GEOGRAPHIE TES-L, THEME 2, Chapitre 3 L’Asie.
Etude de documents corrigée
Rappel de la consigne :
Montrez que ces deux documents permettent de présenter la concurrence régionale
Chine-Japon. Quels aspects de cette concurrence ne font-ils pas apparaître ?
Chine et Japon sont en concurrence au niveau de l’Asie. Le titre de l’ouvrage cité est
explicite : « Chine ou Japon, quel leader pour l’Asie ? » Chacun de ces deux Etats lutte pour sa suprématie
au niveau régional, d’autant plus que l’Asie devient le centre du monde. L’ouvrage universitaire de C.
Meyer est publié aux Presses de Sciences-Po en 2010. Il aborde à la fois les aspects géopolitiques et
géoéconomiques de cette concurrence. La carte est tirée de « La Chine et la nouvelle Asie », parue dans la
revue de géopolitique Questions internationales en 2011. Elle privilégie, surtout dans son titre, la
présentation géopolitique du continent asiatique. Les 2 documents sont de sources fiables car scientifiques.
Ces concurrences peuvent donc être abordées sur le plan géopolitique mais l’aspect économique
est également dominant. Les deux sont associés. Cette lutte pour l’hégémonie est ancienne et ne fait que se
poursuivre aujourd’hui.
A la lecture de la carte, on peut se demander si la Chine veut l’intégration économique ou marquer
sa suprématie régionale à travers l’ASEAN. L’intégration régionale est actuellement un enjeu majeur de
puissance. L’ASEAN (Association des Nations de l’Asie du Sud-Est) est une association d’abord à vocation
économique, même si les objectifs politiques n’en sont pas absents. Ce type d’union se réalise le plus
souvent au profit du partenaire le plus puissant (ainsi, les EUA au sein de l’ALENA). Les pays de l’ASEAN
sont une région vitale pour la Chine et le Japon qui y sont très présents : accords commerciaux, poids des
échanges, afin d’établir une zone de libre-échange. C’est la raison pour laquelle la Chine et le Japon, qui
sont déjà associés au sein de l’ASEAN +3 (avec la Corée du Sud), tentent d’y faire valoir des conceptions
opposées. La Chine tente de restaurer sa suprématie passée, ce qui inquiète ses partenaires. Le Japon, pour la
contrer, propose une solution qui diluerait son influence dans l’ASEAN +6 : les trois nouveaux entrants
(Inde, Australie et Nouvelle-Zélande) sont des démocraties, ce qui affaiblirait la position de la Chine, Etat
autoritaire communiste. C. Meyer explique dans le document 1 une partie de la carte du document 2.
L’objectif de cette concurrence économique est l’accès aux ressources et aux débouchés. Cette concurrence
est féroce dans tous les secteurs car ces deux pays sont des économies proches : Chine et Japon sont
respectivement la deuxième et troisième puissance économique mondiale, et le PIB chinois dépasse
aujourd’hui celui du Japon. Ces deux Etats ont aussi une grande dépendance en énergie et en matières
premières dont leur économie hautement industrialisées a grand besoin. C. Meyer explique aussi la
revendication de la Chine sur les îles Senkaku ou Okinotorishima en mer de Chine : elle vise d’abord des
ressources de pétrole offshore. La Chine sécurise d’ailleurs sa route du pétrole par un « collier de perles » :
bases navales en Asie du Sud le long de la route du pétrole vers le Golfe Persique (document 2).
La Chine entend redevenir une puissance majeure et exercer sa souveraineté sur l’ensemble de la
mer de Chine. Cette rivalité est ancienne (ce qui ne se voit pas sur les documents) et les conditions de
l’occupation de la Chine par les forces japonaises avant 1945 sont encore l’objet aujourd’hui de frictions
entre les deux pays. De plus, malgré sa défaite en 1945 et son occupation par les EUA (d’où la présence de
très nombreuses bases militaires US comme l’illustre la carte 2), le Japon a connu une période de Haute
Croissance, certes ralentie depuis les années 1990, mais qui permet au pays de s’appuyer sur une réelle
avance technologique : téléphonie, informatique, robotique, et des infrastructures performantes comme le
shinkansen… La montée en puissance récente de l’économie chinoise depuis les années 1990 a accru les
rivalités puisqu’il s’agit de 2 puissances exportatrices : la Chine a repris à son compte le modèle japonais
du « vol d’oies sauvages » qui a permis le développement économique spectaculaire de l’Asie. Elle tente
aujourd’hui de faire évoluer son image de « pays-atelier » mais a encore du mal à investir sur le long terme.
Un troisième aspect de leur concurrence n’est pas abordé dans les documents : il s’agit de la
concurrence culturelle. En effet, les deux puissances développent leur soft power afin de renforcer leur
influence mondiale.
Pour le Japon, c’est un moyen de maintenir son rayonnement malgré son faible poids politique
mondial (absence du Conseil de sécurité de l’ONU) et ses problèmes économiques persistants, non
évoqués dans les documents. Il dispose d’une influence culturelle traditionnelle de masse largement
répandue dans les PID et l’Asie : mangas, jeux vidéo, mode, cuisine, robots… Le Japon s’appuie aussi sur
l’aide aux pays en développement, autre levier d’influence. L’aide se concentre surtout dans les
infrastructures de transport : métro de Delhi en 2010, Oulan-Bator, ligne ferroviaire à Sumatra, voie-express
au Vietnam… qui illustrent le savoir-faire japonais. L’aide aux pays en développement intègre également
une vision à long terme, car il s’agit de « contribuer à la paix et au développement ». Cette orientation
permet au Japon de soutenir son modèle fondé sur l’exportation pour « aider le Japon à garantir sa propre
prospérité ». Traditionnellement, l’aide japonaise était surtout destinée aux pays voisins, mais elle se tourne
maintenant aussi vers l’Afrique, continent à fort potentiel (3
ème
donateur mondial sur ce continent).
La Chine privilégie la diffusion de la culture chinoise alors que sa puissance politico-économique
peut paraître angoissante pour une partie de l’opinion mondiale: son image est en effet négative dans les
démocraties occidentales à cause des délocalisations sauvages, du dumping social, du copiage des brevets,
de la dictature, des multiples atteintes à l’environnement… Ainsi, la Chine multiplie les instituts
Confucius afin de corriger son image internationale dégradée et elle s’appuie sur sa diaspora qui lui sert de
relais à l’étranger (popularisation du Nouvel An chinois). La Chine est aussi organisatrice d’événements à
portée internationale comme les JO en 2008, l’Exposition Universelle de Shanghai en 2010, mais aussi
grâce à une industrie cinématographique dynamique…
Les documents présentent donc l’essentiel des concurrences régionales Chine-Japon dans un
ensemble plus vaste encore. Cependant ils laissent de côté plusieurs aspects : l’aspect culturel de leur rivalité
mais aussi la complémentarité de leur économie. En réalité complémentarité et concurrence sont
indissociables.
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