La perception du risque nutritionnel par le consommateur. Synthèse de la littérature et résultats d’une étude qualitative Marie-Eve Laporte * Doctorante, Chaire Marques & Valeurs IAE de Paris, Université Paris I Panthéon Sorbonne * 21 rue Broca - 75005 Paris ; [email protected] Remerciements : l’auteur tient à remercier l’équipe de la Chaire Marques & Valeurs de l’IAE de Paris pour les échanges fructueux qui ont fait progresser cette recherche. L’auteur remercie également les relecteurs anonymes de l’AFM, qui par leurs remarques ont permis d’améliorer le papier. La perception du risque nutritionnel par le consommateur. Synthèse de la littérature et résultats d’une étude qualitative. Résumé en français de 100 mots au maximum : De nombreuses marques alimentaires recourent au « marketing nutritionnel » pour promouvoir leurs produits en tentant de diminuer la perception du risque nutritionnel (PRN). Cependant, on peut s’interroger sur l’efficacité d’une telle pratique, en termes managériaux et de santé publique. Cet article explore les facteurs explicatifs de la PRN à travers une revue de la littérature et une étude qualitative. Cette dernière révèle trois variables, chacune rattachée à un sous-ensemble différent. La naturalité – relative au produit – et la commensalité – liée à la situation de consommation – semblent diminuer la PRN, alors que l’hyperchoix – tenant aux pratiques de consommation – semble l’augmenter. Mots-clés : Comportement du consommateur, alimentation, risque nutritionnel, marketing nutritionnel Consumer perception of nutritional risk. Literature review and qualitative study. Abstract : Many food brands rely on “nutritional marketing” to promote their products while attempting to decrease perception of nutritional risk (PNR). However, such practices are questionable, in terms of managerial efficiency and health policy. This article explores the explanatory factors of PNR through a literature review and a qualitative study. The latter unveils three variables, each of which attached to a different subgroup. Naturality – relating to the product –, and commensality – linked with the consumption context – seem to decrease PNR, whereas hyperchoice – concerning consumption practices – seems to increase it. Key-words: Consumer behavior, food consumption, nutritional risk, nutritional marketing La perception du risque nutritionnel par le consommateur. Synthèse de la littérature et résultats d’une étude qualitative. Introduction La nutrition compte parmi les priorités des pouvoirs publics en raison du coût humain et économique croissant des maladies chroniques associées, première cause de mortalité dans le monde1. Ainsi, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) dresse une liste des « principales maladies nutritionnelles »2. Si certaines sont « clairement d'origine nutritionnelle, pour d'autres, la nutrition contribue à leur étiologie3 ou à leur traitement; enfin, pour certaines, la relation est soupçonnée mais non prouvée ». Or, l’industrie agroalimentaire est directement accusée de contribuer au développement de ces maladies, en particulier de l’obésité (Brée, 2010). Pour l’OMS, la promotion intensive de nourritures denses en calories et le développement des fast-foods sont des facteurs explicatifs probables du surpoids y compris dans les pays en voie de développement (Witkowski, 2007). Les minorités et les populations précaires, à savoir les plus exposées au marketing de produits alimentaires de faible qualité nutritionnelle, sont aussi les plus touchées par l’obésité (Schor et Ford, 2007). L’obésité des enfants s’accroît parallèlement au développement du marketing alimentaire qui les cible spécifiquement (Brée, 2010 ; Moore et Rideout, 2007). En réaction à ces graves accusations, les marques alimentaires ont développé un marketing dit « nutritionnel », consistant à mettre l’accent sur les bénéfices de leurs produits pour la santé, en communiquant leur positionnement notamment via des allégations. Ce « marketing nutritionnel », comme il est nommé en entreprise, a connu un large essor ces vingt dernières 60% des décès leur sont imputables d’après le rapport d’experts de la FAO et de l’OMS de 2003, « Régime alimentaire, nutrition et prévention des maladies chroniques », http://whqlibdoc.who.int/trs/WHO_TRS_916_fre.pdf. Lien consulté le 31/10/2012. 2 « Athérome et coronaropathies ; obésité ; hypertension ; diabète ; cancer ; ostéoporose ; autres » dans le rapport de la FAO de 2001 sur « la nutrition dans les pays en voie de développement », http://www.fao.org/docrep/004/W0073F/w0073f24.htm. Lien consulté le 31/10/2012. 3 « Étude des causes des maladies » (www.larousse.fr) 1 3 années4. Grâce à lui, les marques espèrent se présenter sous un angle vertueux, soucieux des pratiques alimentaires de leurs consommateurs. C’est compter sans les effets pervers du marketing nutritionnel. Il fausse la Perception du Risque Nutritionnel du consommateur (Chandon et Wansink, 2010). Pour améliorer le comportement alimentaire des populations (et notamment limiter les carences et ajuster les prises caloriques), il paraît donc fondamental de mieux comprendre les mécanismes de la PRN et d’identifier ses facteurs explicatifs. Dans cette optique, le présent document synthétise les travaux de recherche sur la PRN et les complète par une étude qualitative. Sur un plan académique, il clarifie la PRN et établit un lien avec trois concepts phares, appartenant chacun à un sous-ensemble différent : parmi les variables relatives au produit, la naturalité ; parmi celles tenant à la situation de consommation, la commensalité ; et parmi celles liées aux pratiques de consommation, l’hyperchoix. D’un point de vue managérial, il remet en cause l’utilisation abusive du marketing nutritionnel. Il suggère aux pouvoirs publics de nouvelles pistes pour encourager une alimentation plus saine, et aux marques une démarche plus sincère, bénéfique en retour à leur réputation. 1. La perception du risque alimentaire par le consommateur 1.1. L’alimentation, une consommation anxiogène L’aliment n’est pas un bien de grande consommation comme les autres (Poulain, 2002). D’une part, le risque biologique est inhérent à l’ingestion de nourriture, vitale et multiquotidienne (Bergadaà et Urien, 2006 ; Rozin, 2005b). D’autre part, l’alimentation repose sur le « principe d’incorporation », à la fois différenciateur et transformateur (Fischler, 1990). 4 Même si les dernières dispositions réglementaires ont freiné son utilisation en Europe, notamment depuis le règlement européen n°1924/2006 concernant les allégations nutritionnelles et de santé. 4 Différenciateur, car il participe à la construction de sa propre identité, le self, dès la petite enfance (Gurviez, 2001). Transformateur, car « le mangeur est transformé de l’intérieur, analogiquement, symboliquement et/ou matériellement, par ce qu’il a mangé » (Fischler, 2001). De plus, l’être humain est confronté à une contradiction insurmontable, le « paradoxe de l’homnivore » (Fischler, 1990). En effet, « tout omnivore, biologiquement, doit à la fois être néophile et néophobe, conservateur et innovateur » (Fischler, 2001). Il doit être néophobe pour se protéger d’aliments potentiellement dangereux, voire mortels. Il doit aussi être néophile pour assurer la diversité nutritionnelle nécessaire à son maintien en bonne santé. Ces caractéristiques propres à la consommation alimentaire mettent en évidence son caractère anxiogène et renvoient au concept de risque perçu. 1.2. Le concept de risque perçu Le concept de risque perçu est particulièrement complexe, d’abord par son caractère à la fois objectif et subjectif (Rosa, 2003). Du XVIII siècle jusqu’aux années 70 prévaut une vision ontologique d’un risque défini par Bernoulli comme « l’espérance mathématique d’une fonction de probabilités d’événements » (Lévy-Garboua, 2011). La théorie des perspectives remet cette conception en cause, en montrant notamment que la perception du risque dépend du cadrage et de la source qui émet l’information (Kahneman et Tversky, 1979). Slovic identifie alors une liste de facteurs expliquant la différence de ressenti entre experts et profanes (Slovic, 1987). Le SARF5 intègre finalement ces deux visions objective et subjective du risque, « en partie une menace ou un préjudice objectif envers les gens et en partie le produit d’une expérience culturelle et sociale » (Kasperson in Pidgeon, R. E. Kasperson et Slovic, 2003). 5 Pour Social Amplification of Risk Framework (cadre de l’amplification sociale du risque) regroupant des chercheurs de tous horizons spécialisés dans le risque (R. E. Kasperson et al., 1988 ; Pidgeon, R. E. Kasperson et Slovic, 2003) 5 Une autre difficulté tient au caractère multidimensionnel du risque perçu (Brunel et Pichon, 2004 ; Volle, 1995). Aux dimensions physique, psychologique, sociale, financière et de performance (Kaplan, Szybillo et Jacoby, 1974) s’ajoutent le risque de perte de temps (Roselius, 1971), et, plus récemment, le risque éthique (Aurier et Sirieix, 2004). Cela rend la modélisation et la mesure du risque d’autant plus compliquées (Mitchell, 1999 ; Volle, 1995). Deux composantes sont traditionnellement utilisées en recherche marketing, l’incertitude et l’importance des conséquences du choix (Taylor, 1974). Elles contribuent à l’intensité du risque perçu dans la représentation mentale que le consommateur se fait de la situation (Gallen, 2001 ; 2005). Cependant, la deuxième dimension paraît à la fois réflexive et formative. Elle peut conduire à la tautologie en confondant le concept de risque et ses manifestations supposées (Volle, 1995). 1.3. Le risque nutritionnel perçu Compte-tenu du caractère vital de la nourriture, la dimension physique prévaut dans le risque alimentaire (Aurier et Sirieix, 2004). Lui-même se divise en deux parties, sanitaire et nutritionnelle (Aurier et Sirieix, 2004 ; Ferreira, 2006). Le risque sanitaire est celui d’empoisonnement à court terme, par contamination de l’aliment (Ferreira, 2006). Le risque nutritionnel se manifeste à long terme par les effets secondaires des aliments ingérés sur la santé6 (Ferreira, 2006) : par exemple des carences nutritionnelles, une prise ou une perte de poids inappropriées. 6 Au sens large, définie « état de complet bien-être physique, mental et social » dans le préambule de la constitution de 1946 de l’OMS 6 Risque alimentaire Risque sanitaire Risque nutritionnel • Court terme (Aurier et Sirieix, 2004) • Long terme (Aurier et Sirieix, 2004) • Contamination (Ferreira, 2006) • Effets secondaires (Ferreira, 2006) • Santé physique immédiate (Aurier et Si- • Santé physique, mentale et sociale à long • rieix, 2004) terme (Aurier et Sirieix, 2004) La néophobie en protège (Fischler, 1990) • La néophilie en protège (Fischler, 1990) Tableau 1. Les composantes sanitaire et nutritionnelle du risque alimentaire Les enjeux humains du risque nutritionnel, physiques et psychosociaux, sont très importants (Bergadaà et Urien, 2006). Le sentiment d’incertitude sur la qualité nutritionnelle est lui-aussi élevé, car elle repose sur des attributs de croyance plutôt qu’expérientiels : le consommateur n’est pas à même de la vérifier (Gomez, 2009 ; Larceneux, 2003). Dès lors se développe la PRN, qui correspond à la conscience de l’ « incertitude liée aux conséquences négatives [de son] choix » sur sa santé à long terme et au sens large (Aurier et Sirieix, 2004). 1.4. L’influence du « marketing nutritionnel » sur la Perception du Risque Nutritionnel De plus en plus d’entreprises ont intégré une dimension nutritionnelle dans leur stratégie marketing. Ainsi, l’entreprise Kraft a mis en place un programme de lutte contre l’obésité depuis 2003, comprenant notamment la révision des recettes et des emballages et une plus grande information des consommateurs7. Les biscuits Prince de Lu mettent désormais en avant les allégations suivantes : « sans colorant, sans conservateur, sans matière grasse hydrogénée, riches en céréales et au lait » Mais cette orientation nutritionnelle des marques 7 Table ronde lors du colloque Enfant, Alimentation et Marketing du 26/11/2010 organisé par J. Brée dans le cadre du programme de recherche MARCO (MARketing and Children Obesity) à la Sorbonne. 7 soulève des questions. De nombreuses recherches ont donc étudié les effets du marketing nutritionnel sur le comportement alimentaire, en particulier le rôle des allégations. Dans plusieurs expérimentations menées aux Etats-Unis, le positionnement santé des aliments conduit à une prise accrue de calories inconsciente (Chandon et Wansink, 2010). Une explication plausible est que le consommateur répartit les aliments en deux catégories, bons ou mauvais pour la santé, sans se référer à des quantités (Chernev et Gal, 2010). Dès lors, quand une marque se positionne selon l’angle nutritionnel, par exemple par l’allégation « faible teneur en matières grasses », les consommateurs déculpabilisés ont tendance à augmenter la taille des portions (Wansink et Chandon, 2006). Car « on ne mange pas avec l’estomac mais avec les yeux » (Chandon, 2009). Cette tendance est encore plus manifeste parmi les personnes déjà en surpoids (Wansink et Chandon, 2006). Or, il est très difficile d’appréhender la taille relative des portions, surtout en trois dimensions (Chandon, 2012 ; Chandon et Ordabayeva, 2009 ; Chandon et Wansink, 2007a). Par exemple, augmenter de 26% chaque dimension d’un paquet de popcorn équivaut mathématiquement à doubler sa taille. Pourtant, les consommateurs n’ont nullement l’impression de manger deux fois plus. Le marketing nutritionnel semble alors inhiber la PRN, même si celle-ci n’est pas mentionnée explicitement dans ces recherches En outre, il existe un « effet de halo santé » : ainsi, les clients de Subway, chaîne de fastfood américaine positionnée santé, sous-estiment les calories consommées dans cette enseigne et s’autorisent des accompagnements plus riches, ce qui les conduit au final à consommer plus de calories par repas que chez McDonald (Chandon et Wansink, 2007b). De même, des consommateurs attribuent un nombre de calories inférieur à un hamburger accompagné d’une salade plutôt qu’au hamburger seul, comme si la salade comportait des calories négatives (Chernev et Gal, 2010). Dès lors, certains chercheurs font le parallèle entre l’industrie agroalimentaire et celle du 8 tabac (Nestle, 2002). Alors que les cigarettes light étaient sensées réduire la dépendance et les risques, les fumeurs déculpabilisés en fument plus et aspirent plus fortement, développant des cancers plus bas dans les poumons (Brownell et Warner, 2009). De la même façon, les aliments light supposés alléger l’alimentation conduisent à une absorption de calories supérieure (Nestle, 2002 ; Wansink et Chandon, 2006). Le marketing nutritionnel a donc des effets pervers graves qui vont à l’encontre de ce qu’il prétend défendre. Il peut induire une sous-estimation du risque nutritionnel. A l’inverse, la présence d’allégations santé peut aussi exacerber la PRN. Ainsi, les Français attribuent une meilleure note santé à un yaourt sans additif ni conservateur qu’à un yaourt allégé en matière grasse ou « enrichi avec un ingrédient bénéfique pour la santé » (Fischler et al., 2010). En effet, le consommateur de mieux en mieux informé est sceptique, voire soupçonneux face au discours santé des marques (Keller et al., 1997). Le marketing n’est pas considéré comme une source d’information nutritionnelle crédible. Il ne remplit aucune des deux conditions requises, ni la compétence, ni l’intégrité (Simon, Berkowitz et Moyer, 1970). Premièrement, il n’est pas perçu comme un expert nutritionnel du fait de la « cacophonie alimentaire » (IREMAS, 2010). Deuxièmement, son intégrité est mise en cause par un consommateur de plus en plus éduqué, conscient de la divergence d’intérêt (Singh et Sirdeshmukh, 2000). D’ailleurs, les valeurs nutritionnelles, formatées par les pouvoirs publics, sont jugées plus crédibles que les allégations attribuées aux marques, considérées comme des promesses peu fiables (Burton et Creyer, 2004 ; Kozup, Creyer et Burton, 2003). Cela illustre l’importance de mieux comprendre les mécanismes de la PRN pour améliorer la santé publique. « Ce que nous savons de l’influence du marketing alimentaire sur la consommation reste minime au regard de ce que nous ne savons pas » (Chandon et Wansink, 2010). Ce concept mérite donc d’être approfondi. C’est l’objet de l’étude qualitative qui suit. 9 2. Etude qualitative La revue de littérature a montré la complexité du risque nutritionnel perçu et le rôle ambigu du marketing nutritionnel. Comment se manifeste la Perception du Risque Nutritionnel ? Quels sont ses facteurs explicatifs ? Comment le marketing l’influence-t-il ? Pour répondre à ces questions, une étude qualitative a été conduite auprès des consommateurs. 2.1. Méthodologie Des entretiens individuels, chacun d’environ une heure trente, ont été menés auprès de dixhuit hommes et femmes d’âges et de conditions sociales très variés8 car l’hétérogénéité de l’échantillon augmente la validité externe (Brunel et Pichon, 2004). Le nombre retenu de dixhuit répondants a découlé du principe de saturation (Evrard et al., 1993). Ces entretiens se sont déroulés en immersion dans la cuisine des individus, ceci afin de les mettre à l’aise et de pouvoir observer le contenu des lieux à la fin du rendez-vous. En effet, sur des sujets sensibles comme les comportements alimentaires et par extension le rapport à son corps, la maladie, la mort, l’interviewé se sent souvent plus détendu lorsqu’il est interrogé chez lui (Gavard-Perret et al., 2008). Cela permet par ailleurs de coupler observation et rapports verbaux (Arnould et Wallendorf, 1994). D’abord non directifs sur le thème des angoisses alimentaires, les entretiens ont ensuite mobilisé des techniques projectives dans un souci de facilitation (Evrard et al., 1993). Pour vérifier la présence de peurs alimentaires, distinguer risques sanitaire et nutritionnel, et identifier des images émotionnelles associées, un premier jeu de photographies a été présenté. Il illustrait neuf situations associées à l’alimentation rencontrées dans la littérature, comme la joie de vivre, la maladie, l’angoisse ou la convivialité. Le répondant devait en associer une, plusieurs ou aucune à une liste de risques sanitaires ou nutritionnels soumise à l’oral (par 8 Voir en annexe A1 la composition de l’échantillon et en A2 le guide d’entretien. 10 exemple « manger un aliment avec une forte teneur en matière grasse »9). Afin de placer le consommateur en situation de consommation, un second jeu de photographies a ensuite été ajouté au premier, montrant huit plats emblématiques du terroir, par exemple le cassoulet ou la tarte Tatin. Cela a permis de contrôler si les répondants manifestaient la même PRN selon le contexte individuel ou social de consommation de plats véritables. L’entretien s’est conclu par une liste de thèmes relatifs à l’alimentation s’ils n’avaient pas été abordés. Quelques semaines plus tard, l’analyse des tickets de caisse des courses alimentaires et des notes de restaurant accumulés dans l’intervalle a permis d’estimer les budgets alimentaires et de vérifier le déclaratif. Les entretiens ont été intégralement enregistrés et retranscrits, puis analysés selon deux méthodes successives. Une analyse transversale par « attention flottante » a fait émerger des thématiques transversales qui ont ensuite guidé l’analyse de contenu systématique réalisée à l’aide du logiciel NVivo8 (Ayache et Dumez, 2011). 2.2. Une PRN élevée, exacerbée par un marketing nutritionnel décrié Les dix-huit personnes interviewées font le lien entre alimentation et santé : « Je suis intimement convaincue que tu peux améliorer ta santé par l’alimentation, et la détruire aussi » (Sylvie). La grande majorité des répondants reconnaît avoir des angoisses liées à la nourriture, sauf – fait nouveau par rapport à l’état de l’art – ceux qui ont connu la faim pendant la guerre. Les trois personnes concernées relativisent leur alimentation, alors que « les gens qui n'ont pas vu la guerre, (…) comme ils n'ont pas souffert de la faim, ils sont plus regardants » (Madeleine). Les inquiétudes portent désormais plus sur la nutrition que sur le risque sanitaire. En effet, pour les répondants, la sécurité alimentaire semble aujourd’hui bien maîtrisée en France. En revanche, les effets nutritionnels à long terme sur la santé leur 9 La liste complète est présentée dans l’annexe A2. 11 paraissent controversés. Cette incertitude nourrit la PRN. Quant au marketing nutritionnel, pour la moitié des personnes interrogées, c’est une information, mais à considérer avec du recul : « Je ne dis pas que je n'y crois absolument pas, mais c'est à modérer. Il y a l’exagération, il faut moduler » (Evelyne). L’autre moitié va audelà : pour elle, il est destiné à séduire, voire tromper : « c’est de la pub ! (…). Tout ça c’est pour faire vendre, c’est du mar-ke-ting » (Chantal). « Ils ont aucun intérêt à bien nous nourrir, ces gens-là. (…) Ils sont là pour développer leurs ventes » (Laurence). Alors que les études menées aux Etats-Unis montrent un effet inhibiteur sur la PRN (Chandon et Wansink, 2007b ; Wansink et Chandon, 2006), la présente recherche pointe plutôt une exacerbation de la PRN due au marketing nutritionnel. En effet, celui-ci contribue à l’incertitude : il amène le consommateur à se poser des questions qu’il aurait peut-être sinon laissées de côté. Or, l’incertitude accroît la perception du risque : « du lait qui est supplémenté en vitamines, je prends pas. (…) Si y en a pas dans le lait, c’est que ça doit pas s’y trouver » (Marie). 2.4. La naturalité réductrice de PRN Sceptiques face au marketing nutritionnel, les répondants recourent donc à des raccourcis décisionnels simplificateurs pour les aider à choisir une nourriture de bonne qualité nutritionnelle, les heuristiques (Tversky et Kahneman, 1992). Ils associent notamment le caractère naturel des ingrédients et du procédé de fabrication à de meilleures qualités nutritionnelles : « si je pars de produits simples, je me dis que je mange plus sainement que si je prends des produits manufacturés » (Sylvie). On retrouve ici la « préférence pour le naturel » relevée dans la littérature (Rozin, 2005b ; Rozin et al., 2004). A quoi les consommateurs reconnaissent-il un produit « naturel » ? D’abord, quinze des dixhuit consommateurs se préoccupent des ingrédients : « pour que ce soit sain, il faut le moins d’ingrédients possible » (Thierry). Ensuite, faire la cuisine permet de réduire la perception du 12 risque nutritionnel, car on contrôle non seulement les ingrédients, mais aussi la fabrication. La composition de l’aliment doit donc ressembler à une recette de cuisine, à la fois courte et compréhensible. D’autre part, si l’aliment est « calibré » (sept occurrences), « standardisé » (sept occurrences), cela l’éloigne de la nature et génère des doutes sur son mode de production. Ce n’est « pas forcément un produit fait pour être bon, mais un produit fait pour être beau. A la limite, c'est suspect » (Claude). D’où une préférence pour les produits de saison et pour les achats chez les petits commerçants plutôt que la grande-distribution, associée à la production industrialisée et qui « fait peur » (Audrey). 2.5. La commensalité réductrice de risque nutritionnel perçu Les répondants associent une alimentation grasse ou sucrée à des situations négatives, comme la maladie ou l’angoisse. Pourtant, face à des images de plats du terroir gras ou sucrés, les évocations redeviennent positives : la joie de vivre, la convivialité... Certes, quatorze d’entre eux évoquent la possibilité de surpoids parmi les risques, mais en cas d’excès. Or, ces plats ne se mangent pas tous les jours, seulement dans des situations de consommation particulières, sociales : « les produits du terroir, c’est quelque chose qu’on partage » (Hervé). En réalité, plus que ce qui est partagé – le contenu des plats, c’est l’opportunité de partager qui semble prévaloir. Ce terme revient d’ailleurs vingt-trois fois : « C’est pas tant lié à ce qu’on mange qu’à la, la circonstance quoi. Par exemple, quand j’ai des copains qui viennent à la maison, finalement j’ai tendance à leur faire à manger quelque chose qu’est pas très différent de ce que je mange moi, mais l’ambiance est très différente parce que c’est une convivialité autour » (Thierry). Même quand la qualité des aliments n’est pas au rendez-vous, le rôle bénéfique du partage est souligné : « la cantine c'est pas bon, (…) par contre, ça te met dans l'ambiance d'une équipe, de, d'un partage » (Marie). Ce résultat met en exergue la commensalité, partage de sa table (mensa) avec (cum) d’autres 13 (Fischler, 2011). Le mot commensal a une connotation protectrice. Il désigne en biologie les organismes qui vivent aux dépens d’un autre sans lui porter tort, dans un « mutualisme » bénéfique aux deux espèces (Lebeer, Vanderleyden et De Keersmaecker, 2010). En médecine, les bactéries commensales, « amies », sont opposées dans l’intestin aux bactéries pathogènes, « ennemies » (Srinivasan, 2010). Pour les anthropologues, la commensalité est aux fondements de la société humaine (Mintz et Bois, 2002 ; Picq, 2011). Elle est considérée comme nécessaire aux bonnes habitudes alimentaires dans de nombreux pays, par exemple au Brésil (Alves et Boog, 2007), ou en Ecosse (Backett-Milburn et al., 2010). Elle est opposée à l’individualisation de l’alimentation qui conduit à une perte de repères, particulièrement aux Etats-Unis (Fischler et Masson, 2008 ; Pollan, 2009). La commensalité contribue donc à éloigner l’aspect anxiogène de l’alimentation : elle déculpabilise. « Les repas familiaux ou avec des copains, c’est pas une source de stress. Alors que quand je suis toute seule, pff, tout le temps » (Lucie). Même les aliments normalement bannis par l’individu deviennent alors temporairement acceptables : « tu pars en week-end avec les copains, et y a du Nutella pour les enfants, et tu te fais une bonne tartine : tu trouveras le Nutella exceptionnel, et t’auras raison d’en manger. (…) En solitaire, ce n’est plus un plaisir, non : après, tu culpabilises » (Marie). La commensalité semble donc agir comme un réducteur de PRN par ses dimensions sociale et affective. 2.6. L’hyperchoix amplificateur de risque nutritionnel perçu Une alimentation saine suppose une variété nutritionnelle et rend les courses et les repas complexes : « c’est un effort » (Adeline). Pour les répondants, le risque nutritionnel « est plus un truc relatif qu’absolu » (Thierry). La décision résulte d’une comparaison débouchant sur un compromis, sources majeures de stress (Schwartz, 2004). L’abondance de choix alimentaire renforce donc encore l’incertitude : « Notre peur, c’est pas de manger. (...) C’est, 14 devant l’opulence, être sûr d’avoir fait le bon choix » (Hervé). Coûteux en temps et en effort, l’hyperchoix diminue la satisfaction du consommateur et sa motivation à choisir (Iyengar et Lepper, 2000 ; Larceneux, Rieunier et Fady, 2007 ; Schwartz, 2004). Or, la nutrition est particulièrement propice à la situation d’hyperchoix dont elle remplit tous les prérequis, comme la difficulté à évaluer les différences par comparaison, le recours à des heuristiques de décision, la pression temporelle (Scheibehenne, Greifeneder et Todd, 2010). D’ailleurs, les consommateurs interrogés mettent en place des stratégies de réduction de choix. Ils s’efforcent de restreindre le choix dans leur réfrigérateur. Ils utilisent souvent des listes de courses, quitte à préétablir la composition des menus. Enfin, ils repèrent les indicateurs de qualité extrinsèques comme le prix, la marque ou le choix du magasin, qui sont des réducteurs d’incertitude (Sirieix, 1999 ; Sirieix et Dubois, 1999). Limiter le choix semble donc un moyen de réduire la PRN pour le consommateur. Conclusion Cette recherche exploratoire pointe l’importance de la Perception du Risque Nutritionnel. En suggérant que la présence d’allégations augmente la PRN, elle semble confirmer le rôle ambigu du marketing nutritionnel relevé dans la littérature (Chandon et Wansink, 2007b ; 2010 ; Wansink et Chandon, 2006). Mais alors que ces articles vont dans le sens d’une inhibition de la PRN, la présente recherche suggère son exacerbation, conformément à l’étude Euroallégations (Fischler et al., 2010). Cela peut tenir à la différence culturelle entre les Américains, pour qui les aliments mauvais pour la santé sont meilleurs au goût (Raghunathan, Naylor et Hoyer, 2006), et les Français pour qui cela ne se vérifie pas (Werle, Trendel et Ardito, 2013). Surtout, cette étude qualitative révèle trois facteurs explicatifs possibles de la PRN, rattachés chacun à un sous-ensemble de variables différent : 15 Premièrement, parmi les variables relatives au produit, elle confirme le lien très fort entre naturalité et nutrition dans l’esprit des consommateurs (Rozin, 2005a ; Rozin et al., 2004). Pour le consommateur, « ce qui est naturel est bon pour la santé » (Thévenot, 2009). Deuxièmement, parmi les variables tenant à la situation de consommation, elle met en évidence le rôle rassurant de la commensalité, comme le soulignent d’autres disciplines : la sociologie (Fischler, 2011), l’anthropologie (Mintz et Bois, 2002 ; Picq, 2011), la biologie (Lebeer, Vanderleyden et De Keersmaecker, 2010) ou la médecine (Srinivasan, 2010). Cela suggère que manger un même aliment en bonne compagnie ou en solitaire ne suscite pas la même PRN. Enfin, parmi les variables liées aux pratiques de consommation, elle montre l’influence de l’hyperchoix (Iyengar et Lepper, 2000 ; Larceneux, Rieunier et Fady, 2007 ; Schwartz, 2004). La nutrition remplit toutes les conditions favorisant son apparition identifiées dans la littérature (Scheibehenne, Greifeneder et Todd, 2010). Or, en présence d’un grand nombre de produits semblables, la nécessité de choisir conduit à juger l’offre de façon comparative et non évaluative (Parker et Schrift, 2011). Dès lors, cela attire l’attention sur un risque nutritionnel éventuel et on peut poser que l’hyperchoix augmente la PRN. Cela pourrait d’ailleurs expliquer pourquoi les personnes qui ont connu les privations pendant la guerre ne craignent pas le risque nutritionnel, car elles se sont adaptées à l’absence de choix (Schwartz, 2004). Toutefois, à ce stade, ces résultats ne reposent que sur dix-huit entretiens en profondeur. L’utilisation de dispositifs expérimentaux permettrait de vérifier l’existence et le sens de ces relations. Cette recherche ouvre par ailleurs de nombreuses perspectives. Ainsi, on a vu qu’une liste d’ingrédients courte et compréhensible est un critère majeur de naturalité. Cependant, cela pose le problème des ingrédients techniques utilisés dans l’industrie pour 16 allonger la durée de conservation. Ils réduisent le risque sanitaire mais génèrent en retour une PRN. Les deux aspects du risque alimentaire, sanitaire et nutritionnel, pourraient donc être négativement corrélés. Une autre piste est le recours à la commensalité pour lutter contre l’obésité. En effet, l’approche rationnelle et individuelle des pouvoirs publics a montré ses limites. Centrée sur la prise objective d’aliments décomposés en nutriments, elle laisse de côté les ressentis contextuels et sociaux et encourage à son tour l’individualisation et la médicalisation de l’alimentation, anxiogènes (Fischler, 2011 ; Picq, 2011 ; Pollan, 2009). D’ailleurs, parmi les solutions proposées pour limiter les effets nocifs de l’hyperchoix tels que l’angoisse, Schwartz suggère le respect de règles sociales (Schwartz, 2004). Cela permet de libérer l’esprit en automatisant certaines décisions. C’est précisément l’un des effets de la commensalité, « force qui régule la quantité mangée » (Fischler, 2011). A l’inverse, l’individualisation de l’alimentation laisse certes une complète liberté d’alimentation, mais aussi la responsabilité et la culpabilité associées (Schwartz, 2004). Bibliographie Alves H.J. et Boog M.C.F. (2007), Food behavior in student residence halls: a setting for health promotion, Revista de Saúde Pública, 41(2), 197‑204. Arnould E.J. et Wallendorf M. (1994), Market-Oriented Ethnography: Interpretation Building and Marketing Strategy Formulation, Journal of Marketing Research, 31(4), 484‑504. Aurier P. et Sirieix L. (2004), Marketing des produits agroalimentaires 2e édition., Paris: Dunod 2009. Ayache M. et Dumez H. (2011), Réflexions en forme de réponses : à propos du codage dans la recherche qualitative, Le Libellio d’Aegis, CRG Polytechnique, 7(3), 29‑34. Backett-Milburn K.C., Wills W.J., Roberts M.-L. et Lawton J. (2010), Food, eating and taste: Parents’ perspectives on the making of the middle class teenager, Social Science & Medicine, 71(7), 1316‑1323. 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Pourquoi ?». On demandera au consommateur de présenter sa cuisine (ustensiles, aliments, …). Poursuite de l’entretien en mode semi-directif : Stimulation par des exercices : Classer les aliments présents dans sa cuisine en plusieurs catégories (>2) et préciser les risques liés à chaque catégorie : selon leur aspect sanitaire, puis nutritionnel. Soumettre une liste de risques alimentaires (fromages au lait cru, forte teneur en matière grasse ou sucre ou sel, présence de pesticides, présence d’additifs, présence d’OGM, radioactivité, maladie de la vache folle,...) et faire réagir selon des méthodes projectives plutôt que directives : associer ces risques à des photos de personnes fournies par nos soins (ayant l’air en bonne santé, en surpoids, malades, …). Montrer des photos de plats emblématiques, « totémiques », et faire réagir (part de l’objectif et du subjectif, pour creuser l’heuristique de naturalité. S’ils n’ont pas été abordés, relancer sur les thèmes suivants : o Quelle importance accordez-vous à votre alimentation et quel rôle joue-t-elle sur vous ? [sur votre santé, votre bien-être, votre beauté] o Que signifie se faire plaisir quand on mange ? Quand vous voulez vous faire plaisir en mangeant, que mangez-vous ? [avoir à l’esprit le plaisir, l’interdit, la transgression, la naturalité] o Votre alimentation est-elle source d’angoisse pour vous ? Pourquoi ? o L’alimentation de vos proches est-elle source d’angoisse pour vous ? Pourquoi ? o Est-il difficile de manger sainement ? Quelles sont vos solutions pour manger sainement ? o Comment évaluez-vous si un produit est bon pour votre santé ? o A qui / à quoi vous fiez-vous pour obtenir des informations nutritionnelles ? Réciproquement, à qui / à quoi ne vous fiez-vous pas, et qu’est-ce qui vous alerte ? En particulier, regardez-vous les indications sur les emballages ? Que pensez-vous des allégations nutritionnelles ? o Avez-vous des exemples de marques, labels, entreprises qui savent vous donner confiance sur la qualité nutritionnelle de leurs produits et pourquoi ? Inversement, des contre-exemples ? En fin d’entretien, on notera les informations suivantes sur le consommateur : o prénom, âge, lieu d’habitation o situation familiale, nombre et âge des enfants o niveau d’étude, profession, revenus du foyer o idée du montant des dépenses pour la nourriture par semaine ou mois du foyer o état de santé et celui de ses proches. Demander la communication des tickets de caisse des courses alimentaires pendant les 15 prochains jours : pochette à disposition pour ce faire. Prendre rendez-vous dans 15 jours. 24 1er jeu de photographies : exercice sur risques alimentaires 25 2è jeu de photographies : exercice sur plats du terroir 26 Autres commentaires 9-convivialité 8-gourmandise 7-angoisse 6-franche rigolade 5-fatigue 4-jeunesse vieillesse 3-maladie grave 2-surpoids 1-bien être Risques puis plats (chacun présenté dans un ordre aléatoire) A) Risques alimentaires Manger du fromage au lait cru Aliment avec une forte teneur en MG Aliment avec une forte teneur en sucre Aliment avec une forte teneur en sel Présence de pesticides Longues listes d'ingrédients avec additifs OGM Radioactivité Maladie de la vache folle B) Plats du terroir Citations spontanées Citations spontanées Citations spontanées Cassoulet Choucroute Bœuf bourguignon Pot-au-feu Raclette Crêpes Tarte tatin Fondant au chocolat Grille complétée pour chaque répondant pendant les exercices projectifs 27