Introduction
Keynes, pourtant peu suspect de sympathies libérales, affirmait que la pression fiscale ne pouvait dépasser 25 % sans remettre en
cause les fondements capitalistes des sociétés occidentales. Force st de constater que cette barrière psychologique a été franchie
depuis longtemps sous l'effet des déficits budgétaires provoqués jusqu'à la fin des années 1960 puis largement subis depuis cette
époque. C'est qu'en effet, il faut distinguer un "bon" déficit budgétaire, provoqué et contrôlé, et qui selon les canons du
keynésianisme, produit des effets de relance salutaires pour la croissance, via le mécanisme du multiplicateur, et un "mauvais"
déficit, subi et non contrôlé, sans effet de relance car lié à des dépenses de fonctionnement jugées improductives.
De fait, le principe libéral-orthodoxe de l'équilibre budgétaire qui a caractérisé le XIXe siècle jusqu'aux années 1930 a volé en
éclats: récemment, sous l'effet de la crise, le déficit budgétaire a atteint des sommets. En 2009, par exemple, il a été de 8,5 % du
PIB en France, bien au-delà de la limite de 3 % imposée par le Pacte de stabilité et de croissance, contribuant ainsi à gonfler un
endettement public qui voisine désormais 90 % du PIB, et dépasse les 100 % dans de nombreux pays comme les Etats-Unis, sans
parler du Japon. C'est dès la fin des années 1960 que le déficit budgétaire devient permanent en France, alimentant la critique
libérale d'un Etat jugé dispendieux et inefficace. Dès lors, le retour à l'équilibre budgétaire devient, avec la lutte prioritaire contre
l'inflation, une des revendications emblématiques du courant libéral aujourd'hui dominant, qui voudrait l'imposer aux
gouvernements sous la forme de "règles d'or" gravées dans le marbre de la Constitution et censées traduire budgétairement les
principes de la "bonne gouvernance".
Nous montrerons donc que la pratique du déficit budgétaire a longtemps caractérisé les politiques économiques d'inspiration
keynésienne, mais que les limites et les apories de ces politiques ont remis à l'ordre du jour le principe orthodoxe de l'équilibre
budgétaire (1e partie). Cependant, l'éclairage historique et l'actualité montrent qu'un tel objectif est difficile à mettre en œuvre et
peut se révéler procyclique en période de crise (2e partie)./
I. Alors que la pratique du déficit budgétaire a longtemps caractérisé les politiques
économiques d'inspiration keynésienne, les limites et les apories de ces politiques ont
remis à l'ordre du jour les principes orthodoxes de l'équilibre budgétaire.
1) Les politiques budgétaires actives, fondées sur un déficit budgétaire consenti, ont dominé le policy-mix d'après-
guerre.
Deux points à traiter ici:
Les fondements théoriques de la relance budgétaire: Keynes (insister notamment sur l'équilibre ex-post I=S du déficit
budgétaire, c'est un point absolument essentiel) + IS-LM + Courbe de Phillips.
Les expériences concrètes: choix Pleven à la Libération, confirmé ensuite par Pompidou ("Mieux vaut l'inflation que le
chômage"), expérience américaine sous Kennedy, extinction de la dette dans un cadre d'économie d'endettement inflationniste:
ici, il faut absolument expliquer les liens entre solde primaire, taux de croissance et taux d'inflation. En effet, la condition de
stabilité de la dette publique s'écrit:
avec spt (solde public en % du PIB), i le taux d'intérêt de la dette, g le taux de croissance du PIB , dt-1 le taux de croissance de la
dette. Le solde primaire stabilisant dépend donc de l'écart entre le taux de croissance de l'économie et celui des taux d'intérêt.
Ceci montre que deux solution peuvent permettre de mener une politique budgétaire expansive sans risque de dérapage de la dette
à long terme:
- La croissance économique, lorsqu'elle est supérieure au taux d'intérêt de la dette, et dans un contexte de modération du déficit
budgétaire permet de réduire l'endettement à long terme.
- L'autre solution économique est l'inflation; celle-ci contribue à réduire le taux d'intérêt réel et donc participe à la réduction de
la dette (effet de levier de l'endettement); c'est la solution qui a été employée après 1945: les dettes issues de la guerre et de la
reconstruction se sont "évaporées" dans l'inflation permanente des "Trente Glorieuses".
On est donc en présence d'un déficit budgétaire sous contrôle, optimisé dans le cadre d'une économie avec faible contrainte
extérieure et avec une inflation de croissance qui contribue à réduire le poids de la dette: cette configuration va voler en éclats à la
fin des années 1960.
2) Ces politiques budgétaires expansives trouvent leurs limites dès le fin des années 1960...
Les difficultés du policy-mix keynésien à partir de la fin des années 1960: échec des politiques de relance, stagflation, le déficit
budgétaire devient systématique et n'exerce plus les effets de relance escomptés. La contrainte extérieure joue ici un rôle essentiel
(à expliquer). Montrer également la montée irrésistible de l'endettement public depuis les années 1980.
Dans ce contexte, on assiste à un retour très marqué à une nouvelle approche des finances publiques, en Grande-Bretagne (Mme
Thatcher, 1979) et aux Etats-Unis (R. Reagan, 1980) qui mettent en œuvre des politiques de tax-cut et de maîtrise des dépenses
publiques, inspirées par les travaux de A. Laffer. Cette période est marquée par un net retour des théories libérales.
3) … alimentant une crise de légitimité des déficits budgétaires et un retour des idées orthodoxes..
Une importante réactualisation des thèses libérales, prônant le retour à l'orthodoxie budgétaire: bien développer ce point:
Friedman et la critique de la courbe de Phillips – Lucas et les anticipations rationnelles – Théorème Ricardo-Barro (bien expliquer
ici l'effet d'éviction de la relance budgétaire financée par l'emprunt - Kydland et Prescott surtout, et la critique des politiques
budgétaires actives). On peut aussi évoquer l'école du Public Choice qui critique la pertinence des dépenses publiques. On
débouche sur un ensemble de postulats fondateurs: neutralité et crédibilité de la politique budgétaire – remplacement des