Article paru dans le bulletin de l'Aleps Liberté économique et progrès social n° 141 d'octobre
2012 ; par Olivier Méresse.
Vendus et invendus
ou
Par quel miracle un titre de presse n'accueillant pas
de publicité peut-il être plus rentable que des concurrents
bénéficiant de cette "manne" ?
Nous montrerons dans un premier temps que si la publicité peut rapporter de l'argent à un titre de
presse, elle entraîne également cinq types de coûts qui sont mal ou ne sont pas comptabilisés,
qu'elle induit huit effets nocifs sur la qualité réelle ou perçue, et qu'enfin elle est quadruplement
vicieuse. Dans un deuxième temps, après avoir rapidement évoqué les aspects également très
positifs de la publicité, nous nous efforcerons d'analyser ses conséquences et ses effets pervers selon
les secteurs de la presse. Nous conclurons alors que sa présence, particulièrement à l'intérieur de
titres de la presse d'information économique et politique, explique, au moins partiellement, la
servilité, la veulerie ou l'ignorance des journalistes, leurs propos lisses et ennuyeux, et, plus
généralement, leur promotion débridée, quoiqu'elle soit souvent involontaire, du relativisme et de
l'obscurantisme.
Le Canard Enchaîné, hebdomadaire satirique paraissant le mercredi ("hebdomadaire du mercredi
paraissant satirique", selon le bon mot de Jalons) qui n'a jamais accueilli de publicité, dispose d'une
trésorerie équivalente à trois années de chiffre d'affaire. Puisqu'il est admis que la publicité
représente environ le tiers des recettes d'un titre de presse, les hebdomadaires ou les quotidiens
concurrents devraient logiquement et toutes choses égales par ailleurs avoir en caisse quatre années
et demie de chiffre d'affaire. Il n'en est rien, de nombreux titres supports de publicité étant même
très largement et chroniquement déficitaires, souvent maintenus en vie par des subventions
publiques indirectes (soutien sectoriel et publicité d'organismes publics notamment) ou plus encore
directes. Ces subventions ne suffisent pas toujours et l'année 2012 a déjà vu disparaître des kiosques
les très illustres quotidiens France-Soir et La Tribune.
Cinq types de coûts qui sont mal ou ne sont pas comptabilisés
Les journaux ne comptabilisent probablement pas dans leurs coûts toute la part liée à la publicité.
En effet, chaque publicité occupe une surface de papier, nécessite de l'encre et des coûts
d'impression supplémentaires, représente une masse qu'il faut aussi transporter, implique de plus
vastes emplacements chez le libraire-déposant, un plus grand poids d'invendus à retourner et à
détruire ou stocker... Un à un, ces coûts sont négligeables et semblent se dissoudre dans les recettes
de la vente d'espaces publicitaires, mais une comptabilité rigoureuse impliquerait de bien les
imputer malgré tout.
La publicité exige également des caractéristiques physiques que le support adopte prioritairement
pour ses annonceurs et qui ne sont pas demandés par les clients lecteurs. Le Canard Enchaîné est
toujours imprimé en noir, auquel s'ajoute une touche de rouge pour la première et la dernière de
couverture. Et les lecteurs n'en demandent pas davantage car l'information qu'ils achètent n'en
demande pas davantage. J'ai sous la main quelques vieux numéros du Point. Après avoir multiplié
les cahiers publicitaires en couleur durant les années 70, ce n’est qu’au début des années 80 que
l’hebdomadaire affiche de tout premiers articles en quadrichromie. Année après année, celle-ci
déborde de la rubrique Civilisation pour toucher les rubriques Société puis Economie, Monde et
enfin Nation, et ce n’est qu’à partir du 16 janvier 1989 que les numéros passent entièrement à la
couleur. Pourquoi y a-t-il désormais des photos dans Le Monde ? Parce que la publicité les y a
amenées depuis fort longtemps. Impossible de tenir une ligne aussi stricte en ayant ici et là de
magnifiques photos en couleur de Peugeot ou d'Audi qui semblent bondir hors de la page.
La publicité entraîne aussi une dilution de la part rédactionnelle. Le Canard Enchaîné ne compte
que huit pages. S'il y figurait des publicités sur une ou deux pages, la direction se sentirait obligée
d'ajouter un ou deux cahiers supplémentaires portant le total de huit à douze ou seize pages. Il
faudrait donc diluer sur dix ou quatorze pages ce qui tient aujourd'hui sur huit. C'est comme ça que
quotidiens et hebdomadaires parviennent à compter des dizaines voire des centaines de pages, qui
bien souvent, de la première à la dernière, n'offrent pas le moindre intérêt et ne sont d'ailleurs pas
lues.
Il faut décompter bien sûr le coût de la régie publicitaire et de tous les efforts entrepris pour racoler
de nouveaux annonceurs. Cependant, l'honnêteté comptable exigerait d'y ajouter une bonne part des
salaires des dirigeants du titre, forcément plus élevés que la moyenne, en les extrayant des frais
généraux ; les dirigeants passant souvent beaucoup de temps à rechercher de nouveaux annonceurs,
à les séduire, à les conseiller, à renforcer les liens avec ceux qui annoncent déjà : déjeuners,
conventions, golfs, etc.
Enfin le maquettiste auquel on demande à la dernière seconde de retirer un encart ou d'en ajouter
deux, de transformer un quart de page en huitième, de faire passer une publicité du cahier central en
troisième de couverture ; ainsi que le journaliste auquel on demande de combler une surface laissée
en blanc ou de raccourcir son article ; tout cela représente un stress supplémentaire, et des coûts,
que Fluide Glacial ou Le Canard Enchaîné n'ont jamais à supporter.
Huit effets nocifs de la publicité sur la qualité d'un titre de presse
Lorsque vous offrez à vos annonceurs des emplacements préférentiels (quatrième, deuxième ou
troisième de couverture, double page centrale, etc.) inévitablement vous ne pouvez plus laisser à
vos éditorialistes ou à vos chroniqueurs que des emplacements non-préférentiels. Vous dévalorisez
donc le cœur de votre offre. Tandis que Fluide Glacial, plutôt que de mettre une publicité Heineken
ou 1664 en quatrième de couverture y place une planche soigneusement choisie pour faire rire ses
lecteurs (l'umour1 du magazine ne plaira pas à tous). De nombreux titres en arrivent même à
proposer leur une à leurs annonceurs, directement ou par le biais d'une "sur-couverture" (mais n'est-
ce pas alors plutôt la une qui se transforme en sous-couverture ?).
Un de vos lecteurs décide de passer l'heure qui vient à lire votre journal. Il s'installe dans le vieux
fauteuil du petit salon, rapproche le lampadaire, bourre une bonne bouffarde et l'allume. Il s'apprête
avec gourmandise à lire cet éditorialiste qu'il chérit. C'est le bonheur de sa semaine. Et là, hop, une
publicité vient le distraire et vous l'arracher, en lui rappelant qu'il pourrait aller s'avaler le plus grand
numéro qu'une bière puisse vous faire. Il n'est pas raisonnable de demander à votre client lecteur de
s'intéresser à votre produit, soit à son contenu éditorial, et en même temps de lui demander de s'en
désintéresser.
1 C'est, nous certifie Olivier, l'orthographe usitée dans ce mensuel pour ce mot. [NDLR — Jacqueline —]
Non seulement la publicité risque de distraire le lecteur concentré, mais elle fait même directement
concurrence au journal. Le publicitaire s'efforce de rendre son message le plus visible, le plus
séduisant, ou le plus choquant, le plus impactant possible. Que reste-t-il de vos mornes titres, de vos
misérables chapôs, de vos petits articles, quand juste à côté on ne s'interdit rien pour attirer
l'attention ? Je me permets donc de distinguer cette impression artificielle d'appauvrissement des
effets de distraction et de dévalorisation vus précédemment.
Un autre effet nocif sur la qualité découle de la décorrélation que la publicité introduit entre la
qualité des articles et les recettes d'un journal. Les deux progressent ou régressent souvent de pair.
Mais pas toujours : une crise économique brutale peut par exemple entraîner une croissance du
nombre d'exemplaires vendus et une chute des recettes publicitaires. Un journal peut donc améliorer
sa qualité éditoriale et voir croître ses déficits, ou être de plus en plus boudé par le public et gagner
de plus en plus d'argent. Un bon indicateur est toujours précieux et les faux thermomètres font les
mauvais diagnostics. Lier les recettes à la qualité de l'offre est une valeur sûre du commerce et pour
ça le mieux est de se passer de publicité. Je viens en creux de le reconnaître, cette décorrélation peut
aussi avoir un effet positif sur le contenu rédactionnel. Mais c'est souvent au prix d'entorses morales
supplémentaires. Je ne citerai pas de noms pour ne pas trahir de confidences, mais beaucoup de
magazines de la presse spécialisée ou professionnelle, dont le modèle économique repose trop
exclusivement sur la publicité, trichent éhontément sur leur diffusion réelle afin de faire monter le
prix des encarts. Largement plus de la moitié des exemplaires imprimés sont directement destinés
au pilon, les abonnés absents, le reste offert et rarement lu. Catastrophe écologique mensuelle, ce
processus vicieux fait produire, pour un club d'initiés, de beaux articles colorés et glacés, financés
par des mécènes ou plutôt des annonceurs trompés.
A l'instant même où un titre de presse accepte une publicité, il change de statut et confirme ce
changement en changeant de nom : il devient un "support". Les publicitaires (tribu étrange à
laquelle je confesse appartenir) dévalorisent aussi l'entreprise, qui devient "annonceur", et le client
transformé en "consommateur" (soit à peu près un tube digestif...). Un support a de fait moins de
valeur, il est plus lourd, comme son nouveau nom l'indique, moins pratique, et cet encart de huit
pages au milieu de votre magazine télé vous empêche d'avoir une vue synthétique de votre soirée du
mardi (arrachez-le !).
Un support est forcément moins crédible qu'un titre de presse indépendant, c'est-à-dire qui ne
dépend que de ses seuls lecteurs. Quand bien même la présence d'une publicité Carrefour n'aurait
absolument aucune influence sur le bien qu'en dit un journaliste quelques pages plus loin, le lecteur
ne pourrait s'empêcher de penser qu'il existe un lien entre les deux. La déconnexion, à supposer
qu'elle existe, ne prévient pas la suspicion.
Et la vérité est qu'il y a souvent un lien entre la publicité et le contenu rédactionnel. L'article
critique sera plus court, ou moins critique. Les éloges seront discrets mais néanmoins soutenus, ou
réitérés. Un journal économique se montrera ainsi très compréhensif envers les dirigeants d'une
entreprise qui annonce... ou qui pourrait annoncer. Inutile de se voiler la face, c'est précisément le
rôle, ou l'art, du rédacteur en chef de servir d'interface, et de laisser croire à ses équipes qu'elles sont
libres tout en prenant en compte les intérêts supérieurs du titre : « Ton article sur Carrefour, Coco, je
l'ai trouvé bêtement véhément ! Essaye aussi de compacter un peu ta prose, s'il te plaît ; on passera
peut-être ton papier dans le numéro de jeudi. Tu me reformates un peu tout ça et tu repasses me
voir ? » Il faut bien comprendre que du point de vue des annonceurs, ce commerce paraît tout à fait
normal. Au nom de quelle abnégation devraient-ils distribuer leur publicité selon d'autres critères ?
Quelques semaines avant la disparition des kiosques de La Tribune, à la suite d'un article jugé
déplaisant, EDF a décidé de supprimer toute publicité dans ce titre. Pour quelle extravagante raison
devrait-on s'attendre à ce qu'une entreprise nourrisse la bouche qui la mord ? Là où les choses vont
un peu loin bien sûr c'est que personne n'ignore l'amitié qui lie Pinault avec Chirac ou les liens qui
existent entre Pierre Bergé et la gauche. Qui escompte la publicité de Gucci, de La Redoute ou
d'Yves Saint-Laurent est un petit peu contraint d'aimer tout le monde...
Ça va tellement loin que sur ce thème j'en colle un paragraphe de plus. Wikipédia nous indique au
chapitre des sources du Canard Enchaîné : « [...] leurs collègues d'autres journaux, qui, quand il ne
peuvent publier leurs informations dans leur propre journal, peuvent les transmettre au Canard ».
Ce que Wikipédia ne nous dit pas, et que je tiens de journalistes qui l'ont vécu, c'est que souvent
c'est leur propre direction qui leur demande d'agir de la sorte. Je le redis en l'explicitant : pour avoir
le droit de parler d'un scandale susceptible d'agacer un annonceur ou ses amis gouvernants (ça
couvre donc une bonne partie du champ), les journalistes se font prier par leur propre direction de
faire passer d'abord l'info par Le Canard Enchaîné. Une fois le fait publié, le journal à la source de
l'info se sent enfin le droit de la reprendre, voire de continuer d'enquêter pour les plus opiniâtres. Le
scoop, qui paraît être la matière première de la presse, son Saint-Graal, est donc concédé à la
concurrence pour cause d'annonceurs fidèles en amitié, mais bougons ou ronchons dès qu'il s'agit de
raquer. Les journaux se ravalent d'eux-mêmes au niveau de "producteurs de contenus" comme ceux
qui alimentent industriellement tant de sites de l'Internet.
Des propos lisses et ennuyeux, qui n'intéressent personne et surtout pas le grand public. Les
journaux ne sont plus qu'une conversation entre dirigeants. Un petit cercle coopté qui se parle à
travers la presse, sans éclat de voix. A l'image de ces photos de jet-setters, "name dropés" dans les
pages cocktails à la fin des magazines. C'est ce crony capitalism, capitalisme de connivence ou de
copinage, dans toute sa splendeur. Cela aboutit à un journalisme non pas élitiste mais "élitien".
Elyséen même. Sur les 60 000 exemplaires encore distribués par La Tribune avant sa disparition des
kiosques, combien l'étaient entre l'avenue Niel et l'avenue de Breteuil à Paris ? Combien circulaient
dans les sièges des grandes entreprises, des ministères, des administrations ? Aucun intérêt ; et donc
une toute petite cible.
Où l'on voit que pour quatre raisons distinctes la publicité est d'essence diabolique
Pour un titre de presse, la publicité est d'essence diabolique. D'abord parce qu'elle est irrésistible. Si
une seule publicité peut "remplacer" plusieurs centaines ou plusieurs milliers de lecteurs, où puiser
la force de la refuser ? Mais justement, la publicité ne remplace jamais les lecteurs. Un lecteur n'est
pas qu'une recette comptable, c'est d'abord et c'est surtout la seule finalité d'un titre de presse. Un
lectorat se forge dans la patience et dans la durée, numéro après numéro, et même mot à mot,
abonné par abonné. Rien ne peut jamais remplacer ces lecteurs fidélisés par la qualité, le travail et la
rigueur. Car il n'est, en fin de compte, point de miracle ici, sinon peut-être celui de la vertu.
La publicité consiste à vendre ses lecteurs à ses annonceurs. Un nouveau lecteur arrive par un côté ;
il est aussitôt "revendu" de l'autre. La sagesse populaire nous enseigne qu'il ne faut pas courir deux
lièvres à la fois, au risque de n'en attraper aucun. Accueillir la publicité c'est plonger pour toujours
dans cette schizophrénie. On cherche des annonceurs pour trouver les moyens de séduire les
lecteurs ; ou on cherche des lecteurs pour attirer de nouveaux annonceurs. Au final, on n'a plus qu'à
se chercher soi-même.
Quand, à un habitant de Seine-Saint-Denis (le fameux autant que misérable "Neuf-trois", qui abrite
conjointement, comme un aboutissement révolutionnaire, notre royale nécropole et notre racaille
interlope) Apple vend un iPad, Apple en tire le même bénéfice exactement qu'en vendant un même
iPad à un habitant des beaux quartiers. Zéro différence. Pour un journal support de publicité, il n'en
va pas de même : il y a les clients dont on est fier, qu'on revendique, qu'on recherche, et ceux dont
on a honte, qu'on voudrait cacher et dont on préférerait presque se passer. Un journal veut être lu
par des "CSP+" (catégories socio-professionnelles supérieures) à fort pouvoir d'achat, afin de
séduire toutes les catégories d'annonceurs et particulièrement les plus prestigieux. Le Nouvel
Observateur, qui se revendique hebdomadaire de gauche (et qui ne fait pas que le revendiquer : qui
suinte le socialisme comme un sport collectif la sueur) fait circuler auprès des média-planning des
analyses discriminantes de son lectorat en insistant sur le nombre élevé de véhicules 4x4 qu'il
possède, ou de semaines aux Bahamas qu'il consomme. Si le petit peuple est mal informé, c'est
parce que les médias le fuient. Vu le contenu des médias, le petit peuple aurait tout lieu de s'en
réjouir. Etre respecté par Nintendo rend sans doute plus heureux que de consommer la presse
gauchiste.
Enfin, dernier principe diabolique : c'est la qualité qui s'ajuste au prix. Si un journal vaut trois euros
et que les recettes publicitaires permettent de le vendre moitié moins cher, soit un euro cinquante,
très rapidement le journal vaudra véritablement un euro cinquante. Car la direction, la rédaction, la
maquette, tout le monde s'ajustera et en donnera bien vite au client lecteur pour autant que le prix
qu'il y met. C'est bien normal : il faut lui faire cracher un euro cinquante ; on lui en donne donc pour
un euro cinquante. La quantité de papier sera peut-être double en effet, mais c'est alors la qualité
rédactionnelle qui sera divisée par quatre. Il n'y aura plus alors qu'à afficher quelques faux scandales
en couverture pour faire exploser les chiffres de vente, mais cette drogue fera comme de juste
descendre chaque jour plus bas le titre. Semaine après semaine, Le Canard Enchaîné s'efforce d'en
donner pour un euro et vingt centimes à ses lecteurs. Pour relever ce challenge, ses salariés sont
parmi les mieux payés de toute la presse française. Les meilleurs caricaturistes se bousculent pour y
coller leurs dessins, et les journalistes des autres journaux viennent y placer leurs scoops.
La pub c'est aussi fun et cool !
Il n'est pas question ici de faire le procès de la publicité. Que les entreprises puissent s'exprimer
librement, défendre leur travail et ajouter leur voix au concert de l'information est à n'en pas douter
une des caractéristiques les plus flagrantes des sociétés ouvertes. Il est souhaitable qu'elles puissent
trouver facilement des vecteurs populaires pour y médiatiser leurs offres ou leurs points de vue sur
le marché ou sur le monde, et la publicité est indiscutablement nécessaire au bon fonctionnement de
la concurrence2. Je n'appelle enfin, vous l'aurez compris, à aucune législation particulière pour
2 Il existe peu d'études économiques rigoureuses de la publicité, mais il serait injuste de ne pas citer l'excellent livre de
Robert B. Ekelund Jr et feu David S. Saurman : Advertising and the Market Process ; 1988 (trad. franç. par Guy
Millière : Publicité et Economie de Marché ; Ed. Litec ; Coll. Liberalia ; 1992). Leur étude, menée aux Etats-Unis
montre, entre autres :
- Que l'information est achetée avec le produit et que l'une et l'autre forment un ensemble indissociable.
- Que la publicité permet au consommateur de satisfaire ses désirs sans se fatiguer à rechercher l'information avec au
final une économie de temps.
- Qu'elle est un moyen d'information nécessaire au bon fonctionnement de la concurrence, qu'elle fait baisser les prix
(même en y intégrant la part consacrée à la publicité) et améliore la qualité des produits et des services.
- Qu'elle ne crée pas de fidélité à la marque (les secteurs les plus investis par la publicité étant ceux les clients se
montrent les plus versatiles).
Un des enseignements les plus intéressants de ce livre est en effet que contrairement à une idée reçue, la publicité
favorise les petits plutôt que les gros. Ce qu'on voit, bien sûr, c'est qu'un petit nombre de marque : Apple, Samsung,
Volkswagen, etc. semblent "monopoliser" la plus large part de l'espace publicitaire. Ce qui peut laisser l'impression que
de plus petites marques sont comparativement "sous l'éteignoir". Ce qu'on ne voit pas c'est que si moi, Olivier Méresse,
inconnu de tous, je m'offre un spot sur TF1 à 20h00, je vais faire un énorme bond en terme de notoriété puisque des
millions de téléspectateurs vont découvrir mon existence, ou celle de mon offre (et à moi de faire une offre
suffisamment intéressante pour qu'on s'y intéresse) la notoriété marginale de Volkswagen, pour un même espace
publicitaire, ne progresserait que de quelques personnes supplémentaires (des enfants trop jeunes pour conduire).
L'accusation selon laquelle la publicité favoriserait la concentration des marchés et fausserait la concurrence ne tient
donc pas. La publicité est au contraire un accélérateur de concurrence qui permet à une nouvelle offre d'atteindre
rapidement un point de notoriété à partir duquel elle pourra éventuellement, si elle rencontre son public, prendre son
envol commercial. Notons que la publicité est loin d'être le seul élément d'une séduction commerciale réussie. Elle n'en
est au contraire que le dernier étage. La stratégie générale suivie par l'entreprise, les innovations qui devraient en
émaner, et le design qui leur donne forme, sont tous trois largement plus décisifs. Seuls les produits qui se vendent tout
seuls se vendent mieux avec de la publicité.
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