Chaussures et moyens de décharge pour les ulcères du pied diabétique : des
recommandations basées sur les preuves.
Document préparé par le groupe de travail sur le chaussage et la décharge de l’IWGDF.
Introduction
Méthodologie
Prévention des ulcères
Traitement des ulcères
Diminution de la pression plantaire
Autres considérations
Annexes
Addendum
Glossaire
Il existe une longue tradition dans l'utilisation clinique des chaussures et de techniques de
décharge pour la prévention et la guérison des ulcères plantaires chez le patient diabétique.
Cependant, la littérature et la recherche dans ce domaine ont pris du retard sur la pratique
clinique, ce qui conduit le clinicien à recommander des interventions fondées sur des avis et
l'expérience plutôt que sur des preuves publiées. L’origine des études scientifiques qui ont
donné un aperçu sur le rôle de la décharge plantaire chez le patient diabétique peut être
attribuée à l'article de référence de Bauman, Girlingand et Brandt, publié il y a près de 45
ans dans Journal of Bone and Joint Surgery1.Malheureusement, cet élan ne s'est pas
maintenu et un article récent de Maciejewski et al.² a souligné, par exemple, que les preuves
de l'utilisation de chaussures thérapeutiques pour prévenir la récidive des ulcères plantaires
n'étaient pas encore solides.
Ainsi, une revue systématique de la littérature actuelle est indispensable pour fournir une
interprétation des données et tirer des conclusions qui puissent être utilisées en pratique
clinique. Les recommandations présentées ici sont destinées à faciliter une telle prise de
décision en mettant à disposition un examen systématique de la littérature scientifique
disponible en mai 2006, dans le domaine du chaussage et de la décharge.
Comme base de ses délibérations, le comité de scientifiques et de cliniciens qui ont généré
les recommandations présentes s'est appuyé sur l'expérience et l'expertise des groupes de
consensus antérieurs du Groupe de Travail International sur le Pied Diabétique. En outre
(comme il est décrit ci-dessous), un certain nombre de nouvelles approches ont été
intégrées, telles que l'utilisation de la relation Patient-Intervention-Comparaison-Résultat
Patient-Intervention-Comparison-Outcome, PICO) et le Réseau Ecossais Intercollégial de
Recommandations (Scottish Intercollegiate Guidelines Network, SIGN) instrument destiné à
l'évaluation de la qualité. Tout notre travail a été basé sur les preuves à l'appui de chaque
article qui a été classé en fonction de la force de ces preuves. Les appréciations ont été
rendues au vu de la possibilité de généralisation, l'applicabilité et l'impact clinique de la
preuve. Alors qu'un grand nombre de connaissances a été acquis à partir d'études sur des
sujets non diabétiques, seules les études dont la population cible étaient des patients
diabétiques ont été inclues. Comme on pouvait s'y attendre, certains travaux publiés par des
membres du comité ont été considérés dans la revue et des lignes directrices strictes ont é
mises en œuvre pour se prémunir contre les conflits d'intérêts.
Les interventions qui sont considérées dans cette étude couvrent tout le spectre des
techniques habituellement utilisées dans le monde entier dans la pratique clinique. Cela
comprend l'utilisation de chaussures classiques et thérapeutiques, des semelles et de leurs
modifications, des différentes techniques de plâtrage, de la mousse feutrée, des
chaussettes, ainsi que des dispositifs pour la marche amovibles et non amovibles. Les
approches chirurgicales de décharge ont également été examinées aussi bien que les
approches traditionnelles telles que le repos au lit, aides à la marche (béquilles, ….) et les
fauteuils roulants.
Le comité a pris grand soin de formuler des recommandations qui puissent être mises en
œuvre quelles que soient les installations disponibles et l'emplacement géographique où le
patient est traité. Alors que des techniques de pointe sont en cours de développement pour
des interventions individualisées, celles-ci dépendent souvent de l'accès à la technologie qui
est disponible uniquement dans les régions les plus aisées.
C’est notre espoir que ces lignes directrices s'avéreront immédiatement utiles dans la prise
en charge clinique des patients atteints de problèmes du pied diabétique. En outre, nous
espérons qu'elles seront les fondations sur laquelle les futures recommandations pourront
être bâties avec le développement de la littérature.
Méthodologie
Introduction
Ces recommandations fondées sur les preuves ont été développées par un groupe
multidisciplinaire de cliniciens et de scientifiques travaillant dans le domaine de la décharge
et de la chaussure pour le pied diabétique. A l'invitation du comité éditorial de l’IWGDF
(International Working Group on the Diabetic Foot, Groupe International de Travail sur le
Pied Diabétique), le groupe de travail de l'IWGDF sur les chaussures et la décharge a tenu
quatre week-end de réunions entre Octobre 2005 et Mai 2007 pour sélectionner les
interventions intéressantes, discuter de la méthodologie, de la recherche de documents et
du classement, procéder à l'évaluation méthodologique de la littérature, s'accorder sur les
résultats, et écrire les recommandations, qui ont été approuvées par le comiéditorial de
l’IWGDF.
Caractéristiques clés
Les patients diabétiques constituent la population concernée par ces recommandations. Le
problème clinique était l'ulcère plantaire. Les recommandations ont éorganisées autour
des thèmes principaux suivants:
Prévention de l’ulcération
Cicatrisation de l’ulcération
Réduction de la pression plantaire
Interventions
Les recommandations se sont concentrées sur les interventions dans le contexte des sujets
mentionnés ci-dessus. Certaines interventions ont été classées en quatre sous-catégories :
1. Techniques de plâtrage
a. Bottes à contact total (Total contact cast, TCC)
b. Chaussures en plâtre
2. Techniques relatives aux chaussures
a. Chaussures
b. Semelles
c. Orthèses (dans la chaussure)
d. Chaussettes/capitonnage
3. Techniques chirurgicales
a. Allongement du tendon d’Achille (ATA)
b. Injections de silicone/rembourrage tissulaire
c. Débridement des cals
d. Résection des têtes métatarsiennes (TMT)
e. Ostéotomie/Arthroplastie/Ostéotomie/Exostectomie
f. Fixation externe
4. Autres techniques
a. Repos au lit
b. Béquilles/Canne/Chaise roulante
c. Appareillage (support sous rotulien, orthèse cheville-pied)
d. Dispositifs de marche
e. Pansement de décharge
f. Mousse feutrée/capitonnage
g. Tampons
Pour chaque critère, une question a été posée par catégorie d'intervention dans le format
général suivant (PICO) : "Y a-t-il une preuve de l'efficacité de [CATEGORIE INTERVENTION]
dans [CRITERE] chez les patients atteints de diabète sucré ? "
Revue systématique de la littérature
La base de données pour ces recommandations a été compilée en faisant une revue
systématique de la littérature scientifique utilisant une stratégie de recherche explicite et un
protocole d'évaluation conçu par le groupe de travail. Le format général de cette procédure
est décrit dans la section générale des méthodes.
Stratégie de recherche
La recherche d'articles appropriés a été axée uniquement sur les patients diabétiques ; les
études sur des sujets sains ou des patients atteints d'autres maladies n’ont pas été prises en
compte. La recherche a couvert les références dans toutes les langues et n'a pas été limitée
par les dates. La recherche a été réalisée le 1e mai 2006. Seules les recherches originale sont
été retenues; les revues, comptes rendus de conférence, résumés et livres n'ont pas été pris
en compte. Le type d’études qui ont été inclues étaient : les essais randomisés contrôlés
(ERC), les études cas-témoins, les études de cohorte et les études contrôlées avant et après
(CBA, control before-and-after), les séries chronologiques interrompues (ITS, interrupted
time series), les études prospectives et rétrospectives non contrôlées, les études
transversales, les séries de cas et les études de cas. Le "traquage" bibliographique à partir
des références des articles analysés n’a pas été réalisé. Les revues systématiques et revues
Cochrane sur le thème du chaussage et de la décharge du pied diabétique ont été
recherchées pour déterminer la nécessité d'une recherche documentaire extensive séparée.
Seule une revue Cochrane 3 a été identifiée. Nous avons donc décidé qu’une recherche plus
extensive des études les plus récentes était nécessaire. Les bases de données examinées ont
été Medline, Embase, Cinahl, la base de données Cochrane sur les revues systématiques, le
registre central Cochrane des essais contrôlés, DARE, NHS EED, et HTA Database. Les chaînes
de recherche ont été créées pour chaque base de données. Il s'agissait de quatre niveaux de
catégories: le patient, la conception de l’étude, les résultats et l'intervention. Les chaînes de
recherche pour chaque catégorie d'intervention peuvent être trouvées dans l’Annexe A.
Evaluation de la littérature
La recherche dans les bases de données a conduit à un total de 1 639 références uniques
(après exclusion des doublons entre les bases de données et entre les sous-catégories).
L’évaluation de ces 1639 références a été réalisée en trois étapes :
Etape1: Un examinateur a été affecté à chacune des 4 sous-catégories d'intervention
et a évalué les références selon le titre et le résumé pour déterminer lligibilité
possible sur trois des quatre critères mentionnés ci-dessus (le patient, les résultats, et
l'intervention). Cette première série d'évaluations a entraîné la sélection de 212
articles potentiellement admissibles.
Etape 2 : Des documents papier complets des 212 articles ont été obtenus. Chaque
article a été réévalué indépendamment par deux examinateurs sur les quatre critères
ci-dessus (y compris la conception de l'étude) pour juger de son éligibilité définitive
en utilisant un simple formulaire : inclusion ou exclusion. Les résultats ont é
discutés entre les co-examinateurs et une décision finale concernant l'inclusion et
l'exclusion a été prise. Ce tour d'évaluation a conduit à conserver 135 articles.
Etape 3 : Les 21 articles concernant soit des ERC, CBA, études de cohorte, étude cas-
témoins, ITS ont été évalués pour leur qualité méthodologique (possibilité de biais)
par au moins deux examinateurs indépendants, au moyen de listes de score standard
basées sur la méthode du Centre Cochrane Hollandais (www.cochrane.nl). Durant
tout le processus, les examinateurs n'ont pas été autorisés à évaluer leurs propres
articles ou à écrire au sujet de ceux-ci, pour éviter tout conflit d’intérêt. Les données
sur les caractéristiques de l'étude, la population des patients, l'intervention et les
résultats ont é recueillies, en utilisant des feuilles d'extraction de données
standard. Les résultats ont été discutés entre les co-examinateurs et une décision
finale a été prise sur la qualité méthodologique. Les items de qualité ont été classés
comme "fait", "pas fait", ou "non reporté". Seule la mention "fait" majorait la note de
qualitotale. Les données extraites ont érésumées dans des tableaux de preuves.
(Annexe B).
Des conclusions ont été tirées et des recommandations ont été faites sur la base de la force
des preuves disponibles dans ces tableaux. Ces tableaux ont été examinés en détail par le
groupe de travail. Le classement des preuves de chaque article a été basé sur la conception
des études et le score total de qualiméthodologique en utilisant plusieurs éléments. Les
recommandations du SIGN ont été utilisées à cette fin.
La possibilité de biais a été scorée différemment pour chaque conception d'étude en
utilisant le système suivant:
ERC (9 items): score 1-4 (-), score 5-7 (+), score 8-9 (++)
Cohorte (8 items): score 1-3 (-), score 4-6 (+), score 7-8 (++)
CBA et études cas-témoin (7 items): score 1-3 (-), score 4-5 (+), score 6-7 (++)
ITS (5 items): score 1-2 (-), score 3-4 (+), score 5 (++)
Rédaction des recommandations et revue par des pairs
Après avoir discuté du contenu des recommandations, les deux mêmes personnes qui
avaient examiné ensemble la qualité méthodologique de chaque sous-catégorie
d’intervention ont écrit la section correspondante des recommandations, excepté, comme
indiqué ci-dessus, quand il y avait un conflit d'intérêts.
Un premier projet de recommandations a été revu au sein du groupe de travail. Après
approbation interne par tous les membres du groupe de travail, les versions ont été
examinées par le comité de rédaction de l’IWGDF et les 80 membres de l’IWGDF. La version
finale des recommandations a été présentée par le groupe de travail à tous les membres de
l’IWGDF lors d’une réunion internationale le 8 mai 2007 à Noordwijkerhout(Pays-Bas).
Prévention d’ulcère
Introduction
La question PICO pour la prévention des ulcères était la suivante : "Existe-t-il une preuve de
l'efficacité du CHAUSSAGE, de la DÉCHARGE CHIRURGICALE ET/OU D’AUTRES
INTERVENTIONS DE DÉCHARGE pour prévenir l'ulcération du pied chez les patients
diabétiques ?"
Nous n'avons pas considéré les techniques de plâtrage dans le contexte de la prévention des
ulcères.
Chaussage
L'effet des chaussures pour la prévention de l'ulcération est supposée reposer sur la
présence d'une semelle intérieure moulée placée dans une chaussure ou une sandale et sur
d'autres interventions individualisées (tels que les soutiens et barres métatarsiennes). Ce
moulage et ces interventions peuvent soulager la pression par accommodation ou par
transfert de charge à d'autres zones du pied. Aucune étude dans la littérature n’a été
trouvée se rapportant à la prévention primaire de l'ulcération plantaire. Cependant,
plusieurs études de niveau 1 et 2 ont évalué les effets des chaussures sur la récidive de
l'ulcère (prévention secondaire).
Un ERC de grande taille, par Reiber et al.4 (qualité 1-), sur une période de deux ans, n'a
trouvé aucune différence significative dans le nombre d'apparition d'ulcère ou la proportion
de personnes souffrant d'ulcères, entre ceux portant leurs chaussures et ceux portant les
chaussures thérapeutiques. Dans cette étude, l’ulcère était mal défini ; plusieurs ulcères
auraient pu se produire chez une seule personne. Le taux de ré-ulcération était faible dans
tous les groupes étudiés et de nombreux patients ne souffraient pas de neuropathie. Un ERC
beaucoup plus petit par Uccioli et al.5 (qualité 1-) a trouvé une différence significative dans la
proportion de personnes souffrant d'ulcères sur une période de 1 an entre le groupe portant
une chaussure thérapeutique et le groupe portant ses propres chaussures. Dans ces deux
études, les pressions plantaires et l'usage des chaussures (observance du traitement) n'ont
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