L`effet De La Gestion Publique De La Rente Sur La Croissance

L’effet De La Gestion Publique De La Rente Sur La
Croissance Economique Hors Hydrocarbures En
Algerie
Dr. Aïssa MOUHOUBI
Département des sciences économiques
Université de Béjaïa
L’effet de la gestion publique de la rente sur la croissance économique hors hydrocarbures MOUHOUBI AISSA
2
Résumé
La rente représente un élément essentiel du mécanisme d'action de toute économie et
fait partie des composantes du revenu, qu'il soit public ou privé. Mais, le problème
réside dans la manière d'acquérir et de gérer ce type de revenu et de le dépenser au
service de la société et du progrès technique et scientifique.
Depuis son indépendance, l’Algérie jouit d’une rente d’origine pétrolière et gazière
importante. Son poids dans les principaux équilibres macroéconomiques (PIB, Budget
de l’Etat et balance commerciale) s’est alourdit après le premier boom pétrolier de 1973.
A partir de cette date, l’Etat algérien s’est donné la mission d’investir cette rente dans la
dynamisation de l’économie et l’amélioration du cadre de vie des algériens.
Après des décennies d’expérience de développement, l’économie demeure fortement
tributaire des prix pétroliers, sans qu’une agriculture ou une industrie hors
hydrocarbures ne puissent remplacer le rôle de la rente dans le financement de
l’économie. En effet, la part de la rente dans les exportations totales est supérieure à
98%. Dans le PIB et les recettes publiques, celle-ci est supérieure à 50%.
Si l’on observe l’évolution du PIB réel en Algérie, on pourrait remarquer une
augmentation sur le long terme. Cependant, la décortication de cette augmentation
montre que celle-ci est biaisée par les résultats positifs réalisés pendant les périodes de
booms des prix pétroliers. En effet, la croissance des secteurs hors hydrocarbures est
quasi-stagnante.
Mots-Clefs : Rente, PIB hors hydrocarbures, croissance, absorption interne,
investissement.
Abstract
The rent is an essential mechanism of action of any economy and is one of the
components of income, whether public or private. But the problem lies in how to
acquire and manage this type of income and spending in the service of society and
scientific and technical progress.
Since its independence, Algeria has an income from oil and gas major. Its weight in
major macroeconomic balances (GDP, government budget and trade balance) is heavier
after the first oil boom in 1973. From this date, the Algerian government is given the
mission to invest this cash in boosting the economy and improving the quality of life of
Algerians.
After decades of development experience, the economy remains highly dependent
on oil prices, without any agriculture or non-oil industry cannot replace the role of cash
in financing the economy. Indeed, the share of rent in total exports is higher than 98%.
In GDP and government revenue, it is more than 50%.
If we look at the evolution of real GDP in Algeria could notice an increase in the
long term. However, decortication of this increase shows that it is biased by the positive
results achieved during periods of oil price booms. Indeed, the growth of non-oil sectors
is almost stagnant.
Keywords: Rent, non-oil GDP, growth, internal absorption, investment.
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INTRODUCTION
Après l’indépendance de l’Algérie en 1962, le principal défi en face
duquel était l’Etat était l’investissement de la rente des hydrocarbures
dans des projets porteurs de valeur ajoutée. Ainsi, des plans de
développement se sont succédé depuis 1967 jusqu’au lendemain de la
crise des prix troliers de 1986. Après une quinzaine d’années de
marasmes économiques, les années deux mille sont moins d’une
nouvelle période de pléthore financière qui a permis à l’Etat de drainer la
rente des hydrocarbures vers des investissements qui devraient
promouvoir la production hors hydrocarbures, et sortir du cercle vicieux
de la dépendance rentière.
Ce papier se penche sur l’incidence de la gestion de la rente dans
l’économie algérienne depuis l’indépendance à nos jours. Avec le calcul
de quelques ratios, il tente, d’une part, de mesurer l’envergure de la
dépendance de l’économie algérienne vis-à-vis de la rente. D’autre part,
de sonder l’effet de la rente sur l’investissement et la production hors
hydrocarbures.
1. UN PETIT APERÇU SUPERFICIEL SUR L’ENVERGURE
DE LA DEPENDANCE PETROLIERE EN ALGERIE
Depuis le premier réajustement des prix de 1973, les hydrocarbures
ont dépassé la barre des 90% du total des exportations de biens et
services de la plupart des pays arabes exportateurs d’hydrocarbures. Du
coup, les revenus générés par ces exportations sont très substantiels pour
leurs économies, pouvant ainsi, mettre en œuvre une masse
d’investissements importante. Ils peuvent être utilisés dans l’importation
de biens d’équipement permettant d’accroître la productivité des facteurs
dans les secteurs hors hydrocarbures qui deviendront pas-à-pas une base
solide de développement.
Cependant, sur le plan pratique, « la croissance de l’économie serait
beaucoup plus rapide que si l’on ne disposait pas de ce surplus »
(Benabdallah, 1999 ; p. 123)
1
. Il est constatable que cette rente est au
service des pays consommateurs, voire même, un désavantage de
développement des pays qui extraient la richesse. En fait, les sommes
colossales payées à ces pays ne quittent, théoriquement, pas le sol des
pays consommateurs. Elles ne sont que transférées des comptes des
compagnies pétrolières aux grands marchés financiers, aux comptes des
1
Ahmed Zaki Yamani disait : « All in all. I wish we had discovered water ».
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pays exportateurs, et sont ensuite diffusés comme investissements de
portefeuilles dans les pays consommateurs (Sid Ahmed, 1980 ; pp. 210-
211).
En réalité, l’avantage qui doit être tiré de la rente des hydrocarbures
est l’étincelle qui sera donnée aux secteurs industriel et agricole tel qu’il
était stipulé par la charte nationale de l’Algérie : « Comme dans tous les
pays éprouvés par l’exploitation coloniale, les richesses minérales
constituent pour l’Algérie une source vitale pour se doter, dans
l’immédiat, d’une capacité d’accumulation, à l’échelle des besoins
exigés par les choix de son développement » (FLN, 1976 ; p. 124)
2
. Une
fois, les bases agricole et industrielle seraient installées, le secteur des
hydrocarbures pourra fournir de la matière première à des prix
compétitifs pour concurrencer les marchandises internationales sur les
marchés national et international (Mouhoubi, 2006).
Les hydrocarbures ne constituent pas, seulement, une source de
financement pour l’économie, mais peuvent être une source d’énergie et
de matières premières. Comme il est déjà noté, la mission traditionnelle
confiée à la rente des hydrocarbures est celle de doter l’économie d’une
base industrielle entrevue comme l’instrument matériel et objectif de
l’indépendance de l’économie nationale. Le schéma des industries
industrialisantes est la conséquence de cette politique, en Algérie. Il est
incité par la charte nationale (FLN, 1976 ; pp. 124-131) et initié depuis
les années soixante avec le premier plan triennal (1967-1969). En effet,
dans l’espace de sept années, les revenus pétroliers ont été multipliés par
20 ; ils passent de 1 milliards de dinars en 1967 à 20 milliards de dinars
en 1974. Cependant, la rente des hydrocarbures, ne pouvant pas alimenter
le démarrage brusque de l’opération d’industrialisation, avait eu comme
force synergique, l’endettement extérieur, rendu aisé par celle-ci
(Mouhoubi, 1983 ; p. 63).
Parallèlement, tout le monde est d’accord quant à la raison pour
laquelle les hydrocarbures sont extraits. Les hydrocarbures sont une
source d’énergie vitale pour le développement économique. Ils ont un
rendement thermique beaucoup plus supérieur à n’importe quelle autre
source d’énergie fossile pour la me quantité de coût de production.
Ceci n’est pas la seule raison qui les rend aussi convoités. A vrai dire, ils
se représentent comme une matière première pour l’industrie
pétrochimique, laquelle a conquis tous les domaines de l’industrie. D’où
2
Voir sur ce sujet, Temmar (1983).
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la création de deux genres de marchés pour la même commodité ; marc
des bruts et marché des produits. La demande de l’industrie mondiale, à
travers ces marchés, pour l’énergie et les matières premières est
galopante face à une offre qui se fait de plus en plus rare et chère. Cela
veut dire que le fait d’en disposer permet à un pays de ne pas l’importer,
d’économiser des devises et d’offrir à son économie un avantage absolu.
Pour corroborer cette affirmation, en général, les commodités
hydrocarbures peuvent représenter de 40 à 60% du coût total d’un produit
industriel, et parfois plus.
Pour le cas algérien on peut voir, à travers la loi 05-07 relative aux
hydrocarbures qui recommandait, avant son amendement, la
libéralisation des prix intérieurs de l’énergie. Le désavantage pour
l’industrie nationale qui souffre déjà de problèmes de gestion et de
financement, en lui infligeant un problème d’intrants devient plus
prononcé. En l’occurrence, pour Chevalier (1975 ; p. 135), « à l’intérieur
du pays le prix de l’énergie doit être fixé au niveau le plus bas pour que
le pays puisse néficier de tous les effets externes. On peut donc fixer le
prix de l’énergie à son coût de développement, qui représente le coût réel
de l’énergie pour le pays considéré ». Cependant, cela semble absurde,
car sinon, le prix infime de l’énergie perpétrera une très haute entropie.
La thèse défendue par Mékidèche (2000, pp.89-93) tient à ce que le
développement économique de l’Algérie qui passe, d’abord, par
l’industrie pétrochimique devra être rémupar des capitaux étrangers
incités par les atouts dont dispose le pays (matière première, position
géographique importante, infrastructure pour le lancement de projets
pétrochimiques). Ainsi, au lieu d’orienter les investissements étrangers
vers l’Amont de l’activité pétrolière, des mesures incitatives auraient pu
être prises en compte pour l’attraction de ces investissements au profit de
l’industrie pétrochimique. L’industrie, qui grâce à ses externalités, tous
les autres secteurs de l’économie s’épanouiront. Ce faisant, jusque-, la
dépendance de la rente des hydrocarbures ne cesse de se fortifier.
En effet, la rente, comme elle a été définie dans le premier chapitre de
cette présente thèse, est l’attente financière d’un propriétaire foncier à
obtenir de la part d’un exploitant de cette propriété. Sur la base des
travaux de Nankani (1979), Gelb (1988) et Auty (1993), l’indice de la
dépendance pétrolière est construit. Cet indice donne la moyenne de la
pénétration des revenus pétroliers dans les trois principales grandeurs
économiques d’un pays.
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