Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 1 Notions de géomorphologie 1. Introduction Les reliefs continentaux peuvent être classés en trois grandes catégories: plaine, plateau et montagne. Mathieu et al., 1997, Géographie Seconde, Les hommes et la Terre, Bordas, p.79. Des reliefs volcaniques peuvent se superposer à ces formes de relief. Des petits reliefs dominent parfois plaines et plateaux de quelques dizaines de mètres. Ce sont des collines lorsque leur sommet est arrondi et leurs versants en pente douce. Le relief est "vivant", en constante modification. Il évolue très lentement le plus souvent, mais parfois brutalement. Ce que l'homme a sous les yeux, quand il observe le relief, c'est en réalité le résultat de l'action combinée de deux types de facteurs: • des facteurs internes qui ont créé ce relief et dont l'action constitue la tectonique d'une région (plissements, volcanisme, failles, …); • des facteurs externes qui attaquent le relief et le façonnent: il s'agit de l'eau, la glace, le vent, les variations de température,…, responsables de l'érosion. Forces internes TECTONIQUE Forces externes EROSION Formation des reliefs Attaque et destruction des reliefs continentaux Duel permanent à l’échelle des temps géologiques Les reliefs actuels sont le résultat à un moment donné de ce conflit. La géomorphologie est une science qui a pour objet la description et l'explication des formes du relief terrestre. Elle étudie donc à la fois les facteurs internes et les facteurs externes qui modèlent le relief. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 2 Ces facteurs agissent en général très lentement. Peu de modifications majeures du relief sont visibles à l'échelle de temps humaine. Les évolutions se font à l'échelle des temps géologiques (ou échelle stratigraphique), divisée en grandes ères en fonction de la formation de chaînes de montagnes et des changements importants dans l'évolution des êtres vivants. QUATERNAIRE TERTIAIRE SECONDAIRE PRIMAIRE 2. Les roches Le relief va entre autres dépendre du type de roches présent à la surface de l'écorce terrestre. Géologie: Science d'observation et d'étude des matériaux qui constituent le globe. Roche: Tout matériau constitutif de l'écorce terrestre. Exemples: - Roches liquides ou gazeuses: pétrole, gaz naturel… - Roches solides meubles: sable, argile,… - Roches solides cohérentes: calcaires, grès, charbon,… Les roches solides sont constituées d'un mélange de minéraux. La classification principale des roches se fait d'après leur origine. On distingue trois grands types de roches: • Les roches MAGMATIQUES (endogènes) Roches issues du refroidissement du magma. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 3 • Les roches SEDIMENTAIRES (exogènes) Roches formées à la surface de l'écorce terrestre, résultant de l'action des agents d'érosion et de transport puis d'un dépôt. • Les roches METAMORPHIQUES Roches formées, sans fusion, à partir d'autres roches (magmatiques ou sédimentaires) par recristallisation due à des élévations de la température et de la pression (métamorphisme = transformation). 2.1. Les roches magmatiques Le magma (matière minérale à l'état de fusion) est engendré par la fusion locale de roches profondes. Cette masse fluide tend à s'élever dans les fractures de la croûte terrestre. Les roches issues du refroidissement du magma sont de deux types: extrusives ou intrusives. 2.1.1. Les roches magmatiques extrusives (ou effusives ou volcaniques) Le magma fait irruption en surface, à "l'air libre" (on parle alors de lave). Il se refroidit rapidement et devient une roche extrusive. Les gaz contenus dans le magma n'ont pas le temps de s'échapper, ce qui explique la porosité de ce type de roches (nombreux petits trous liés aux bulles de gaz, comme dans la pierre ponce). La cristallisation est faible ou inexistante. Ce sont souvent des roches sombres, comme le basalte. 2.1.2. Les roches magmatiques intrusives (ou plutoniques) Le magma, après s'être élevé dans la croûte terrestre, s'accumule dans une chambre située à une certaine profondeur. En se refroidissant lentement, il devient une roche intrusive. Ce lent refroidissement permet l'évacuation des gaz (les roches sont donc non poreuses) et l'apparition de cristaux bien formés (cristallisation plus ou moins importante en fonction du temps de refroidissement). Il s'agit par exemple du granite, qui a un aspect "moucheté" à cause des nombreux minéraux qui le composent. 2.2. Les roches sédimentaires Les sédiments sont des dépôts, la plupart du temps au fond des eaux. Les roches sédimentaires formées à partir de ces sédiments peuvent être soit meubles (formées d'éléments séparés – ex: sable), soit cohérentes (formées d'éléments soudés entre eux – ex: grès). Elles sont de différents types, en fonction de l'origine des sédiments qui les composent. 2.2.1. Classement des roches sédimentaires 2.2.1.1. Les roches détritiques Exemples de roches détritiques: sable, grès, argile, schiste Elles résultent de l'accumulation et du compactage de débris provenant de la désagrégation d'autres roches. Le processus de transformation en roche porte le nom de diagenèse (ou lapidification). Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 4 En théorie, les sédiments déposés au fond de la mer vont être classés en fonction de leur taille (granulométrie). Les débris les plus gros vont se déposer le plus près de la côte, tandis que les débris les plus fins vont se déposer plus au large, dans des régions moins agitées. La nature des roches qui en résultent va donc dépendre de la granulométrie des sédiments. Classes granulométriques (diamètre): - Cailloux (blocs, galets, graviers, gravillons): + de 2 mm - Sables: de 0,05 à 2 mm - Limons: de 0,002 à 0,05 mm - Argiles: - de 0,002 mm 2.2.1.2. Les roches organogènes Exemples de roches organogènes: craie, calcaire Après la mort des organismes marins, la partie molle se putréfie ou est mangée tandis que les parties dures (coquilles, pièces de squelette, constructions des coraux…) subsistent. Les roches organogènes résultent de l'accumulation de ces débris d'organismes au fond de la mer. 2.2.1.3. Les roches organiques (ou carbonées) Exemples de roches organiques: charbon, pétrole Les roches organiques résultent de la transformation de matière organique végétale ou animale et sont riches en carbone. 2.2.1.4. Les roches évaporitiques Exemples de roches évaporitiques: gypse, NaCl,… Les roches évaporitiques proviennent de la précipitation de sels par suite de l'évaporation d'eau salée. Cette précipitation résulte de l'évaporation et de la concentration des sels jusqu'au point de saturation. 2.2.1.5. Evolution de quelques roches sédimentaires Etat meuble Etat cohérent Roche métamorphique Argile Sable Gravier Schiste Phyllade (ardoise) Grès Quartzite Poudingue Poudingue (à ciment cristallin) Boues calcaires, coquillages Craie, calcaire Marbre Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 5 2.2.2. Quelques caractéristiques des roches sédimentaires 2.2.2.1. La stratification Les roches sédimentaires sont disposées en strates, couches successives qui diffèrent les unes des autres par quelques caractéristiques (composition, granulométrie, couleur,…). strates joints de stratification Grand Canyon, USA. 2.2.2.2. La subsidence Les couches sédimentaires sont souvent empilées sur des épaisseurs considérables, atteignant plusieurs kilomètres. Le dépôt de sédiments s'accompagne d'un affaissement progressif, très lent, de l'écorce terrestre. Ce mouvement porte le nom de subsidence. 2.2.2.3. Age des roches sédimentaires Cet âge correspond au temps écoulé depuis le dépôt du sédiment. On distingue l'âge absolu et l'âge relatif d'une roche. Age absolu: C'est l'âge exprimé en millions d'années. Il peut être déterminé en se basant sur le fait que toutes les roches contiennent des éléments radioactifs qui se transforment. Age relatif: C'est l'âge d'une roche comparé à celui d'une autre (plus vieille, plus jeune ou du même âge). Il peut être déterminé en fonction de la disposition des strates et par la présence de fossiles dont on connaît l'évolution au cours du temps. 2.3. Les roches métamorphiques Exemples de roches métamorphiques: quartzite, phyllade, marbre,… (voir tableau p. E.5) Des roches peuvent être enfouies à de grandes profondeurs sous l'effet de la subsidence ou d'une phase de plissement. Ces roches peuvent être mises en contact avec des intrusions de magma et sont soumises à des températures et pressions élevées qui provoquent leur recristallisation et leur transformation en roches métamorphiques. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 6 Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 7 Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 8 3. L'érosion 3.1. De quoi dépend le travail de l'érosion? 3.1.1. De la nature de l'agent érosif Les agents érosifs (vent, eaux courantes, glaciers, mer,…) ont chacun leurs procédés de destruction. Ils façonnent donc le relief en modelés caractéristiques. 3.1.2. De la nature des roches Les différentes roches, quand elles sont à l'air libre, s'érodent plus ou moins facilement selon leur nature. Une roche dure s'érodera moins rapidement qu'une roche tendre. L'érosion ne sculpte donc pas de la même façon une région formée d'une seule sorte de roche et une région composée de plusieurs roches de duretés différentes. Une roche dure est laissée "en saillie" au-dessus d'une roche tendre que l'érosion a déblayée. On parle d'érosion différentielle. Grand Canyon, Arizona, USA Dead Horse Point, Utah, USA Par ailleurs, on peut distinguer des paysages qui ont un aspect particulier, dépendant de la nature des roches qui composent leurs sous-sols. Il existe par exemple des "paysages granitiques", des "paysages calcaires", … Paysage calcaire à Madagascar (Tsingys de Bemahara) Paysage granitique à Madagascar Paysage calcaire en Irlande (Burren) Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 9 3.1.3. De la forme que la tectonique a donnée à la région (forces internes) L'érosion n'attaque pas de la même façon une région plissée, une région faillée, un anticlinal, un synclinal,… Anticlinal de Durbuy (Source: Maréchal, 1992, "La structure géologique", in "Géographie de la Belgique", Ed. du Crédit Communal, Bruxelles, p.38.) Déformation des roches (Utah, USA) 3.1.4. Du climat Le climat détermine l'intensité des processus d'érosion, en amplifiant l'action de certains agents d'érosion et en réduisant l'action d'autres agents. Il agit aussi indirectement en favorisant ou en freinant le développement de la végétation et du sol qui s'interposent entre les roches et les agents météorologiques. Deux types de processus d'érosion ont des importances différentes en fonction du climat. Il s'agit des processus d'érosion mécanique, qui prédominent dans les climats froids et les climats secs, et des processus d'érosion chimique, qui prédominent dans les climats chauds et humides. 3.1.5. De la durée du travail d'érosion L'érosion agit, en général, avec une extrême lenteur. Une montagne vieille n'aura donc pas la même forme qu'une montagne jeune. Parfois, cependant, l'érosion peut avoir la soudaineté d'un cataclysme (érosion liée à une avalanche, éboulements de flancs de falaises, tremblements de terre,…). Montagnes vieilles: Wicklow Mountains, Irlande Erosion sur le bord du lac Michigan, au nord de Chicago (USA). Source: de Blij et Muller, 1993, Physical geography of the global environment, ed. Wiley, p. 392. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 10 3.2. Processus de désagrégation mécanique Les différents processus d'érosion repris ci-dessous sont en fait combinés à une force qui va permettre la chute des matériaux érodés: il s'agit de la gravité. 3.2.1. La dilatation mécanique Un bloc rocheux situé en profondeur est soumis à une pression élevée, liée aux couches de roches qui le surmontent. Lorsque l'érosion élimine ces roches sus-jacentes, la pression exercée sur le bloc rocheux en question diminue, et ce bloc se dilate. Il subit donc une augmentation de volume qui s'accompagne de la formation de fissures (aussi appelées diaclases). Ces fissures vont par la suite faciliter les processus d'érosion. Diaclases dans du calcaire (Burren, Irlande) 3.2.2. La dilatation thermique Quand il fait très chaud, les roches se dilatent. Par contre, quand il fait très froid, celles-ci se contractent. Dans les zones désertiques, l'amplitude thermique quotidienne peut être très importante (plusieurs dizaines de degrés de différence entre la nuit et le jour). Ces alternances répétées de dilatation et contraction peuvent désagréger les roches. 3.2.3. La gélifraction Il s'agit de la fragmentation de la roche sous l'effet des alternances de gel-dégel. De l'eau est présente dans les pores et les fissures des roches. Quand cette eau gèle, son volume augmente, ce qui augmente la pression au sein de la roche. Quand l'eau dégèle, la pression diminue. Après plusieurs cycles gel-dégel, les fissures s'agrandissent et les débris se détachent. Gélifraction sur un bloc de granite Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 11 3.2.4. L'érosion liée aux végétaux Les racines des végétaux peuvent s'introduire dans des fissures. Leur croissance élargit ces fissures et peut faire éclater la roche. 3.2.5. L'érosion éolienne Le vent est surtout actif dans les régions arides, comme les déserts chauds ou les déserts froids, et le long de certaines zones littorales. Il est un facteur d'érosion selon deux processus: la déflation et la corrasion. 3.2.5.1. La déflation La déflation est l'action du vent qui balaye et entraîne les particules les plus légères des surfaces dégagées des déserts. Elle est favorisée par l'absence d'un tapis végétal. Le vent laisse donc sur place les fragments les plus grossiers, ce qui donne à la plus grande partie des déserts l'aspect d'immenses champs de cailloux: les regs. Reg – Hoggar Algérie Photo Patrick Chatelier 3.2.5.2. La corrasion La corrasion est l'action d'érosion par le vent chargé en particules solides. Les grains de quartz qui composent le sable "mitraillent" les roches à une grande vitesse quand il y a des rafales de vent. Le socle du sphinx d'Egypte est creusé de stries profondes liées à la corrasion… Les rochers champignons constituent un relief caractéristique d'une érosion plus marquée à la base, là où l'attaque par les grains de sable est plus forte. Rocher champignon en Algérie (Photo Patrick Chatelier) 3.2.5.3. Des formes d'accumulation En plus d'être un important facteur d'érosion, le vent est aussi un facteur d'accumulation. En effet, le sable entraîné par le vent s'accumule sous forme de dunes dans certaines régions. On a alors formation de déserts de sable, appelés ergs. Erg – Tadrart Algérie (Photo Patrick Chatelier) Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 12 3.2.6. L'érosion par les eaux courantes Les eaux courantes, quelle que soit leur origine (fonte des glaciers, précipitations, sources,…) finissent toujours par se concentrer. Elles se concentrent dans une vallée déjà existante ou, à défaut, dans des rigoles. De rigole en rigole, de vallée en vallée, l'eau tend à s'écouler vers la mer, au niveau le plus bas qu'elle puisse atteindre. L'eau est à la fois un agent d'érosion, de transport et de dépôt. On peut distinguer l'érosion liée au ruissellement et l'érosion liée aux cours d'eau. 3.2.6.1. Le ruissellement Le ruissellement est l'écoulement instantané et temporaire des eaux sur un versant, à la suite par exemple d'une averse. Quand l'eau ruisselle sur des roches meubles imperméables ou sur des roches tendres, elle peut provoquer la formation de ravines profondes qui se marquent dans le paysage. En effet, les filets d'eau se rassemblent dans des rigoles et, pluie après pluie, empruntent le même parcours, ce qui élargit les rigoles. Ce type d'érosion dépend évidemment aussi du climat: ces ravines se forment plus facilement dans des régions dépourvues de végétation et où les précipitations sont rares mais violentes. Un paysage typique de ce type d'érosion est celui des badlands (relief où l'érosion a découpé un réseau complexe de ravins étroits séparés par des crêtes aiguës). Paysage de badlands dans la Vallée de la Mort en Californie (USA) Si ce type d'érosion se forme sur un terrain hétérogène (c'est-à-dire qui comprend de gros blocs"emballés" dans une matrice plus fine), des cheminées des fées peuvent se développer. Les gros blocs, compacts et résistants, protègent les roches sous-jacentes qui constituent alors des colonnes "coiffées" par des pierres protectrices. Formation: Cheminée des fées, Cappadoce, Turquie Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 13 Un cours d'eau transporte des alluvions: - il possède une capacité de transport, variable selon les endroits et les périodes : il s’agit de la masse totale d’alluvions que le cours d’eau est capable de transporter. - il est caractérisé aussi par sa compétence, variable selon les endroits et les périodes : qui est la taille maximale des alluvions qu’un cours d’eau peut entraîner. Un cours d'eau érode: - Par érosion verticale Le cours d'eau approfondit sa vallée et fait reculer ses versants. La vallée prend un profil dit en "V". Un exemple d'érosion verticale est celui du creusement des marmites de géants: - Par érosion latérale Quand la pente est faible, les cours d'eau forment des méandres. L'érosion est plus importante sur la rive concave, qui prend l'aspect d'une paroi abrupte, tandis que des alluvions se déposent là où la vitesse est moins élevée, sur la rive convexe, formant souvent une petite plage en pente faible. La Semois (Ardenne belge) Les versants de la vallée reculent progressivement et la vallée s'élargit: Source: de Blij et Muller, 1993, Physical geography of the global environment, ed. Wiley, p. 427. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 14 Dans certains cas, deux méandres voisins "se recoupent": l'érosion qui se fait de part et d'autre amène deux rives concaves voisines à se rejoindre. Le méandre situé entre les deux est alors abandonné par le cours d'eau et devient un bras mort ("oxbow lake" en anglais). 5 km Méandres, dont méandres abandonnés, dans un affluent de l'Amazone. Source: Google Earth. Un cours d'eau dépose: A certains moments et à certains endroits, le cours d'eau n'est plus capable de transporter les alluvions dont il est chargé, parce que la pente est plus faible, la vitesse moins élevée,… Il les dépose donc. Ces dépôts forment les plaines alluviales (surface plane située au bord du cours d'eau et recouverte d'alluvions). Ils peuvent aussi former les cônes de déjection et les deltas, à l'embouchure de la mer ou d'un lac. Les zones de dépôts d'alluvions correspondent généralement à des terres très fertiles, comme par exemple le delta du Nil en Egypte. Il s'agit cependant souvent de zones inondables, parfois instables, dans lesquelles des aménagements sont nécessaires afin de les rendre utilisables par l'homme. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 15 3.2.7. L'érosion par les glaciers Si la couche de neige tombée durant l'année (surtout pendant la saison froide) est plus épaisse que celle que le Soleil sera capable de faire fondre pendant la saison chaude, il subsistera une certaine quantité de neige appelée "neige persistante" ou "neige éternelle". Dans les régions polaires, de basses latitudes, on peut retrouver des neiges éternelles dès le niveau de la mer. Plus le climat est chaud, plus il faut prendre de l'altitude pour trouver des neiges persistantes. Dans les Alpes européennes, par exemple, il faut en moyenne monter jusqu'à 2500 mètres d'altitude pour retrouver la limite des neiges éternelles. Cette limite varie en fonction de toute une série de facteurs: variation d'une année à l'autre, variation liée à l'exposition au Soleil, à la pente,… 3.2.7.1. La glace de glacier La glace de glacier est le résultat de la transformation progressive de neige en névé puis en glace, accompagnée d'une augmentation de la densité. La neige qui s'accumule à la surface est composée de petits cristaux séparés par de l'air. Plusieurs couches de neige s'entassent les unes sur les autres. Sous l'effet de la pression des couches supérieures, les couches inférieures se compriment. De plus, les variations de température en surface peuvent être responsables d'une fonte partielle de la neige, suivie de son regel. Le manteau neigeux subit donc des transformations: la neige se transforme en névé, c'est-à-dire en neige tassée dont la densité est de l'ordre de 0,55. Par la suite, le névé lui-même se comprime sous l'effet de la pression des couches susjacentes. On observe une recristallisation progressive, une compression de l'air (formation de bulles de gaz) et une augmentation de la densité, qui mènent au stade de glace de glacier (densité de 0,9). 3.2.7.2. Les sortes de glaciers On peut distinguer deux types principaux de glaciers, en fonction de leurs formes. • Les calottes glaciaires des régions polaires (Groenland et Antarctique), qui sont très étendues et dont l'épaisseur de glace atteint plusieurs kilomètres: on parle d'inlandsis. • Les glaciers locaux, qui n'existent qu'à partir d'une certaine altitude: ce sont les glaciers de montagnes. Ci-dessous, nous allons en particulier nous pencher sur un type de glaciers de montagnes qui prédomine dans les Alpes, par exemple: les glaciers de vallées, avec langue glaciaire. 3.2.7.3. Les parties principales d'un glacier La neige s'accumule dans le bassin d'alimentation, qui porte aussi le nom de cirque glaciaire. Il s’agit d’une grande cuvette, en forme d’amphithéâtre, ouverte du côté de l’aval, dominée en amont par des parois raides, dans laquelle la neige s’accumule et se transforme en glace. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 16 Sous l'effet de la gravité, la glace formée va s'écouler en dehors du cirque glaciaire. La glace se détache de la paroi rocheuse en formant la rimaye, une crevasse près de la base de cette paroi. La glace est évacuée dans la langue glaciaire: elle s'y écoule très lentement et arrive sous la limite des neiges persistantes, dans une zone où elle va fondre progressivement (zone d'ablation du glacier). Les eaux de fonte se rassemblent et forment le torrent sousglaciaire, qui s'écoule sur le lit du glacier, sous la glace. Le front du glacier correspond à la partie terminale du glacier, où le torrent sous-glaciaire sort à l'air libre et devient le torrent proglaciaire. Le front se déplace en fonction des variations de régime que subit le glacier, c'est-à-dire suivant la quantité de neige qui tombe dans le bassin d'alimentation et la quantité de glace qui disparaît dans la zone d'ablation. On dit que le glacier avance ou recule. L'écoulement dans la langue glaciaire ne se fait pas à la même vitesse partout (on estime que la vitesse d'écoulement des glaciers varie de 25 mm à 1,25 m par 24 heures dans les régions tempérées). La vitesse est plus élevée au centre que sur les bords, à la surface qu'au fond, à cause du frottement sur les parois. Ces différences de vitesse entraînent l'apparition de crevasses longitudinales. Le profil longitudinal du lit d'un glacier ne présente pas une pente constante. On observe dans la plupart des cas des irrégularités marquées. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 17 - Verrous : zones en saillie ou de rétrécissement dans le lit du glacier, liées à une érosion différentielle. - Ombilics : zones en creux ou zone d’élargissement dans le lit du glacier, liées à un surcreusement. Ces irrégularités sont responsables de différences de vitesse d'écoulement. Les ruptures de pente provoquent la formation de crevasses transversales, séparés par de gros blocs de glace appelés séracs. 3.2.7.4. Le glacier transporte, érode et dépose Le glacier transporte des matériaux qui proviennent des parois de la montagne et de la vallée et de l'action érosive du glacier lui-même. Les glaciers sont capables de charrier des blocs de plusieurs tonnes et sont de ce fait les agents de transport les plus puissants dans la nature. Les matériaux que le glacier transporte et qu'il dépose quand il fond sont appelées moraines. On distingue plusieurs types de moraines: - Moraines latérales, formées de débris rocheux éboulés ou arrachés aux parois; Moraines médianes, formées par deux moraines latérales qui se rejoignent quand deux glaciers confluent; Moraines frontales, situées à l'avant du glacier; Moraines basales, situées sur le fond du glacier. L'action d'érosion du glacier s'exerce via: - Le frottement de la glace mais surtout de tous les débris transportés au sein de la glace, qui usent les parois de la vallée en agissant comme un immense papier ponce. L'érosion liée au torrent sous-glaciaire. La gélifraction. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 18 3.2.7.5. Les formes d'érosion L'érosion glaciaire imprime des formes particulières au relief. - Le cirque L'érosion de plusieurs cirques voisins forme des crêtes (entre deux cirques) ou des pics en forme de pyramide (3 cirques ou plus). - Les vallées en U: l'érosion ne se fait pas que sur le fond, mais aussi sur les parois de la vallée, ce qui mène à la formation d'une vallée en auge typique. Quand la mer envahit une ancienne vallée glaciaire, on parle de fjord. - Les ombilics et les verrous, qui restent visibles dans le paysage même après le retrait du glacier. Les ombilics sont dans ce cas souvent remplis d'eau (lacs). - Les vallées suspendues, qui sont liées à l'écoulement d'un glacier affluent sur un glacier principal. - Les roches moutonnées, qui ont une allure générale arrondie et qui sont striées par l'érosion (stries parallèles à la direction d'écoulement du glacier. Vue sur le glacier de Valsorey (Valais suisse) Vue sur le glacier de Tseudet et le Mont Vélan (Valais suisse) Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 19 Mont Cervin (Suisse) – Source: de Blij et Muller, 1993, Physical geography of the global environment, ed. Wiley, p. 442. Roches moutonnées et striées en Alaska (Van Horn Ridge) Source: de Blij et Muller, 1993, Physical geography of the global environment, ed. Wiley, p. 448. Ancienne vallée glaciaire et roches moutonnées dans le Yosemite National Park (Californie – USA). Fjord norvégien http://folk.uio.no/dansh/norway/fjord.jpg Bas glacier d'Arolla (Valais suisse). Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 20 3.2.8. L'érosion par la mer Les océans et les mers couvrent 71% de la surface du globe et contiennent 97% des eaux terrestres. 3.2.8.1. Les mouvements de la mer • Les courants marins: ils naissent grâce au vent ainsi qu'aux différences de températures et de salinités des eaux qui entraînent des différences de densités. • Les vagues: Ce sont des déformations de la surface de la mer occasionnées par le vent. Quand les vagues n'ont plus de profondeur suffisante pour leur mouvement vertical, ce qui arrive quand elles atteignent le rivage, leur base est arrêtée par le frottement sur le fond, et la partie supérieure tombe en avant: les vagues déferlent. • La houle: Il s'agit d'une onde qui se propage à la surface de la mer, souvent très loin de l'endroit où souffle le vent, semblable aux rides qui apparaissent lorsqu'on jette une pierre dans un étang. Le bouchon monte et descend sans avancer. • Le ressac: Le long du rivage, en touchant un obstacle, ou par simple gravité, l'eau de la vague déferlante est en partie renvoyée vers le large. • Les marées: Ce sont des oscillations périodiques auxquelles la mer est soumise. Le courant correspondant à la marée montante est appelé flux (ou flot), celui de la marée descendante reflux (ou jusant). L'estran correspond, lui, à la zone dégagée entre marée haute et marée basse. Ces mouvements doivent leur origine à l'attraction des astres (Soleil – Terre – Lune principalement). Les périodes et l'amplitude des marées dépendent donc des positions relatives de ces trois astres, mais aussi de la dimension et de la forme des océans et des mers, de la forme des côtes. 3.2.8.2. Les formes d'érosion littorales : les falaises Les falaises sont des abrupts littoraux créés par l'action de la mer au dépend du relief continental. Leur profil présente une pente relativement forte, limitée par une nette rupture de pente basale qui marque le passage à une plate-forme rocheuse (plate-forme d'érosion ou d'abrasion). Cette limite est souvent marquée par une encoche ou par des grottes. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 21 Les falaises sont des espaces toujours en évolution, façonnés principalement par l'action des vagues qui ont une force destructrice énorme. - Par leur plasticité, qui leur permet de s'introduire partout; - Par leur énergie et leur poids, qui provoquent l'élargissement des diaclases des roches et la dislocation de celles-ci ; - Par la compression de l'air contenu dans les fissures des roches – les fortes différences de pressions dues au déferlement des vagues peuvent donc être transmises très profondément à l'intérieur des roches et ébranler des ensembles rocheux jusqu'à des distances importantes de la zone d'impact; - Par le "mitraillage" des roches avec les particules en suspension dans l'eau (sables, galets); - Par leur retour à la mer, transportant les fragments érodés. L’érosion est évidemment fonction du type de roche, et d’autres éléments comme la direction des strates par rapport à l’action des vagues. Si la base d'une falaise n'est plus atteinte par la mer, on parle de falaise morte, même si celle-ci peut encore évoluer sous l'action de facteurs d'érosion non liés à la présence de la mer (vent, ruissellement, …). La mer, comme tout agent d'érosion, tend à niveler. Elle remplit les parties rentrantes avec les débris des parties saillantes. Une côte soumise depuis peu à l'action de la mer est dite jeune. Elle est encore découpée par l'alternance de caps et de golfs. Lorsque ces caps ont déjà reculé, laissant comme témoins quelques îlots ou écueils, lorsque des plages, en voie de formation, apparaissent dans les golfes, la côte est dite mûre. Lorsque les plages s'alignent à la hauteur des caps décapités, lorsque les îlots ou les écueils-témoins ont disparu, la côte est dite régularisée. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 22 3.2.8.3. Les formes d'accumulation littorales • Les plages : • Les flèches littorales : • Les dunes: • Les deltas: 3.2.8.4. Quelques formes particulières Si un continent s'élève ou s'abaisse à cause de mouvements tectoniques, ou si le niveau de la mer s'élève ou s'abaisse, la zone de contact entre terre et mer se déplace, et le travail de la mer est à recommencer, à un niveau supérieur ou à un niveau inférieur. Il y a environ 15 000 ans, le niveau des mers était de près de 100 mètres plus bas qu'aujourd'hui (période glaciaire). La déglaciation progressive a provoqué une transgression marine, le niveau de la mer n'a cessé de s'élever. Beaucoup de côtes ont été submergées, et la mer a envahit certaines vallées. Une vallée envahie par la mer s'appelle une ria. Dans les vallées glaciaires, on parle de fjords. Dans les vallées calcaires, on parle de calanques. Calanque dans le Sud de la France. Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 23 3.3. Le relief calcaire (karstique) : exemple d'érosion chimique 3.3.1. Caractéristiques du calcaire Dans les massifs calcaires, l'érosion mène à des formes particulières en raison de deux propriétés de cette roche: sa perméabilité "en grand" et sa solubilité. • Le calcaire est perméable "en grand". Si on fait couler de l'eau pure sur un morceau de calcaire, l'eau ne s'y infiltre pas. Le calcaire n'est donc à priori pas perméable à l'échelle d'un bloc de cette roche. Par contre, à l'échelle de tout un massif calcaire, on peut considérer que cette roche est perméable "en grand". Le calcaire, roche sédimentaire, est en effet parcouru par des diaclases (fissures) et par des joints de stratification. L'eau peut donc s'infiltrer dans ces fissures et circuler au sein du massif calcaire. • Le calcaire est soluble: il se dissout au contact d'une eau acidifiée. L'eau plus ou moins acidifiée qui s'infiltre dans les fissures provoque donc une dissolution qui élargit ces fissures. Cette dissolution se fait suivant l'équilibre chimique suivant: CaCO3 (solide) + H2O + CO2 ↔ Ca(HCO3)2 (dissous) 3.3.2. Formes d'érosion liées aux reliefs karstiques De manière générale, peu de cours d'eau s'écoulent en surface dans les régions calcaires. Les cours d'eau importants creusent des canyons profonds (1), aux versants raides. Des cours d'eau plus petits disparaissent dans des pertes (2), en s'enfonçant dans le massif calcaire. En surface, des dépressions fermées plus ou moins vastes sont visibles. Ces dépressions, ou dolines (3), naissent de l'élargissement des fissures par la dissolution. Elles peuvent s'agrandir par des effondrements, l'action du ruissellement et par la réunion de plusieurs dépressions de petite dimension (ce qui forme un ouvala – 4). Une grande part de l'érosion se manifeste en profondeur: des réseaux de grottes se développent, liés à l'action de l'eau qui s'est infiltrée et circule au sein du massif calcaire. L'écoulement souterrain élargit progressivement les galeries, par érosion mécanique et érosion chimique. Certaines galeries sont inondées (6), d'autres se sont "asséchées" parce que le niveau d'eau (7) s'est abaissé dans le massif calcaire (8). Les parois des grottes sont tapissées de concrétions calcaires: des stalactites (9) et des stalagmites (10) provenant de la précipitation de calcaire amené par les eaux d'infiltration. Quand le cours d'eau finit par réapparaître à l'air libre, on parle de résurgence (à ne pas confondre avec une source!). Des effondrements peuvent mettre en contact ces grottes et les dépressions de surface en formant des gouffres ou avens (11). Fiche technique 6 Notions de géomorphologie 24 Relief karstique – Source: de Blij et Muller, 1993, Physical geography of the global environment, ed. Wiley, p. 437. Doline Causse Mejean, Lozère, France - photo André Lardon Canyon - Gorge du Verdon (Var, France) Gouffre de Padirac (Lot, France) Stalactites dans une grotte du Burren (Irlande) Résurgence dans le Jura (France)