(Enquête)
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Les entreprises recherchent désormais des prols
hybrides pour animer leur supply chain, autrement
dit des professionnels à la fois à l’aise dans le
maniement des systèmes d’information et d’analyse
de dones et disposant de solides qualités
humaines. Des directeurs supply chain, responsables
de formation et recruteurs livrent leurs visions de ce
tier alors que les cabinets de Hays et Michael
Page ont publié récemment leurs études sectorielles.
Les métiers de la supply
chain ne connaissent pas
la crise et ignorent les
mauvais chiffres de la
croissance en France et
dans l’UE, respectivement +0,4 %
et +0,9 % l’an dernier. Les recru-
tements dans ce secteur ont
atteint « un excellent
niveau en 2014 et celui-ci
devrait se maintenir en
2015 », peut-on lire dans
l’Étude de rémunéra-
tion nationale publiée
par le cabinet de recru-
tement Hays en parte-
nariat avec Cadrem-
ploi.fr.
Corollaire de cette bonne
san, la palette de com-
pétences attendues de la
part des chefs dorchestre
de la supply chain ne cesse de sen-
richir. « Le véritable supply chain
manager reste une denrée rare. Il doit
avoir une exrience opérationnelle,
être un bon communiquant, etc. La
dimension personnelle du candidat
est extrêmement importante. C’est
le monsieur quali et service client
de lentreprise, un poste extrêmement
important et par conséquence très
expo. Sur le plan du recrutement,
nous sommes de plus en plus exigeants,
tout simplement parce que ces pro-
fessionnels vont occuper des fonctions
clés qui vont les amener à
progresser dans les organi-
grammes », résume Fabrice
Veyre, directeur exécutif
du cabinet Michael Page
qui vient de publier, début
avril, en partenariat avec
lAslog, son Étude de fonc-
tions et munérations en
supply chain et logistique
2015.
Dès lors, la question de
la formation initiale des
candidats se pose. Bien
entendu, les entreprises privigient
généralement aux postes de supply
chain manager des profils plutôt
expérimentés. Pour autant, en amont,
les universis, écoles d’innieurs
et business schools orientent-elles
leurs programmes dans la direction
attendue par le marché ?
Collaborer à livre ouvert.
Les compétences techniques ou
«hard skills » semblent aujourd’hui
bien identifiées. Olivier Thelliez,
directeur supply chain Europe,
Moyen-Orient et Afrique de Bacardi-
Martini en fait une revue express :
connaissance des principaux outils
transactionnels, systèmes et flux
(ERP, WMS, TMS, EDI, Desdav,
etc.), maîtrise des principaux pro-
cessus (integration business planning,
S&OP, appels d’offres, etc.), bases
en termes de normes européennes
de gestion (EANCOM, TNT, etc.)
Le véritable supply chain
manager reste une denrée
rare.La dimension
personnelle du candidat est
extrêmement importante.
Cest le monsieur qualité et
service client de lentreprise.
Supply chains cherche
managers multitâches
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et notions d’organisation de la dis-
tribution dans les pays concers.
Si les formations supérieures de
haut niveau semblentpondre à
ce cahier des charges, la plupart des
programmes doivent encore amé-
liorer leurs enseignements, selon
Robert Launay, directeurnéral
du prestataire logistique Alis inter-
national.«Les écoles devraient nouer
des partenariats avec de grands
éditeurs de logiciels en gestion de la
supply chain pour familiariser les
étudiants au maniement de ces outils,
même s’ils évoluent sans cesse. Par
exemple, de nombreux groupes tra-
vaillent aujourd’hui en mode SaaS
[Software as a Services, autrement
l’analyse de la valeur, autrement dit
le value stream mapping, nous in-
ressent tout particulrement. Elles
permettent de diagnostiquer les pertes
et d’analyser leurs causes. Dans un
contexte économique de plus en plus
exigeant, les industriels comme
les distributeurs cherchent à optimiser
leurs cts, il est important de trouver
un vrai périmètre de collaboration
et de confiance entre fournisseur et
client qui permette de travailler à
livre ouvert sur les coûts de la supply
chain, de l’usine au linéaire. »
En mode « projet ». Pour le
directeur supply chain de Bacardi-
Martini, les processus de travail en
dit logiciels installés sur des serveurs
distants, Ndlr] », ajoute Robert Lau-
nay, par ailleurs coprésident du
conseil d’orientation de l’Isteli, le
réseau de formations supérieures
de l’Aftral. Preuve de l’importance
prise par ces fonctions, létude réalisée
par le cabinet Michael Page et lAslog
a ingré un nouveau tier, celui
de chef de projet systèmes d’infor-
mation.
Directeur logistique et service
client pour Coca-Cola Entreprise,
Éric Desbonnets insiste plus parti-
culièrement sur les principes du
lean manufacturing : « La maîtrise
des techniques damélioration continue
appliquées à la logistique comme
© Fotolia
Les formations doivent
encourager les étudiants à
développer leurs capacités
de communication et de
manager.
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(ENQUÊTE)
en magasin, n’est pas adapté», pour-
suit-il.
Davantage dagilité.Les direc-
teurs supply chain, les responsables
de formation et les recruteurs inter-
rogés insistent sur ces notions de
savoir-être. Directeur de lIsteli Paris,
Dominique Duhautbout évoque les
propos tenus par un professionnel :
« Ce qui lintéressait, ce nétait
pas la formation en tant que
telle, mais la maturité des
dipmés pour qu’il puisse
les reformer». Poussant cette
logique encore plus loin,
de grands groupes ont
construit des universités
dentreprise. Ainsi, Amazon
propose d’explorer les
enjeux de la supply chain
via son programme MBA
Pathways et l’université du
groupe Seb permet, chaque
année, à plus de 2 000 collaborateurs
en France, d’améliorer leurs com-
pétences en management, en logis-
tique, etc.
Quant à savoir si la maturité néces-
saire à lexercice du tier de supply
chain manager s’acquiert sur les
bancs d’une école La réponse est
vraisemblablement « non ». Une
première expérience (3 à 5 ans)
demeure un passage quasi obligatoire.
En effet, pour le directeur logistique
mode « projet » doivent être mieux
dominés. « À leur sortie d’école, les
jeunes dips manquent parfois
de savoir-faire dans ce domaine. Or
la gestion de projets implique beau-
coup de méthodologie : construction
de retroplannings, de project charters,
etc. Le manager doit également sas-
surer que toutes les personnes clés
ont bien été assoces. Il doit finir
avec rigueur les rôles et responsabilités
de chacun avec le comité de direction
du projet, qu’il s’agisse de la mise
en place d’un processus S&OP ou
encore dun changement de prestataire
logistique. »
Le directeur supply chain d’un
grand groupe français de retail sat-
tarde davantage sur les compétences
humaines ou « soft skills ». Selon
lui, « le supply chain manager,
constamment confronté à des masses
de données, est quelqu’un d’agile.
Évidemment, un bon professionnel
est à l’aise avec des systèmes d’in-
formation et les systèmes d’analyse
de dones. Mais ces outils ne sont
pas en mesure de tout faire. Dautant
que les cycles de vie des produits se
sont considérablement raccourcis.
Par ailleurs, les SI n’intègrent pas
certaines données comme
la perte de valeur de leuro
par rapport au dollar ou
encore la chute des cours
du pétrole, etc.» Selon lui,
les formations doivent
aussi encourager les étu-
diants à velopper leurs
capacités de communi-
cation et de manager :
« Un supply chain mana-
ger ne peut se contenter
de rester purement ana-
lytique dans son argumen-
tation face à un directeur marketing.
Il doit être capable de travailler sa
relation émotionnelle. » Dans cette
chaîne qui confie le approvision-
nement des boutiques à son équipe
supply chain, les managers doivent
également être capables de justifier
leurs calculs à des directeurs de
magasins sous pression. « Invoquer
la loi de Poisson pour rassurer un
directeur qui craint de perdre des
ventes, suite à la réduction des stocks
et service client chez Coca-Cola
Entreprise, « dans une supply chain
qui s’est énormément spécialisée, le
passage dune scialité à lautre per-
met de conserver une vision d’en-
semble. Et la performance vient jus-
tement de cette capaci à conserver
une vision transversale ». Dans le
recrutement de ses supply chain
managers, le groupe Bacardi-Martini
privilégie « des personnes avec de
premres expériences significatives
dans la gestion de la demande (S&OP
manager, demand planner), mais
également en logistique (transport
et/ou entrepôts) et management. Le
passage palable dune jeune recrue
sur des postes opérationnels (demand
planner, logistic specialist, etc.), permet
d’asseoir les acquis théoriques, de
découvrir la réalité des marchés, ainsi
que les interactions entre les différentes
entités d’une même entreprise »,
taille Olivier Thelliez.
Approche interculturelle.
La montée en puissance des fonctions
de supply chain management dans
les PME nécessite également des
capacités d’adaptation. Directeur
associé de Supply Job, cabinet de
recrutement spécialisé dans les
métiers de la logistique, Didier Aiva-
zoff insiste « sur les différences qui
subsistent en termes de niveaux de
cision entre les grands groupes et
La montée en puissance
des fonctions de supply
chain management dans
les PME nécessite des
capacités dadaptation.
Un supply chain manager
ne peut se contenter de
rester purement
analytique dans son
argumentation face à un
directeur marketing. Il doit
être capable de travailler
sa relation émotionnelle.
© Fotolia
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les petites et moyennes entreprises.
Certains profils, réunissant a priori
toutes les qualités, se révèlent incapables
de sadapter au rythme d’une PME. »
Leader mondial des équipements
de distribution et de stockage d’hy-
drocarbures gazeux et de gaz indus-
triels cryogéniques, Cryolor (200 per-
sonnes) s’est récemment ouverte
aux notions de supply chain mana-
gement. Le directeur supply chain
de cette filiale d’Air Liquide, Julien
Constant, a rendu la formation au
certificat Basics of supply chain
management (BSCM) de l’Apics
obligatoire pour l’ensemble du
service achat/supply chain. «Ce cer-
tificat balaye les notions de flux, d’or-
ganisation d’une supply chain ainsi
que l’ensemble des principes fonda-
mentaux et processus associés (S&OP,
MPS, lean, demand driven MRP,
théorie des contraintes, etc.) Il donne
un vocabulaire commun et une bonne
vision d’ensemble de la meilleure
manière dont une supply chain devrait
fonctionner aujourd’hui. Dans le
cadre d’un recrutement, cette certi-
fication serait sans aucun
doute un plus pour nous. »
Par ailleurs, des compé-
tences en management inter-
culturel apparaissent de plus
en plus comme un atout. Il
nest d’ailleurs pas cessaire
de franchir une mer ou un
océan pour s’en rendre
compte. Par exemple, outre-
Rhin, il peut être mal peu
de sécarter de lordre du jour
d’une réunion. Dominique
Estampe, directeur de l’Isli
(Institut supérieur de logis-
tique industrielle) –un des
plus prestigieux programmes
en supply chain management dans
l’Hexagone évoque l’importance
de comprendre le fonctionnement
de chaque pays. « Chaque marc
conserve son propre fonctionnement
culturel, glementaire, manarial,
etc. Une entreprise amenée à conquérir
de nouveaux territoires doit en avoir
conscience. On n’applique pas les
mêmes thodes de management
en Amérique du Sud, en Asie ou au
Moyen-Orient. Sans compter que
désormais de nombreuses équipes
supply chain en France et en Europe
sont multiculturelles. »
Managers créatifs. Dans une
supply chain en reconfiguration
permanente, la créativité est éga-
lement une quali très pri-
sée par les recruteurs.
« Procter et Gamble ou
LOréal demeurent des mas-
todontes. Mais l’arrivée des
seaux sociaux et du e-
commerce contraint leurs
organisations à gagner en
rapidité et en flexibilité. Ils
doivent innover rapidement
pour pouvoir lutter avec les
concurrents qui entrent sur
le marché », détaille le direc-
teur de lIsli. Et de citer lavènement
de linternet des objets qui permettra,
notamment, aux colis connectés,
d’informer un entrepôt de leurs
horaires darrivée. Le directeur sup-
ply chain Europe, Moyen-Orient
et Afrique de Bacardi-Martini estime,
pour sa part, que les managers doi-
vent organiser « une veille techno-
logique » et s’intéresser « aux ten-
dances culturelles, aux modes de
consommation, etc. »
Les formations bac + 5 doivent-
elles également se préparer à former
des supply chain managers scia-
lisés ? Certaines en prennent
la direction : marketing, SI, immo-
bilier logistique, etc. Toutefois, le
directeur supply chain du groupe
de retail pci estime que «lerreur,
dans nos métiers, c’est que les gens
se spécialisent trop. Il faut apprendre
aux managers à rester global. » Par
ailleurs, il observe que dans son
équipe supply chain, les profils issus
d’écoles de commerce réussissent
moins bien que les profils formés
dans des écoles d’ingénieurs,
car il leur manque une com-
pétence en systèmes d’infor-
mation. À l’inverse, le direc-
teur de Supply Job estime
que les supply chain managers
doivent disposer de savoir-
faire commerciaux afin din-
tervenir en appui de la force
de vente, « pour prouver la
disponibilité du produit ou
encore démontrer que l’en-
treprise est capable de mettre
en place une organisation qui amène
le produit au client ».
Maîtrise du français. Si le
profil idéal du supply chain manager
peut varier d’une organisation à
l’autre, toutes s’accordent sur sa
nécessaire maîtrise de la langue
française à l’écrit. Cette
compétence redevient un
critère important dans le
recrutement des futurs
supply chain managers.
L’an dernier, le conseil
d’orientation de l’Isteli a
souhai que les étudiants
se réapproprient les fon-
damentaux de la langue
française en préparant le
certificat Voltaire. Un pro-
gramme proposé par la
société lyonnaise Wonooz.
Le directeur de l’Isteli rap-
pelle « combien ces com-
tences sont importantes
dans la rédaction de mail, d’appel
d’offres, etc. » Le directeur général
dAlis international enfonce le clou
estimant que « certains managers
bac +5 doivent apprendre à retranscrire
en termes rédactionnels ce quils sou-
haitent exprimer». Quant à langlais,
sa maîtrise continuera d’être une
compétence recherchée à côté dune
deuxième voire d’une troisième
langue étrangère.
Philippe Bohlinger
Si le prol idéal du
supply chain manager
peut varier dune
organisation à lautre,
toutes s’accordent sur sa
nécessaire maîtrise de la
langue fraaise à lécrit.
Dans une supply chain en
reconguration
permanente, la créativité
est une qualité très prisée
par les recruteurs.
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