Section 3: Comment expliquer le comportement électoral ? I. L’abstention. A. Définitions et mesure. Pour pouvoir voter, un individu doit d’abord être inscrit sur les listes électorales. Depuis 1997, les jeunes sont automatiquement inscrits lorsqu’ils ont 18 ans. Mais un individu inscrit peut en France souhaiter ne pas voter. On parle dans ce cas d’abstention. On peut comparer le nombre d’abstentionnistes par rapport au nombre d’inscrits par un calcul de pourcentage. On obtient le taux d’abstention. On peut calculer aussi un taux de participation. Ce taux peut être calculé en fonction de la catégorie sociale, mais aussi en fonction du type d’élection. On observe ainsi de façon plus exacte les raisons qui poussent les individus à s’abstenir de voter. Doc 2 p 82. B. Les déterminants de l’abstention. Doc 3 & 4 p 83. L’abstention est un phénomène qui doit être étudié avec précaution. Il ne faut pas déduire d’une hausse du taux d’abstention un désintérêt massif de la population pour la politique. Tout d’abord, nous pouvons observer que certaines élections continuent de mobiliser les citoyens de façon importante, comme c’est le cas de l’élection présidentielle. D’autres élections au contraire ont un enjeu qui semble plus obscur à bon nombre d’individus (élections européennes, élections cantonales). C’est d’ailleurs le degré de compréhension des enjeux politiques qui expliquer les différences de taux d’abstention selon les catégories sociales. En effet, on peut estimer que la participation est plus faible chez les individus les moins bien intégrés et qui s’estiment peu compétents pour prendre des décisions par rapport aux questions politiques. Pour d’autres catégories, plus diplômées, l’abstention peut être en revanche une forme d’expression politique. Elle a pour but de signifier sur des élections précises que les citoyens désavouent les candidats dans leur ensemble, ou qu’on estime que le vote n’aura aucun impact concret. II. Le choix des électeurs. A. Le vote, un acte déterminé. Doc 4 p 85. Doc 2 p 84. A l’Université de Columbia, à l’occasion des élections présidentielles de 1910, des sociologues ont cherché à savoir si le vote était influencé par des variables sociologiques. Il s’agit d’une approche déterministe puisqu’on en vient à considérer que les opinions politiques sont façonnées par le milieu d’origine, et qu’il existe des variables lourdes du comportement électoral. Leurs études parvinrent à démontrer l’existence de tels déterminismes. En effet, selon le résultat des enquêtes, les individus habitant en milieu rural, de religion protestante et de niveau de vie aisé ont tendance à voter pour le candidat républicain. A l’inverse, les habitants de milieux urbains, de religion catholique et de niveau de vie modeste votent davantage pour le candidat démocrate. De nombreuse études semblables ont eu lieu en Europe. Elles ont souvent démontré l’importance d’un vote ouvrier, clairement marqué à gauche, et tout particulièrement vers le Parti Communiste. Doc 1 p 84. Toutefois, l’analyse de ces déterminismes nécessite une certaine prudence. En effet, les chiffres statistiques ne permettent pas de déduire de façon immédiate certains déterminismes. La catégorie des jeunes par exemple peut sembler avoir une certaien homogénéitié mais il ne faut pas confondre l’effet de l’âge avec celui de la génération, c’est-àdire du contexte dans lequel les jeunes se trouvent au moment de leur première participation aux élections. Si les jeunes ont pu être marqués par des événements qui semblent déterminants pour leurs choix électoraux, ils ont aujourd’hui un vote plus volatil. Pour mesurer les déterminismes, Robert Alford propose un indice simple, qui fait la soustraction entre le pourcentage d’ouvriers qui votent à gauche et celui des non-ouvriers qui votent à gauche. Plus l’indice est élevé, plus le vote de classe est important. La lecture de travaux statistiques récents semble montrer que le vote de classe est en déclin, puisque l’indice d’Alford est en chute dans de nombreux pays. Doc 1 p 86. B. Le vote comme acte rationnel. Doc 2 p 86. Un autre courant sociologique, l’individualisme méthodologique, estime qu’il faut représenter le vote comme un acte rationnel. Chaque individu essaie d’obtenir à travers son vote la plus grande satisfaction possible par rapport à ses intérêts. Sa décision est le fruit d’un arbitrage rationnel entre gains et coûts que représentent un candidat. Le vote est donc le résultat de la confrontation entre l’offre des candidats et la demande des électeurs, comme dans n’importe quel marché. On peut parler dans certains cas de vote sur enjeu. Lorsque l’ensemble de la population considère un thème comme crucial, les électeurs vont choisir le candidat qui semble le mieux préparé pour résoudre les problèmes qui se posent sur ce thème. Il peut s’agir par exemple de la crise économique, du chômage, de l’insécurité, de l’Union Européenne. Dans ce cas, le vote cesse d’être déterminé mais correspond à des choix individuels et rationnels. Doc 4 p 87. Doc 3 p 87. Ainsi le vote des électeurs est plus changeant. On parle de volatilité, pour désigner le fait qu’un électeur change de candidat ou de parti d’une élection à une autre. Cette volatilité peut tout d’abord s’exprimer par l’abstention. L’électeur, déçu par son candidat et ne souhaitant voter pour un autre, peut décider de s’abstenir. Un électeur peut aussi choisir de voter pour un parti différent. Dans ce cas, c’est souvent pour un parti proche, et il est rare que certaines frontières soient franchies par bon nombre d’électeurs (comme le clivage droite/gauche). Le fait que certains individus soient capables d’exprimer des opinions de façon très volatile, en votant successivement pour des candidats très éloignés, s’explique par le fait que ces individus ont une méconnaissance de la politique et de ses programmes. Cette volatilité exprime essentiellement un vote protestataire. On peut donc nuancer le point de vue selon lequel le vote est un acte parfaitement rationnel. III. Le rôle des médias. A. La mise en scène de la politique. Les hommes politiques contemporains attachent beaucoup d’importance à l’image que les médias donnent d’eux. C’est en effet à travers les journaux, la télévision ou internet que les électeurs connaissent les candidats. Les campagnes électorales doivent donc être particulièrement soignées à travers les médias. Les candidats prennent donc en compte les sondages pour essayer de comprendre les réactions de la population par rapport à leurs propositions ou actions. Ils doient aussi prendre soin de leurs passages à la télévision, et mettre en scène leurs campagnes. Internet est un outil nouveau que les hommes politiques utilisent de plus en plus (twitter, facebook, blogs). Doc 1 p 88. B. L’impact des médias sur le choix des électeurs. Des recherches sociologiques parfois anciennes portent sur la capacité des médias à influencer le citoyen et à modeler son opinion. Certains estiment que les médias comme la radio peuvent amener les individus à croire tout ce qui leur est annoncé, ou à adopter de façon crédule les opinions qui leur sont présentées. De nombreuses dicatures ont utilisé cet outil à la manière d’une « piqûre hypodermique ». Doc 2 p 88. Doc 3 p 89. Doc 4 p 89. Pour M. McLuhan, c’est en particulier la télévision, qui constitue un « média chaud », qui peut facilement influencer les individus. En effet, elle génère des émotions par l’image et s’adresse plus à la sensibilité qu’aux capacités de réflexion. Les hommes politiques vus à la télévision ont donc une personanlité plus concrète, ils semblent plus proches, et les candidats soignent leur image dans ce cadre. On peut cependant penser qu’en fait les médias sont moins puissants et que les électeurs ne sont pas si aisément malléables. D’autres éléments permettent aux individus de se faire une opinion car les sources d’information sont variées. N’oublions pas que d’autres déterminants peuvent jouer un rôle (§IIA) de façon contradictoire à celui des médias. Ainsi, un individu plongé dans un millieu social de gauche aura peu de chances d’être convaincu par une propagande de droite. Enfin, on peut estimer que si les médias ont une influence, c’est de façon indirecte. En effet, ils peuvent contribuer à la création d’un « agenda ». C’est ainsi que l’on nomme les thèmes que les électeurs considèrent comme primordiaux et que nous avons appelés « enjeux ». (§II.B). Ainsi les thèmes de l’insécurité, de la corruption, par exemple peuvent être mis en emphase au détriment d’autres questions, parce que les médias les évoquent de façon plus fréquente.