Travail, argent et religion : l’approche wébérienne de la religion
Charles Fleury 1
TRAVAIL, ARGENT ET RELIGION
L’APPROCHE WÉBÉRIENNE DE LA RELIGION1
1. INTRODUCTION
Lorsqu’on s’intéresse à l’histoire du développement économique du Québec et du Canada, on remarque
qu’un relation semble exister entre religion et économie. Par exemple, on note que, au niveau économique,
les Canadiens-français, presque exclusivement catholiques, ont accusé un certain « retard » par rapport à
leurs homologues protestants, les Canadiens-anglais, et ce, jusqu’au milieu du 20e siècle (Linteau, Durocher
et Robert, 1989). En fait, il semble que le maniement des capitaux ait davantage été l’affaire des Canadiens-
anglais protestants. Pour les francophones catholiques, le mode de vie paysan semble avoir été plus carac-
téristique. C’est d’ailleurs ce que laisse entendre Paul-André Linteau (1999) dans sa rétrospective du 20e
siècle paru dans l’ouvrage Québec 2000. De fait, celui-ci soutient que, en 1900, la population du Québec vit
encore majoritairement dans les régions rurales où elle s’active à l’agriculture et à la coupe forestière. Seule
une minorité œuvre, selon lui, dans les usines implantées en milieu urbain, lesquelles appartiennent surtout à
la communauté anglophone.
Par exemple, s’intéressant à l’économie Montréalaise, Linteau soutient que celle-ci est le royaume de la gran-
de bourgeoisie canadienne-anglaise, souvent d’origine écossaise. Certes, comme le souligne l’auteur, la
croissance de Montréal favorise tout de même l’essor d’une bourgeoisie canadienne-française, laquelle est
présente surtout dans le commerce du gros, la finance, la promotion foncière et certaines industries manu-
facturières. Qui plus est, une situation semblable s’observe également dans les autres régions du Québec.
« Partout, des entrepreneurs francophones sont à la tête de petites entreprises, d’envergure locale ou
régionale, s’appuyant sur la clientèle canadienne-française » (Ibid. : 99). Toutefois, pour Linteau, malgré
des progrès indéniables, leurs affaires restent modestes à côté de celles des grands entrepreneurs
anglophones : les banques francophones, par exemple, n’ont ensemble que 4,5% de l’actif total des banques à
1 Cette essai a été rédigé dans le cadre du séminaire de maîtrise « Concepts fondamentaux en sciences des religions » dispensé par
Denise Veillette au département de sociologie de l’Université Laval.