Synthèse : développement industriel et technologique en

COMMISSION
II
DEVELOPPEMENT INDUSTRIEL
ET
TECHNOLOGIQUE EN MEDITERRANEE
Sous la direction de Abdelkader SID AHMED
Chercheur Orstom
SYNTHESE
DEVELOPPEMENT INDUSTRIEL
ET TECHNOLOGIQUE EN MEDITERRANEE
Par Abdelkader smAHMED
Les travaux de cette commission étaient axés sur les grands points suivants: les
acteurs du développement industriel et technologique et tout d'abord l'entreprise,
les politiques et les modèles de développement mises en œuvre, les enseignements
pouvant être tirés de certains modèles réussis pour les pays de la rive Sud de la
Méditerranée -et au-delà -sur les types de développement industriels possibles
en Méditerranée Occidentale.
Trois cas typiques étaient censés illustrer les trois types particuliers d'entreprise
en Méditerranée Occidentale:
le
cas marocain censé valoir pour tout le Maghreb
en ce qui concerne du moins les contraintes structurelles pesant sur les entreprises,
le
cas Baléo-Sardo-Corse censé valoir pour l'entreprise insulaire et le cas Nord-
Méditérannéen.
L'étude du professeur R. Amrani, met en évidence quelques caractéristiques
essentielles de l'entreprise marocaine. Ainsi la structure de leurcapital révèle t-elle
une prédominance du capital familial. La recherche d'une autonomie totale de
gestion de ses affaires amènerait ainsi l'entrepreneur marocain (y compris les plus
grands selon Amrani) arejeter ainsi les possibilités de croissance plus rapide à
travers l'apport de capitaux externes: le recours même limité àl'épargne externe
est rejetée ajoute-fil dans
le
souci de ne pas avoir àdivulguer l'information dont
l'entrepreneur marocain pense avoir l'exclusivité. D'où une forte opacité de l'envi-
ronnement du monde des affaires et qui n'encourage pas
le
développement de rela-
tives sereines entre l'entreprise marocaine et ses partenaires. Le professeur Arnrani
yvoit àla fois la cause et la conséquence du fonctionnement peu efficient de l'en-
treprise marocaine.
Un deuxième handicap àl'expansion de l'entreprise marocaine tient àl'environ-
nement et plus particulièrement au poids des lourdeurs bureaucratiques. Ainsi
Amrani note t-il, qu'en dépit d'importants efforts visant àrendre plus flexible et
plus rationnelle l'Administration marocaine (douanes, impôts, changes), les entre-
prises marocaines continuent de se plaindre des lenteurs, de l'inertie voir même de
l'incompétence de l'administration. Le système de formation professionnelle est
même remis en cause et au-delà la valeur des diplômes décernés. En sens inverse,
précisons également que l'administration reproche àl'entreprise marocaine son
peu de goût du risque, son peu de sens de l'organisation et surtout sa mentalité d'as-
sistée. Ces caractéristiques négatives de l'entreprise marocaine expliquent la réti-
cence du secteur bancaire àla considérer comme
un
véritable partenaire d'autant
qu'elle génère peu de projets viables.
Pourcompléterce modèle de l'entreprise marocaine, précisons que pourR. Arnrani
la coopération inter-entreprise est quasiment
un
leurre au Maroc. La concurrence
se faisant par les prix rarement par la qualité et par la diversification des produits
fabriqués au point paradoxal que les entreprises étrangères possèdent une meilleure
connaissance de l'état du marché que les entreprises marocaines qui yévoluent.
Enfin le fonctionnement très centralisé et la concentration du pouvoir au profit
d'une seule ou de quelques personnes dans la grande majorité des PMI marocaines
aboutit aussi àune rétention de l'information. Une confusion grave s'établit chez le
280
chefd'entreprise entre les tâches banales et les tâches stratégiques rendant ainsi ce
dernier sous informé des potentialités réelles de son affaire. D'où les conséquences
particulièrement négatives aussi bien pour la gestion comptable, que l'initiative, la
valorisation des ressources humaines ou la maintenance. Constatant donc que la
culture d'entreprise «dans les pays de la rive
Sud»
constitue une action
de
longue
haleine en direction
de
nombreux domaines (formation, information,administration,
système financier, etc.), Arnrani conclut que seul l'Etat est en mesure d'entreprendre
une tâche d'une telle envergure mais un Etat moins englué cependant dans des
tâches de gestion des unités de production tout en étant plus présent sans l'activité
économique.
Aux Baléares, en Sardaigne comme en Corse, François de Casabianca et Eric
Faucon observent également la prédominence des petites entreprises contrôlées
familialement ;les nombreuses difficultés qu'elles rencontrent les empêchent de
franchir les limites d'un univers régional elles sont par ailleurs efficacement
concurrencées par les entreprises extérieures. De ce fait les entreprises insulaires
ne
peuvent asseoir leurcroissance sur l'exportation alors qu'elles sont déjà
au
départ
handicapées par l'étroitesse
de
leurs marchés domestiques et leur faible efficacité
résultant de structures périmées. S'il existe bien àcôté de grandes entreprises
publiques, ces dernières sont très dépendantes.
de
l'extérieur et leur effet sur le tissu
local trop limité en raison d'une part, de la nature de leurs activités mais aussi du
fait que ces industries consistent souventen de simples délocalisations
de
la fonction
de production d'entreprises nationales ou étrangères. François de Casabienca et
E.
Faucon notent en outre que les politiques de développement promues -jusqu'ici
-par les Pouvoirs publics demeurent peu efficaces. Elles n'ont pas contribué à
aider la petite entreprise et les résultats obtenus contestables malgré l'importance
des moyens consentis. De ce fait, concluent-ils, le tissu industriel reste fragile,
accueillant des activités considérées ailleurs comme en déclin accentuant de la
sorte le caractère de zones périphérique des îles.
Al'inverse, dans son analyse du modèle italien, fort complexe, dans le scénario
méditerranéen et international, le professeur
A.
Perelli observe l'existence d'une
«vaste zone de PME
»,
très dynamiques, ycompris
au
niveau international «notam-
ment dans les secteurs
de
présence italienne traditionnelle sur le marché mondial
(textile, confection, chaussures, électroménagers, mobilier, agroalimentaires. Cette
zone de PME est àla fois couplée sur un tissu productifregroupant les secteurs les
plus dynamiques d'avant garde insérés dans la division internationale du travail
(automobile, mode, désign, image, microélectronique, etc.) et une «vaste région
d'économie informelle
»,
lieu
de
la production domestique, d'activités marginalisées,
de travail
au
noir, etc.
Le professeur Perelli note cependant que c'estla grande industrie qui fut le pivot
de la croissance réelle importante de l'économie et en premier lieu du dynamisme
italien àl'extérieur. Mais le processus d'internationalisation du secteur industriel
revêt encoreessentiellementla forme marchande ainsi qu'en témoigne non seulement
le nombre limite
de
multinationales italiennes mais également le taux très élevé de
281
concentration de l'activité de production àl'étranger. Et
A.
Perelli de conclure: «le
défi global» rend la vie dure aux firmes italiennes pénalisées par leurs dimensions
limitées, par leur manque de culture d'entreprise, et notamment précise-t'il dans le
secteur des nouvelles technologies, ce caractère encore fortement «marchand» de
la présence itaiienne sur les marchés mondiaux est reflétée également par la faible
participation des secteurs innovateurs aux activités d'exportations (10,7
%)
:le
secteur aintensité recherche-développement la plus élevée, serait celui présentant
le
solde négatif export-import le plus grand.
Surla base de ces éléments A. Perelli peut ainsi caractérisercomme suit le modèle
italien d'entreprise.
-Existence d'un petit nombre de groupes en mesure d'entrer dans la compétition
globale au moyen d'alliances stratégiques internationales. Cette insertion se fait
soit sur la base de positions mondiales déjà acquises, ou d'un dynamisme puissant
au plan de l'innovation technologique non stratégique (Fiat, Olivetti). Soit sur la
base d'un «mix de capacité d'organisation, de créativité toute italienne ou de dif-
férentiels salariaux (Benetton par exemple)
».
Soit enfin sur la base de capacités
d'intégration de «niveaux qualitatifs d'excellence àcoûts de production hautement
compétitifs (mode, image, textile, etc.).
-Existence d'un vaste secteur d'entreprises (généralement petites
et
moyennes)
en mesure de s'insérer sur le marché international échangeant la technologie contre
leurs positions de marché.
-Existenceenfind'un troisième secteur-celui des PMEenpleine mutation aujourd'hui.
Ces approches de l'entreprise ont suscité de vives discussions.
M.
Ben Mansour,
président de l'Association des entreprises algériennes publiques arappelé que l'on
ne fait pas d'industrie en l'absence d'idéologie.
II
rappelle également en précisant
qu'il vient d'un pays l'on avoulu,
et
J'on
veut toujours faire une industrie, une
grosse industrie, que dans la majorité
du
Tiers-Monde, ce sontles petites industries,
industries gadgets qui se sont développées. L'expérience marocaine doit donc être
resituée dans cecontexte et
si
elle rend compte du cas tunisien, ellediffère totalement
du cas algérien. Pour
M.
Ben Mansour la différence essentielle entre les deux cas
provient du fait qu'au Maroc on considère l'activité industrielle comme étant une
activié banale, allant de soi, sans contrainte aucune, alors que la position algérienne
peutêtre traduite par la position idéologique suivante: il faut vouloir s'industrialiser
pourdévelopper une activité industrielle. Plus concrètement selon
M.
Ben Mansour,
l'activité industrielle apour mission principale d'accélérer le processus d'accumu-
lation du capital et non une intégration immédiate au marché mondial et encore
moins la satisfaction des besoins immédiats de la société. Pour
M.
Ben Mansour
c'est cette absence d'idéologie d'industrialisation qui explique l'inexistence d'une
culture d'entreprise
au
Maroc. De façon générale pour
M.
Ben Mansour la grande
carence des trois pays du Maghreb se situe bien au niveau de cette faiblesse voir de
l'inexistence d'une culture d'entreprise.
Une différence essentielle importante entre l'entreprise maghrébine et l'entreprise
insulaire Baléo-Corso-Sarde, est le fait que la première ne bénéficie pas de l'assise
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