
Royaume-Uni – Une année 2016 dominée
par le risque de « Brexit »
Slavena NAZAROVA
slavena.nazarova@credit-agricole-sa.fr
N° 15/378 – 21 décembre 2015
En cas de Brexit, la capacité du Royaume-Uni à
mettre en place des accords préférentiels avec ses
partenaires européens et non européens (notam-
ment les États-Unis et les marchés asiatiques)
sera décisive pour la prospérité économique du
pays à long terme. Selon une étude de la London
School of Economics (LSE)
, la hausse des tarifs
douaniers et non-douaniers (lois anti-dumping,
standards divers en termes d’étiquetage, etc.) qui
résulterait d’un Brexit aurait un impact sur le
niveau de PIB britannique allant de 1,2% dans un
scénario optimiste à 3,1% dans un scénario
pessimiste, tout en prenant en compte la
contribution nette au budget européen (8 milliards
d’euros en 2013, soit 0,5% du PIB). De manière
plus réaliste, la prise en compte de certains effets
dynamiques (impact sur la productivité notam-
ment), pourrait plus que doubler ce coût (allant de
2,2% dans le cas le plus optimiste à près de 10%
dans le cas le plus pessimiste). Une étude plus
récente
, datant de mai 2015, menée par
BertelsmannStiftung en partenariat avec l’institut
allemand iFO, a conduit à des résultats similaires :
le coût en termes de PIB par habitant serait de
0,6% à 3,0% à horizon 2030 en fonction du degré
d’isolement commercial, mais pourrait s’élever à
14% après prise en compte d’effets dynamiques
(innovation et investissement).
Impact via les IDE
Les investissements directs à l’étranger (IDE)
pourraient subir de plein fouet l’accès d’incertitude
réglementaire post Brexit. Le Royaume-Uni pour-
rait devenir une destination moins attractive pour
les investisseurs non européens qui utilisent leurs
filiales britanniques pour exercer leurs activités à
travers toute l’UE. C’est notamment le cas du
secteur financier, qui concentre 27% du total des
IDE au Royaume-Uni.
LSE/CPE, Pr.Ottaviano et al, “The Costs and Benefits of
Leaving the EU”, May 2014
BertelsmannStifung, « Brexit – potential economic
consequences if the UK exits the EU », PolicyBrief # 2015/15
Les services financiers, les plus exposés au
risque de Brexit
Les services financiers apparaissent comme le
secteur le plus exposé au risque de Brexit, en
raison de son caractère fortement réglementé. Or,
c’est aussi l’un des secteurs où le Royaume-Uni
enregistre un surplus commercial avec l’UE. En
cas de Brexit, la probabilité d’obtention d’un accord
de libre-échange avec l’UE dans ce secteur
similaire à l’existant paraît très faible. Même si la
City de Londres dispose d’atouts intrinsèques
(langue, niveau de compétences à la pointe des
marchés de capitaux et souvent absentes des
autres places européennes), la perte du « passe-
port » européen devrait conduire les banques
britanniques et étrangères à ouvrir des filiales dans
d’autres pays européens afin de continuer à mener
leurs activités à travers le continent.
Seulement trois pays membres de l’Association
européenne de libre-échange (Norvège, Islande et
Liechtenstein) ont un accès complet au marché
unique des biens et des services, mais cela les
oblige à respecter les quatre libertés (de circulation
des biens, des capitaux, des services et des
personnes) sans avoir de droit au vote dans la
conception des règles européennes. La Suisse,
qui ne fait pas partie de l’Espace Economique
Européen, a un accès à des domaines spécifiques
du marché unique sur la base d’un accord de libre-
échange de 1972 et d’une série d’accords bilaté-
raux conclus avec l’UE entre 1999 et 2004.
L’accès d’incertitude, en théorie, négatif pour
les marchés
En théorie, quelle que soit l’issue du référendum,
l’incertitude quant à la position du Royaume-Uni
vis-à-vis de l’UE pourrait peser sur la confiance
des investisseurs dans les mois précédant le
référendum. L’investissement privé, l’investisse-
ment direct et les investissements de portefeuille,
ainsi que les intentions d’embauche, pourraient
être reportés jusqu’à ce que la visibilité s’améliore.
Cet accès d’incertitude devrait se traduire par un
ralentissement de l’activité économique dont l’am-
pleur est difficile à prévoir.
Compte tenu de notre scénario qui table sur une
séquence positive des événements (compromis
avec l’UE trouvé d’ici février et campagne du
gouvernement en faveur du statu quo), nous
faisons l’hypothèse, d’un impact relativement
modeste sur l’activité d’environ -0,2% en 2016, par
rapport à une situation sans référendum.
0
10
20
30
40
50
60
UE Autres
pays
européens
Amériques Asie Australie
et Océanie
% du total
R-U : position extérieure nette en
IDE par source géographique
Stock d'IDE entrant au Royaume-Uni, 2014
Source : ONS, Crédit Agricole S.A.