Ce prix correspond au coût de dépollution. Dans l’approche libérale, le coût de dépollution marginal est optimal lorsqu’il est égal au
dommage marginal des riverains. Graphiquement, l’optimum de pollution se trouve au croisement de la droite de coût marginal et de
celle de dommage marginal. Il s’agit de minimiser la somme du dommage et du coût de la réduction de la pollution. Autrement dit, le
coût de la dépollution ne doit pas être trop élevé pour ne pas menacer l’existence de l’entreprise et, en même temps, celle-ci ne doit
pas trop polluer pour ne pas causer trop de dommages aux habitants. Ainsi, l’optimum de pollution n’implique pas l’absence totale de
pollution ! Il ne faut pas confondre internalisation des externalités et disparition de la dégradation environnementale.
3.2. Les différents outils de la politique environnementale
Les instruments réglementaires : Leur objectif est de contraindre le comportement sous peine de sanctions administratives ou
judiciaires. Ils prennent très souvent la forme de normes : (i) les normes d’émission qui définisse les seuils à ne pas dépasser ou à
respecter (ii) Les normes de qualité qui spécifie les caractéristiques des milieux récepteurs (niveau de bruit maximum, concentration
maximale de nitrates par litre d’eau…) (iii) Les normes technologiques qui imposent l’utilisation de techniques particulières (iv) Les
normes de produits qui caractérisent la composition obligatoire d’un produit (phosphates dans les lessives…)
Limite : Difficile de trouver la norme qui fixe l’optimum social car cela nécessite de connaitre niveau de pollution optimal et pour cela
la droite de coût marginal de dépollution dont le réglementeur a difficilement connaissance car elle relève de la compta privée (alors
qu’il peut connaître la droite de dommage marginal)
Les instruments économiques : leur objectif est d’inciter à adopter des comportements moins polluants grâce à un signal prix. On
peut distinguer les écotaxes, les marchés de permis négociables, Les subventions sur la dépollution ou plus généralement sur le coût
de dépollution (en France, les subventions couvrent 40 % des coûts d’investissement des stations d’épuration urbaine), les règles
juridiques de responsabilité qui oblige le pollueur à dédommager les victimes.
- L’écotaxe est une application du principe de la taxation pigouvienne. Dans un ouvrage de 1932, The economics of welfare, PIGOU
préconisait de taxer les entreprises jusqu’à ce que le niveau de taxe, fixé en fonction de l’optimum de pollution, soit égal au coût
marginal de dépollution des entreprises. Ainsi, plus le niveau de pollution d’une entreprise est élevé, plus le montant de la taxe est
important et inversement. Il en résulte un principe d’équimarginalité, c’est-à-dire que toutes les entreprises ont le même coût
marginal de dépollution. La taxe répartie ainsi efficacement l’effort de dépollution entre les firmes. La solution de Pigou revient à
donner le droit de propriété sur l’environnement aux pollués et la distribution des revenus entre les pollués et les pollueurs qui en
résultent est évidemment moins favorables pour les pollueurs que dans le cas de la norme.
Limite: idem que pour les normes ; BAUMOL et OATES ont montré qu’il était inefficace de compenser les pollués pour la pollution
optimale qu’ils subissent, en plus de taxer les pollueurs : cela n’inciterait par les riverains à prendre les mesures nécessaires contre
les effets de la pollution (The theory of environmental policy, 1988)
- la solution des marchés de permis négociables fait référence à la théorie de Ronald COASE émise dans un article de 1960 « The
problem of social cost », in Journal of Law and Economics : il s’oppose à PIGOU dans le fait que ce n’est nécessairement au pollueur
de payer pour la pollution dont il est responsable sinon il s’ensuit des coûts sociaux (réduction de la production, perte d’emploi
éventuel…) En fait il suggère qu’aucune institution n’est véritablement nécessaire pour parvenir à une allocation efficace des
ressources si les pollueurs et les pollués peuvent négocier directement entre eux. La répartition du profit total des participants
dépend alors du rapport de forces dans la procédure de négociation, mais l’allocation des ressources obtenues est toujours optimale
quelle que soit la répartition initiale des droits de propriété sur l’environnement. Par exemple, si des riverains ont droit à une eau
propre entre le niveau zéro déchet et l’optimum de pollution, l’entreprise a intérêt à obtenir l’accord des riverains pour déverser
des polluants en versant une compensation supérieure au dommage marginale subi par les pollués tout en s’assurant que le
paiement est inférieur au bénéfice marginal qu’elle retire de ses rejets. Un accord se fait quand la firme a un niveau de rejets qui
égalise son bénéfice marginal et le dommage marginal subi par le fermier. Dans ce cas, l’externalité est internalisée par le pollueur.
A l’inverse, si les riverains n’ont pas un droit de propriété sur une eau propre, ils doivent compenser l’entreprise tant que le prix
reste inférieur au dommage marginal. Et l’entreprise accepte n’importe quel prix supérieur au bénéfice marginal qu’elles tirent de
ces projets. Un accord a lieu quand le prix payé par le paysan égalise son dommage marginal et le bénéfice marginal de la firme.
Dans ce cas, l’externalité est internalisée par le paiement de la victime.
Limite : Absence de coûts de transaction, c’est-à-dire des coûts de coordination des agents (coût d’informations, de contrôle de la
pollution, de rédaction des contrats…) ; mais l’hypothèse ne se vérifie pas dans le monde réel.
Deux systèmes sont utilisés : (i) Système « Cap and Trade » : sur une zone géographique, le réglementeur définit un plafond
d’émission (le CAP) correspondant au maximum de pollution autorisée. La distribution se faire gratuitement selon une règle de
répartition, soit aux enchères.. première solution inéquitable car la distribution se fait proportionnellement aux émissions
passées.(ii) Système « Baseline and Credit » : Chaque firme se voit attribuer un niveau à partir duquel ses performances sont
mesurées. L’écart entre le niveau de pollution et le niveau fixé peut être acheté ou vendu.
Limite : (i) A Kyoto, le nombre de quotas distribués la première année du fonctionnement a été si peu nombreux que le prix du
permis a été quasi nul à la fin de l’année
1
. Cette situation n’est pas lié à l’instrument en lui-même, mais à l’influence des lobbies des
firmes auprès des états qui les ont poussés à fixer un plafond trop haut induisant un prix nul. (ii) problème moral lorsque les
entreprises ont un nombre de quotas équivalent à leur niveau de pollution.
Les instruments informationnels : l’objectif est d’inciter à adopter des comportements moins polluant par le biais d’un signal
informationnel. Ex : éco-labels
Les accords volontaires ou négociés : Il s’agit de dispositifs contractuels liant une autorité publique est une industrie, où l’industrie
s’engage à respecter des objectifs d’amélioration de l’environnement. L’accord se réalise au niveau de l’industrie qui répartit ensuite
les efforts. Des industries très polluantes comme celle du verre, des emballages, de l’aluminium ont signé de tels accords notamment
sur l’augmentation de l’efficacité énergétique ou la réduction des émissions de CO2.
Autres solutions : dans Governing the commons : the evolution of institutions for collective action (1990), Elinor OSTROM remet en
cause l'idée classique selon laquelle la propriété commune est mal gérée et doit être prise en main par les autorités publiques (pigou)
1
Le protocole de Kyoto a fixé un objectif de réduction des émissions mondiales de 5 % par rapport à 1990. L’union européenne s’est engagée à réduire de 8 %
entre 2008. Pour ce faire, l’union européenne a lancé en janvier 2005 un marché d’échange de quotas d’émissions de carbone. En 2005, les institutions
européennes ont émis 2,2 milliards de tonnes de CO2, soit 2,2 milliards de quotas ( un quota égal 1 t). Toutefois les émissions ont été inférieures de 44
millions de tonnes par rapport aux quotas fixés ( France et Allemagne ayant été les plus généreux avec leurs entreprises). Conséquence : le prix du quota qui
était de 8,5 euros le 3 janvier 2005 et qui avait atteint 31 € d’avril 2006 s’est effondré à 8,6 euros en mai 2006. Notons par ailleurs que le marché
européen actuel n’intègre pas l’industrie des transports (responsable de 25 % des émissions de gaz à effet de serre) ni celle du bâtiment prenant le
risque de ne pas pouvoir respecter les engagements de Kyoto.