26 PEOPLESPHERE N0156. OCTOBRE 2011
RH à mobiliser pour soutenir cette réponse
de l’organisation. Ce travail, fastidieux,
débouche, par regroupements et après
avoir intégré les éléments de stratégie de
l’organisation, sur l’identification d’une
série de politiques RH clé que l’entreprise
doit mettre en place et qui créeront un
maximum de valeur, pour les parties
prenantes considérées. Et, donc, y compris
pour les collaborateurs, les associations de
travailleurs, les groupes de pression, les
partenaires, etc. pris en considération. »
Il n’y a donc pas de boîte à outils « toute faite »…
Laurent Taskin: « Certainement pas. Pour le
dire autrement, je peux faire de la GRRH, sans
avoir de politique de gestion de la diversité ou
du bien-être au travail, mais en plaçant au cœur
de mes politiques de formation, de partage
des connaissances, de gestion de carrières ou
de sélection, les dimensions de justice sociale
et d’équité – ma politique RH est-elle ‘juste’?
Et c’est ici que le DRH doit arriver à affirmer ce
qui est juste ou pas et au regard de quoi; c’est
ici que le responsable RH n’est pas seulement
le développeur de politiques et pratiques RH
sophistiquées et techniciennes: il est un leader,
capable d’affirmer un principe de justice et de
faire un choix éminemment politique: ‘Nous
ne nous inscrirons pas dans tel ou tel projet,
car cela ne répond pas à notre vision de la
société, ou cela introduit de l’inéquité dans le
traitement de nos collaborateurs’. »
Brigitte Hudlot: « Il n’y a jamais de boîte
à outils toute faite. Mais il existe différents
champs sur lesquels les RH ont une carte à jouer.
Tout d’abord, ils peuvent intervenir en tant que
caisse de résonnance de ce qui se passe dans
et à l’extérieur de l’entreprise. Les managers
évoluent souvent le nez sur le guidon et ont peu
l’occasion d’en prendre la mesure. Il y a donc un
rôle d’alerte à exercer par rapport aux attentes
des gens. D’autre part, les RH sont ceux qui
ont le plus l’habitude d’entretenir un dialogue
avec une des parties prenantes – et non des
moindres –: les syndicats, idéalement en
dépassant la confrontation pour s’inscrire dans
une logique de partenariat. Cette compétence
du dialogue et cet état d’esprit peuvent être
utilisés et transférés vers d’autres personnes
dans l’entreprise pour dialoguer avec d’autres
acteurs comme les ONG, les collectifs de
voisinage, les académiques, etc. Autre exemple:
s’inscrire dans la voie du développement
durable va exiger de recruter et de développer
d’autres profils, avec d’autres compétences,
mobilisant d’autres comportements. Les RH
doivent donc pouvoir identifier les nouveaux
besoins des départements en la matière et
veiller à y répondre. »
Francis Karolewicz: « S’il n’y a pas de recette
toute faite, il y a bien un ingrédient essentiel:
les individus agissent là où ils sont évalués. Si
l’on veut modifier les modèles d’entreprise, il
faut changer les modèles d’évaluation. On
peut dire qu’il s’agit d’un levier où les RH
sont en première ligne, même si énormément
dépend du positionnement que leur donne
la direction générale et du charisme qu’ils
ont. Le problème, c’est que beaucoup
restent dans un rôle de pompier, alors que
de tels chantiers demandent beaucoup de
leadership. Ce qui va développer la légitimité
du DRH, c’est justement sa capacité à prendre
de la hauteur, à passer à de nouveaux
modèles, à être porteur de sens, à ouvrir de
nouveaux chemins porteur d’espoir. »
CHRISTOPHE LO GIUDICE
Dossier / Balises
Laurent Taskin:
« Le responsable RH n’est pas seulement le déve-
loppeur de politiques et pratiques RH sophisti-
quées et techniciennes: il est un leader, capable
d’affirmer un principe de justice et de poser des
choix éminemment politiques. »
Brigitte Hudlot:
« L’enjeu n’est pas que les RH sortent du volet
‘people’ pour toucher à l’environnemental, par
exemple, mais bien qu’ils interviennent partout où
ils le peuvent pour que la préoccupation du déve-
loppement durable percole dans l’organisation. »
Dans le livre RH et développement durable, Bernard Calisti
et Francis Karolewicz proposent une vision d’une autre GRH
et livrent des méthodes et outils pour finaliser une poli-
tique de ressources humaines durables. Aux Editions d’Or-
ganisation, Paris, 2005, ISBN 2-7081-3334-9, 240 pages.
Plus d’informations: www.drhd.fr.
Laurent Taskin et Matthieu de Nanteuil, appuyés par un large
panel de contributeurs, publient ce mois-ci Perspectives cri-
tiques en management – Pour une gestion citoyenne, un véri-
table plaidoyer en faveur d’une éthique de responsabilité.
Aux Editions De Boeck, Louvain-la-Neuve, ISBN 978-2-8041-
6484-3, 275 pages.
Perspectives critiques
en management
Préface de
Hugh WILLMOTT
Pour une gestion citoyenne
Sous la direction de
Laurent TASKIN et Matthieu de NANTEUIL
MANAGEMENT