ROYAUME-UNI – Une année 2016 dominée par le risque de « Brexit

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N°15/378 – 21 décembre 2015
ROYAUME-UNI – Une année 2016 dominée
par le risque de « Brexit »
 Le référendum promis par David Cameron
d’ici fin 2017 sur le maintien du RoyaumeUni dans l’Union européenne (UE) est, sans
aucun doute, l’un des principaux risques à
suivre en Europe dans les mois à venir.
 La possibilité d’une sortie de l’UE (Brexit) ne
peut être écartée. Un tel événement constituerait un précédent pour l’Europe, potentiellement très dommageable à l’UE et à son
économie.
 Les sondages font état d’une opinion publique indécise, susceptible de connaître des
revirements d’ici le référendum.
 Le résultat du référendum dépendra, en
grande partie, des concessions que le
Premier ministre britannique parviendra à
obtenir à l’issue des négociations en cours
avec ses partenaires européens.
 Si le processus de négociation est complexe, en particulier en raison du « problème » des migrations intra-UE, le Conseil
européen des 17 et 18 décembre derniers
s’est achevé sur une note d’optimisme. Un
compromis avec l’UE semble possible d’ici
le Conseil européen de février, ce qui
ouvrira la voie à la tenue du référendum
pendant l’été 2016.
 Notre scenario reste compatible avec un
maintien du Royaume-Uni dans l’UE après
une issue favorable des négociations. La
plupart des partis politiques, des médias et
des organisations patronales est favorable
au maintien dans l’UE.
 Il est possible que la croissance économique britannique ralentisse légèrement
dans les mois précédant le vote, notamment
via le canal de l’investissement, en raison
d’un attentisme accru dans le monde des
affaires.
Études Économiques Groupe
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Des négociations difficiles, mais pas
insurmontables
Avec sa lettre adressée au président du Conseil
européen David Tusk début novembre, le Premier
ministre britannique David Cameron a donné le
signal de départ formel des négociations avec ses
partenaires européens des termes de l’adhésion
du Royaume-Uni à l’UE. En précisant les réformes
de l’Union auxquelles il aspire (voir encadré), le
Premier ministre britannique a posé les bases des
négociations et espère obtenir un accord dans les
deux prochains mois (probablement d’ici le
prochain Conseil européen des 18 et 19 février
2016). Á la fin de ces négociations, la date du
référendum pourra être fixée (pendant l’été 2016,
selon les souhaits du Premier ministre britannique). L’accord obtenu avec Bruxelles conditionnera, en grande partie, le résultat du référendum.
D’importantes incertitudes entourent à la fois la
durée et le résultat des négociations, surtout dans
un contexte où l’UE doit gérer d’autres priorités : la
crise des réfugiés, la menace terroriste, sans
oublier les suites de la crise grecque. La question
de l’immigration est la plus épineuse et, par
conséquent, susceptible de ralentir le processus.
Mais le Conseil européen de décembre s’est
achevé sur une note d’optimisme et de nombreux
éléments portent à croire qu’un accord pourrait
être trouvé relativement vite, ce qui ouvrira la voie
à un référendum en juin ou, au plus tard, en
septembre 2016.
Une modification des Traités sera évitée
Il est dans l’intérêt de David Cameron d’éviter
autant que possible toute révision des Traités (au
prix, certes, du mécontentement des membres les
plus eurosceptiques de son parti), qui serait un
processus long et douloureux. La modification des
Traités ne serait pas réalisable dans les délais
souhaités par le Premier ministre, de nombreux
Royaume-Uni – Une année 2016 dominée
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États-membres y étant opposés. Comme noté par
le Sénat français dans son Rapport d’information
d’avril 2015, même si une révision des Traités
serait sans doute nécessaire à terme pour y
introduire les nouveaux mécanismes créés en
zone euro depuis la crise, il n’y a pas aujourd’hui
urgence pour Bruxelles de rouvrir les Traités pour
satisfaire les exigences de Londres. Á présent, il
est plutôt question de recours à des mécanismes
juridiques ad hoc, afin d’éviter une telle révision.
Il n’est donc pas étonnant de constater que
certaines exigences de David Cameron, notamment dans le domaine de la gouvernance économique, sont plus modérées que lors de son
premier discours début 2013 (en contrepartie
d’exigences plus sévères dans le domaine de la
libre circulation des personnes, très important aux
yeux de l’opinion publique). En particulier, le
Premier ministre britannique n’insiste plus sur la
priorité aux rapatriements des compétences au
profit des États-membres, réforme qui aurait
nécessité un changement des Traités. Il souhaite
un respect plus rigoureux dans la mise en œuvre
des principes de subsidiarité et de proportionnalité.
Pour cela, il propose un renforcement du rôle des
Parlements nationaux dans le processus décisionnel de l’UE, idée qui a déjà trouvé écho dans
d’autres pays membres.
Recoupement avec l’agenda européen
Les propositions britanniques relatives à la
« compétitivité », qui ont pour but ultime de booster
les perspectives de croissance et d’emploi à long
terme, sont d’un intérêt commun pour l’ensemble
des pays membres de l’Union, ce qui devrait
faciliter l’obtention d’un accord. Bon nombre de
propositions concrètes, telles que l’approfondissement du marché unique dans le domaine du
numérique (Digital Single Market) et celui des
marchés de capitaux (Capital Markets Union), le
commerce et l’investissement, ou encore la
simplification de la régulation et la réduction des
excès bureaucratiques, font déjà partie des
priorités de la Commission européenne pour 2015
et 2016. Dans son rapport « Britain in the EU
Renegogiation Scorecard » le think tank European
Council on Foreign Relations (ECFR) met en
évidence l’existence dans d’autres États-membres
d’un important soutien à l’achèvement du marché
unique, à la réduction de l’excès de bureaucratie
pour les PME et à la conclusion d’accords
commerciaux avec des partenaires clés.
L’émigration communautaire : une ligne rouge
Les demandes de David Cameron dans le
domaine de l’immigration constituent l’obstacle le
plus important, car contraires à l’un des principes
fondateurs de l’UE – à savoir la libre circulation
des personnes. Mais c’est aussi la question la plus
importante aux yeux du public britannique. De
récents sondages conduits par YouGov montrent
que c’est dans le domaine du contrôle des
frontières et de l’immigration que les Britanniques
souhaitent le plus de réformes (52% des sondés),
suivi par les réformes quant aux conditions d’éligibilité aux prestations sociales pour les émigrants
(46%), bien loin devant les questions relatives à la
gouvernance économique (29% souhaitent une
révision des pouvoirs octroyés aux parlements
nationaux ou encore 14% sont pour exclure le
Royaume-Uni du principe d’une « union toujours
plus étroite »).
Parmi les réformes souhaitées, la plus controversée est de loin celle qui priverait d’aides
sociales (telles que la Job Seekers Allowance, les
crédits d’impôts à l’emploi, le droit au logement
social) pendant quatre ans les émigrants européens installés au Royaume-Uni. Cette demande
est contraire au principe de non-discrimination
entre ressortissants des pays membres de l’Union.
De nombreux pays d’Europe centrale et orientale,
notamment la Pologne, y seront opposés en raison
du grand nombre de ressortissants de ces pays
résidant et travaillant au Royaume-Uni. David
Cameron s’est montré relativement flexible, disant
qu’il reste ouvert au dialogue et à des solutions
alternatives, tout comme le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker1.
Milliers/an
R-U : migration nette en termes de
citoyenneté (à fin juin 2015)
300
200
100
0
-100
-200
75 77 79 82 84 87 89 91 94 96 99 01 04 06 08 11 13
Citoyens de l'UE
Citoyens hors UE
Citoyens britanniques
Source : ONS, Crédit Agricole S.A.
1
Selon le journal Financial Times, M. Juncker aurait, lors du
Conseil européen du 18 et 19 décembre, évoqué la possibilité
du déploiement d’un mécanisme de « pause d’urgence » pour
arrêter les flux d’immigration dans le cas où les services
publics du pays d’accueil se trouveraient submergés.
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Royaume-Uni – Une année 2016 dominée
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David Cameron pourrait s’appuyer sur l’arrêt
récent de la Cour de justice européenne (CJE)
statuant que les pays européens peuvent exclure
de prestations sociales des citoyens d’autres
États-membres, si ces derniers restaient trop
longtemps inactifs, afin de les empêcher de
devenir un poids excessif pour le système social
du pays d’accueil. Le « tourisme social » a ainsi
été sanctionné à deux reprises par la CJE depuis
novembre 2014, ce qui peut servir de jurisprudence et de base pour un projet de réforme par
la Commission européenne.
Les axes de réformes souhaités
par D. Cameron
1 – Gouvernance économique : protéger les
intérêts des pays non-membres de la zone euro
(les pays-membres de la zone euro ne doivent pas
imposer leurs décisions aux 28 de l’UE) ; prendre
en compte l’existence de plusieurs devises au sein
de l’UE ; respecter l’existence d’institutions nationales (comme la Banque centrale d’Angleterre) qui
ont en charge la stabilité financière et la supervision du système bancaire, de la même façon que
la BCE l’est pour les pays-membres de la zone
euro.
2 – Compétitivité : développer le Marché unique
(notamment dans la sphère des services, de l’économie numérique et des capitaux) ; réduire les
excès d’activité législative et de bureaucratie, en
particulier pour les petites entreprises ; finaliser des
accords de libre-échange avec des partenaires non
européens, y compris les États-Unis, la Chine et le
Japon.
3 – Souveraineté : exclure le Royaume-Uni du
principe d’« union sans cesse plus étroite » ; renforcer le rôle des Parlements nationaux dans le
processus législatif (notamment à travers d’un droit
de veto de groupes de Parlements nationaux sur
des projets de législation européens) ; respecter le
principe de subsidiarité.
4 – Immigration : trouver des accords afin de
réduire les flux d’immigration depuis les pays
européens (l’une des propositions étant de ne pas
appliquer le principe de libre circulation aux « nouveaux pays-membres » tant que leurs économies
n’ont pas convergé avec le reste de la zone) ;
exiger des citoyens européens installés au
Royaume-Uni de travailler et contribuer pendant
quatre ans, avant de pouvoir bénéficier d’aides
sociales telles que des crédits d’impôts à l’emploi
ou de droit au logement social.
Une opinion publique indécise
Des divisions internes aux principaux partis
Tous les partis de l’opposition, excepté l’UKIP
(12,6% des votes lors des élections législatives de
mai 2015, un seul siège dans la chambre des
Communes en raison du système de scrutin
uninominal à un tour), sont officiellement favorables au maintien dans l’UE. Les Libéraux
Démocrates et les nationalistes écossais (SNP)
sont fortement favorables au maintien dans l’UE ;
une large majorité des députés travaillistes également, même si un nombre marginal d’entre eux,
parmi lesquels le nouveau leader Jeremy Corbyn,
sont ouvertement eurosceptiques (anti-austérité).
Les divisions les plus fortes se trouvent évidemment au sein du parti conservateur où plusieurs
dizaines de députés (entre 50 et 100) devraient
faire campagne pour le Brexit, à moins que David
que David Cameron ne parvienne à obtenir des
réformes radicales lors des négociations avec l’UE,
ce qui semble peu probable.
Une opinion publique changeante
On observe d’importants revirements dans les
sondages au sujet de l’appartenance à l’UE depuis
2012. Après un pic de l’euroscepticisme durant
l’été 2012 (une majorité de 51% pour le Brexit,
contre 28% pour le statu quo selon YouGov), la
tendance s’est inversée. Depuis le discours de
David Cameron début 2013 et jusqu’à récemment,
l’opinion publique était favorable à l’UE. En
revanche, depuis l’été 2015, certains sondages
suggèrent une remontée des opinions en faveur du
Brexit, probablement due à la crise des réfugiés et
à une accentuation du sentiment d’insécurité
depuis les attentats à Paris. La position des Britanniques est susceptible encore de changer d’ici la
tenue du référendum, d’autant plus que de nombreux éléments demeurent à ce stade inconnus.
R-U : opinion publique à l’égard de
l’appartenance à l’UE
%
60
50
40
30
20
10
12
13
14
15
Rester
Sortir
Ne voteraient pas/ Ne savent pas
Note : Enquête basée sur la simple question « rester ou
sortir ? »
Sources : YouGov, Crédit Agricole S.A.
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Royaume-Uni – Une année 2016 dominée
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Une forte dispersion dans les sondages
Si, selon Ipsos-MORI, l’opinion publique est
toujours largement favorable au maintien dans
l’UE, à 53%, contre seulement 36% pour la sortie,
les derniers résultats de YouGov sont beaucoup
moins tranchés. Lorsqu’il s’agit de répondre à la
question simple « Faut-il que le Royaume-Uni
reste membre de l’UE ? », le camp du « pour » et
le camp du « contre » sont au coude-à-coude
(avec 41% des votes chacun selon le sondage du
24 novembre). Une enquête publiée le 15
décembre par le « Daily Express » indique une
légère majorité de 51% favorable à une sortie de
l’Union, en progression de trois points par rapport
au mois dernier. Il existe donc une forte dispersion
entre les sondages. De plus, les résultats des
élections de mai 2015 a quelque peu remis en
cause la fiabilité des enquêtes d’opinion.
maintien dans l’UE qu’en faveur d’une sortie.
L’institut estime à 8% le pourcentage de voix
supplémentaires susceptibles de voter pour le
maintien, contre seulement 1% pour le Brexit.
Si le risque de Brexit mérite d’être pris au sérieux,
les résultats des enquêtes d’opinion ne doivent
pas être sur-interprétés. La majorité des députés
parlementaires, des médias et des organisations
patronales est favorable au maintien dans l’UE. De
plus, l’analyse approfondie des résultats de ces
enquêtes révèle une opinion publique globalement
peu encline à prendre le risque d’une sortie de
l’UE, considérant celle-ci comme source de prospérité économique et d’emplois. Comme l’histoire
l’a montré à plusieurs reprises, un revirement en
faveur du statu quo est souvent observé au
moment du vote crucial, les sondages étant
souvent l’expression d’un mécontentement vis-àvis du gouvernement.
Le rôle crucial des renégociations
La capacité de David Cameron à obtenir des
concessions importantes de l’UE semble influer
fortement sur les choix des Britanniques. Lorsqu’on leur demande comment ils voteraient si
D. Cameron n’arrivait à obtenir que des concessions mineures, les répondants sont partagés :
38% sont en faveur d’une sortie, 37% pour le
maintien. En cas d’absence de réformes, le
pourcentage des intentions de votes en faveur du
Brexit montent à 46% (contre 32% pour le statu
quo). En revanche, si David Cameron obtenait des
réformes significatives, les préférences pour la
sortie de l’UE ne sont plus que de 23%, contre
50% pour le maintien dans l’UE. Les sondages
soulignent aussi un doute très partagé vis-à-vis du
pouvoir de négociation de David Cameron : ils ne
sont que 18% à penser qu’il pourra obtenir la
totalité ou la majorité de ses revendications.
L’UE source de protection et de richesse pour
les Britanniques
Les sondages ont également révélé une certaine
aversion au risque de l’opinion publique. La majorité des Britanniques perçoit la sortie de l’UE
comme risquée (45%), contre 36% pour le maintien dans l’UE et ils sont 49% à penser qu’il serait
plus prudent de rester au sein de l’UE que d’en
sortir (39%). Les Britanniques sont plus nombreux
à penser qu’ils seraient économiquement « plus
mal lotis » en dehors de l’UE (33%), contre 27%
qui pensent qu’ils seraient « mieux lotis ».
Implications économiques d’un Brexit
Impact via le commerce
Compte tenu de la forte intégration qui existe entre
le Royaume-Uni et l'UE, les conséquences d’un
Brexit sur le plan économique et politique seraient
très négatives de part et d’autre de la Manche.
Malgré le développement du commerce avec le
reste du monde depuis 2006, l'UE reste à ce jour
le plus important partenaire commercial du
Royaume-Uni (suivie par les Etats-Unis). En 2014,
les exportations de biens et services vers l’UE
représentaient 44,4% des exportations totales du
pays (12,6% du PIB), contre un peu plus de la
moitié pour les importations. Le Royaume-Uni
enregistre un déficit commercial avec l’UE sur les
biens, mais qui cache un léger surplus du côté des
services (grâce, largement, aux exportations de
services financiers).
R-U : comptes courants avec l'UE 27
Mds £
50
0
-50
-100
-150
2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014
Commerce des biens
Commerce des services
Soldes des revenus primaires
Risque asymétrique dans l’évolution des votes
Le pourcentage encore important d’indécis (19%)
laisse penser qu’il y a encore une marge importante pour un revirement de l’opinion dans les
prochains mois. YouGov juge plus forte la probabilité d’une évolution des votes en faveur du
Solde des transferts courants
Compte courant
Source : ONS, Crédit Agricole S.A.
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Royaume-Uni – Une année 2016 dominée
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En cas de Brexit, la capacité du Royaume-Uni à
mettre en place des accords préférentiels avec ses
partenaires européens et non européens (notamment les États-Unis et les marchés asiatiques)
sera décisive pour la prospérité économique du
pays à long terme. Selon une étude de la London
School of Economics (LSE)2, la hausse des tarifs
douaniers et non-douaniers (lois anti-dumping,
standards divers en termes d’étiquetage, etc.) qui
résulterait d’un Brexit aurait un impact sur le
niveau de PIB britannique allant de 1,2% dans un
scénario optimiste à 3,1% dans un scénario
pessimiste, tout en prenant en compte la
contribution nette au budget européen (8 milliards
d’euros en 2013, soit 0,5% du PIB). De manière
plus réaliste, la prise en compte de certains effets
dynamiques (impact sur la productivité notamment), pourrait plus que doubler ce coût (allant de
2,2% dans le cas le plus optimiste à près de 10%
dans le cas le plus pessimiste). Une étude plus
récente3, datant de mai 2015, menée par
BertelsmannStiftung en partenariat avec l’institut
allemand iFO, a conduit à des résultats similaires :
le coût en termes de PIB par habitant serait de
0,6% à 3,0% à horizon 2030 en fonction du degré
d’isolement commercial, mais pourrait s’élever à
14% après prise en compte d’effets dynamiques
(innovation et investissement).
Impact via les IDE
Les investissements directs à l’étranger (IDE)
pourraient subir de plein fouet l’accès d’incertitude
réglementaire post Brexit. Le Royaume-Uni pourrait devenir une destination moins attractive pour
les investisseurs non européens qui utilisent leurs
filiales britanniques pour exercer leurs activités à
travers toute l’UE. C’est notamment le cas du
secteur financier, qui concentre 27% du total des
IDE au Royaume-Uni.
Seulement trois pays membres de l’Association
européenne de libre-échange (Norvège, Islande et
Liechtenstein) ont un accès complet au marché
unique des biens et des services, mais cela les
oblige à respecter les quatre libertés (de circulation
des biens, des capitaux, des services et des
personnes) sans avoir de droit au vote dans la
conception des règles européennes. La Suisse,
qui ne fait pas partie de l’Espace Economique
Européen, a un accès à des domaines spécifiques
du marché unique sur la base d’un accord de libreéchange de 1972 et d’une série d’accords bilatéraux conclus avec l’UE entre 1999 et 2004.
L’accès d’incertitude, en théorie, négatif pour
les marchés
R-U : position extérieure nette en
IDE par source géographique
UE
Compte tenu de notre scénario qui table sur une
séquence positive des événements (compromis
avec l’UE trouvé d’ici février et campagne du
gouvernement en faveur du statu quo), nous
faisons l’hypothèse, d’un impact relativement
modeste sur l’activité d’environ -0,2% en 2016, par
rapport à une situation sans référendum.
60
50
40
30
20
10
0
Autres Amériques
pays
européens
Asie
Australie
et Océanie
Stock d'IDE entrant au Royaume-Uni, 2014
Source : ONS, Crédit Agricole S.A.
3
Les services financiers apparaissent comme le
secteur le plus exposé au risque de Brexit, en
raison de son caractère fortement réglementé. Or,
c’est aussi l’un des secteurs où le Royaume-Uni
enregistre un surplus commercial avec l’UE. En
cas de Brexit, la probabilité d’obtention d’un accord
de libre-échange avec l’UE dans ce secteur
similaire à l’existant paraît très faible. Même si la
City de Londres dispose d’atouts intrinsèques
(langue, niveau de compétences à la pointe des
marchés de capitaux et souvent absentes des
autres places européennes), la perte du « passeport » européen devrait conduire les banques
britanniques et étrangères à ouvrir des filiales dans
d’autres pays européens afin de continuer à mener
leurs activités à travers le continent.
En théorie, quelle que soit l’issue du référendum,
l’incertitude quant à la position du Royaume-Uni
vis-à-vis de l’UE pourrait peser sur la confiance
des investisseurs dans les mois précédant le
référendum. L’investissement privé, l’investissement direct et les investissements de portefeuille,
ainsi que les intentions d’embauche, pourraient
être reportés jusqu’à ce que la visibilité s’améliore.
Cet accès d’incertitude devrait se traduire par un
ralentissement de l’activité économique dont l’ampleur est difficile à prévoir.
% du total
2
Les services financiers, les plus exposés au
risque de Brexit
LSE/CPE, Pr.Ottaviano et al, “The Costs and Benefits of
Leaving the EU”, May 2014
BertelsmannStifung, « Brexit – potential economic
consequences if the UK exits the EU », PolicyBrief # 2015/15
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Royaume-Uni – Une année 2016 dominée
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En cas de sortie de l’UE, l’incertitude sur les
relations du pays avec l’UE et le reste du monde
devait provoquer un sell-off immédiat sur les actifs
financiers (actions et titres souverains) et une
hausse des taux de rendement des Gilts. La
Banque d’Angleterre (BoE) devrait mener une politique monétaire plus expansionniste, en abaissant
son taux directeur. La livre sterling se dépréciera
davantage. Des accords de libre-échange dans les
secteurs de biens pourraient être rapidement mis
en place avec l’UE, mais le secteur des services,
fortement réglementé, devrait être durablement
touché.
A contrario, si le peuple britannique votait en
faveur du maintien dans l’UE (en ligne avec notre
scénario), une ré-accélération de l’activité devrait
avoir lieu dans les mois suivant le référendum. La
BoE entamera alors la normalisation de sa politique monétaire (au quatrième trimestre 2016 selon
nos prévisions), provoquant éventuellement une
réappréciation de la livre. 
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