contre 2,5 par patient-année avec les traitements (Mocroft
A, Euro Sida Study, Lancet 2000;356).
Dans l’étude Mortalité 2000, réalisée par l’équipe française
de Charlotte Lewden, qui a concerné la plupart des centres
français et près de 960 patients décédés, 47 % des per-
sonnes sont décédées du Sida, dont 19 % sans avoir reçu
aucun traitement antirétroviral (Charlotte Lewden and the
Mortality 2000 Study Group. International Journal of
Epidemiology 2005-34). Ce phénomène n’est pas stricte-
ment français : une étude réalisée à Londres a aboutit aux
mêmes chiffres. Les deux études signalent bien évidem-
ment l’aspect négatif du retard de recours aux soins mais
également, souvent, l’impact des difficultés économiques et
sociales pour le patient.
Il arrive aussi que le patient, après s’être remis de son infec-
tion opportuniste et après instauration d’une trithérapie,
développe un syndrome de reconstitution immune presque
aussi dramatique que la maladie opportuniste initiale (voir
à ce sujet la présentation d’Olivier Lortholary, page 23).
Risques pour la société
Lorsque la maladie est contrôlée, on peut espérer que sa trans-
mission soit davantage contrôlée, même si ce n’est bien sûr
pas une garantie. Une prise en charge précoce apporte donc
un bénéfice tant pour la société que pour l’individu. On
peut en tirer les conséquences inverses lorsque l’infection
n’est pas prise en charge.
Une maladie toujours pas ordinaire
Le VIH n’est toujours pas une maladie ordinaire : il demeure,
encore aujourd’hui, du déni, de l’ignorance, des personnes
qui ne se considèrent pas concernées. Certaines populations
craignent particulièrement la stigmatisation liée à cette mala-
die ; tout cela contribue au retard au dépistage et à la prise en
charge. Or une prise en charge tardive est une perte de chance
pour le patient. Il est de notre rôle de tout faire pour l’éviter. ❑
Enquête VESPA
Un des objectifs de l’enquête VESPA était d’estimer la propor-
tion de dépistages VIH tardifs, d’identifier les caractéristiques
socio-démographiques des patients dépistés tardivement et de
décrire les circonstances de ce dépistage. Il s’agit d’une enquête
transversale incluant des patients qui connaissaient leur séro-
positivité depuis au moins 6 mois, âgés de 18 ans ou plus, de
nationalité française ou résidant en France depuis au moins six
mois lorsqu’ils étaient étrangers. Le recrutement s’est fait de
façon aléatoire, dans les consultations externes de 102
services hospitaliers tirés au sort. Entre décembre 2002 et
octobre 2003, 4963 sujets étaient éligibles. On a défini le
dépistage tardif pour des personnes arrivant avec des symp-
tômes classant Sida ou avec un taux de CD4<200/mm3au
moment du diagnostic de la séropositivité ou dans l’année.
Résultats
Les caractéristiques de l’enquête : sur 2932 qui ont répondu,
1077 ont été diagnostiqués depuis 1996. 68 % étaient des
hommes dont 50 % d’homosexuels ; 66 % sont de nationalité
française. Parmi les étrangers, 73 % viennent d’Afrique sub-
saharienne.
L’ enquête a montré qu’un tiers des patients étaient classés en
dépistage tardif, et sur ce tiers, près de la moitié des personnes
(42 %) ont découvert leur infection au stade Sida.
Risques liés à un diagnostic tardif
Les résultats montrent que le risque d’être dépisté tardive-
ment augmente avec l’âge au moment du diagnostic : le risque
relatif des 50-59 ans est de 2,89 fois celui des moins de 30
ans et celui des plus de 60 ans est de 4,2. Les hommes hété-
rosexuels ont 1,68 fois plus de risque que les homosexuels. Les
toxicomanes passés ou actuels présentent aussi de 2 à 3 fois
plus plus de risque. Les personnes nées à l’étranger ont, quant
à elles, 1,58 fois plus de risque que celles nées en France.
Circonstances d’un diagnostic tardif
Parmi les diagnostics tardifs (par opposition au dépistage en
phase chronique), les tests ont été plus fréquemment réali-
sés parce qu’il y avait apparition de symptômes (64 %
contre 33 %) ou à la demande d’un médecin (53 % contre
36 %) . A l’inverse, le dépistage se fait moins souvent chez
les personnes diagnostiquées tardivement :
• à l’occasion d’un test volontaire (27,5 % versus 53,3 %).
• après le diagnostic d’un partenaire (7,1 % versus 13,6 %).
• après exposition accidentelle (5,3 % versus 11,95 %).
Caractéristiques d’un diagnostic tardif en population hété-
rosexuelle
• 3,57 fois plus d’hommes que de femmes.
• 3,55 fois plus de personnes avec partenaire sexuel stable.
• Plus de risque avec l’âge.
Épidémiologie de la prise en charge tardive
Murielle Mary-Krause, Inserm U270 (Paris)
Environ un tiers des personnes séropositives sont dépistées tardivement. Mais quel est
le profil de ces personnes ? Y a-t-il des facteurs qui favorisent la prise en charge tardive,
ou au contraire, qui en préservent ? Deux études récentes tentent de répondre à ces ques-
tions : l’enquête VESPA, et l’analyse de la base hospitalière française.
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