
PAUL-LAURENT ASSOUN 
propre position à l'endroit du politique
 :
 C'est le défi lancé dans sa conférence sur « la science et 
la vérité »
 :
 « Qui d'entre vous écrira un essai, digne de Lamennais, sur l'indifférence en matière 
de politique? (11) » C'est dans ce contexte qu'il évoque « l'agnosticisme politique de Freud » 
qu'il relate à l'ordre « capitaliste ». 
On remarquera le défi, lancé en 1965
 :
 c'est cela qu'il nous faudrait
 :
 une réécriture de 
YEssai sur l'indifférence en matière de religion de Lamennais dans l'ordre politique. On 
reconnaît la métaphore qui positionne la « matière politique » en ce lieu d'un traité imaginaire 
dont pourtant, faut-il comprendre, la psychanalyse pressent l'opportunité, sinon la nécessité. 
A défaut de relever le défi de Lacan, rappelons ce que le Traité de Lamennais comprenait 
pour voir s'esquisser, fût-ce comme mirage, YEssai sur
 Vindifférence
 en matière de politique, dont 
il passait commande. Manière de préciser cet « indifférentisme » prémédité qui serait l'envers 
du freudisme. Traité alors intempestif
 —
 les acteurs de mai 68 ne semblaient pas précisément 
indifférents en matière politique —, quoique dans l'après-coup, la signification de l'événement 
semble avoir mis à nu les profondeurs que pouvait prendre l'indifférence en la matière, 
mesurées par la désillusion, entendons le retour du réel. 
Qu'on ne s'y trompe pas: le but de Lamennais est de réfuter le système de
 l'indif-
férence (12). C'est donc un système d'apologétique, mais qui porte, moins que sur l'athéisme, 
sur cette croyance que l'athéisme accrédite — à entendre littéralement. L'indifférence, c'est 
cette foi athée qu'est la tolérance ou mieux le tolérantisme. 
Il y a trois systèmes d'indifférence (13)
 :
 celui qui réduit la religion à une fiction nécessaire 
au peuple (14) ; celui qui la réduit à une foi générale mais sans connaissance des modes du culte 
— c'est la religion naturelle (15) ; enfin, celui qui admet la révélation, mais laisse à la libre 
pensée le soin de l'interpréter — soit le protestantisme (16). 
Lacan donc nous recommande une critique de la position indifférentiste. La politique se 
soutient, faut-il comprendre, d'une foi qui se récuse, qui fait l'impasse sur l'Autre. 
Le machiavélisme — qui, remarquons-le, sert de métaphore au religieux chez Lamennais 
— se caractérise par cette position
 :
 peu me chaut la politique, elle est faite pour que l'Autre y 
croie, que le peuple se prenne pour lui-même. 
Le naturalisme positionne la politique comme ce Bien générique du politique en général
 : 
c'est, disons-le, l'humanisme. 
Le protestantisme enfin, c'est dans l'ordre politique l'idée que le texte prime l'autorité, que 
l'Église — entendons le Parti — est inutile. 
Aucune de ces positions n'est tenable
 :
 je ne peux pas croire « pour de rire », l'Autre me 
tient par la religion du peuple
 ;
 je ne peux me fier à une « religion naturelle », je dois être d'une 
certaine couleur; enfin, le Parti tient à l'entendement politique. On retrouve le syndrome 
freudien: un individualisme, un agnosticisme et au centre une «politique couleur chair». 
Celle-ci a fait son deuil, est-il besoin de le dire, de toute croyance apologétique en la consistance 
de l'Autre (17): il n'empêche qu'elle cherche à penser ce qui, dans le sujet, ne peut rester 
indifférent... à l'Autre. Freud invente en ce sens une forme inédite d'indifférentisme... 
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