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GEA - Euthanasie Page 3 sur 16
Les Pères de l’Église considéraient la souffrance comme un aspect essentiel de la sanctification.
Cette conviction, combinée à l’assurance de la souveraineté de Dieu et la confiance qu’Il fait
toute chose pour notre bien final, les a amenés à prêcher la persévérance dans les afflictions.
Ainsi, il n’y a aucun récit de suicide de malade chez les Pères de l’Église.
Dans le Nouveau Testament la santé du corps est associée au concept de réconciliation. La santé
du corps n’est pas un bien absolu, ni une fin en soi, même si les guérisons effectuées par le Christ
sont un sujet de réjouissance. La maladie est le signe d’un monde perturbé par le péché originel,
et les guérisons miraculeuses de Jésus font entrevoir l’accomplissement eschatologique dans
lequel le corps aussi bien que l’âme sera racheté. La santé est une bénédiction, quelque chose de
désirable, mais elle n’est pas indispensable au bien-être. La maladie n’est pas pour autant
imputable à un péché que le malade aurait commis.
La terminologie concernant la maladie et les dysfonctionnements physiques est vaste et peu
précise dans le Nouveau Testament et les écrits des Pères de l’Église. Il n’est donc pas possible
de faire des interprétations médicales de ces textes. Les récits de guérison ont une portée
théologique. Ils révèlent la nature des relations entre la personne malade et Dieu. Ces récits ne
peuvent pas être approchées d’un point de vue médical. Ce n’est pas la nature de la maladie, son
développement ou son traitement qui attirent l’attention, mais la maladie est envisagée comme un
événement significatif de l’histoire du patient dans la perspective générale du message du salut1.
Les évangélistes considéraient les miracles de Jésus comme des signes qui authentifiaient Jésus
comme Messie, tout en affirmant que le signe de Jonas était encore plus grand. Par ailleurs, si de
nombreuses guérisons ont été accomplies par Jésus et ses disciples, il y a aussi plusieurs cas de
non-exaucements dont le plus connu est la maladie de l’apôtre Paul, l’épine de sa chair.
L’idée que les souffrances individuelles sont le résultat de péchés individuels est une notion
rejetée par Jésus. Le péché est présent en arrière-fond des souffrances et des maladies, mais il est
impersonnel. Dans le Nouveau Testament, la maladie est surtout regardée en fonction de son but
et de sa signification, et non pas en raison de sa cause ou de son origine (par ex. Jean 9 :1-3, Jean
11 : 4).
Paul et les Pères de l’Église ont aussi beaucoup écrit au sujet des bénéfices spirituels potentiels de
la maladie (par ex. 2 Cor 12 :1-10).
Dans le christianisme primitif, même si l’âme était considérée comme plus importante que le
corps, il n’est pas affirmé que l’âme soit fondamentalement bonne et le corps fondamentalement
mauvais. Les textes de cette époque encouragent à prendre soin du corps, comme étant le temple
de Dieu. Pour le Pères de l’Eglise, il y a trois causes possibles pour les maladies, qui d’ailleurs ne
s’excluent pas : Dieu, les démons et les causes naturelles. Les soins dépendront de la cause
discernée. Ceux-ci seront alors soit la prière, soit le recours à la médecine ou encore l’exorcisme.
Le recours aux pratiques occultes est bien sûr interdit. Contrairement à la conception
prépondérante actuellement dans les milieux chrétiens selon laquelle toute guérison provient de
Dieu, les Pères de l’Église croyaient sans équivoque que Satan et les démons étaient capables de
guérir. Ils ne mettaient pas en doute l’efficacité des pratiques magiques.
Le recours à la médecine était admis pour un chrétien. Toutefois, le chrétien dépend de Dieu seul,
et non pas d’un élément de sa création, même parfaitement approprié. Dans leurs commentaires
sur le recours à la médecine, les Pères de l’Église se prononçaient sur un recours limité aux
médecins, car ils pensaient que les chrétiens doivent compter sur Dieu seul, qui peut choisir de
donner ou non la guérison.
1 H.Roux, « Sickness » in A companion to the Bible, ed. JJ von Allmen