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permettent un peu plus de conscience de soi et de morale. Elles ont une
longue tradition (aussi vieille que l’Antiquité : plus de 2000 ans donc) de ce
qu’on appelle « la direction de conscience » : qu’ai-je fait de bon de ma
journée ? Qu’est-ce que je peux améliorer pour être meilleur encore ?
Un exercice ludique peut vous convaincre aisément que cette pratique,
si importante en apparence et dans notre histoire, peut pourtant être tout à
fait dépourvue de sens. À tout le moins, elle mérite une distance critique qui
évite d’accorder trop vite du crédit au jugement que l’on porte sur soi.
D’autant que ce jugement peut parfois être assez lourd à porter.
Considérez votre journée d’hier. Retrouvez ses moments principaux,
leur enchaînement, si possible les menus détails et les pensées qui les ont
accompagnés heure après heure. À partir de cette reconstitution, considérez
votre attitude. Tentez de la juger. Non pas objectivement, comme si vous
parveniez à prendre sur vous un point de vue objectif et neutre.
Insidieusement, au contraire. De manière partiale, tendancieuse, excessive !
Apercevez d’abord l’extrême élégance de
vos moindres gestes. Interprétez en bonne part
toutes vos cogitations intimes. Voyez comme
vous avez été dévoué, attentif, altruiste,
compatissant, désintéressé, modeste, efficace,
humain, solidaire, charitable, respectueux, tout
au long de la journée ... Un ange vraiment.
Le but de l’expérience est que vous parveniez à l’expérimenter
vraiment. Peu importe ce que vous avez bien pu accomplir. Vous devez
parvenir à discerner dans votre journée d’hier – que l’on supposera plus ou
moins banale – les signes évidents de votre bonté. Car, après tout, même
sous vos gestes maladroits, se cache toujours un brin d’humanité. Non ?
Lorsque vous aurez le sentiment que ce résultat est à peu près acquis,
suivez le chemin exactement inverse. Efforcez-vous de trouver, dans les
mêmes actes et pensées de cette journée, les indices évidents de votre
perversité, de votre méchanceté fondamentale, de votre intérêt toujours
camouflé sous la moindre de vos générosités. Soyez fin dans l’interprétation
et dénichez, dans tout ce qui a été fait, dit et pensé, la confirmation de votre