de choix, l’expression de sa volonté et sa stabilité décisionnelle.
Cette incapacité acquise peut être plus ou moins étendue, plus
ou moins constante, et nécessiter dans certains cas une protec-
tion légale.
La loi 68-5 du 3 janvier 1968 relative à la protection des inca-
pables majeurs comporte trois régimes différents assurant la
protection juridique patrimoniale des individus majeurs qui, en
raison de leur état mental ou physique, ne peuvent gérer leurs
biens. Il s’agit de sauvegarder dans sa personne ou ses biens
quelqu’un ne pouvant plus pourvoir à ses intérêts de façon auto-
nome. Ces mesures touchent aux intérêts civils des patients sous
le contrôle de l’autorité judiciaire. Elles ont parallèlement une
incidence sur la protection de leur santé. Le tuteur, par exemple,
prend soin de la personne du mineur ou du majeur dans le seul
intérêt de celle-ci, notamment pour tout ce qui est relatif aux
traitements médicaux.
Il intervient si son pupille est susceptible de participer à une
recherche biomédicale. Néanmoins, il n’entre pas dans la fonc-
tion initialement définie pour la tutelle d’avoir à se prononcer
sur de tels enjeux. Aussi le tuteur peut-il en refuser l’exercice,
et se limiter à l’orthodoxie de sa fonction.
Les régimes, du plus léger au plus complet, sont, respective-
ment, la sauvegarde de justice, la curatelle, la tutelle.
!La sauvegarde de justice. Elle s’adresse aux patients dont
les facultés intellectuelles ne sont que passagèrement troublées,
aux patients dont l’état mental impose une mesure de protec-
tion immédiate, aux patients encore “capables”, mais suscep-
tibles d’actes juridiques inconsidérés, ces actes pouvant alors
être remis en question, voire annulés.
Lors de la procédure de mise sous tutelle ou curatelle, le juge
peut placer provisoirement une personne sous sauvegarde de
justice, le temps de mettre en place le régime qu’il envisage.
Une mise sous sauvegarde de justice est ouverte par déclara-
tion au procureur de la République, accompagnée d’un certifi-
cat médical établi par un médecin spécialiste. Dès l’enregis-
trement par le procureur de la déclaration, la sauvegarde est
effective.
Elle cesse automatiquement au bout de deux mois, ou dès que
le médecin atteste la disparition des conditions d’ouverture, ou
par radiation par le procureur ou par ouverture d’une curatelle
ou d’une tutelle. Elle peut être renouvelée par périodes semes-
trielles.
!La curatelle. Elle concerne les patients dont les facultés men-
tales sont altérées ou dont les facultés physiques sont défi-
cientes, gênant les actes de la vie civile et nécessitant à la fois
conseils et contrôle (elle vise, en outre, les personnes que la
prodigalité ou l’intempérance menacent de ruine matérielle).
La personne reste autonome pour les actes de la vie courante,
mais dépend du curateur pour les décisions importantes.
Une mise sous curatelle se fait par requête auprès du juge des
tutelles, émanant de la personne elle-même, de son conjoint (sauf
en cas de séparation), des ascendants, descendants, frères et
sœurs, du procureur de la République, voire du juge lui-même.
La requête est accompagnée d’un certificat médical qui a été
établi par un médecin spécialiste inscrit sur une liste spéciale.
L’instruction effectuée par le juge des tutelles fait l’objet d’un
jugement, notifié au requérant et à l’intéressé sauf indication
médicale, et porté sur l’acte de naissance de l’intéressé. Le cura-
teur est le plus souvent un membre de la famille ou, à défaut,
une personne choisie et contrôlée par le juge.
La durée de la curatelle est liée aux causes qui l’ont motivée.
Elle peut se faire par jugement, à la demande d’une personne
habilitée, disposant d’un certificat d’un médecin expert. Elle
peut être ensuite remplacée par une tutelle.
!La tutelle. Elle concerne les personnes dont l’altération des
facultés physiques ou psychiques est suffisamment grave et
habituelle pour que le malade doive être représenté de manière
permanente et continue dans les actes de la vie civile.
La procédure de mise en place est identique à celle de la cura-
telle.
Le tuteur représente la personne dans tous les actes juridiques
de la vie civile, tous ceux passés postérieurement au jugement
de mise sous tutelle par la personne protégée étant nuls. Cette
personne conserve la personnalité juridique, mais sa capacité
juridique est exercée par le tuteur.
Le juge des tutelles peut moduler la tutelle en fonction des cir-
constances (état du patient, ressources, modification de la situa-
tion familiale).
Rappelons l’existence de la “gérance de tutelle”, concernant
une personne sans famille ni proche, dont la situation maté-
rielle très simple ne justifie pas la tutelle complète. Le juge des
tutelles désigne un gérant qui remplira le rôle de tuteur lors de
l’éventualité d’une recherche biomédicale, avec l’autorisation
du juge des tutelles.
Dans ces trois régimes de protection, seul le dernier, la tutelle,
concerne une personne (au sens juridique du terme, c’est-à-dire
apte à être titulaire de droits et assujettie à des obligations) inca-
pable d’exprimer un consentement pour une recherche biomé-
dicale. Dans les autres circonstances, si le mandataire ou le
curateur est prévu pour conseiller et assister la personne dans
les décisions concernant sa santé, c’est la personne elle-même
qui consent. Toutefois, la loi Huriet-Sérusclat dispose, en
contradiction avec le principe même de la curatelle ou de la
sauvegarde de justice, que “pour les majeurs protégés par la
loi, le consentement est donné par le représentant légal”.
La loi prévoit, hors le cas des recherches avec bénéfice indivi-
duel ne présentant pas un risque prévisible sérieux, l’autorisa-
tion du conseil de famille. Il s’agit là d’un organe de la tutelle
des mineurs ou des majeurs incapables présidé par le juge des
tutelles et composé de quatre à six personnes désignées par le
juge parmi celles s’intéressant à l’incapable (ou au mineur),
réglant ses conditions générales de vie et contrôlant la gestion
du tuteur pour les actes les plus graves. Cependant, la personne
majeure protégée peut refuser de participer à une recherche bio-
médicale à laquelle son représentant légal a consenti, et ce refus
prévaut sur l’acceptation.
La Lettre du Pharmacologue - Volume 17 - n° 3 - mai-juin 2003
79
LÉGISLATION