOF), elle ne donnait aucune description des
caractéristiques épidémiologiques, cliniques, échocardiographique et Doppler. En effet, elle avait
pour unique objectif de préciser les aspects embryologique et génétique de la cardiopathie (Patterson
et al., 1993).
99
100
CONCLUSION
La TOF, cardiopathie cyanogène la plus fréquente chez l’Homme et chez les carnivores
domestiques, reste encore peu étudiée en médecine vétérinaire. Tandis qu’à l’heure actuelle, cette
cardiopathie fait l’objet d’une correction chirurgicale systématique, précoce et bien maîtrisée en
médecine humaine, le recours à la correction chirurgicale demeure rarissime et risqué en médecine
vétérinaire.
Malgré les limites principalement liées à son caractère rétrospectif, ce travail est, à notre
connaissance, le premier à étudier spécifiquement les caractéristiques épidémiologiques, cliniques,
échographiques et Doppler de cette cardiopathie congénitale chez un nombre aussi important de
carnivores domestiques. En effet, cette étude portant sur 31 cas de TOF diagnostiqués et suivis entre
avril 2003 et juin 2014 dans deux centres de référés en cardiologie a permis, d’une part, de
confirmer et de préciser des données bibliographiques déduites de cas ponctuels, et d’autre part,
d’apporter des informations nouvelles sur cette cardiopathie.
A l’instar des précédentes publications, le pourcentage de mâles atteints de TOF dans la présente
étude était supérieur à celui des femelles, à la fois dans la population globale (61 % versus 39 %,
respectivement) mais aussi chez le chat. En revanche, cette tendance n’a pas été identifiée ici chez
le chien. De plus, les chiens de petit format étaient les plus nombreux, représentant 60 % de la
population canine. Les symptômes fonctionnels retrouvés étaient concordants avec ceux
classiquement décrits dans la littérature. Néanmoins, de manière intéressante et sans explication
rationnelle, ces derniers étaient plus précoces et plus invalidants chez le chien que chez le chat. Un
souffle systolique basal gauche lié à la présence de la sténose pulmonaire était retrouvé dans la
moitié des cas, aussi bien dans l’espèce féline que dans l’espèce canine, soulignant ainsi l’intérêt de
l’auscultation cardiaque dans la démarche diagnostique de cette cardiopathie congénitale.
Concernant les résultats de l’examen écho-Doppler, chez plus de la moitié des animaux atteints de
TOF (59 % des cas), la sténose pulmonaire était importante, caractérisée par un gradient de pression
trans-sténotique ≥ 80 mmHg et une inversion partielle ou totale du shunt à travers la CIV toujours
unique et large, a été systématiquement observée (à l’exception d’un cas). Ces sténoses
pulmonaires, pour la plupart serrées, avaient ainsi pour conséquence une hypertrophie de la paroi
ventriculaire droite, modérée à très importante (épaisseur en moyenne 1,5 fois supérieure à celle de
la paroi libre du ventricule gauche), présente chez tous les animaux de l’étude. Néanmoins, à
l’ECG, une déviation axiale droite, pourtant caractéristique d’une hypertrophie ventriculaire droite,
était identifiée chez seulement 43 % d’entre eux. La localisation de l’obstacle sténotique était plus
variée que celle décrite dans la littérature avec 64 % des sténoses isolées (sous-valvulaire
prédominante, mais aussi valvulaire et supra-valvulaire) et 36 % de sténoses combinant au
minimum 2 obstacles.
L’inversion de shunt, principalement à l’origine des symptômes fonctionnels et des complications
observés, a été détectée chez près des trois quarts des animaux inclus, expliquant une survie limitée
à court et moyen terme, illustrée pour la première fois par cette étude. En effet, la médiane de survie
n’était que de 23,4 mois seulement dans la population générale et elle était presque divisée par deux
chez le chien (13 mois), à mettre en relation avec l’apparition plus précoce de symptômes
fonctionnels par comparaison à la sous-population féline.
Les progrès qui restent à réaliser concernant la TOF chez les carnivores domestiques sont
essentiellement relatifs à sa correction chirurgicale. Il conviendrait ainsi de déterminer la technique
optimale de correction (palliative ou curative) et de préciser quelles en seraient les indications selon
l’espèce considérée.
101
102
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LISTE DES FIGURES
Figure 1 - Représentation schématique d’un cœur sain (Bajolle, 2012)
Figure 2 - Représentation schématique d’un cœur lors de tétralogie de Fallot (Bonow et al., 2012)
Figure 3 - Photographie d’une coupe transversale d’un cœur d’enfant atteint de tétralogie de Fallot
(Moller et Hoffman, 2012)
Figure 4 - Schéma présentant l’anatomie de la vascularisation cardiaque chez un individu sain
(Dyce et al., 2002)
Figure 5 - Aortogramme (projection grand axe oblique/crâniale) présentant l’anomalie de
distribution des artères coronaires la plus fréquente chez les patients atteints de tétralogie de Fallot
(Moller et Hoffman, 2012)
Figure 6 - Schéma présentant le cloisonnement des ventricules au 46ème jour du développement
embryonnaire (Larsen, 2001)
Figure 7 - Localisation du second champ cardiaque au cours du développement embryonnaire (Di
Felice et Zummo, 2009)
Figure 8 - Classification des cardiopathies congénitales (Clark, 1986)
Figure 9 - Représentation schématique des caractéristiques des différentes anomalies conotroncales
(Bajolle, 2012)
Figure 10 - Hippocratisme digital chez une fillette atteinte de tétralogie de Fallot (Laplane et al.,
1977)
Figure 11 - Radiographie de thorax (vue de face) chez un patient atteint de tétralogie de Fallot
(Shelton, 2007)
Figure 12 - Caractéristiques échocardiographiques de la tétralogie de Fallot présentées en miroir
avec les anomalies anatomo-pathologiques (Bonow et al., 2012)
Figure 13 - Représentation schématique de l’anastomose de Blalock-Taussig modifiée (Kaguelidou,
2006)
Figure 14 - Etapes (a, b, c) de la levée de la sténose pulmonaire lors de la correction chirurgicale
totale de la tétralogie de Fallot sans incision de l’anneau valvulaire pulmonaire (Jonas, 2009)
Figure 15 - Représentation schématique de la correction chirurgicale totale de la tétralogie de Fallot
avec élargissement de l’anneau valvulaire pulmonaire (Bonow et al., 2012)
Figure 16 - Coupe « grand axe » par voie parasternale chez un patient qui a subi une correction
chirurgicale totale (Otto et al., 2011)
Figure 17 - IRM thoracique d’un nouveau-né de 6 mois atteint de tétralogie de Fallot compliquée
d’une atrésie pulmonaire et venant de subir une anastomose de Blalock-Taussig modifiée (Soler et
al., 2007)
Figure 18 - IRM thoracique d’un homme de 20 ans ayant subi une correction chirurgicale totale de
sa tétralogie de Fallot et présentant une dyspnée à l’effort (Soler et al., 2007)
Figure 19 - Coupes longitudinales transventriculaires du cœur gauche (A) et du cœur droit (B) d’un
chien atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010)
Figure 20 - Orthopnée chez un chaton de 4 mois atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007)
Figure 21 - Cyanose débutante au repos chez un chien atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007)
Figure 22 - Radiographie thoracique de profil (A) et de face (incidence dorso-ventrale) (B) d’un
chien atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger et Feldman, 2010)
Figure 23 - Echocardiographie-Doppler d’un chiot Spitz loup atteint de tétralogie de Fallot (Ettinger
et Feldman, 2010)
Figure 24 - Electrocardiogramme d’un chien atteint de tétralogie de Fallot présentant une
hypertrophie importante du ventricule droit (Tilley, 1992)
Figure 25 - Angiographie du chien de la Figure 22 atteint de tétralogie de Fallot (Ware, 2007)
109
Figure 26 - Photographies des trois étapes clés de l’anastomose entre artère sous-clavière et artère
pulmonaire homolatérale utilisant la veine jugulaire comme greffon chez un chien sain (Pelosi et al.,
2006)
Figure 27 - Coupe écho-Doppler « petit axe » transaortique obtenue par voie parasternale droite
chez un chien ayant subi 30 jours auparavant une anastomose entre artère sous-clavière et artère
pulmonaire homolatérale utilisant une portion de veine jugulaire comme greffon (Pelosi et al., 2006)
Figure 28 - Angiographie artérielle du chien de la Figure 28, 30 jours après l’anastomose entre
artère sous-clavière et artère pulmonaire homolatérale utilisant la veine jugulaire comme greffon
(Pelosi et al., 2006)
Figure 29 - Coupes histologiques comparatives d’une veine jugulaire normale de chien (à gauche)
et d’une veine jugulaire utilisée comme greffon pour l’anastomose entre artère sous-clavière et
artère pulmonaire chez un chien sain 30 jours après sa mise en place (à droite) (Pelosi et al., 2006)
Figure 30a (Borenstein et Behr, 2009) et b (Behr et al., 2007) - Principes de la circulation extracorporelle chez le chien
Figure 31 (a et b) - Radiographies thoraciques de face (a) et de profil (b) d’un Chihuahua de 6,2
mois atteint de tétralogie de Fallot diagnostiqué à l’Unité de Cardiologie d’Alfort
Figure 32 (a et b) - Radiographies thoraciques de face (a) et de profil (b) d’un chat européen de 7,0
mois atteint de tétralogie de Fallot diagnostiqué à l’Unité de Cardiologie d’Alfort
Figure 33 - Coupe petit axe transventriculaire en mode Temps-Mouvement, obtenue par voie
parasternale droite chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de tétralogie de Fallot et inclus
dans l’étude
Figure 34 - Localisation de la sténose pulmonaire chez 25 animaux (12 chats et 13 chiens) atteints
de tétralogie de Fallot inclus dans l’étude
Figure 35 - Morphologie du tronc pulmonaire chez 27 animaux (13 chats et 14 chiens) atteints de
tétralogie de Fallot inclus dans l’étude
Figure 36 - Mode Doppler continu réalisé à partir d’une coupe petit axe transaortique obtenue par
voie parasternale droite chez un chat européen mâle de 9 mois atteint de tétralogie de Fallot et
inclus dans l’étude
Figure 37 - Répartition du sens du shunt interventriculaire chez 28 animaux (14 chats et 14 chiens)
atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
Figure 38 - Coupe grand axe 5 cavités en mode Doppler couleur obtenue par voie parasternale
droite chez un chien Boxer femelle de 5,6 mois atteint de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
Figure 39 - Courbe de survie globale des 29 carnivores domestiques atteints de tétralogie de Fallot
isolée inclus dans l’étude
Figure 40 - Comparaison des courbes de survie des 15 chats et des 14 chiens atteints de tétralogie
de Fallot isolée inclus dans l’étude
110
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 - Avantages et inconvénients des deux techniques de Blalock-Taussig
Tableau 2 - Avantages et inconvénients des deux abords possibles pour la correction chirurgicale
totale de la tétralogie de Fallot
Tableau 3 - Evolution de l’hématocrite et de la pression artérielle en O2 de l’ensemble des chiens
de l’étude de Brockman et al. suite à la technique de Blalock-Taussig modifiée (Brockman et al.,
2007)
Tableau 4 - Caractéristiques épidémiologiques des 31 carnivores domestiques atteints de tétralogie
de Fallot (diagnostiquée d’avril 2003 à juin 2014) et inclus dans l’étude
Tableau 5 - Âge au diagnostic (mois) des 31 animaux (16 chats, 15 chiens) atteints de tétralogie de
Fallot
Tableau 6 - Poids au moment du diagnostic (kg) de 23 animaux (9 chats, 14 chiens) atteints de
tétralogie de Fallot
Tableau 7 - Symptômes fonctionnels présents lors du diagnostic de tétralogie de Fallot des 31
carnivores domestiques inclus dans l’étude
Tableau 8 - Caractéristiques du ou des souffle(s) cardiaque(s) présent(s) au moment du diagnostic
de tétralogie de Fallot des 31 carnivores domestiques inclus dans l’étude
Tableau 9 - Valeurs du rapport de l’épaisseur de la paroi libre du ventricule droit (PVDs) sur
l’épaisseur de la paroi libre du ventricule gauche (PLVGs) chez 17 animaux (8 chats et 9 chiens)
atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
Tableau 10 - Valeurs de la fraction de raccourcissement (FR, %) chez 27 animaux (13 chats et 14
chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
Tableau 11 - Valeurs du rapport du diamètre du tronc pulmonaire sur le diamètre de l’aorte
(TP/Ao) chez 14 animaux (9 chats et 5 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
Tableau 12 - Valeur maximale du flux pulmonaire (Vmax) et du gradient de pression transsténotique (ΔP) mesurée chez 22 carnivores domestiques (10 chats, 12 chiens) atteints de tétralogie
de Fallot et inclus dans l’étude
Tableau 13 - Diamètre de la communication interventriculaire (CIV) chez 26 animaux (14 chats et
12 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et inclus dans l’étude
Tableau 14 - Valeurs du rapport du diamètre de la communication interventriculaire (CIV) sur le
diamètre de l’aorte (Ao) chez 24 animaux (14 chats et 10 chiens) atteints de tétralogie de Fallot et
inclus dans l’étude
111
ÉTUDE RÉTROSPECTIVE ÉPIDÉMIOLOGIQUE, CLINIQUE,
ÉCHOCARDIOGRAPHIQUE ET DOPPLER DE 31 CAS DE TÉTRALOGIE DE
FALLOT CHEZ DES CARNIVORES DOMESTIQUES DIAGNOSTIQUÉS
ENTRE 2003 ET 2014
Auteur : PITSCH Isabelle
Résumé :
La tétralogie de Fallot est une cardiopathie congénitale complexe et cyanogène, peu fréquente chez l’Homme et chez les
carnivores domestiques. Cette affection est grave et invalidante, nécessitant chez l’homme une correction chirurgicale
totale et précoce. Peu de données sont disponibles dans la littérature vétérinaire concernant cette cardiopathie, la
majorité d’entre elles provenant de descriptions de cas ponctuels. L’objectif de la première partie bibliographique de ce
travail était ainsi d’analyser de façon comparative l’étiologie, l’épidémiologie, la physiopathologie et les
caractéristiques cliniques de la tétralogie de Fallot en cardiologie vétérinaire et humaine. Le but de l’étude rétrospective,
présentée dans la deuxième partie du document, était d’analyser les données épidémiologiques, cliniques,
échocardiographiques et Doppler ainsi que la survie de chats et de chiens ayant fait l’objet d’un diagnostic de tétralogie
de Fallot dans deux centres de référés en cardiologie vétérinaire.
Un total de 31 cas (16 chats et 15 chiens) atteints de tétralogie de Fallot, diagnostiqués à l’Unité de Cardiologie d’Alfort
et au Centre Hospitalier Vétérinaire des Cordeliers entre avril 2003 et juin 2014 a été analysé de façon rétrospective.
L’âge au diagnostic était de 11,9 ± 9,5 mois. Le pourcentage de mâles atteints était supérieur à celui des femelles, à la
fois dans la population globale (61,3 % versus 38,7 %, respectivement) mais également chez le chat (61,3 % versus
38,7e%). En revanche, cette particularité n’a pas été retrouvée chez le chien, avec 53,3 % de mâles et 46,7 % de
femelles atteints. Les chiens de petit format étaient les plus nombreux, représentant 60 % de la population canine. Les
principaux symptômes fonctionnels observés étaient l’intolérance à l’effort (90,3 %), la dyspnée (58,0 %) et la cyanose
(48,4 %). A l’auscultation cardiaque, un souffle systolique basal gauche a été détecté dans la moitié des cas, aussi bien
dans l’espèce féline que dans l’espèce canine. A l’examen électrocardiographique, une déviation axiale droite a été
identifiée dans 43 % des cas. Concernant les résultats de l’examen écho-Doppler, une hypertrophie de la paroi
ventriculaire droite modérée à très importante (épaisseur en moyenne 1,5 fois supérieure à celle de la paroi libre du
ventricule gauche) était présente chez tous les animaux de l’étude. La localisation de l’obstacle sténotique était plus
variée que celle décrite dans la littérature avec 64 % des sténoses isolées (sous-valvulaire, valvulaire, ou supravalvulaire) et 36 % de sténoses combinant au minimum 2 obstacles. La communication interventriculaire était toujours
unique et large, avec un rapport moyen entre son diamètre et celui de l’aorte égal à 0,61. Lorsque la sténose pulmonaire
était associée à un gradient de pression trans-sténotique supérieur à 80 mmHg, une inversion partielle ou totale du shunt
à travers la communication interventriculaire était observée chez tous les animaux à l’exception d’un cas.
L’inversion de shunt était présente chez 71,4 % des animaux au moment du diagnostic, expliquant une survie limitée à
court et moyen terme. En effet, la médiane de survie n’était que de 23,4 mois seulement dans la population générale et
elle était presque divisée par deux chez le chien (13 mois), à mettre en relation avec l’apparition plus précoce de
symptômes fonctionnels par comparaison à la sous-population féline.
En conclusion, cette étude est la première à décrire de manière exhaustive et précise les caractéristiques
épidémiologiques, cliniques, écho-Doppler ainsi que la survie d’une population de carnivores domestiques atteints de
tétralogie de Fallot. Les résultats montrent en particulier que les décès surviennent majoritairement chez le jeune adulte
(malgré quelques exceptions), soulignant ainsi l’intérêt de développer des techniques chirurgicales palliatives ou
curatives, à l’instar de ce qui est réalisé chez le nouveau-né.
Mots clés : TÉTRALOGIE DE FALLOT / CARDIOPATHIE / CARDIOPATHIE CONGÉNITALE / STÉNOSE
PULMONAIRE / COMMUNICATION INTERVENTRICULAIRE / DEXTROPOSITION DE L’AORTE /
HYPERTROPHIE / VENTRICULE DROIT / ÉCHOCARDIOGRAPHIE / DOPPLER / CARNIVORE / CHIEN /
CHAT / CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT / UNITÉ DE CARDIOLOGIE
D’ALFORT / CENTRE HOSPITALIER VÉTÉRINAIRE DES CORDELIERS
Jury : Président : Pr.
Directeur : Pr. Valérie CHETBOUL
Assesseur : Pr. Renaud TISSIER
Invité : Dr. Eric BOMASSI
A RETROSPECTIVE STUDY OF 31 CASES OF TETRALOGY OF FALLOT
FROM 2003 TO 2014 : EPIDEMIOLOGIC, CLINICAL AND ECHO-DOPPLER
FINDINGS
Author: PITSCH Isabelle
Summary:
Tetralogy of Fallot is a complex cyanotic congenital heart defect, which is uncommon in human and small animals.
This severe and disabling heart disease requires early surgical correction. Little information is available about this
disease in the veterinary literature, and most data are derived from description of isolated cases.
The first part of this report is a bibliographic review presenting the comparative etiological, pathophysiological,
epidemiological, and clinical features of Tetralogy of Fallot in humans and small animals.
The second part of this report is composed of a retrospective study dedicated to cats and dogs diagnosed with Tetralogy
of Fallot in two French referral centers of veterinary cardiology, with the aim to assess their epidemiological, clinical,
echocardiographic and Doppler, and survival characteristics.
A total of 31 recruited animals (16 cats, 15 dogs), diagnosed at the Cardiology Unit of Alfort and the Veterinary
Hospital « les Cordeliers » between April 2003 and June 2014, were retrospectively analyzed.
Age at diagnosis was 11.9 ± 9.5 months. The percentage of males was higher than that of females both for general
population (61.3 % versus 38.7 % respectively) and for cats (61.3 % versus 38.7 %). By contrast, this was not the case
for dogs, with 53,3 % of males and 46,7 % of females suffering from tetralogy of Fallot. Small dogs were much more
prominent with 60 % of the canine population. The main clinical signs were exercise intolerance (90,3 %), dyspnea
(58,0 %) and cyanosis (48,4 %). A left basal systolic heart murmur was detected at cardiac auscultation in half of the
cases in both feline and canine species. A right axis deviation was observed on ECG tracings in 43 % of cases.
Regarding echocardiographic and Doppler findings, a moderate to significant right ventricular hypertrophy was found
(the right end-systolic wall thickness was on average 1,5 fold higher than that of the end-systolic left ventricular free
wall) in all tested animals. Pulmonic stenosis localization was more varied than previously described including 64 % of
isolated stenosis (subvalvular, valvular or supravalvular) and 36 % of « mixted » stenosis combining at least two
obstructive lesions. A single and large ventricular septal defect was always found with a mean defect diameter on aorta
ratio of 0,61. A complete or partial reverse of the interventricular shunt was observed in all but one animals when the
systolic pulmonic pressure gradient was higher than 80 mmHg. A reverse intraventricular shunt was already present in
71,4 % of cases at the time of diagnosis, thus explaining medium and long-term limited survival rate. Indeed, the
median survival times was only 23,4 months for the general population and was nearly halved in dogs (13 months),
which can be related to an earlier onset of clinical signs by comparison with the feline sub-population.
In conclusion, this study is the first to exhaustively and accurately describe the epidemiological, clinical, echo-Doppler
and survival characteristics of a canine and feline population with tetralogy of Fallot. The present results show that
death occurs predominantly in young adult animals (with a few exceptions), underlying the interest to develop palliative
or curative surgical techniques, as is already the case for newborn children.
Keywords: TETRALOGY OF FALLOT / CARDIOPATHY / CONGENITAL HEART DEFECT /
PULMONARY STENOSIS / VENTRICULAR SEPTAL DEFECT / DEXTROPOSITIONING OF THE
AORTA / HYPERTROPHY / RIGHT VENTRICLE / ECHOCARDIOGRAPHY / TISSUE DOPPLER /
CARNIVORE / DOG / CAT / VETERINARY UNIVERSITY CENTER OF ALFORT / CARDIOLOGY
UNIT OF ALFORT / VETERINARY CENTER OF « LES CORDELIERS »
Jury: Président : Pr.
Directeur : Pr. Valérie CHETBOUL
Assesseur : Pr. Renaud TISSIER
Invité : Dr. Eric BOMASSI
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