dont l’absorption croissante des jeunes enquêtés par les enjeux sportifs s’appuie sur une
immersion dans les différentes compétitions qui mobilisent les équipes du club. Insérés dans
un univers « à part », soumis à l’urgence compétitive et rythmés par le calendrier sportif, ils
intériorisent aussi des manières de jouer structurées par une « culture de la gagne » et une
tension agonistique qui contribuent à façonner leurs dispositions compétitives. L’appropriation
du jeu telle qu’elle est suscitée par l’encadrement sportif est également révélatrice de la place
donnée à la dimension collective de la pratique. L’adhésion à un groupe, à un « nous »
compétitif, et la promotion d’un « esprit d’équipe » générateur de solidarités, participent ainsi
de l’apprentissage dans le club. Dans un deuxième temps sont mises en évidence de
nouvelles échéances qui structurent l’expérience des apprentis footballeurs (« La formation
comme espace de luttes individuelles »). Elles sont le produit d’un second calendrier, celui des
étapes internes d’un cursus professionnalisant. Aux échéances compétitives s’ajoutent, en
effet, celles qui déterminent la position dans la structure et les espoirs de professionnalisation
(comme l’obtention d’un contrat par exemple). L’intériorisation de ce calendrier s’objective
selon trois angles permettant de souligner en quoi la formation est à la fois, et
indissociablement, individualisante, incertaine et concurrentielle. Ainsi, après avoir montré de
quelle manière l’activité tend à être envisagée en termes de carrière individuelle, il s’agit de
souligner le poids de l’incertitude dans la formation et de ses effets sur le rapport des joueurs à
l’activité et à leurs pairs. C'est en raison de cela que la formation constitue souvent
l’expérimentation d’une vie « sous pression ».
Cette précarité des statuts à l’intérieur du centre de formation tend à produire un rapport tendu
et inquiet à l’avenir. Il facilite une appropriation ascétique et disciplinée de l’activité qui se
trouve renforcée par les manières d’apprendre, les techniques footballistiques et les façons de
traiter le corps engagées dans l’apprentissage (« L’apprentissage des savoir-faire
footballistiques »). Dans cette troisième partie, l’enseignement des manières légitimes de jouer
et son rôle dans l’intériorisation d’une culture sportive professionnelle spécifique sont au cœur
des interrogations et observations développées. Dans un premier temps (« Les savoir-faire :
apprentissage et rapport au jeu »), les modes d’appropriation d’une gestualité spécifique sont
décrits selon trois perspectives. Il apparaît, tout d’abord, que la forme et le mode
d’organisation des exercices ainsi que les relations d’apprentissage font des séances
d’entraînement le lieu de l’intériorisation d’un rapport à la pratique marqué par la discipline et
une morale de l’effort. De plus, la socialisation à ce mode d’engagement se trouve redoublée
par la forme des techniques et le style de jeu enseignés qui donnent lieu à une incorporation
pratique. Ce mode d’appropriation est privilégié mais il n’est pas exclusif comme le montre le
recours à un travail correctif sur soi qui rompt, en partie, avec le rapport pratique à la pratique.
Enfin, les comportements de spectateurs des apprentis sont analysées car, à l’intérieur de la
formation, elles participent à l’apprentissage et, au-delà, à l’appropriation du métier. Le
modelage des dispositions corporelles des aspirants footballeurs constitue, dans un second
temps, un axe d’exploration de la socialisation et de l’intériorisation d’un travail sur soi (« Le
corps au service du football : entre dépassement et préservation »). L’intensité et le degré
d’emprise de la formation permettent, en effet, la production d’une culture somatique
spécifique qui, ajustée à un usage sportif intensif, s’actualise dans un ensemble de