Musée de Cluny : musée national du Moyen Âge - Dossier Orient / Occident - Textes généraux 2
L’Empire byzantin, l’Occident chrétien et le monde
islamique au Moyen Âge : Rivalités et échanges
Si l’Orient lointain constitue un véritable réservoir de l’imaginaire médiéval,
puisqu’on y situe à la fois le paradis terrestre, le royaume du prêtre Jean, les pays de
Gog et Magog, et toutes sortes d’êtres fabuleux comme les cynocéphales (voir le
tympan du portail central de l’église de la Madeleine à Vézelay), les relations entre
Orient et Occident au Moyen Âge se traduisent concrètement par un jeu à trois, dont
les protagonistes sont l’empire byzantin, l’Occident latin et chrétien, et, à partir du
VIIe siècle, le monde islamique. Ces relations, multiples et diversifiées, oscillent
constamment entre rivalités et échanges.
1- Un jeu à trois : Occident, Byzance, Islam :
1.1 La séparation entre Orient et Occident
L’Empire romain avait créé une civilisation commune autour du bassin
méditerranéen, aboutissement d’un long processus d’unification politique et
culturelle, civilisation d’ailleurs marquée par le prestige de la culture grecque. Les
tissus coptes et les ivoires paléochrétiens témoignent aujourd’hui de ce langage
commun. En 395, après l’épisode de la tétrarchie de Dioclétien et la fondation en 330
par Constantin de Constantinople, où il transfère la capitale impériale, l’empire
romain est divisé, à la mort de Théodose, entre l’Orient et l’Occident. Ce partage se
révèlera définitif. L’empire romain d’Orient, ou empire byzantin, survit jusqu’à la fin du
Moyen Âge, en tant qu’empire romain, héritier de l’ancienne Rome ; les Byzantins se
qualifiaient de « Romains » et Constantinople était considérée comme la Nouvelle
Rome. Empire romain, certes, mais de langue et de culture grecques – le grec
devient la langue officielle de l’empire sous Justinien (527-565) - et, à partir de 391,
de religion chrétienne. Le transfert définitif de l’Etat dans l’Orient hellénisé et la perte
progressive de l’Occident (malgré sa reconquête par Justinien), ainsi que la
christianisation de l’empire (quasiment achevée à la fin du Ve siècle), sont des
éléments déterminants pour la formation de l’empire byzantin.
Cet empire perdure tout au long du Moyen Âge, mais avec des fluctuations de
son étendue territoriale et surtout un amenuisement progressif, marqué surtout dans
un premier temps par la perte des possessions byzantines en Orient (Syrie-Palestine
en 638, Egypte en 641) et en Occident (Carthage et la Sicile conquises par les
Arabes en 697 et en 827, l’exarchat de Ravenne par les Lombards en 751), ensuite
par le démantèlement de l’Empire en 1204 lors du détournement de la 4e croisade.
Face à l’empire byzantin, l’empire romain d’Occident s’éteint dès 476, quand le
Skire Odoacre dépose Romulus Augustule, et laisse place à des royaumes
germaniques (appelés autrefois « barbares ») issus des grandes invasions (ou plutôt
des grandes migrations) – franc, ostrogoth, wisigoth, burgonde…- ; tout en étant les
fossoyeurs de l’empire romain d’Occident ces royaumes se considèrent les héritiers
de la romanité (Clovis reçoit les insignes consulaires). Parallèlement, tandis que les
royautés qui se consolident en Occident (franque, wisigothique) se christianisent par
la conversion de leurs rois païens (Clovis en 496-498 ou en 506-508) ou ariens
(Recarède en 587-589), et que le christianisme se diffuse peu à peu des villes vers