Renouveler le répertoir
e
Il faut toujours réexaminer les oeuvres dites mineures de
s
grands auteurs
: certaines pièces négligées se mettent parfois
à
correspondre à des préoccupations qui sont dans l'air du temps
.
C'est le pari que nous avons fait avec
le Menteur
de Corneille
.
Et c'est le même pari que nous faisons en vous présentan
t
Peines d'amour perdues,
une comédie de Shakespeare peu con
-
nue en français et qui, même en anglais, a dû attendre l
e
vingtième siècle pour retrouver sa popularité
.
Shakespeare a écrit
Peines d'amour perdues
vers 1595, à l
a
même époque où il a donné
Richard 17, Roméo et Juliette
et
l
e
Songe d'une nuit d'été
.
Il écrivait alors du théâtre depuis six o
u
sept ans et
Peines d'amour perdues
date de ce moment où il prend pleine possession de se
s
moyens de dramaturge
; son génie poétique, présent depuis le début, s'affine et il a appris à mieu
x
structurer ses pièces
.
Comme
le
Menteur, Peines d'amour perdues
est une comédie qui porte sur l'utilisation d
u
langage dans l'art de la séduction
. Mais la pièce critique également la mentalité du « tout o
u
rien » qui menace toujours l'être humain, ce qui est extraordinairement illustré par cette histoir
e
de jeunes hommes qui, pour mieux se consacrer aux études, décident de renoncer aux plaisirs d
e
la vie et à la compagnie des femmes . C'est aussi une oeuvre qui dit que la maladresse en amou
r
est un fléau universel, qui accable les nobles comme le commun des mortels, les lettrés comm
e
les ignares, les gens sérieux comme les têtes de linotte
.
. .
Pour vous offrir ces
Peines d'amour perdues,
une distribution presque entièrement composé
e
de jeunes acteurs, une solide équipe de concepteurs et une metteure en scène, Manou Vallée, qu
i
dirige son premier spectacle chez nous
.
Enfin, il y a dans l'idée de présenter cette pièce le pur plaisir d'éblouir, tant par les mots qu
e
par les images
. Parce que c'est ce que Shakespeare, visiblement, désirait
.
Le directeur artistique
,
Pierre Roussea
u
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Dans ce cahie
r
Peines d'amour perdues
occupe une place à part dans 1'oeuvre de Shakespeare : aucune autr
e
de ses pièces ne pousse aussi loin les jeux de langage et de séduction
. Pour ce cahier, plutôt que d
e
parler en général de Shakespeare et de son époque pour ensuite nous pencher davantage sur
Peine
s
d'amour perdues,
nous avons décidé de procéder de manière inverse et d'observer cette comédie
à
la loupe, sachant que nous y retrouverions Shakespeare et son temps . C'est pourquoi la présenta-
tion de la pièce est plus élaborée qu'à l'habitude
. Nous avons aussi demandé à Véronique Borboên
,
dont l'érudition s
u
r
la vie à cette époque est remarquable, de nous décrire les modes de séductio
n
dans l'Angleterre d'Élisabeth l'
. A la lecture de cet article, on comprendra à quel poin
t
Shakespeare, même en s'éloignant de tout réalisme, a plongé au coeur de la culture amoureuse d
e
son temps, démontant les mécanismes de la séduction . Ce qui est fascinant, c'est que les façons d
e
séduire ont changé, mais que la mécanique que Shakespeare a mise à nu est toujours la même
.
Paul Lefebvre
C
a h i e r 3 8
© Thédtre
Denise-Pelletier