A l’exception de Portrait d’une femme…
Lorsque Michel Vinaver écrit Mémoire sur mes travaux, il revient sur les douze pièces qui
composent alors son répertoire et dont Portrait d’une femme, publiée en 1986, est la dernière.
L’auteur y observe les « constantes » et les « contrastes » qui se sont jusqu’ici dessinés au fil de son
oeuvre. Lorsque Michel Vinaver évoque sa dernière pièce, on ne peut qu’être frappé de la façon
récurrente qu’elle a de « faire exception »…
[ A une exception près — Portrait d’une femme se situe dans les années 50, soit un tiers de siècle
avant son écriture — l’action de chaque pièce est exactement contemporaine du moment où elle
s’écrit. ]
Ecrits sur le théâtre 2, page 59
[ A l’exception de la dernière en date, Portrait d’une femme, qui est d’un seul tenant, et d’A la
renverse, qui est en deux blocs chacun d’une seule coulée, chaque pièce se présente comme une
série de segments finis. ]
Ecrits sur le théâtre 2, page 77
De même, lors d’un entretien avec Jean-Loup Rivière, en 1987 :
[ Jamais je ne pourrais dire que je vais faire une pièce où l’amour sera la chose importante. Je ne peux
pas faire ça. Je fais une pièce et je m’aperçois, au fur et à mesure de l’avancement du travail, que
l’amour est en diffusion dans la matière textuelle, mais, sauf peut-être dans ma toute dernière pièce,
Portrait d’une femme, personne ne peut dire des mots d’amour, ne peut faire des déclarations d’amour,
ni de jalousie, ni de haine, ça n’est pas possible, ça se passe autrement. ]
Ecrits sur le théâtre 2, page 113
Michel Vinaver dira de King et d’ « elle », bien plus tard, lors de son auto-interrogatoire II (1998) :
Sa plus proche parente est Portrait d’une femme. Les deux, et elles deux seulement, se situent à
une époque autre que celle de leur écriture ; mettent en scène des faits s’étant produits
réellement, des personnes ayant existé réellement.
Elles deux sont traversées par une énigme.
Qui ne se résout pas.
Dans les deux cas l’énigme réside dans un personnage central…
Qui ne se pose pas de questions.
Etranger aux questions qu’on lui pose, ou qu’on voudrait lui poser.
(Ecrits sur le théâtre 2, page 236)