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Colloque du Conseil scientifique de l’AMF - Paris, le 15 mai 2006
Quels sont les risques portés par les investisseurs ?
Table ronde 1
Participent à cette table ronde :
Patrick ARTUS, Directeur de la recherche, IXIS CIB
André LABOUL, Directeur de la division des affaires financières, OCDE
Michel AGLIETTA, Professeur, Université de Paris X – Nanterre
Vladimir BORGY, Economiste, CEPII
Christophe JAECK, Head of Credit Structuring, Société Générale Londres
Olivier GARNIER, Directeur général adjoint, Société Générale Asset Management
La table ronde est animée par Christian de BOISSIEU, Professeur, Université de Paris I – Panthéon
Sorbonne.
Exposé introductif : Où sont les nouveaux risques financiers ?
Patrick ARTUS
Je souhaiterais, à titre d’introduction à cette journée, exposer brièvement ce qui me semble être
nouveau au sein des risques financiers ainsi que les évolutions récentes les plus marquantes et les
plus intéressantes à observer. J’évoquerai ainsi trois types de risques : le risque de mauvaise
valorisation des actifs financiers, celui d’une mauvaise répartition des risques entre les individus et les
risques liés à l’utilisation d’actifs de couverture comme supports d’investissements.
Les risques de mauvaise valorisation des actifs financiers
Nous observons depuis 2003, pour des spreads de crédits d’entreprise high yield ou BBB, des
niveaux de primes de risque de défaut historiquement faibles, malgré l’observation qu’à des périodes
où les taux de défaut sont extrêmement élevés succèdent généralement des périodes où les taux de
défaut sont faibles. Tous les calculs montrent que les primes sur le marché du crédit sont aujourd’hui
trop basses pour couvrir le risque actualisé de défaut des entreprises. Cette observation est valable
tant pour l’Europe, les Etats-Unis et le Japon que pour les marchés émergents. S’agissant de ces
derniers, on constate ainsi à la fois un très important resserrement des spreads et une envolée des
indices boursiers. Des inquiétudes naissent donc quant à la valorisation de ces actifs, de même qu’en
ce qui concerne celle des actifs immobiliers. On observe notamment en Espagne ou au Royaume-Uni
une forte progression des prix de l’immobilier et, parallèlement, du taux d’endettement des ménages.
La poursuite de la réduction des primes de risque est devenue extrêmement difficile à justifier par les
variables fondamentales qui déterminent le risque sur ces actifs.
La deuxième inquiétude concerne la prise en compte dans la valorisation des actifs de l’allongement
de la durée de vie. Les valorisations des titres d’Etat intègrent-elles les effets du vieillissement sur les
déficits et les dettes publiques ? Selon les prévisions, à législation inchangée, l’augmentation des
dépenses de santé et de retraite dans les pays développés sera considérable, même si l’on intègre
les réformes opérées jusqu’à aujourd’hui. Sur les marchés d’actions, de nombreuses études mettent
en évidence une corrélation entre la structure démographique de la population et la valorisation des
actifs. Le cas du marché américain montre que lorsque l’on a peu d’acheteurs structurels d’actions
face aux vendeurs structurels, à savoir les retraités, la valorisation est faible. Ce raisonnement est
également valable sur le marché immobilier, où cette corrélation est sans doute plus marquée du fait
de la nature même des actifs. Enfin, les marchés financiers n’anticipent pas de hausse de l’inflation :
l’inflation anticipée à 25 ans sur le marché américain est quasiment la même que l’inflation anticipée à